5. Installation des Homo Sapiens

Paléolithique supérieur

C’est à Maisières que l’on trouve les traces les plus anciennes d’Homo Sapiens dans la vallée de la Haine. Mais les remarques que nous avons émises au chapitre précédent à propos de l’homme de Neandertal sont valables ici aussi. Le temps, et particulièrement le rude climat de la dernière période glaciaire a effacé beaucoup de traces.

Présentons le personnage. Appelé en France “l’Homme de Cro-Magnon”, la dernière espèce du genre Homo est apparue en Afrique de l’Est il y a plus ou moins 200.000 ans. Il descend de l’Homo Erectus africain et a présenté plusieurs morphologies intermédiaires, nommées archaïques, avant de devenir 100% de ce que nous sommes encore aujourd’hui: le même bagage génétique, les mêmes potentialités physiques et intellectuelles. Les différences sont culturelles. Elles sont dues au milieu dans lequel l’homme naît et vit. Ainsi, on a trouvé en Afrique du Sud, sur des sites datant de 100.000 à 80.000 ans, des innovations techniques propres à Sapiens et les premières oeuvres d’art.

Après avoir colonisé toute l’Afrique, Homo Sapiens est passé de l’Egypte vers le Proche-Orient entre 100.000 et 80.000 ans, il y a côtoyé des Néandertaliens arrivés d’Europe. Il a poursuivi son chemin vers l’est, vers l’Asie, puis l’Australie. Les conditions climatiques n’étant pas excellentes en Europe, il ne s’y est pas aventuré tout de suite. Une fenêtre climatique favorable vers 45.000 l’a décidé à prendre la route de l’ouest, croisant au passage d’autres Néandertaliens. On le retrouve sous nos latitudes vers 42.000.

Mode de vie

Au Paléolithique supérieur, qui commence donc en Europe avec l’arrivée d‘Homo Sapiens, ce dernier va développer plusieurs cultures successives qui vont se définir selon ses méthodes de taille du silex. Il va cependant améliorer son outillage en travaillant d’autres matières : l’os, le bois des arbres, les bois de cerf, l’ivoire de mammouth, dans le but d’être plus efficace à la chasse (pointes en os, silex ou ivoire, sagaies, propulseurs, frondes), à la pêche (harpon), dans les activités de boucherie, de boulangerie (premières meules manuelles pour broyer des graines et des racines), etc. Il débite des fines lames de silex qu’il retouche avec précision. Les plus vieux arcs datent de la fin de cette période.

Homo Sapiens est le réel inventeur de l’art. Il va sculpter dans la pierre, le bois et l’ivoire des petites figurines. Il va peindre et graver sur les parois des cavernes, sur des pierres, sur des os. Les préhistoriens pensent que l’art était alors un acte religieux (les Vénus aux formes généreuses seraient des déesses de la fertilité que l’on invoque pour la persistance du genre humain ; les animaux peints ou gravés sont à la fois liés à la subsistance alimentaire par la chasse et aussi à la crainte de la nature sauvage). Cet homme va aussi fabriquer des petits instruments de musique (flûtes) et des parures (colliers, bracelets). Chantait-il ? Dansait-il ? C’est fort probable.

Cet humain reste cependant un nomade, chasseur, cueilleur et pêcheur. Il va traverser cette période très rude qu’est le dernier pic glaciaire (entre 22.000 et 20.000) en s’abritant au mieux dans les entrées de grotte et les abris sous roche où il peut allumer et entretenir du feu. Il est probable qu’au plus fort de la période glaciaire, il s’est éloigné de nos régions pour rejoindre le climat plus doux du Midi de la France (Périgord, Provence, Pyrénées) et de l’Espagne. C’est là qu’il va déployer toute la perfection de son art rupestre (Chauvet, Pech Merle, Cosquer, Lascaux, Altamira, …). Nous n’avons pas eu cette chance chez nous.

C’est également pendant cette dernière période glaciaire que se sont déposés des dépôts éoliens importants faits de loess qui ont recouvert la Moyenne Belgique et les versants de la vallée de la Haine, principalement au sud de celle-ci. Le paysage était celui des steppes, très ouvert, et la faune assez proche de celle décrite dans le chapitre précédent.

Les cultures du Paléolithique Supérieur sont plus nombreuses:

  • la Culture Aurignacienne (43.000-29.000). La plupart des sites belges de cette époque se trouvent dans la vallée de la Meuse, dans des grottes. L’exception est ce campement de chasseurs dont les vestiges ont été trouvés, lors de travaux sur le canal, à Maisières. Ce sont des outils en silex, en os et en ivoire, très nombreux (plus de 34.000) et très diversifiés (burins, perçoirs, grattoirs, aiguilles, pointes, …) qui dateraient de 37.000 (premier campement) et de 32.000 (deuxième campement). On y a également trouvé des plaquettes en ivoire gravées de motifs géométriques et beaucoup d’ossements d’animaux chassés.
    De la même période, datent des silex taillés trouvés à Stambruges, Quevaucamps, Obourg, Vellereille-le-Sec et Leval-Trahegnies.
  • la Culture Gravettienne (29.000-18.000), documentée dans les grottes mosanes, mais pas chez nous, hormis peut-être quelques silex ramassés à Quevaucamps. Les hommes de cette période étaient de grands chasseurs des troupeaux des steppes (rennes, mammouths, bisons, chevaux). Ils inventèrent la meule pour moudre les grains sauvages.
  • la Culture Magdalénenne (18.000-12.000), à partir de laquelle le climat est devenu moins rude. La toundra recule et laisse place aux forêts de pins, puis de feuillus. Les animaux des steppes disparaissent (mammouths) ou remontent plus au nord (rennes). Ceux des forêts les remplacent (cerfs, sangliers, daims, …) et deviennent les premières victimes des chasseurs qui ont inventé l’arc et la flèche, mieux adaptés pour la chasse en forêt. Les sites sont nombreux dans le bassin mosan. On mentionne un gisement de silex taillés de grande qualité à Obourg (Bois Saint-Macaire) et un autre moins important à Quevaucamps.
  • les Cultures épipaléolithiques (12.000-9500), intermédiaires et proches du mésolithique ; quelques outils en silex ramassés à Obourg (Bois du Gard et Bois Saint-Macaire) et à Hyon appartiendraient à des cultures de cette époque (creswellien, hambourgien, ahrenbourgien).

Mésolithique
Nous plaçons cette période dans ce chapitre, car elle est plus brève (9500-5200) et constitue un intermédiaire avant le néolithique. Ce qui la caractérise, c’est l’adoucissement net du climat qui évolue en quelques milliers d’années vers le climat tempéré actuel et qui détermine le paysage que nous connaîtrions aujourd’hui si l’homme ne l’avait pas complètement transformé par ses activités. La description de ce nouvel environnement se trouve dans le chapitre consacré à la géographie de la vallée de la Haine (chapitre 2).
L’homme reste un nomade, chasseur et cueilleur, mais il a l’avantage de pouvoir trouver sa subsistance dans son environnement quotidien quasi toute l’année. Ses campements deviennent donc plus prolongés, mais comme ils ne sont pas réalisés en matière dure, ils n’ont pas été conservés. Les seuls témoignages restent encore leurs outils, assez peu différents de ceux de la période précédente. Affaire de spécialistes donc !

Pour information, quelques sites mésolithiques sont documentés du côté de Charleroi (Loverval et Aiseau-Presles) et dans la vallée française de l’Escaut (Valenciennes, Bouchain, Bruay-sur-Escaut). Mais il faut aussi signaler quelques ramassages de silex mésolithiques, comme des haches-marteaux, et des harpons en os (cultures du Tardenoisien et du Maglemosien) en petites quantités dans les localités suivantes : Mons (Porte du Parc), Hyon, Obourg, Sirault, Bernissart, Blaton, Harchies, Ville-Pommeroeul, Stambruges, Quevaucamps, Ellignies-Sainte-Anne, Wadelincourt et Blicquy ( lieu-dit Ville d’Anderlecht).

On peut considérer que, dès cette période, il existait de nombreuses petites communautés qui nomadisaient un peu partout en vallée de Haine.
Pendant notre mésolithique, si peu inventif, au Proche-Orient, les hommes transformaient complètement leurs sociétés et leur économie dans des modèles qu’ils vont exporter chez nous.

Place à la révolution néolithique !

4. L’homme de Neandertal

Le Paléolithique Moyen
L’homme de Neandertal n’aurait-il pas enterré ses morts chez nous? Nous tenterons une réponse un peu plus loin.

La deuxième période de l’ère quaternaire est celle du Paléolithique Moyen, qui commence il y a 150.000 ans et se termine il y a 42.000 ans. Ces dates sont imprécises.
C’est pendant cette période qu’a vécu Homo Neandertalensis, cet homme dont le squelette fut décrit pour la première fois dans la vallée de la Neander, près de Düsseldorf en Allemagne.

Cette nouvelle espèce n’est évidemment pas apparue du jour au lendemain. Elle est le fruit d’une lente évolution de l’espèce précédente, l’Homo Erectus européen qui s’était déjà transformé en Homo Heidelbergensis, au prix de quelques mutations génétiques sur un laps de temps de plusieurs dizaines de milliers d’années. Entre les deux, on a décrit plusieurs formes intermédiaires, qu’on a appelées “pré-néandertaliennes” ou “archaïques”.

Les Néandertaliens, sans doute apparus durant l’avant-dernière période glaciaire (“Riss”), se sont développés pendant la période interglaciaire suivante (dite “Riss-Würm”) et la dernière période glaciaire (“Würm”), du moins avant le grand pic glaciaire (30.000-15.000).
A cette époque, quand le climat n’était pas encore trop rude, on peut imaginer une vallée de Haine avec son fond marécageux et ses versants boisés couverts d’arbres à feuilles caduques. Dans les prairies couraient des éléphants antiques, des rhinocéros, des chevaux. Les sangliers, les cerfs, les chevreuils et les aurochs préféraient les milieux forestiers. Il fallait surtout se méfier des carnivores: les hyènes, les loups, les renards, les ours …

Au fur et à mesure que le climat s’est refroidi, la forêt a cédé le pas aux prairies steppiques. Il faisait plus sec. Il est probable que, durant les longs hivers, qui duraient dix mois, la rivière et ses ruisseaux étaient secs ou glacés. Les carnivores s’y sont maintenus. La faune forestière a quasi disparu. Celle des steppes s’est développée avec ses grands troupeaux de bisons, de rennes, de chevaux, de mammouths, de rhinocéros laineux, d’antilopes saïga, …

Les hommes de Neandertal étaient plus adaptés que leurs prédécesseurs pour faire face à ces conditions climatiques. Plus robustes, ossus et musclés, ils avaient aussi un cerveau plus développé. A la différence des autres, ils avaient une vie sociale plus élaborée et un début de pensée spirituelle ou symbolique. Ils enterraient leurs morts et ornaient leurs sépultures avec des fleurs ou de l’ocre. Ils fabriquaient des colliers avec des dents animales ou des coquillages. Ils développèrent également de nouvelles techniques de taille par débitage de lames, plus efficaces pour le travail (viande, peaux, bois, …). C’est ainsi qu’ils furent à l’origine d’une nouvelle culture, la Culture moustérienne, ainsi appelée parce qu’elle fut décrite pour la première fois au Moustier, dans le Périgord. Ces éclats, bien standardisés, pouvaient servir de pointes, de couteaux, de racloirs, de denticulés pour scier le bois ou la corne, … Ils continuaient encore à tailler des bifaces de type acheuléen.

Résistants au froid et à la marche, ils pratiquaient la chasse en groupes et n’hésitaient donc pas à affronter des mammouths ou des rhinocéros, des rennes et des bisons. Ils étaient essentiellement carnivores, mais s’adonnaient aussi à la cueillette.

Par ces rudes climats, ils préféraient s’abriter dans des abris sous roches ou des entrées de grottes. C’est là qu’ils enterraient aussi leurs morts. C’est pourquoi on a retrouvé de nombreux squelettes d’Homo Neandertalensis dans les grottes des vallées de la Meuse et de ses affluents (Sclayn, Spy, Couvin, Trooz, Engis, Mozet …).
On n’en a pas trouvé dans nos contrées hennuyères. D’abord, il n’y a pas ou très peu de grottes et les campements à l’air libre n’avaient lieu que pendant les courts étés. Ensuite, durant la dernière période glaciaire, de violents vents secs ont érodé le sol et ont sans doute détruit tout ce qu’il y avait en surface, y compris leurs sépultures.

C’est à la fin de l’interglaciaire Würm-Riss et au début du glaciaire Riss que l’homme de Néandertal s’est répandu vers l’est de l’Europe, vers le Proche-Orient et une partie de l’Asie Centrale. Il y a 80.000 ans, au Levant, il a rencontré les premiers Homo Sapiens qui venaient d’Afrique où ils s’étaient développés depuis près d’une centaine de milliers d’années. Jusque là,ils ne s’étaient pas encore aventurés en l’Europe, car le climat les en dissuadait.

Outils moustériens (lames obtenues par débitage de blocs de silex)

Si leurs os ne sont plus visibles en vallée de Haine, ils ont cependant laissé des témoignages de leurs passages en divers endroits de la région, sous forme de silex taillés selon leurs méthodes moustériennes.

Dans le chapitre précédent, on a vu que des Néandertaliens archaïques, proches des Heidelberg, ont laissé des traces dans la région de Spiennes (Petit-Spiennes, Carrière Hélin, Mesvin et Harmignies) il y a entre 250.000 et 128.000 ans.

Au XIXème siècle et au XXème, de nombreux silex taillés de la culture moustérienne ont été ramassés dans divers villages des environs, sans que l’on réalise des fouilles méthodiques, comme on a pu le faire dans les grottes mosanes. Des outils moustériens ont été trouvés à Havré (Bois), Ghlin, Bernissart, Harchies, Angre, Givry (Bruyères), Ressaix (Trieu).
Il semblerait que ce soit à Stambruges qu’on en ait découvert le plus, ce qui a fait évoquer l’hypothèse d’un campement plus long à cet endroit.
Côté français, de belles découvertes ont été faites en bord de Scarpe (Saint-Amand, Biache-Saint-Vaast).

On le voit, cette période est finalement peu documentée en vallée de Haine et dans le Hainaut en général. Les conditions climatiques (paysage ouvert en climat rude) n’étaient pas favorables à une présence durable. Les humains s’aventuraient dans nos régions sans doute l’été, y campaient à proximité des troupeaux ou des sources de silex pour les tailler. L’hiver, ils descendaient plus au sud ou se réfugiaient dans leurs abris mosans. De plus, ils ne devaient pas être très nombreux, nomadisant par petits groupes familiaux, avec peu de probabilités de se rencontrer entre eux sur d’aussi grands territoires.

A partir de 40.000, on ne trouve plus de trace d’hommes de Néandertal en Belgique. Ils disparurent progressivement. Les témoignages les plus récents (vers 30.000) ont été découverts en Espagne, comme si leurs derniers représentants s’étaient progressivement retirés vers le sud. On ne sait pas pourquoi ils ont disparu; on n’a pas découvert de traces de massacres, ni de signes de maladies ou de dégénérescence. Il est possible qu’ils ne s’adaptèrent tout simplement pas aux conditions climatiques de la dernière période glaciaire dont le pic eut lieu vers 20.000.

Place aux suivants…

3. Les premiers pas de l’homme

Le paléolithique inférieur

C’est plutôt en bord de Houille que les archéologues ont découvert des traces du passage des premiers hommes chez nous. D’abord à Spiennes, ensuite à Mesvin. C’était il y a entre 500.000 et 300.000 ans avant notre ère.

Mais avant d’entrer dans les détails, il paraît bon, pour celles et ceux qui ont une idée un peu floue de la préhistoire, de définir plus précisément celle-ci. Cette science traite de ce qui concerne l’humanité, y compris dans ses formes originelles (préhominiens). Elle ne repose pas sur des écrits de ces époques primitives. Elle n’est connue que par l’archéologie (et ses nombreuses branches annexes, dont la paléo-génétique). L’écriture a été inventée entre 4000 et 3500 avant J.C. par les Sumériens et les Egyptiens. Elle n’a d’abord concerné que leurs transactions commerciales, puis l’histoire de leurs rois, leurs religions et enfin leurs codes de lois. Les écrivains ne se sont intéressés que très tardivement à notre région, soit au Ier siècle avant Jésus-Christ. Tout ce qui s’y est passé avant n’est donc connu que par l’archéologie.

La préhistoire est divisée en quatre grandes périodes: le paléolithique, le mésolithique (période très courte), le néolithique et les âges des métaux : cuivre, bronze et fer.

Le paléolithique est lui-même subdivisé en trois périodes: inférieur, moyen et supérieur, en fonction des diverses espèces humaines qui y ont vécu.

A chacune de ces périodes, correspondent des cultures qui se définissent par les modes de vie et de fabrication d’objets. Pour les premières cultures, il s’agit essentiellement de la forme des outils en pierre fabriqués, puis avec la complexification des cultures, on s’est intéressé aux modes de sépultures, aux arts, aux formes et décorations des céramiques, etc…

L’humanité est représentée par le genre homo. Elle commence il y a 2.500.000 ans (et avec elle le Paléolithique Inférieur). Les hommes sont les premiers à s’aider de pierres qu’ils ramassent pour effectuer des gestes précis (découpe de la viande, des peaux, taille de branches, cueillette de racines, …), après avoir transformé ces pierres par une taille destinée à leur donner une forme précise, la plus efficace possible pour leur usage.

Ces premiers humains étaient aussi capables de transmettre leur “technologie” à leurs proches et à leurs descendants. Aux gestes, ils commencèrent, dès  qu’ils le purent, à joindre la parole. Leurs ancêtres Australopithèques avaient appris à se tenir debout (mais grimpaient encore aux arbres comme leurs cousins, les singes). L’homme, lui, vit debout, explore mieux son environnement. Il marche mieux et peut courir. La position relevée de sa tête a permis de développer son larynx au point qu’il peut émettre des sons articulés.

Ce premier homme « inventeur » a été surnommé homo habilis. Cela va de soi. Son espèce a vécu près de 700.000 ans.

Il est apparu en Afrique, du côté de l’Ethiopie et du Kenya. Il s’est répandu dans une partie du continent. Il a côtoyé les derniers Australopithèques. On a trouvé en Géorgie (Caucase européen) des hommes qui lui ressemblaient assez bien morphologiquement et qui y ont vécu il y a 1.800.000 ans. Sans doute des descendants, les premiers Européens, mais qui ne sont pas allés plus loin dans leur migration (dans l’état actuel des connaissances). Ce sont les “hommes de Dmanissi” (Homo Georgicus).

A la même époque, une autre espèce était apparue en Afrique, celle des homo erectus, probablement plus adaptée à la vie et aux changements de conditions climatiques. Elle s’est répandue dans toute l’Afrique et a rapidement pris le chemin des autres continents, surtout en direction de l’Asie. Cet homme a vécu très longtemps, plus de 1.500.000 ans, ce qui lui a valu plusieurs mutations génétiques qui ont transformé sa morphologie et ont permis d’établir des sous-espèces.

Cet homo erectus est venu en Europe. Sans doute, les conditions climatiques rudes l’ont confiné au début sur les bords de la Méditerranée, de la Grèce à l’Espagne. Dans ce dernier pays, comme dans le sud de la France, il y vivait il y a 1.200.000 ans. Il a été classé dans la sous-espèce des homo antecessor.

L’audace ou l’amélioration du climat l’ont poussé à se risquer plus au nord. En effet, pendant ce que l’on appelle le Pléistocène Moyen (800.000-180.000), le climat était généralement froid, mais les périodes de temps très rigoureux (80% du temps) alternaient avec des périodes plus chaudes et humides pendant lesquelles la vie humaine devenait possible sur nos territoires.

Il y a 600.000 ans, ce descendant de l’homo erectus commença à nomadiser sous nos latitudes. Il avait lui aussi un peu évolué sur le plan morphologique. On l’a bien décrit sur des parties de squelettes découvertes près d’Heidelberg en Allemagne. C’est pourquoi on a appelé cette sous-espèce homo heidelbergensis.

Essai de reconstitution d’un homo heidelbergensis

Le “Belge” le plus ancien connu a été signalé à Sprimont, dans la Grotte de la Belle-Roche, sur les bords de l’Amblève. Il existe quelques controverses pour le dater très précisément, mais il semble qu’il y ait vécu il y a 500.000 ans.

C’est probablement l’un de son espèce qui est passé et a laissé des traces, sous forme de silex taillés, en bord de Trouille, à Spiennes. Probablement, car ses os ont disparu, mais à cette époque, ce ne pouvait être que lui. Il était nomade, suivait les troupeaux qu’il chassait pour en avoir la viande et les peaux. Il se nourrissait aussi de fruits, de racines, de poissons et de crustacés. A Spiennes, c’est sur les sites du “Pa d’la liau” et de “Petit-Spiennes” que des silex taillés, datés entre 450.000 et 300.000 ans, ont été trouvés, bien longtemps avant que d’autres hommes plus récents ne viennent y creuser des puits et des galeries pour les extraire en profondeur. Sur cette large période, plusieurs occupations eurent lieu à des moments différents.

Bifaces acheuléens trouvés à Spiennes

Plus haut, j’ai évoqué les cultures qui, pour ces premiers temps préhistoriques ,se définissaient par la forme des outils. La première culture fut dénommée oldowayenne, car décrite pour la première fois à Olduvaï en Tanzanie. Il s’agissait de pierres encore taillées avec peu de précision. L’inventeur en était Homo habilis, qui transmit sa technologie à Homo Erectus. On a encore trouvé de tels outils en Europe jusqu’il y a 700.000 ans, mais pas chez nous. Cependant en Afrique, Erectus avait déjà inventé le biface, outil taillé sur deux faces, plus tranchant et précis, pour en faire des grattoirs et des racloirs. On parla alors de Culture acheuléenne, car décrite pour la première fois à Saint-Acheul, près d’Amiens. Cette technique de taille n’a pénétré l’Europe que tardivement. C’est cependant elle qu’on retrouve chez les Homo Heidelbergensis, ces premiers “gens de chez nous”. De nombreux silex acheuléens furent trouvés à Spiennes.

Ce sont également ces humains qui semblent avoir “inventé le feu“, c’est-à-dire qu’ils avaient la capacité d’allumer un feu et de l’entretenir, ce qui améliorait leur quotidien (chaleur, lumière, défense vis-à-vis des animaux sauvages, cuisson, …). C’était il y a 400.000 ans.

Enfin, ces premiers hommes appréciaient particulièrement les entrées de grottes et les abris sous roche pour y établir leurs camps. On en a trouvé de nombreuses traces en bord de Meuse et de ses affluents. Mais à la bonne saison, ils s’aventuraient dans des régions où ils ne pouvaient s’abriter que sous des tentes en peau. Et ce fut le cas au bord de la Trouille.

La région au sud et à l’est de Mons a été très appréciée pour son silex, car on trouve d’autres témoignages du passage des hommes dans les époques suivantes, du moins lorsqu’on se trouvait dans des fenêtres climatiques plus douces, quand les forêts reprenaient leurs droits sur les toundras gelées et que la nourriture y était plus abondante.

Ainsi entre 300.000 et 200.000 ans avant notre ère, on trouve de nombreuses traces archéologiques, toujours à travers des quantités parfois impressionnantes de silex taillés, dans les localités suivantes :

  • À Mesvin, sur un plateau entre la Wampe et le By (v.250.000). Ici, on a découvert une évolution progressive de la technique de taille vers la confection de lames de silex selon une nouvelle méthode, dite débitage Levallois, que, plus tard, les Néandertaliens vont utiliser à grande échelle. A la même époque, à d’autres endroits, on trouve encore majoritairement des silex acheuléens (bifaces). Ce qui fait penser à certains préhistoriens qu’il existait deux groupes humains qui se côtoyaient mais qui utilisaient des technologies différentes. Le premier se trouvait en Angleterre (Clacton-on-Sea) et se répandit via nos régions vers l’Elbe en Allemagne. Le second le voisinait au sud à partir du Bassin de Paris
Outils trouvés à Mesvin

En fait, sur plusieurs de ces sites (Obourg, Spiennes, Mesvin, Saint-Symphorien, La Louvière), les découvertes réalisées dans les couches plus supérieures sont essentiellement liées à des outils façonnés selon les méthodes Levallois plus récentes (dites Levallois IV). Il s’agit d’une période plus clémente entre les deux dernières périodes glaciaires. On sait qu’à ce moment, les hommes qui vivaient en Europe Occidentale, les derniers Homo Heidelbergensis, étaient lentement en train d’évoluer vers des morphologies proches de celles des Néandertaliens, leurs descendants.

On considère que le Paléolithique Inférieur commence il y a 2.500.000 ans (découverte des premiers silex taillés et des plus vieux fossiles humains en Afrique) et se termine il y a 130.000 ans. Deux espèces d’hommes ont vécu pendant ce très long laps de temps : Homo Habilis (qui n’est pas venu dans nos contrées) et Homo Erectus, dont une forme évolutive, Homo Heidelbergensis, a parcouru nos latitudes. En effet, sous nos cieux, ces hommes ont vécu sur une relativement courte période, entre 500.000 et 130.000 ans, probablement même de façon très épisodique. Ils n’ont pas laissé de fossiles osseux, mais bien leurs outils de travail, taillés dans le bon silex du bassin de la Haine. Ils ont pratiqué des méthodes de taille relevant de la culture acheuléenne, mais certains d’entre eux ont fait de l’innovation en commençant à débiter les pierres en lames.

Place à l’espèce suivante…

2. Géographie de la vallée de la Haine

Ce chapitre a pour objet de décrire le relief, le cours de la rivière et de ses affluents, le paysage naturel (avant qu’il ne soit modifié par les activités humaines), le sol et le sous-sol qui ont permis ces mêmes activités humaines.

Etymologie

Les anciennes mentions de la rivière Haine se présentent sous les formes successives: Hangna (936-957), Hainae (Xème), Hainam (1034), Hagna (Xème), Hagnam (Xème, 1158), Hagna (1040, 1096), Haina.

On écrit Hayne en France.
A l’époque romaine, elle se serait appelée Samara, « eau tranquille ».

Certains pensent que ce nom pourrait venir du mot celtique hen qui signifie « vieux » (vieille rivière ?). Pour d’autres, il pourrait venir de l’ancien germanique Hagino-, qui signifie « bois » ou « qui traverse les bois » (selon M. Gysseling). Cette hypothèse nous parait la meilleure vu le contexte géographique, comme vous le verrez ci-après.

Le relief

Comme l’a expliqué le chapitre précédent, il est le résultat de centaines de millions d’années d’évolution, où la croûte terrestre, qui correspondait au sol hennuyer, s’est façonnée par soulèvements, plissements, déformations, failles, submersions marines, sédiments, etc…

Le relief définitif de la vallée, depuis la source sur le plateau d’Anderlues jusqu’à sa confluence avec l’Escaut à Condé, ne semble pas plus vieux que 2 millions d’années, soit  dans la dernière ère Quaternaire, alors que des humains foulaient déjà le sol africain. On sait que dans les derniers 600.000 ans, des changements ont encore eu lieu (soulèvements, érosions, solifluctions violentes) pendant les périodes glaciaires Riss et Würm.

La Haine prend sa source sur un plateau, à une altitude proche des 200 mètres, sur le territoire d’Anderlues. Ce plateau est le prolongement vers le Hainaut du plateau brabançon et hesbignon, subsistance de l’ancien massif primaire du Brabant.

La Haine dévale d’abord assez rapidement vers le nord jusqu’à Carnières et Morlanwelz, puis oblique vers l’ouest, presque en ligne droite. La forte rupture de pente entre Anderlues et Morlanwelz est due à une faille géologique. Elle trouve son sillon sur le plateau brabançon-hennuyer, assez ondulé.

La vallée est étroite dans sa première partie. Elle doit contourner les collines de Mons par le nord, puis continue son chemin en direction de l’Escaut qu’elle rencontre à Condé. La largeur de la vallée s’accentue au fur et à mesure que l’on se rapproche du confluent et de la vallée de l’Escaut Moyen. Cette plaine alluviale de la Basse-Haine trouve son origine dans des affaissements qui ont eu lieu en profondeur.

La vallée de la Haine s’individualise par rapport aux reliefs voisins. Au nord, on monte en pente douce vers un plateau faiblement ondulé (Pays d’Ath – altitude 90-110m) qui la sépare de celle de l’Escaut. Les deux Dendre y prennent leur source avant de se rejoindre à Ath et d’aller retrouver l’Escaut au nord, à Dendermonde/Termonde. Ce plateau est relativement rectiligne d’ouest en est et est peu découpé par les affluents de la rive droite.

Au sud, la pente est plus raide vers le plateau de Bavay, encore appelé Hauts-Pays, au-delà duquel s’écoule la Haute-Sambre. On monte de 25-30m à plus de 110m en peu de kilomètres.
De ces deux flancs descendent des ruisseaux et des rivières qui viennent grossir le cours tranquille de la Haine, cours d’eau près desquels nombre de hameaux et de villages vont apparaître au Moyen-Age. Ceux du versant sud, surtout entre Mons et Condé, dévalent sur un dénivelé important (une centaine de mètres en quelques kilomètres). Ils le font après avoir creusé des petits vallons encaissés (Wasmes, Boussu-Bois, Montignies-sur-Roc, Angre et Roisin) qui mettent à nu en certains endroits les couches sous-jacentes du sol (houille, roche) .Sur le versant nord, le ruisseau de la Fontaine-Bouillante incise le relief à hauteur de Blaton, lit qui a été emprunté par le canal Blaton-Ath.

Pour compléter  cette description du relief, on peut  mentionner la présence récente des terrils des XIXème et  XXème siècles, qui ont sans doute « sali » le paysage des communes houillères, mais qui aujourd’hui, pour la plupart, se sont transformés en biotopes verts naturels.

Le paysage

Il ne s’agit pas du paysage actuel, complètement transformé par les activités humaines, mais de celui que les hommes de la période néolithique ont connu il y a plus ou moins 7000 ans. Avant cela, le paysage a beaucoup varié selon le climat, glaciaire ou interglaciaire. Il y a 10-12.000 ans, ce climat s’est fortement adouci, est devenu tempéré, semblable à celui que nous connaissons aujourd’hui, avec des petites variations séculaires.

Ces hommes du néolithique sont arrivés dans nos régions pour s’y installer et pratiquer leur économie  basée sur l’agriculture et l’élevage. Ils y ont trouvé un fond de vallée marécageux, surtout à partir de Trivières. Mais de Morlanwelz jusqu’à Ville-sur-Haine, la rivière a creusé un vallon plutôt étroit. Au-delà, celui-ci prenait de la largeur, surtout à partir de Mons, pour aller se fondre finalement dans la large vallée de l’Escaut moyen. Le cours de la rivière y était lent, sinueux, quittant son lit en temps de fortes pluies ou de fonte des neiges. La rivière était peu profonde et laissait émerger çà et là des petits îlots entourés de bras de rivière et de marécages qui se mêlaient aux affluents. Ursindongus était un de ces îlots que le moine Ghislain choisit pour y établir son monastère. Et Mons Castrilocus était une colline enlacée entre Haine et Trouille. Quelques marécages, aujourd’hui, sont la résultante d’effondrements miniers du XXème siècle (Harchies, Strépy-Bracquegnies). Quelques sites ont conservé des noms qui rappellent ces temps anciens : roselière (roseauxs), jonchères ou joncquois (joncs), herbières, …

La vallée de la Trouille, dans sa partie finale, au bas de la partie nord du plateau des Hauts-Pays, présentait les mêmes aspects.
Plus tôt, lors des périodes interglaciaires du Paléolithique (après Mindel et Riss), de grandes crues couvrirent la Belgique et le nord de la France. Lors des différente décrues , se sont formés des replats sur les flancs des vallées correspondant à d’anciens lits de rivières. Les niveaux se sont alternativement élevés et abaissés. Les nappes fluviales se sont concentrées et enfoncées progressivement dans les vallées. Ainsi se sont succédé des phases d’alluvionnement et de creusement qui ont abouti à la formation de terrasses, les plus anciennes étant les plus élevées. C’est sur les terrasses les plus basses qu’on a trouvé des traces de passages de nomades paléolithiques (Spiennes, Mesvin, Saint-Symphorien, Haine-Saint-Pierre).

Au néolithique, les prairies humides du fond de vallée se prêtaient fort bien au pâturage des troupeaux de ces éleveurs. Pour cultiver, ils se sont installés à distance de la rivière et des endroits inondables. C’est également ce qu’ont fait les premiers villageois du Moyen-Age.

Les versants, au nord et au sud, étaient couverts de forêts et de bois où vivait une faune typique : cerfs, ours, loups, sangliers, … Les loups furent présents jusque vers 1830. Cette forêt était à la marge occidentale de la Grande Forêt Charbonnière (Carbonaria Silva, citée par Jules César), riche en espèces feuillues (chênes, hêtres, bouleaux, aulnes), qui s’est développée après la dernière période glaciaire et qui s’étendait du nord au sud de l’actuelle Belgique, principalement en son milieu, depuis les derniers affluents de l’Escaut au nord (Gette, Rupel), jusque dans l’Entre-Sambre-et-Meuse et les Ardennes. D’ouest en est, elle allait de la Dendre à la Nèthe.

Forêt Charbonnière à la période franque (déjà réduite)

Elle a souvent servi de frontière. Ainsi , entre Nerviens et Eburons lors de la période gauloise; les Nerviens l’ont d’ailleurs colonisée et en grande partie défrichée. A l’origine, elle était nettement plus étendue que sur la carte ci-contre qui date de la fin de la période gallo-romaine, alors qu’elle avait déjà subi de grands défrichements. Elle fut d’ailleurs coupée en deux (nord et sud du sillon Sambre-et-Meuse) par la chaussée romaine Bavay-Cologne aménagée dans les dernières décennies avant J.C. Au Vème siècle, elle séparait les Francs Saliens (capitales : Tournai et Cambrai) des Francs Ripuaires (capitale : Cologne). Plus tard, sous les Mérovingiens, elle sépara l’Austrasie de la Neustrie.

Puis ce fut la Haine elle-même qui servit de frontière entre les comtés (pagus) de Hainaut et du Brabant primitif (ou “Burbant”) jusque 1050, avant de devenir un axe central dans la constitution du comté médiéval de Hainaut, auquel elle donna son nom.
De part et d’autre de la Haine, cette forêt était quasi continue sur les versants et les plateaux. Les villageois au Moyen-Age ont continué à la défricher. Cette opération fut beaucoup plus intense à partir de la fin du XVIIIème siècle lors de  l’industrialisation, surtout sur le versant sud.
Ce nom de ” Forêt Charbonnière” vient du fait qu’elle constituait une source importante de charbon de bois, bien avant qu’une partie fût exploitée pour son charbon de houille. Le charbon de bois était utilisé pour chauffer les relais (le long des chaussées) et les postes militaires en ville, à l’époque romaine.

Les premiers agriculteurs vivaient en lisière de celle-ci, profitant du bois pour leurs constructions et pour le chauffage. Ils y trouvèrent, surtout au sud, des terres limoneuses arables favorables à leurs semis et plantations. Au nord, les terrains étaient plus sablonneux (landes, bruyères). On y élevait des moutons du côté de Ghlin-Maisières-Casteau.
De cette grande forêt, il  reste aujourd’hui quelques vestiges. Au nord de la Haine, de Bonsecours jusqu’à Saint-Denis-en-Broqueroie, en passant par Blaton, Stambruges, Hautrage, Baudour et Maisières.  Sur ces terrains sableux, on trouve plutôt des pins. Au sud ,dans les bois de Colfontaine, de Saint-Ghislain (à Dour) et d’Angre-Roisin, ainsi que dans la Forêt de Mormal en France, les arbres y sont plutôt des feuillus (chênes, hêtres, érables).

Le sol

Comme on vient de le dire, le sol était plus sablonneux au nord de la vallée et plus limoneux au sud de celle-ci.

Dans le fond humide de la vallée, on  trouve des alluvions amenées par la rivière et ses affluents.

La couverture minérale du sol sur les versants et sur les plateaux est essentiellement la résultante des dépôts sédimentaires éoliens qui se sont constitués lors des périodes glaciaires où les vents froids et secs étaient particulièrement violents, parcourant de grandes étendues de toundras sans obstacles forestiers. Ce sont des loess (ou limons) favorables aux cultures. Au nord de la vallée, ces limons recouvrent mal les sables déposés à diverses périodes. Ce sont des sols peu favorables à l’agriculture et encore aujourd’hui relativement boisés.

Le sous-sol

Celui de Wallonie, et donc celui de la vallée de la Haine, est particulièrement complexe. Il est principalement constitué de sédiments marins qui se sont déposés depuis plus de 600 millions d’années au gré des nombreuses transgressions marines qui ont recouvert le sol de la Basse-Belgique et de la moitié occidentale de l’actuel Hainaut.
Lors de la constitution de la chaîne varisque (ou hercynienne) au Carbonifère, des plissements de terrain au nord de celle-ci, donc en Wallonie, ont créé une grande faille presque continue d’est (Allemagne) en ouest (Nord de la France) et qui prend le nom de « Faille du Midi » dans le Hainaut. La vallée de la Haine s’est constituée parallèlement à cette faille. Dans ce secteur, deux types de couches se côtoient et se chevauchent, celles du Dévonien (grès) et celles du Carbonifère (houille).

De l’ère primaire, on retiendra:

  • Les dépôts du Dévonien (416-359Ma) : des grès, des schistes et des poudingues. Surtout sur le versant sud (Angre, Roisin, Dour, Boussu-Bois, Montignies-sur-Roc, Eugies). Dans le bois d’Angre (Honnelles), ces roches affleurent encore du côté du “Caillou-qui-Bique”. A Rouveroy, ces roches sont riches en carbonate de cuivre (malachite, azurite).
  • Les dépôts du Carbonifère (359-299Ma) : ce sont les veines de charbon de houille qu’on retrouve sur les deux versants, moins profondes au sud qu’au nord, veines qui se situent dans des couches de grès et de schistes de la période précédente. Elles constitueront la base de l’économie  du Borinage (Couchant de Mons) et du Centre (Levant de Mons) à partir de la deuxième moitié du XVIIIème siècle. De cette époque date aussi le dépôt de roches calcaro-siliceuses dans la région d’Hautrage.

De l’ère secondaire, on mentionnera :

  • Au début du Crétacé (étage cénomancien), se sont déposés les grès et les marbres de la région de Bavay (Bellignies, Houdain, …), les grès rouges de Wihéries, Montignies-sur-Roc, Athis, Quévy et Havay.
  • Les dépôts calcaires du Crétacé (135-65Ma) sont essentiellement crayeux. Ces sédiments proviennent de la décomposition de coquillages marins. Ils sont particulièrement abondants à l’ouest et au sud de Mons : Obourg, Saint-Symphorien, Spiennes, Harmignies, Mesvin, Ciply, Cuesmes, Nouvelles, Noirchain, Genly, Asquillies … Ces dépôts crayeux sont également présents plus à l’est où ils sont, parfois plus profonds, parfois plus affleurants, comme à Morlanwelz. Ce sous-sol alimentait les fours à chaux. Le même phénomène se retrouve dans les Hauts-Pays (Montignies-sur-Roc). Ces craies sont riches en phosphates à Ciply et autour
  • À cette époque, se sont également déposées des argiles diverses au nord de la Haine, depuis Bernissart jusqu’à Baudour.

Les dépôts tertiaires sont évidemment les plus superficiels. Dans les régions crayeuses, à l’est et au sud de Mons, se forment au Paléocène des blocs de silex (transformation siliceuse) à Obourg, Spiennes et Harmignies, où les hommes du néolithique ont creusé des puits et des galeries pour l’exploiter à grande échelle. Cependant,  bien plus tôt, au paléolithique, des nomades de passage ont ramassé des galets de silex qu’ils ont taillés. A Spiennes déjà, à Maisières, à Haine-St-Pierre, Leval, Ressaix, Epinois. Dans les derniers siècles de notre ère, on recherchait encore ces silex pour en faire de la pierre à fusil et à briquet (Spiennes, Ciply, St Symphorien, Mesvin, Obourg, Maisières, Nimy, Baudour, Douvrain).

Au nord de la Haine, les nombreuses avancées marines ont laissé de grandes quantités de sables, étendues qui se sont couvertes de bois et de bruyères. On a parfois parlé de « Campine hennuyère » pour cette zone entre Peruwelz et Casteau. Ce sont des sables de l’étage Landénien ou Thanétien. Ils ont , en certains endroits, été exploités en carrières ou sablières (Stambruges). Les collines de Mons et alentours (Héribus, Panisel) ont été façonnées par la nature à cette époque.
A Baudour et dans la région qui l’entoure, on  a trouvé les matières qui ont servi dans les faïenceries. Les terres argileuses, plus abondantes dans cette région, ont alimenté les briqueteries et les fabriques de tuiles et de réfractaires, comme à Hautrage. A partir du XVIème siècle, on commença à remplacer dans les constructions des particuliers  les matières inflammables (bois, torchis, chaume) par des briques.

En certains endroits, comme à Blaton, Quevaucamps et même Grandglise, des grès recouvrent le sable.

On divise le sous-sol borain en trois massifs houillers :

  • Le Massif du Borinage, caractérisé par des veines de charbon faciles d’accès (Flénu, Jemappes, Quaregnon, Wasmes, Pâturages). Il s’agit de charbon “flénu” gras, qu’on utilisait pour un usage domestique, les briqueteries, les verreries et les fours à puddler
  • Le Massif de Grisoeul (Frameries-Pâturages), autour des mines de l’Agrappe et de l’Escouffiaux. L’extraction était très difficile, avec de fortes concentrations de grisou
  • Le Massif du Comble Nord, où les eaux souterraines y étaient très abondantes et la chaleur accablante: Bernissart, Rieu du Cœur, Nord de Flénu, Hensies-Pommeroeul

En fait, deux couches géologiques successives constituent les roches du houiller présentes dans le pli synclinal qui s’est produit à la fin de l’ère primaire :

  • Le Namurien, à la base, dépourvu de charbon, est constitué de grès schisteux (qu’on exploite encore à Hautrage)
  • Le Westphalien au-dessus, parcouru de veines de houille. Les plus anciennes et donc les plus profondes procurent des charbons pauvres en matières volatiles (charbons maigres), que l’on utilise dans les fours à briques ou à chaux. On en trouve plus dans le Bassin de la Basse-Sambre (vers Charleroi). Les veines plus récentes contiennent des charbons enrichis en gaz (demi-gras et gras), qui permettent d’atteindre de plus hautes températures, utilisés dans les fours à coke, les fours à fonte, les verreries et l’alimentation des machines à vapeur.Elles sont plus importantes à l’ouest (« flénu ») et … plus riches en grisou.

C’est évidemment le charbon de houille qui est à l’origine du développement industriel de toute la vallée. Ce combustible a attiré d’autres industries qui se sont réparties de façon inégale : sidérurgie, constructions métalliques, verreries, chimie.

Les roches ont été et sont encore exploitées, mais n’ont pas remplacé la vitalité industrielle de l’exploitation de la houille. On continue ainsi à extraire de l’argile à Hautrage pour les réfractaires, des craies à Obourg pour les cimenteries et des sables à Blaton et à Tertre.

La Haine et son réseau hydrographique

Un village s’implante sur des terres favorables à l’agriculture et à l’élevage, à proximité d’une source d’eau (sources, ruisseaux, rivières) et si possible d’un endroit boisé. La vallée de la Haine, par son fond humide (pour les prairies d’élevage), ses versants limoneux (pour l’agriculture) et boisés (pour la construction et le bois de chauffage), ses nombreuses sources et ruisseaux ont offert aux hommes la possibilité d’y fonder de nombreux villages. On trouve ci-après la description du réseau hydrographique et on se rend compte que la plupart des villages de la région répondent à ces critères. Quasi tous se sont établis à une distance variable de la rivière, afin de garder les pieds secs. Deux exceptions : Saint-Ghislain, fondé par des moines, sur un îlot (Ursidongus) émergeant du fond marécageux, et Condé au confluent. On pourrait peut-être y ajouter le château de Boussu, établi lui aussi sur une petite éminence peu éloignée de la rivière. Le village s’est cependant constitué un peu plus au sud.

La description qui suit est celle que l’on peut faire aujourd’hui en regardant une carte actuelle. Elle ne répond plus à ce qu’elle était il y a encore 2000 ans, tant les cours d’eau furent redirigés et canalisés depuis.

La Haine et ses affluents (calque d’une carte du XVIIIème siècle)

A l’origine de la Haine, on trouve plusieurs sources et ruisseaux nés sur le territoire d’Anderlues à une altitude de plus de 180m, à proximité du site « Planti », point le plus élevé (212m) de la Moyenne Belgique.

Sa longueur totale est de 60km et son bassin hydrographique est estimé à une superficie de 798km².

Ces ruisseaux dévalent vers le Nord dans un vallon encaissé en perdant rapidement de l’altitude et se réunissent à  Carnières (110-116m).

La Haine arrose alors successivement les villages suivants :

  • Morlanwelz (96m), où elle oblique vers l’ouest et reçoit les eaux de deux ruisseaux: l’Olive et le Ry du Bois.
  • Haine-Saint-Pierre (76m)
  • Haine-Saint-Paul (72m)
  • Saint-Vaast (56m)
  • Trivières (54m) – affluent : ruisseau de la Princesse, qui prend sa source à Buvrinnes, traverse, sous le nom de Samme, Epinois, Ressaix, Battignies, Binche, Waudrez et Péronnes-lez-Binche
  • Maurage (46m) – affluent : ruisseau des Estinnes, venant de Bray et des deux Estinnes, provenant de la confluence de plusieurs ruisseaux prenant leurs sources à Fauroeulx, Peissant et Vellereille-lez-Brayeux
  • Boussoit (42m) – affluent : ruisseau du Thiriau, venant d’Houdeng-Aimeries et d’Houdeng-Goegnies
  • Strépy-Bracquegnies
  • Ville-sur-Haine (40m)
  • Havré (40m)
  • Obourg (38m) – affluent : Aubrecheuil qui prend sa source au nord de Saint-Denis-en-Broqueroie
  • Contour de Mons par le nord-ouest (33m)
  • Nimy
  • Ghlin (30m) – affuent : le ruisseau d’Erbisoeul
  • Jemappes (28m) – affluent : la Trouille (infra)
  • Quaregnon et Wasmuel (25m) – affluent : le Rieu du Cœur qui prend sa source dans le bois à Eugies, traverse Pâturages avant d’atteindre Quaregnon où il se joint à l’Elwasmes qui vient de Blaugies par Petit-Dour, le bois de Colfontaine, Warquignies et Wasmes, où il reçoit le ruisseau de Colfontaine
  • Saint-Ghislain (22m) – affluents au nord du village : ruisseaux descendant de Baudour par Tertre (la Gronde, la Briserie). C’est à ce niveau que les îlots étaient les plus nombreux et étaient devenus des passages obligés d’une rive à l’autre.
  • Boussu (22m) – affluent : le Hanneton qui prend sa source dans le bois de Saint-Ghislain à Dour, où il reçoit le ruisseau de la Bonne-Fontaine, puis passe par Boussu-Bois et, autrefois, traversait Boussu en son milieu actuel
  • Hautrage (22m) au nord
  • Hainin au sud
  • Thulin au sud (22m) – deux affluents
    • Le Grand Séquisse, qui prend sa source sur les hauteurs de Dour, traverse le bourg sous le nom de ruisseau Delval, puis le ruisseau des Prés avant d’atteindre Thulin
    • Le Rieu d’Elouges, qui prend sa source à la limite Dour-Blaugies-Wihéries, porte le nom de Rieu Saussez à Dour, puis de ruisseau de Cocars, où il reçoit un ruisseau venant de Wihéries avant de traverser Elouges, puis Thulin
  • Montroeul-sur-Haine et Hensies au sud (20m)- affluents : ruisseaux des Préelles et du Roeulx, ainsi que de nombreux courants ou ruisseaux de drainage
  • Harchies – au nord
  • Saint-Aybert (18m) – affluent : Hogneau (infra)
  • Condé – confluence avec l’Escaut (18m). Le trajet final coïncide aujourd’hui avec celui du canal Pommeroeul-Condé.

Les altitudes mentionnées sont les moyennes pour chaque village traversé. On constate que la perte d’altitude est très importante entre les sources du plateau d’Anderlues et le premier village traversé, Carnières. La déclivité diminue au fur et à mesure que la rivière s’avance vers l’ouest. Elle devient minimale à partir de Mons.
En fait, depuis que la région a commencé à être peuplée par des populations agricoles, le cours naturel de la Haine n’a cessé d’être modifié. Pour lutter contre les inondations d’abord, et pour rendre son cours navigable (pour des petites embarcations plates), les hommes ont rehaussé les berges, réduisant la largeur du cours d’eau. Ces aménagements doivent probablement remonter aux derniers siècles avant J.C., et surtout aux Gallo-Romains dont on sait qu’ils transportaient des marchandises par cette voie. La situation est probablement restée comme cela pendant tout le moyen-âge. Le cours fut ensuite rectifié à plusieurs reprises jusqu’à la fin du XXème siècle et fut finalement canalisé. Ce qui n’a pas empêché quelques inondations majeures en aval de Saint-Ghislain, notamment lors de l’hiver 1925-1926. De plus, des effondrements miniers ont créé des dépressions marécageuses, encore présentes aujourd’hui, mais transformées en réserves naturelles ornithologiques.

 

La Trouille

  • Source : à Grand-Reng (commune d’Erquelinnes)
  • Elle passe en France, arrosant Villers-Sire-Nicole, puis revient en Belgique et traverse les communes suivantes:
  • Rouveroy
  • Givry – affluents : les ruisseaux de Haulchin, d’Aulnois, de Coury, des Prés à Rieux
  • Harmignies

    La Trouille à Harmignies
  • Spiennes
  • Hyon – deux affluents importants:
    • Le By
      • Source près de Malplaquet en France, entre en Belgique et traverse:
      • Blaregnies – affluents : les ruisseaux de Bury, de la Roulerie, du Bois de Blaregnies et des Saulois
      • Aulnois – affluent : le Louvroit
      • Bougnies
      • Asquillies
      • Nord de Noirchain – affluents : le Ruisseau du Temple venant de Frameries, ceux de Champré et de l’Harbée venant de La Bouverie, celui des Rogneaux venant de Genly par Noirchain
      • Mesvin
      • Ciply
      • Hyon, où il se jette dans la Trouille
    • La Wampe
      • Source : Goegnies-Chaussée – affluents : les ruisseaux du Barbet et de Malengreau
      • Quévy – affluents : les ruisseaux du Lombray et de la Fontaine de la Ville
      • Bougnies
      • Asquillies
      • Nouvelles
      • Harveng – affluent : des ruisseaux venant d’Havay, dont celui du Barbet
      • Hyon, où il se jette dans la Trouille
  • Mons – affluent : la Seeuwe qui descend de la colline.                                                                                                                                                                                                    Jadis, la Trouille passait au pied de la colline de Mons. Elle pénétrait donc dans l’enceinte de la ville médiévale et apportait de l’eau aux artisans, principalement aux tanneurs et aux foulons. Un embarcadère avait été aménagé au lieu-dit « Rivage » à la sortie de la ville, du côté de l’actuel Pont de Jemappes.
  • Jemappes – où elle se jette dans la Haine.

 

Le Hogneau (Honniau). Cette rivière prend le nom de Grande Honnelle dans son parcours belge.

  • Source : La Longueville, au nord de Bavay (144m), puis elle traverse :
  • Audignies
  • Taisnières-sur-Hon
  • Hon-Hergies, 
  • Houdain-lez-Bavay
  • Bellignies
  • Gussignies – affluent : le ruisseau de Bavay
    • Source : Locquignol, puis traverse : Bavay, Saint-Vaast, Bellignies, Bettrechies
  • Passe la frontière franco-belge près de l’ancienne gare de Roisin
  • Autreppe (75m)
  • Angre – affluent : le ruisseau de Roisin, dont la source est en France, qui traverse Roisin et son château, puis descend par le bas d’Angreau pour se jeter dans la Honnelle.
  • Baisieux
  • Quiévrain – affluent : la Petite Honnelle
    • Source : entre Gussignies et Malplaquet, puis traverse :
    • Bellignies,
    • Gussignies,
    • Erquennes,
    • Athis,
    • Rampemont,
    • Montignies-sur-Roc,
    • Audregnies,
    • Baisieux
  • Crespin – affluent : l’Aunelle
    • Source : Locquignol (Forêt de Mormal, au sud-est du Quesnoy), 156m, traverse :
    • Gommegnies,
    • Wargnies-le-Petit,
    • Wargnies-le-Grand,
    • Jeanlain,
    • Sebourg,
    • Rombies-et-Marchipont,
    • Quiévrechain (frontière franco-belge entre Sebourg et Crespin)
    • Confluent à Crespin, 23m
  • Thivencelle (14m) où Le Hogneau se jette dans la Haine

1. Mise en place du décor

Raconter la préhistoire et l’histoire de la vallée de la Haine, ce n’est pas seulement s’arrêter aux hommes et aux femmes qui y ont vécu, par intermittence ou en permanence, depuis 400.000 ans. C’est aussi s’intéresser aux conditions (climat), à l’environnement et à ses ressources (eau, couverture végétale, faune), aux possibilités minérales qui leur ont permis de survivre (économie du sol et du sous-sol). Les limons, les sables, les argiles, les pierres et le charbon s’y sont déposés depuis des centaines de millions d’années. C’est donc l’histoire de la mise en place de ce décor que ce premier chapitre rapporte.

Ceci ne peut être compris que dans le cadre plus vaste du monde où le Pays de Haine n’est qu’un microcosme qui vit au gré de tous les microcosmes qui l’entourent et des macrocosmes qui régissent ce monde.

13, 8 milliards d’années – le Big Bang

Naissance de l’univers observable. Disparition d’un monde antérieur?

L’histoire de la Terre se raconte en cinq ères : précambrienne, primaire, secondaire, tertiaire et quaternaire. Chacune d’elles comprend des périodes géologiques (ex : cambrien, carbonifère, dévonien, jurassique, etc…) qui elles-mêmes peuvent encore être divisées en étages (namurien, maastrichtien, …).

4,6 milliards d’années – début de l’ère précambrienne

La terre se constitue dans le système solaire par accrétion de matière recueillie dans l’espace environnant. Ses diverses enveloppes profondes se forment, dont les continents visibles en surface, ainsi que les océans. De la surface vers le centre, on trouve :

  • La croûte terrestre
  • Le manteau
  • Le noyau

La lithosphère est l’enveloppe terrestre rigide de la surface de la terre, composée de :

  • La croûte terrestre
  • De la partie supérieure du manteau

L’asthénosphère est la partie inférieure du manteau.

Apparition de l’atmosphère terrestre.

A partir d’ici, les continents vont se déplacer sous forme de plaques, se morceler, s’éloigner, puis se rassembler en se chevauchant sur les bords, ce qui va entraîner des soulèvements à l’origine des chaînes de montagnes (orogenèse), des plissements et des failles.

Les pluies, les vents et le gel érodent les sommets qui dépassent et finissent par araser ces montagnes (érosion) jusqu’à les réduire en plaines et faire apparaître en  surface ou dans le sous-sol des couches jusque-là très profondes.

Ainsi deux chaînes de montagnes européennes, qui furent aussi élevées que l’Himalaya aujourd’hui, ont disparu.

Par moments, la mer va submerger certaines parties des continents, les plaines surtout (transgressions marines), et donc aussi les anciennes montagnes arasées, et y déposer des couches sédimentaires d’origine marine (sable, craie, roches calcaires). Ces sédiments vont s’accumuler. Les conditions dans lesquelles ils vont s’enfoncer dans le sol (pression, température) vont déterminer le type de roches qu’on y trouve. Beaucoup de celles que nous trouvons en Pays de Haine ont une origine marine.

Aux sédiments marins, il faut aussi ajouter les alluvions, drainés par les cours d’eau (sédiments fluviatiles) et les fines particules transportées par le vent (sédiments éoliens, notamment les limons de surface).
Tous ces phénomènes se passent sur des centaines de millions d’années et continuent insensiblement à l’heure actuelle,  ou de façon plus marquée lors des tremblements de terre et des éruptions volcaniques.

Petit à petit, très lentement, vont s’installer le relief visible aujourd’hui et les différentes couches qui se sont déposées sous nos pieds.

Entre 3,8 et 3,5 milliards d’années

Début de la vie sous forme de molécules organiques simples (les experts actuels pensent même que ce phénomène est peut-être plus précoce encore). Puis de molécules plus complexes capables de se répliquer (ADN, ARN).

Apparition des premiers micro-organismes cellulaires : les stromalithes. Puis les premières bactéries capables de photosynthèse : formation de glucose à partir de gaz carbonique (CO2) et d’eau (H20) et rejet d’oxygène (O2) dans l’atmosphère.

Au milieu d’un grand océan, se trouvait un grand continent : la Rodinia.

Tout cela met près de 3 milliards d’années à se mettre en place.

Il y a 750 millions d’années (Ma)

La Rodinia se morcelle en plusieurs continents.

Il y a 650-630 Ma

Une glaciation sévère transforme la terre en une espèce de grosse boule de neige.

Apparaissent les premiers animaux sur les fonds marins : des éponges.

Puis des éruptions volcaniques libèrent de grandes quantités de gaz carbonique qui réchauffent l’atmosphère.

A la surface des océans, apparaissent les phytoplanctons qui libèrent de grandes quantités d’oxygène.

Il y a 600 Ma

Le grand continent se reforme : le Gondwana,  pour une grande part situé dans l’hémisphère sud.

Puis trois grandes îles s’en détachent :

  • la Laurentia (Amérique du Nord, Groenland, Ecosse et nord-ouest de l’Irlande)
  • la Baltica (Europe du Nord et Scandinavie)
  • la Sibéria (Sibérie)

Il y a 575 Ma

Apparaissent, toujours dans l’eau, les premiers invertébrés (animaux à corps mou sans colonne vertébrale) : des édicariens qui se diversifient en cnidaires radiaires (anémones de mer, coraux, étoiles de mer et méduses).

 

L’ère primaire (ou paléozoïque) – 514-252 Ma

514-488 Ma – le Cambrien

Un micro-continent, Avalonia, se détache du Gondwana vers le nord (une partie de l’Amérique du Nord et une partie de l’Europe du Nord, dont le massif anglo-brabançon, dans lequel se trouve le Hainaut,  ainsi que l’Ardenne). La partie méridionale de l’Europe forme la marge nord du Gondwana.

A partir des édicariens, les premières espèces animales se diversifient, toujours en milieu marin, et pour 90% au fond des océans.

Aux espèces radiaires précédentes (qui se développent dans plusieurs directions), s’ajoutent les espèces bilatériennes (qui ont un hémicorps gauche et un droit) : les crustacés, les mollusques, …

488-444 Ma – l’Ordovicien

C’est le début d’une vie hors de l’eau : des algues vertes et des plantes à spores seulement.

444-416 Ma – le Silurien

Avalonia rencontre et se soude à Baltica. Ce nouveau continent entre en collision avec la Laurentia pour former la Laurussia et provoquer la formation d’une chaîne de montagnes, dite calédonienne. Longue de 4000 km et large de 500 km, elle s’étend du nord-est des Etats-Unis jusqu’à l’ouest de la Scandinavie, incorporant le Groenland, l’Irlande et l’Ecosse.

Gondwana remonte vers le nord. L’océan qui le séparait de la Laurussia se réduit.

C’est alors qu’a lieu le plissement des roches du massif calédonien du Brabant, formant les plus anciennes roches de Belgique qui affleurent au milieu des roches plus jeunes. On en trouve encore dans les vallées (Dendre, Senne, Dyle), en Condroz et dans l’est de la Belgique. Ce sont des schistes, des quartzites et des grès en majorité, provenant de la solidification de sédiments issus de l’érosion des sommets montagneux. On exploite ces roches du côté de Stavelot.

Des événements volcaniques ont fait remonter des profondeurs de la Terre des roches magmatiques (lave) qui se sont refroidies. Les carrières de Quenast les exploitent (« porphyres »).

Les premières plantes terrestres apparaissent : les fougères, les prêles, les premiers arbres.

416-359 Ma – le Dévonien

La chaîne calédonienne s’érode. Les massifs ardennais ont été complètement arasés. Celui du Brabant est comme une île submergée.

Ce qui deviendra la Wallonie est bordé au sud par un océan qui va à plusieurs reprises « transgresser » et venir « lécher » le massif brabançon.

Des sédiments marins se déposent et forment l’essentiel des roches de Wallonie (plus de 5500km²).

Ce sont du sable, de l’argile et des galets arrachés par l’érosion aux reliefs du continent, notamment du massif du Brabant. Transportés vers le sud par l’eau des torrents et des fleuves, ces matières sédimentent dès qu’elles atteignent la mer et donnent naissance à des grès, des schistes et des poudingues (roches encore siliceuses).

La mer finit même par recouvrir le massif du Brabant érodé.

Cette époque est marquée par le dépôt de calcaires (début des roches calcareuses argileuses) dans un climat de type tropical. Les marbres exploités dans la région de Roisin-Bellignies datent de cette époque.

Puis le climat se refroidit (glaciation), la mer se retire, absorbée en partie par les glaciers polaires. Les dépôts s’arrêtent.

A partir de poissons archaïques se développent les premiers vertébrés : les amphibiens et les reptiles marins.

359-299 Ma – le Carbonifère

Laurussia (dont fait partie la Wallonie, et donc le Hainaut) et Gondwana finissent par entrer en collision. La ligne de suture se fait au sud de la Wallonie, entre la Manche et les Vosges. Cet épisode déclenche la formation d’une nouvelle chaîne de montagnes, dite varisque ou  hercynienne (350-280 Ma) qui va de la péninsule ibérique vers la Bohême, en passant par le milieu de la France.

La mer recule et les reliefs s’érodent.

La région de Mons est alors située en bordure de mer, dans une vaste plaine marécageuse et forestière, à proximité de l’équateur.

D’énormes quantités de débris végétaux (riches en carbone) se sont accumulées, amenées par des cours d’eau dans des deltas ou des lagunes à la végétation luxuriante où la mer s’engouffre par moments, y laissant d’énormes sédiments qui se transformeront en charbon au fur et à mesure de leur enfouissement dans le sol. Le charbon, comme le pétrole, provient de l’accumulation et de la transformation de grandes quantités de matières organiques (végétales et animales) en milieu pauvre en oxygène.

C’est ainsi que s’est formé le bassin houiller dans l’axe Scarpe-Haine-Sambre-Meuse-Rhin, à la bordure nord du massif varisque, dans des fossés d’effondrement.

La Wallonie est à cheval sur une frontière. Au nord, les roches n’ont pas été plissées. Au sud, elles sont plissées et comprimées. Il se forme alors de grandes structures plissées à concavité vers le haut (synclinales) ou vers le bas (anticlinales).

Les roches situées au sud du massif du Brabant se sont désolidarisées de leur soubassement et forment des écailles qui se chevauchent l’une  l’autre en direction du nord le long de failles. Une de ces failles importantes est la Faille du Midi (en Hainaut) où se chevauchent des roches plus anciennes et des roches plus jeunes.

Se répandent alors sur terre les premières grandes forêts de lycophytes et de fougères. Les premiers animaux terrestres , les amphibiens, sortent de l’eau et vivent une vie mi-aquatique, mi-terrestre. Ils sont pourvus de poumons et de choanes (sortes de narines).

Le plissement varisque est responsable de la structure actuelle de notre région. Au-dessus du massif houiller se sont déposées, depuis Namur jusqu’à Quiévrain, des masses charriées depuis la chaîne montagneuse. C’est l’érosion qui, par la suite, permettra aux veines de charbon d’affleurer à certains endroits, notamment sur les versants de la vallée de la Haine.
C’est aussi lors de cette période que se déposent dans le Tournaisis, la région d’Hautrage et dans la région de Soignies-Ecaussines des roches calcaires et calcaro-siliceuses que les carrières d’aujourd’hui exploitent.

299-251 Ma – le Permien

La collision des deux continents est complète. A nouveau, il n’existe plus sur terre qu’un seul continent : la Pangée, entourée d’un seul océan : la Thétys.

Le Hainaut se situe quelque part au milieu de ce continent.

En Wallonie, plus aucun plissement n’adviendra désormais. Seuls quelques soulèvements vont encore modifier le relief .La chaîne hercynienne commence alors à s’éroder.

La faune terrestre s’enrichit essentiellement de reptiles, à la fois herbivores et carnivores, qui cohabitent avec les amphibiens.

A la fin de cette période, vers 251 Ma, une grande crise d’extinction va faire disparaître 50-75% des organismes marins. Les espèces terrestres résistent mieux, notamment les reptiles qui se diversifient, ainsi que la flore.

 

L’ère secondaire (ou mésozoïque) – 251-65 Ma

C’est l’ère du grand développement des reptiles sur les continents, des ammonites, bélemnites et foraminifères dans les mers.

Le climat est plus chaud.

252-201 Ma – le Trias

La chaîne hercynienne est complètement érodée. Il n’en reste, chez nous, que les sommets de l’Ardenne qui émergent, ainsi que le vieux massif du Brabant. Il n’y a pas de dépôt de sédiments en Wallonie pendant cette période.

Développement de forêts de conifères, de fougères et de cycadales.

Apparition des premiers dinosaures vers 225Ma. Ce sont des reptiles dont les membres postérieurs sont repliés sous eux pour leur permettre de se déplacer sur deux pattes.

201-135 Ma – le Jurassique

La Pangée (continent unique) commence de nouveau à se diviser en Laurasie au nord et Gondwana au sud.

C’est à ce moment que débute le troisième cycle de formation de montagnes en Europe : l’orogenèse alpine (constitution des Alpes et des Pyrénées) qui se prolongera à l’ère tertiaire.

Une nouvelle transgression marine a lieu, avec son lot de sédiments calcaires, ne laissant que quelques îlots émergés : le sud du massif de Brabant, le Condroz et l’Entre-Sambre-et-Meuse.

Le Hainaut, en Laurasie, est sous eau.
Le climat est très humide. Marécages et lagunes couvrent de très grandes surfaces. Les dinosaures représentent 95% des animaux terrestres et continuent à se diversifier.

135-65 Ma – le Crétacé

Les continents s’écartent de plus en plus.

L’océan Atlantique apparaît entre d’une part la future Amérique et d’autre part l’Eurasie et l’Afrique. De même s’ébauchent l’Antarctique, l’Australie et l’Océan Indien.

L’Europe occidentale (donc la Belgique) est toujours sous eau. Ce qui entraîne une nouvelle sédimentation marine et la formation de nouvelles roches.

Les Alpes s’élèvent.
Puis la mer commence à se retirer, laissant à nu des roches qui vont s’éroder.

Le bassin de Mons se forme par effondrement.

Les transgressions et régressions successives de la mer abandonnent des sédiments crétacés et principalement de la craie sur les bombements du Cambrésis, du Tournaisis et du Hainaut. Cette craie est une ancienne boue calcareuse, constituée à 80-90% de détritus de petits organismes marins (plancton, algues unicellulaires, …). 

C’est dans ces dépôts, au sud et à l’est de Mons (Baudour, Maisières, Saint-Denis, Obourg, Saint-Symphorien, Spiennes, Harmignies, Ciply, Mesvin, Cuesmes, Saint-Vaast, Trivières), qu’on va trouver divers types de craies calcareuses (par leur nature, leur couleur et leur contenu en phosphates). Ces dépôts datent de la fin du Crétacé (90-65Ma). Les craies blanchies des formations de Trivières, Obourg, Nouvelles et Spiennes appartiennent à l’étage Campanien du Crétacé (83-70 Ma), tandis que la craie phosphatée de Ciply relève du Maastrichtien (70-65 Ma). A Harmignies, la couche est épaisse d’une centaine de mètres et fut déposée en 6 à 7 millions d’années à raison de 1 à 3 mm par siècle.

A l’ouest du bassin de Mons se sont déposés des sédiments alluviaux et lacustres constitués de graviers, de sables, de marnes glauconieuses (qui cimentent des galets de roches, comme dans la région de Bellignies-Bavay), d’argiles divers (Bernissart, Harchies, Pommeroeul, Hautrage, Baudour) et de grès rouges ferrugineux (Wihéries).
Toutes ces couches de roches recouvrent les sédiments houillers du Carbonifère.

Dans ces couches, on a retrouvé de très nombreux fossiles. Parmi eux :

  • le Hainosaurus Bernardi (lézard du Hainaut) découvert dans une carrière de craie à Ciply-Mesvin, dont le squelette atteint 15m de long
  • Les Iguanodons, découverts dans une houillère à Bernissart. Ceux-ci furent en réalité piégés dans des gouffres formés par l’effondrement de grottes, dans les calcaires du Carbonifère inférieur.
  • Les Allopleuron hoffmanni qui sont des tortues géantes,  découvertes elles aussi dans la région.

Le climat est toujours humide et chaud. On est sous les Tropiques. Il n’y a pas de calotte glaciaire.

Les continents connus aujourd’hui commencent à s’individualiser.

Les premières plantes à fleurs apparaissent. Les dinosaures ont atteint leur plus grande diversification.

Les premiers mammifères, de petite taille, apparaissent vers 125 Ma. Ce sont des insectivores arboricoles.

Le crétacé se termine vers 65 Ma par une nouvelle grande crise d’extinction. Disparition de 75% des espèces animales, dont la totalité des dinosaures et des grands reptiles.

Les oiseaux en sont les seuls descendants. Les autres reptiles (serpents, lézards, tortues, crocodiles) ainsi que les mammifères (les placentaires plus que les marsupiaux) échappèrent au désastre.

Quelle fut la cause de cette extinction ?  Il n’y a aujourd’hui que des hypothèses (météorite au Mexique, glaciation, éruptions volcaniques violentes en Inde, …).
L’océan Atlantique s’ouvre complètement pendant cette période.

 

L’ère tertiaire (ou cénozoïque) – 65-4 Ma (millions d’années)
La plaque africaine continue à pousser vers le nord, accentuant l’orogenèse alpine.
C’est l’ère du grand développement des mammifères, qui sont devenus les espèces dominantes sur terre.

Pendant cette période, deux transgressions marines laissèrent encore des dépôts calcaires et sablonneux.

Un anticlinal se forma depuis le Cambraisis jusqu’au Boulonnais en traversant l’Artois. Au sud s’est formé le Bassin Parisien vers lequel il descend en pente douce. Au nord, il forme la plaine flamande avec une pente plus raide, traversée par l’Escaut et ses affluents de la rive gauche (Scarpe, Lys), ainsi que par l’Yser.

A la fin du tertiaire, le sol de la plaine flamande, autrefois couvert par la mer, est fait de sables et d’argiles qui comblent les golfes calcaires. L’érosion des roches par les eaux courantes n’a laissé que les monts flamands entre les  vallées (entre Lys et Escaut, entre Escaut et Dendre).

65-55 Ma – le Paléocène

Les continents continuent à dériver jusqu’à leur position actuelle. La mer se retire de plus en plus. Le massif du Brabant s’individualise à nouveau.

Le climat se refroidit.

La mer s’avance encore, jusqu’à la fine ligne brune dans le dessin qui suit.

Dans le Bassin de Mons, les sédiments continuent à se déposer (calcaires, sables, marnes, argiles). A l’est et au sud de Mons (entre Obourg et Harmignies), dans les dépôts crayeux du crétacé, se forment en grandes quantités des blocs de silex par silification de la craie calcaire, c’est-à-dire par transformation de certaines algues (diatomées) et d’éponges, riches en spicules (aiguilles) de silice, qui se mélangent à la craie déposée au crétacé. Ce sont ces silex qui feront la joie des premiers hommes de passage.

Des quartzites du Paléocène seront utilisés dans la construction (hôtel de ville de Mons, remparts de Binche), pour des mégalithes (Gozée), pour les polissoirs et les meules. C’est un matériau dur et résistant au temps.

Dans la région de Ciply-Mesvin-Cuesmes, c’est la période optimale de formation des galets crayeux phosphatés, exploités dans le complexe minier de la Malogne.

Dans la région de Grandglise-Stambruges se constituent les sablières (période : Thanétien, anciennement appelé Landénien). Mais en certains endroits, comme à Blaton, Quevaucamps et même Grandglise, des grès recouvrent le sable.

55-34 Ma – l’Eocène

Les mammifères continuent à se diversifier pour donner la plupart des ordres actuels de placentaires : rongeurs, carnivores, ongulés, cétacés, proboscidiens, …

Les premiers primates apparaissent. Le plus ancien fossile connu (Altiatlasius) a été découvert au Maroc. Il est vieux de 58Ma.

La mer qui s’avance encore vers l’ouest, jusqu’au ruisseau de Piéton, continue à déposer des argiles et des sables, comme dans le Centre (Morlanwelz, Hyon, Peissant). Les collines sablonneuses de Mons et des alentours (Panisel, Héribus) sont apparues à cette période dans la cuvette montoise.

34-24 Ma – l’Oligocène

Les primates se diversifient.

La mer envahit encore à plusieurs reprises le territoire de la Wallonie, déposant chaque fois des sédiments, mais ceux-ci seront érodés dans les périodes suivantes.

Le climat est tempéré. Les calottes glaciaires qui se forment font baisser le niveau des mers. Il fait sec. La savane remplace le milieu forestier et de nouveaux animaux « modernes » arrivent d’Asie.

A la fin de cette période, sous l’effet de l’orogenèse alpine, l’Ardenne et le Brabant « remontent », repoussant la mer.

23-5 Ma – le Miocène

Les continents et les océans tendent à atteindre leur position actuelle. Sauf l’Amérique du Sud qui est encore séparée de celle du Nord.

Les grandes chaînes de « jeunes montagnes » se constituent (Cordillère des Andes, Himalaya, Alpes, Pyrénées).

La Méditerranée apparaît pour séparer l’Europe de l’Afrique. La Basse Belgique et le Hainaut restent encore sous eau.

A partir de 17 Ma, le climat devient plus chaud et plus sec. Les animaux marins et terrestres sont assez proches des espèces actuelles. Ce sont les primates qui se développent le plus. On situe à 18 Ma en Afrique l’apparition du Proconsul, premier singe anthropoïde sans queue, ancêtre des hominidés.

Vers 8 Ma, survient une grande crise climatique avec sécheresse et désertification de grandes zones.

Le Grand Rift est-africain s’est constitué : à l’ouest une zone forestière tropicale et équatoriale, à l’est une zone sèche de steppes arbustives et de savanes à graminées. C’est probablement à cette période que se sont séparées les branches des grands singes africains actuels et des hominidés. Chez les seconds est apparue la posture redressée et la marche bipède. Les singes continuèrent à se développer dans l’ouest forestier humide. Les hominidés préférèrent les savanes plus sèches.

C’est dans ce contexte qu’est apparu il y a 7 Ma le plus ancien hominidé connu : Toumaï au Tchad, dans un environnement proche de celui qui règne à l’est du Rift.

5,3-2,5 Ma – le Pliocène

Les continents, à quelques dizaines de kilomètres près, ont atteint leur position actuelle. Les deux Amériques sont connectées. Alpes et Pyrénées achèvent leur développement en hauteur sous la pression de la plaque africaine contre la plaque européenne.

L’érosion a achevé son travail pour aboutir aux reliefs actuels. La Mer du Nord se retire de façon définitive de nos régions, mais couvre encore le nord du pays.

Les fleuves et les rivières qui s’y jettent prennent leur source en Artois (Lys, Scarpe, Escaut, Sambre) et dans l’Ardenne. Elles creusent des vallées peu marquées et largement évasées, formant des marécages, et se dirigent toutes vers le nord. La reconstitution qui suit est intéressante et semble indiquer que la Haine (dont on sait qu’elle coule d’est en ouest) n’existe toujours pas.

Il semble que de nouvelles poussées, liées à l’orogenèse alpine, continuent à faire monter le plateau brabançon, qui se continue vers le Hainaut (plateau d’Anderlues, crête qui sépare le bassin de la Haine et celui de la Sambre) et vers le Nord de la France (plateau de Bavay). Les vallées du Hainaut apparaissent alors telles que nous les connaissons aujourd’hui : la Haine sur toute sa longueur, les hauts courts de la Sambre, de la Senne et de la Dendre.

Le décor géologique est planté pour que les hommes de la préhistoire et ceux de l’histoire y vivent et y développent leurs activités : agriculture, élevage, industrie du bois, artisanat de l’argile, exploitation du silex (Obourg, Spiennes), de la pierre (quartzite, grès), de la houille, …Il n’y a malheureusement pas de minerai métallique en quantités importantes (or, argent, cuivre, étain, fer) dans le sous-sol hennuyer.

Quant au paysage (la faune, la flore), il va varier en fonction du climat. A la fin de l’ère tertiaire et au début du quaternaire, le climat est plus froid et sec. Les glaciers ont envahi l’Antarctique, l’Arctique et le Groenland. C’est la première glaciation qui commence.

La toundra et les forêts de conifères dominent en Europe du nord. Aux latitudes moyennes dominent des forêts d’arbres à feuilles caduques. Les faunes sont quasi actuelles, avec des espèces archaïques qui disparaîtront plus tard.

En Afrique, les hominidés se diversifient à l’est (Ethiopie, Kénya, Tanzanie), au sud (Afrique du sud) et au Tchad. Apparaissent, puis disparaîtront, des espèces dont certaines seront à l’origine des hommes. Passent ainsi des Ardipithèques, plusieurs espèces d’Australopithèques, dont la célèbre Lucy, et des Paranthropes.

Ils ont tous en commun de pouvoir se tenir debout, de pouvoir marcher (gauchement), mais d’encore grimper aux arbres. Ils vivent dans les savanes. Ils mangent ce qu’ils cueillent. Ils sont peu carnivores. Ils n’ont pas inventé l’outil. Ils resteront dans leurs régions et surtout ne s’aventureront pas hors d’Afrique.

Parallèlement, les grands singes, habitants des forêts équatoriales et tropicales, vont évoluer vers les formes connues actuellement (chimpanzés, gorilles, orangs-outangs, …), nos cousins en somme.

L’ère quaternaire – de 2,5 millions d’années à nos jours

C’est celle du développement du genre Homo, donc des humains.

Un homme est capable d’une adaptation à l’environnement, supérieure aux autres espèces animales. Avec le temps, plus il accumulera ces capacités de s’adapter, plus la partie antérieure de son cerveau va se développer.

Il invente l’outil. Au départ, c’est une pierre ramassée qu’il va transformer pour la rendre plus tranchante pour diverses tâches : découper les peaux et la viande, creuser le sol pour récolter des racines, casser des branches. Les premiers outils connus actuellement datent d’il y a 2.5 Ma.

Il est capable de transmettre ses connaissances par le langage articulé, grâce à une transformation de son larynx, qui résulte de sa capacité à se tenir debout.
Il nomadise et étend son territoire, génération après génération, pour chercher sa subsistance.

Il y a 2.000.000 d’années, il a conquis toute l’Afrique et en est sorti vers le Moyen Orient. Plus tard, vers 500-400.000, il “inventera” le feu.

L’ère quaternaire se divise aussi en périodes géologiques : le Pléistocène (de 2.588.000 à 11.430 ans avant le présent) et l’Holocène (de 11.430 ans à nos jours). Les trois périodes du Paléolithique (infra) correspondent au Pléistocène. Celui-ci est caractérisé, sur le plan climatique, par des alternances de glaciation et de réchauffement qui vont conditionner le sol (les sédiments fluviatiles et surtout les limons éoliens), le paysage et la faune animale, ainsi que la possibilité ou l’impossibilité pour les humains de vivre dans certaines régions.

Et c’est particulièrement le cas dans nos régions de l’hémisphère nord où l’on a compté, entre 600.000 et aujourd’hui, quatre glaciations majeures, séparées par des périodes interglaciaires.

Lors des glaciations, les glaciers vont s’étendre jusqu’ aux Pays-Bas, au nord de l’Allemagne et à la Grande-Bretagne.Le niveau des mers est bas. On peut passer à pied le Pas-de-Calais et le sud de la Mer du Nord vers la Grande-Bretagne.

Les vents sont puissants, secs et froids, érosifs. Ils drainent sur de grandes distances des poussières (« farines de roches ») qui finissent par se déposer sous forme de loess (limons) sur le sol de toute la Flandre et de la partie nord de la région wallonne.

Le paysage des plaines est fait de grandes steppes ouvertes. Quelques troupeaux d’animaux (rennes, chevaux, mammouths, bisons, …) les parcourent. Ces périodes glaciaires sont peu propices à la vie humaine, sauf en bordure des steppes. Les premiers hommes en Europe occidentale apparurent d’abord dans les zones méridionales, autour de la Méditerranée. C’était il y a environ 1 million d’années.

Lors des périodes interglaciaires, les glaciers se retirent vers le nord et le niveau des mers remonte. Lors du Pléistocène Inférieur (2.588.000 à 780.000), le climat a tendance à être chaud et humide. Le paysage est ouvert et arboré. Il est parcouru par des troupeaux d’équidés (chevaux), de cervidés (cerfs, chevreuils), de bovidés (bisons, aurochs), de canidés (chiens, loups, renards), de proboscidiens (mammouths, mastodontes), de félins (tigres à dents de sabre, lynx), d’ursidés (ours)…

Les premiers groupes humains à s’aventurer plus au nord, notamment dans nos régions, semblent le faire il y a 500.000 ans.

La dernière période glaciaire s’est terminée lentement entre il y a 18.000 ans et 10.000 ans. Commence alors l’Holocène qui correspond à une période interglaciaire qui se continue jusqu’à aujourd’hui.

Le réchauffement climatique et l’humidité qui l’accompagne dans les zones tempérées permettent le reboisement. La Grande Forêt Charbonnière commence à couvrir alors une grande partie de la Belgique du nord au sud et particulièrement la vallée de la Haine.

Aux périodes géologiques, les préhistoriens préfèrent une autre division, basée sur les types d’outils utilisés :

  • Le Paléolithique Inférieur (de 2.588.000 à 130.000), dominé par les Homo Habilis et les Homo Erectus (ainsi que diverses formes qui s’en rapprochent, dont les européennes). C’est à l’occasion d’un réchauffement climatique que les humains vont gagner le Moyen-Orient et le Caucase, et sans doute une partie de l’Asie. C’était il y a 1,8 Ma. On voit ensuite en Europe des Homo Erectus, qui évoluent vers Homo Heidelbergensis, à partir d’1Ma dans les régions méditerranéennes et vers 500-400.00 dans nos régions. Ce sont les premiers hommes à fouler le sol de l’actuelle Belgique.
  • Le Paléolithique Moyen (de 130.00 à 45.000). En Afrique, l’Homo Erectus évolue lentement vers notre ancêtre Homo Sapiens (homme moderne) qui commence à migrer vers 100.000 au Moyen Orient, puis en Asie et en Australie. Il fait alors trop froid en Europe pour qu’il s’y risque. En Asie, Homo Erectus évolue vers des formes qui disparaîtront. En Europe, Homo Erectus, devenu Homo Heidelbergensis, a évolué vers l’Homme de Neandertal qui domine cette période.
  • Le Paléolithique Supérieur (de 45.000 à 11.430 ans BP, “before present”, soit avant le temps présent). Les derniers néandertaliens disparaissent lentement en Europe jusqu’à 30.000. Toutes les formes archaïques disparaissent en Afrique et en Asie. L’homme moderne, Homo Sapiens, celui qui nous ressemble comme deux gouttes d’eau (sur le plan génétique et intellectuel, et non pas morphologique), les a supplantées sur tous les continents, dont l’Europe, à partir de 45.000, et l’Amérique (entre 30 et 15.000).

C’est pendant cette période qu’a lieu la dernière période glaciaire. Les hommes restent des nomades qui se déplacent au fil des saisons, comme les troupeaux qu’ils chassent, à la recherche de nourriture (animale et végétale) et de « logements » (les entrées de grottes et les abris sous roches).

  • En Europe, on décrit une période intermédiaire, le mésolithique (entre 9000 et 6000/5000 avant JC.). L’homme, toujours nomade, s’adapte aux nouvelles conditions climatiques moins rigoureuses. Ses déplacements sont moins importants. Il vit au bord des cours d’eau et en lisière de forêts. Celles-ci dominent dans nos régions. Il a diversifié ses méthodes de chasses.
  • Le néolithique signe la sédentarisation des humains qui inventèrent l’agriculture, l’élevage, l’habitation fermière, la poterie, le tissage. Cette «invention » commença au Moyen Orient très progressivement entre 10.000 et 6000 avant J.C., dans ce qu’on appelle le « Croissant fertile » (Palestine, Syrie, Mésopotamie), là où l’homme a pu trouver des espèces animales et végétales qu’il a pu domestiquer par sélection. Cette première grande révolution culturelle s’est alors répandue dans toutes les directions, et notamment vers l’Europe. Il a atteint nos contrées vers 5200.