Ville-Pommeroeul & Pommeroeul

Entité communale de Bernissart

Les deux villages, dont l’histoire est fortement liée, sont traités dans le même chapitre (il me manque les dates de séparation des deux communes, puis celle de leur fusion).

Le territoire

Superficie: 742 ha (Pommeroeul), ? (Ville-Pommeroeul)

Altitude: de 20 m (Haine) à 70m (bois)

Situation géographique : Le territoire des deux villages se situe dans la vallée de la Haine, sur sa rive droite. Pommeroeul dans la partie basse au bord de la rivière. Ville sur le versant nord.

Cours d’eau : la Haine et un ensemble de petits rus et de courants de draînage aménagés par l’homme (ruisseau des Fontaines, le Grand Courant, ruisseau des Chênes de Pouilleux, ruisseau des Prés de l’Eglise, rieu Coulon)

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : la partie basse était marécageuse et le versant boisé

Nature du sol : alluvionnaire, loess (bas), sablonneux (nord)

Nature du sous-sol : grès, schistes, houille

Préhistoire

Mésolithique (Homo Sapiens) : 

On aurait trouvé un harpon en os, de la culture du maglemosien (6800-5500).

Néolithique (Homo Sapiens) : 

On a ramassé sur le territoire des deux villages des objets datant de cette période.

  • Une pointe de flèche en os (XIXème siècle)
  • une hache polie (de type Spiennes) en 1975-1976 à la limite de Ville-Pommeroeul et d’Hautrage.
  • En 1994, lors de travaux de déblais du canal (J. Dufrasnes), on a trouvé une autre hache polie du néolithique moyen ou final.
  • Il en fut de même en 1992 près de la « Ferme du Marais » (J. Dufrasnes) : fragment de hache polie, éclat poli, ainsi que près de la « ferme de la chapelle ». Artefacts de la culture de Michelsberg (Dufrasnes).

Age du bronze 

Des vestiges de l’âge du bronze (sans précision) auraient aussi été exhumés du sol, notamment des outils en bois de cerf, lors de la construction de l’autoroute, près de la Haine.

Ages du fer :

C’est surtout à partir du deuxième âge du fer (entre 400 et 0, période pendant laquelle les Celtes Gaulois se sont installés dans nos régions) que les résultats de fouilles deviennent intéressants. Déjà, Mr Debove, au XIXème, évoquait une ferme portant le nom de « ferme de la Mottelette » à peu de distance d’une butte sur laquelle était un moulin à vent. Un champ s’appelait le champ de la Motte. Il en concluait à l’origine tumulus gaulois. 

Mais c’est en bord de Haine, lors des travaux de construction de l’autoroute Bruxelles-Paris, que les découvertes les plus intéressantes ont été réalisées. De cette époque gauloise, d’avant la conquête, datent des dépôts subaquatiques (« dépôts humides ») dans les alluvions de la Haine. On y a ramassé des armes (six épées en fer, pointes de lance) et des outils variés (haches, faux, couteaux, tisonniers, moitié d’une torque en or à âme en fer, des pièces d’harnachement). Des monnaies gauloises (rameaux A, potin, statère uniface  des Ambiens de la Somme du Ier avt.JC.) furent aussi trouvées.

Donc ce site de Pommeroeul présentait déjà un certain attrait avant la période romaine.

Antiquité gallo-romaine

A l’époque romaine, la chaussée Bavay-Blicquy croisait la Haine navigable (vers l’Escaut) au sud de l’actuel village d’Hensies, au lieu-dit « Malmaison ». Ce type de site favorisait l’implantation de petites agglomérations portuaires (portus) qui favorisaient le commerce et l’artisanat (boucherie, tannerie, …).

Déjà des fouilles anciennes avaient révélé quelques objets (lampe de terre cuite, urnes cinéraires, monnaies romaines). 

En 1975, on découvrit à peu de distance de là, lors des travaux d’aménagement de la Haine pour la construction de l’autoroute et la dérivation des eaux de l’ancien canal Mons-Condé, au lieu-dit “Pont-Cocu”, dans des anciens marais, pas loin de la Haine, des vestiges gallo-romains d’une grande importance (fouilles M. Vynckier):

  • des structures d’habitations artisanales du Ier siècle de notre ère : des poutres, des pieux, des éléments de plancher
  • des tessons de céramiques en terre sigillée (donc importées) et des fragments de tuiles (indices de constructions)
  • des objets en fer : clous, gaffes, harpons, tisonniers, couteaux, ciseaux, … qui sont des instruments de mariniers
  • des objets en bois (coffres, boîtes, gobelets)
  • des armes (pointes de lance, épées dans leurs fourreaux, poignards, sabres)
  • des fibules en bronze pour l’habillement
  • des vases en verre
  • des monnaies (potins gaulois IIème-IIIème apr.J.-C.)
  • des cornes de bovidés en très grand nombre (tannerie?, abattoir?)
  • surtout cinq barques d’environ 5m creusées d’une pièce (monoxyles) dans des chênes, dont une grande péniche gallo-romaine (18m sur 2.8m) relativement bien conservée, faite de poutres assemblées (actuellement exposée à Ath) – datation : 188 (bateau III), 178 (IV)
  • des briques de tourbe
  • des sandales cloutées en cuir.
  • un atelier de bronzier

Certains ont émis l’idée qu’un ancien vicus, à cet endroit, fut surpris par une grave inondation brutale ou une bataille  au I ou IIème siècle, car des ossements humains ont aussi été retrouvés là, comme si des hommes avaient été surpris par le phénomène destructeur. Par la suite, le site aurait donc été abandonné.

Des prospections ont été reprises en 1985-1989, sur les déblais du canal, permettant de retrouver encore plusieurs objets gallo-romains : notamment des statuettes en bronze (J. Dufrasnes), dont une Minerve (déesse tutélaire des artisans).

En d’autres endroits du village, Mr Jean Dufrasnes (archéologue amateur travaillant pour le Service wallon d’archéologie), a, dans ses prospections, fait d’autres découvertes :

  • près de la « Ferme du Marais », en 1992, il a dégagé des indices d’un établissement gallo-romain (tegulae, tessons de céramique commune, fragment de meule)
  • dans un champ près de la « Ferme de la Chapelle », en 1991: des vestiges de construction gallo-romaine en deux sites distants de 100m
  • sur le site « Les Prés de Thulin », en 1992, à 500m au sud de l’autoroute : indices d’un petit établissement gallo-romain (fragments de tuiles et tessons de céramique commune)
  • sur le site de « La Canarderie », en 1999-2000: des éléments de construction gallo-romaine (fragment de tuiles, tessons de céramique commune, fragment de meule)
  • dans un champ sans construction : des monnaies (as, sesterce, sesterce d’Hadrien, sesterce de 269-274 donc plus récent), des fibules romaines (Ier et IIème)

(Je ne sais pas situer ces sites sur le plan. Aide?)

Ce qu’on peut conclure et imaginer à partir de tous ces éléments, c’est qu’au croisement de la chaussée romaine et de la Haine, sur les actuels territoires d’Hensies (lieu-dit “Malmaison”), Pommeroeul et Montroeul-sur-Haine (champ Franoé), une petite agglomération est née à proximité d’un débarcadère, attirant quelques artisans (tanneurs, bouchers, bronzier, …), que des établissements gallo-romains existaient dans les environs immédiats, sans doute des petites exploitations agricoles.

Aucune fouille ne permet pour l’instant d’imaginer une villa romaine typique.

Des hommes, sans doute des Nerviens, vivaient sur ce territoire, déjà avant la conquête romaine, ce qui permettrait de croire qu’avant la chaussée romaine préexistait un chemin d’une certaine importance. D’après les datations, le portus aurait pu disparaître au cours du second siècle, mais des monnaies plus récentes, trouvées dans les environs, indiqueraient une présence humaine jusqu’au moins le milieu du IIIème siècle, période des premières invasions barbares.

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

En 2004, 2006 et 2008, Mr Jean Dufrasnes, toujours dans ses pérégrinations exploratrices, a découvert: trois fibules ansées mérovingiennes à quelques mètres l’une de l’autre, provenant sans doute de tombes bouleversées par des labours, pouvant dater de la fin VII-début VIIIème siècle.

Aucun indice d’habitat, comme c’est souvent le cas pour cette période. Mais présence probable de Francs dans la seconde partie de la période mérovingienne, sans que l’on puisse affirmer, comme souvent, une continuation dans le temps de la présence et d’activités humaines dans ces villages.

Deuxième Moyen-Age – le village

Aucun élément ne permet de préciser dans le temps la chronologie des faits, probablement entre la fin du IXème et le XIème siècle.

Deux noyaux d’habitat légèrement distants l’un de l’autre se formèrent. Ville (-Pommeroeul) et Pommeroeul se trouvaient au nord de la Haine et faisaient partie du Pagus de Burbant jusqu’au milieu du XIème siècle, quand toute cette région entre Haine et Escaut fut rattachée au comté de Hainaut. Un hameau de Pommeroeul s’appelait d’ailleurs “Bourbant” et était la propriété de deux clercs nommés Gilbert et Régnier qui y firent édifier une chapelle qui fut consacrée en 1082 par Gérard II, évêque de Cambrai.

Première mention: 845

Toponymie (anciennes orthographes) :

  • Pinneroeul (1186)
  • Pomeriolum (1211)
  • Pumeriaux (1262)
  • Pommeroeul (1497)
  • Peumeroel (1599)

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :

Ce mot serait dérivé du latin “Pomariolus” ou « Pommorum brolium » , signifiant « petit verger de pommiers » (selon la légende).

Pour Ville : dans un diplôme de Charles le Chauve en 854, la localité nommée Villa est mentionnée en confirmation de possessions de la cathédrale de Tournai. « Villa » fait référence aux grands domaines carolingiens qui apparurent au VIIIème siècle et connurent leur plein développement au IXème siècle.

Epoque de son apparition: Xème ou XIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine et la Haine

sources d’eau ou cours d’eau: la Haine et les rus évoqués plus haut. Le ruisseau des Fontaines devait passer dans l’enceinte du château.

source de bois: le versant de la vallée était boisé

proximité d’un lieu de pouvoir: le château de Ville (à la place de la gare actuelle)

Paroisse

Chaque village eut sa paroisse et son église propre. Dédiée à Notre-Dame à Pommeroeul et à Saint-Brice à Ville.

En 1090, le hameau de Bourbant fut séparé de la paroisse de Ville et soumis au dîmage du monastère de Crespin.

Mais en 1110, une seule communauté paroissiale fut décidée pour les deux villages. En 1119, elle fut rattachée à celle d’Hautrage, déjà citée en 1095,  dépendant des mêmes autorités.

En 1158, Baudouin IV, comte de Hainaut, jugea un différend entre le monastère de Crespin et Théodorique de Ville au sujet des dîmes prélevées par Crespin.

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Chièvres

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants, pour les deux communautés) donné à l’abbaye de Saint-Ghislain en 1119 par l’évêque de Cambrai.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale
  • Autorité supérieure: comté de Hainaut
  • Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

Une seigneurie féodale aurait aussi été constituée dans chaque village. Il est même probable que le territoire de Ville était partagé entre une partie liée à Pommeroeul (seigneurie principale décrite ci-dessous) et une autre (petite?) partie liée à Hautrage et Villerot (voir le chapitre d’Hautrage).

On cite en 1199, un certain  Guillaume Cotteriau, seigneur de Pommeroeul, probable exploitant agricole, qui donna des biens situés à Goy  (Ghoy) à l’abbaye de Mont-Saint-Martin

Les seigneurs de Ville furent des barons au service du comte. A la sortie du Moyen Age, Pommeroeul, Ville et Hautrage ne formaient qu’une seule seigneurie. Il s’agissait, en partie, d’un arrière-fief de l’alleu de Walcourt, situé à Boussu, inféodé au Comte de Namur en 1211 (Th. Bernier).

La seigneurie principale

Rapidement Ville et Pommeroeul ne formèrent qu’une seule seigneurie. Plusieurs familles la détinrent :

  • La famille d’Avesnes
  • La famille de Strépy (Harchies)
  • La famille de Berlaimont/Berlaymont
  • La Maison de Luxembourg
  • La Maison de Ligne, jusqu’à la fin de l’Ancien Régime

Maison d’Avesnes

Après que le Burbant, devenu marche d’Ename, fut rattaché au Hainaut en 1049, de grandes luttes eurent lieu pour y conquérir les pouvoirs locaux, entre les comtes de Hainaut, ceux de Flandre, les Chièvres, les Enghien, les Avesnes, … Ces derniers furent sans doute les plus remuants. Ils réussirent à s’implanter en quelques lieux (Condé, Leuze) et furent repoussés en d’autres (Chièvres, Lessines, Grammont).

Thierri d’Avesnes ( ?-1106). Il est le premier seigneur de Ville connu. Petit-fils de Wédric « le Sor » (le roux) et fils de Wédric « le Barbu », il s’imposa sans doute à Ville, après avoir hérité de Condé et de Leuze. Aussi belliqueux que ses ancêtres, il fut en guerre contre le comte Baudouin II, dont il assaillit les villes de Mons et de Maubeuge, avec leurs abbayes respectives. Il finit assassiné en forêt de Mormal. 

Il est possible que le comte Baudouin III ait détaché la seigneurie de Ville des autres possessions des Avesnes et l’ait donnée à la famille voisine de Strépy-Harchies, dont le sire Jean Hugues était un conseiller des comtes.

Maison de Strépy

A cette époque, le seigneur de Strépy et d’Harchies était Hugues de Strépy (v1090/1100-1121). Comme ses ancêtres, il était un conseiller des comtes, donc de Baudouin III. Lui succédèrent :

  • Allard II de Strépy (v1120/1130-apr1136 ou 1204), fils du précédent
  • Allard III de Strépy (v1150-1175), fils du précédent. Il devint aussi seigneur d’Audregnies par mariage.
  • Baudouin III de Strépy (1140-v1200 ; v1175-1200 ; 1150-1209), fils d’Allard III
  • Allard IV de Harchies (v1170-apr1224/1234), fils aîné de Baudouin. Ce seigneur de Strépy, Harchies, Ville et Audregnies devint également seigneur de Quévy par mariage. Il était le type même du preux chevalier médiéval au service du comte (Baudouin VI/IX avec qui il partit à la quatrième croisade, puis Ferrand de Portugal), du roi de France Philippe-Auguste (pour lequel il combattit en Normandie contre Richard Cœur de Lion. Il partit également à la croisade contre les Albigeois).
  • Gérard 1er de Strépy (ou Allard dit « Gérard ») (v1220/1230- apr.1265), fils du précédent. Il ajouta à ses domaines Hautrage et Villerot, fieffé par la comtesse Marguerite. Il est probable que la partie de Ville qui était attachée à ces domaines revint aussi à ce moment dans le grand domaine de Ville.
  • Arnould I de Strépy (1240, Harchies- ?), fils du précédent. Celui-ci partagea son domaine, fit se son aîné Arnould le seigneur d’Harchies et de son cadet Gérard le seigneur de Ville, d’Audregnies et d’Hautrage.
  • Gérard II de Strépy (v1275- ?), fils du précédent. A sa mort, il partagea aussi ses domaines. Il fit de son aîné Guillaume le seigneur d’Audregnies et de son puîné Gérard le seigneur de Ville, Hautrage et Villerot.
  • Gérard III de Strépy-Ville (1310- ?),  fils d’Arnould. Personnage important, puisqu’il fut Grand Bailli de Hainaut, il n’eut qu’une fille, Alix de Strépy-Ville, héritière des trois villages.

Maison de Berlaimont

Il s’agit d’un village situé entre Le Quesnoy et Avesnes-sur-Helpe. Ses seigneurs étaient les descendants de Gilles de Chin, le « tueur du dragon de Wasmes ». Il s’agit ici d’une branche cadette.

  • Jean 1er de Berlaimont-Ville  ( ?-1366) devint seigneur de Ville, Hautrage et Villerot en épousant Alix de Strépy-Ville. Il fit bâtir la première église de Pommeroeul en 1360.
  • Gérard II de Berlaimont, dit « Persidès de Ville » ( ?- 1410), fils des précédents. Il fut Grand Bailli du Hainaut.
  • Gérard III de Berlaimont ( ?- ?), fils du précédent
  • Gérard IV de Berlaimont ( ?- 1473), fils du précédent. Il n’eut qu’une fille héritière, Marie.

Maison de Luxembourg

  • Jacques 1er de Luxembourg-Fiennes (1445-1487). Membre d’une branche cadette des Luxembourg. Il devint seigneur de Ville, Pommeroeul, de Hautrage, Villerot après avoir épousé Marie de Berlaimont (1455-1529). 
  • Jean II de Luxembourg-Fiennes (1477-1508), fils des précédents. Il n’eut pas d’enfant et ce fut sa sœur Philipotte qui lui succéda.

    D’Adrien de Montigny (fin XVIème)

Famille de Ligne (XVI-XVIII)

  • Antoine « le Grand Diable » de Ligne (1474-1532), fils de Jean IV. Il devint seigneur de Ville, Pommeroeul, Hautrage et Villerot après avoir épousé Philippote de Luxembourg-Fiennes.
  • Jacques de Ligne (1503-1552), fils du précédent
  • Georges de Ligne ( ?-1579), fils du précédent
  • Philippe de Ligne (1533-1583), fils de Jacques, frère de Georges
  • Lamoral Ier (1563, Beloeil-1624, Bruxelles),  fils du précédent
  • Florent de Ligne (1588-1622), fils de Lamoral I
  • Albert-Henri (1615-1641), fils aîné de Florent de Ligne
  • Claude-Lamoral I (1618, Beloeil-1679, Madrid), son frère
  • Henri-Louis-Ernest de Ligne (1644-1702), fils du précédent
  • Antoine Joseph Ghislain (1682-1750), fils d’Henri-Louis- Ernest de Ligne
  • Claude Lamoral II (1685-1766), frère du précédent
  • Charles-Joseph Lamoral de Ligne (1735, Bruxelles – 1814, Vienne), fils de Claude-Lamoral II

Il fut le dernier seigneur féodal, déchu de ses droits par les révolutionnaires. A ce moment, dans la vallée de la Haine, les Ligne possédaient, parfois depuis longtemps, Beloeil, Ellignies-Sainte-Anne, Quevaucamps, Granglise, Stambruges, Préaux (Harchies), Hautrage, Ville et Pommeroeul, Montroeul-sur-Haine et Thulin, Amblise (Crespin), Villerot, Tertre et Baudour. En plus d’autres fiefs disséminés ailleurs.

D’Adrien de Montigny
La commune

Il semble que Ville et Pommeroeul n’obtinrent que tardivement, en 1415, une charte-loi leur permettant de s’ériger en commune.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

  • Département: Jemappes
  • Canton: Quevaucamps
Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Ath
  • Arrondissement judiciaire: Tournai
  • Canton: Quevaucamps
  • Entité communale depuis 1977: Bernissart
Economie

Elle fut longtemps essentiellement agricole et forestière.

Des légendes couraient dans le passé pour décrire la prospérité et la richesse de ces territoires, enviés par ceux qui habitaient au-delà de la rivière. Ainsi ce « jardin aux pommes d’or » gardé par des êtres fabuleux (d’où le nom du village).

Au hameau du « Pont de Thulin », furent construits en 1837 des hauts fourneaux et des fours à coke,  faisant partie des « S.A. Hauts-Fourneaux du Borinage », dont le siège était à Pommeroeul. Ils devinrent les « Hauts-Fourneaux de Pommeroeul ».  On en transporta les produits vers la gare de Thulin à partir de 1844. Le charbon de cette région était de piètre qualité, si bien qu’ils fermèrent en 1863 et que la société fut dissoute en 1866.

Le Pont de Thulin sur l’ancien canal
Voies de communication importantes

Routières :

  • L’ancienne chaussée romaine de Bavay à Blicquy passait à la limite des villages de Pommeroeul et d’Hensies
  • Au nord de Ville-Pommeroeul passait un ancien chemin qui reliait Mons et Saint-Ghislain à Condé et Tournai, au moyen-âge. Cette voie était peut-être déjà empruntée bien avant la conquête romaine.
  • La chaussée de Bellevue, qui, au moyen âge, descendait de Dour par Thulin et rejoignait le bois de Pommeroeul. 
  • Le boulevard sud de Wallonie (entre Dour et Nimy), longeant la zone industrielle d’Hautrage à Ghlin, fut construit au milieu des années ‘1960. 
  • L’autoroute Bruxelles-Paris, construite au début des années ‘1970, et son embranchement vers Tournai.

Navigables :

  • La Haine, qui garda son importance commerciale jusqu’à la construction des canaux
  • Le canal Mons-Condé, achevé en 1818 et fonctionnel jusqu’à la fin des années ‘1960
  • Le canal de Nimy à Blaton et Antoing, construit dans les années ‘1950
  • Et celui de Blaton à Condé par l’écluse d’Hensies, actuellement non fonctionnel

Chemin de fer :

  • La ligne St-Ghislain-Tournai
Patrimoine ancien

Un château, entouré de douves (visible sur l’album de Croÿ, fin XVIème siècle) était situé à la limite des deux villages de Ville et Pommeroeul. Il fut détruit par Louis IX en 1478, puis reconstruit à la charnière XV-XVIème siècle dans le type Renaissance (avec des baies). Des vestiges étaient encore visibles au début du XXème. La gare y fut implantée.

Patrimoine actuel

Eglise Notre-Dame (Pommeroeul). De style gothique, elle fut bâtie entre le XIIIème et le XVème siècle. Elle est caractérisée par son clocher penché. Le plan est celui d’une église-halle, où les trois nefs sont d’égale hauteur. Sa construction s’étala sur quatre siècles, ce qui explique les divers styles. Sa fondation est entourée de la légende miraculeuse de Josse le Baretteur (Audin et Cambier). Une statue de la Vierge fut l’objet de pèlerinages, reconnus par l’évêque de Cambrai. On y trouve le tombeau de Gérard, seigneur de Ville et de Pommeroeul. Un oratoire fut aussi élevé en 1776 sur la maison du miraculé.

Eglise St Brice à Ville. Elle date de 1415.

Harchies

Entité communale de Bernissart

Le territoire

Superficie: 1077 ha

Altitude: de 15 à 35 m

Situation géographique : le territoire de Harchies est situé dans la vallée de la Haine sur son versant nord.

Cours d’eau : de nombreux rus affluents de la Haine

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : le sud devait être marécageux et le versant boisé (faisant partie de la forêt allant de Bonsecours à Saint-Denis-en-Broqueroye).

Nature du sol : sablonneux

Nature du sous-sol : grès, schistes, houille

Préhistoire

A l’époque où il n’y avait pas de villages ni d’infrastructures pour la circulation, la Haine, de part et d’autre de son cours, était un axe qui devait être emprunté par les hommes nomades du paléolithique et plus tard par les sédentaires du néolithique. A hauteur d’Harchies et de Blaton, il existe une zone de passage privilégiée vers les vallées situées plus au nord.

Néolithique

Mrs Parent et Dufrasnes ont inspecté à de nombreuses reprises le sol d’Harchies et y ont fait plusieurs découvertes (CAW).

Dans une zone au nord-ouest du village (lieux-dits « Le Catignier », « Vieille Voie », « Au-dessus du Rieu », « Couture du Coucou »/zoning industriel), ils ont (1985-2015) trouvé un important matériel lithique s’échelonnant du paléolithique moyen (culture du moustérien) à l’âge du bronze.

Neuf sites différents (2015) ont ainsi été prospectés. Y ont été trouvés :

  • de nombreuses (plus de 40) pointes de flèches en silex de divers types d’époque mésolithique finale et néolithique (type Spiennes ou Ghlin)
  • des couteaux
  • un fragment de poignard
  • des fragments de haches polies

Au sud du village, dans la zone « Etang de Préau » (2001, S. Parent) : pointes de flèches en silex, racloir, lames.

Dès le XIXème, on y avait déjà trouvé sur son sol des haches de silex, dont la spécificité n’est pas précisée.

Age du bronze :

Dufrasnes, 2010, champs à la sortie du village vers Blaton :

  • Un tranchet en bronze à languette (bronze final III)
  • un rasoir

En 1879, furent ramassés des « lingots » de bronze, en forme de côtes (comme dans le sud de la Belgique à la fin du bronze ancien et à Caix dans la Somme datant ici du bronze final).

Une nécropole avec des fragments d’épées de bronze a été individualisée (Bronze ancien ou moyen – S. Parent, 2006)

Ages du fer – Premier âge du fer (culture de Hallstatt). Sur le site de la « Maison Cauchies », Mr Leblois répertoria des indices d’une nécropole hallstattienne (Leblois 2011) (entre 825/800 et 725/700). Ces sépultures contenaient quatre épées de bronze brisées rituellement (1913, 1914, 1926, 1955), des bouterolles en fer, des objets de toilette (pincette à épiler, cure-oreille, rasoirs), ainsi que des éléments de parure rares (épingles, anneaux, bracelets).

Antiquité gallo-romaine

La chaussée romaine Bavay-Blicquy-Velzeke (Gand) traverse le village de Harchies du sud au nord.

Au sud, à Hensies-Malmaison et Pommeroeul sur la Haine, se trouvait un vicus et un embarcadère avec une zone artisanale. A peu de distance, au champ Franoë de Montroeul-sur-Haine, on a exhumé des vestiges d’un habitat avec un ou des ateliers. A Harchies, des découvertes du XIXème siècle mentionnent :

  • deux tumulus
  • des monnaies
  • des débris de vases

Plus récemment, ont été trouvés :

  • au lieu-dit « Au-dessus du Rieu » (nord-ouest du village, 1983) ce qui a été un établissement gallo-romain, dont témoignent des fragments de tegulae, des pierres étrangères au terrain, de rares tessons dont un fragment de coupe en terre sigillée importée de Gaule centrale, fin Ier-IIème siècle. Au même endroit, on avait trouvé au XIXème deux tuyaux de conduction de l’eau (Leblois, 1971/73). Ce site a malheureusement été perturbé par la construction du canal Nimy-Blaton.
  • Au « Hameau du Coucou » (Leblois, 2006): des tessons gallo-romains (d’autres avaient déjà été trouvés au même endroit en 1955-56 – de la seconde moitié du Ier siècle). Mais aussi beaucoup de céramique post-médiévale.
  • près de l’« Etang de Préau », dans un champ à l’ouest du village (S. Parent, 1986): des vestiges gallo-romains (fragments, de tuiles, céramique commune et sigillée, des substructions, fosse-dépotoir) de la première moitié du IIème siècle. Il semblerait qu’il y exista un établissement romain relativement prospère  depuis le milieu du Ier siècle jusqu’au milieu du IIIème, moment des premières invasions germaniques. Il est difficile de préciser s’il s’agissait d’une villa, mais les propriétaires pouvaient se permettre d’acheter de la céramique de luxe importée.
  • Sur les « Blanches Terres » (J. Dufrasnes, 1998) : traces d’occupation gallo-romaine (fragments de tuiles)
  • Sur le site « Les Sartis » (au sud du village, à proximité de la Haine – site essarté dans la seconde moitié du XIIIème, dans le hameau du Catillon, ayant eu une certaine importance au Moyen Age), (J. Dufrasnes, 2008). Traces discrètes gallo-romaines : tessons de céramique commune du IIIème siècle et sigillée d’Argonne de la fin du IIème, des fragments de tegulae, un fragment de meule, un sesterce de Faustine la Jeun(e décédée en 175). Ce site aurait été occupé entre la fin du IIème siècle et la fin du Haut-Empire. Il s’agissait d’un petit habitat modeste dans une zone humide peu propice à l’agriculture, mais propice à l’élevage, à 2km du vicus portuaire de Pommeroeul.
Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

Des vestiges mérovingiens auraient peut-être été trouvés (J. Dufrasnes). Sans précision.

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: ?

Toponymie (anciennes orthographes) : ?

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :   Harchies  aurait tiré son nom de “arca” qui signifie “pont romain” construit à cet endroit ou encore une borne délimitant une propriété.
D’après Max Servais, Harchies  serait dérivé de Hariciacum : villa de Harico.

Epoque de son apparition: entre le Xème et le XIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine Bavay-Blicquy, un probable vieux chemin datant du néolithique longeant la Haine par le nord

sources d’eau ou cours d’eau: la Haine

source de bois: à pied sec sur le versant commençait la forêt

proximité d’un lieu de pouvoir: le château seigneurial local

Paroisse dédiée à Notre-Dame

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Chièvres

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Saint-Ghislain en 1138 par Nicolas, évêque de Cambrai.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Harchies se situait dans un premier temps dans le Pagus du Brabant (Burbant ou comté de Chièvres), au nord de la Haine, avant d’être rattaché en 1049 au comté de Hainaut.

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

On trouvait sur l’actuel territoire de Harchies plusieurs seigneuries :

  • la seigneurie principale (infra)
  • la seigneurie du Préaux (infra)
  • le fief du Petit-Grandglise: un fief ample consistant en rentes seigneuriales, qui relevait de la cour féodale de Hainaut et appartenait, au XIXe siècle, aux comtes de Mérode  de Waroux.

La seigneurie principale

Harchies fut une baronnie au service des comtes de Hainaut, devant à ceux-ci hommage et soutien à la guerre (ost). Les familles qui ont fait fonction de seigneurs de Harchies sont :

  • celle de Strépy (aussi appelée de Strépy-Harchies) qui a également détenu Ville, Pommeroeul, Hautrage, Audregnies et Bellignies (jusque vers 1440)
  • celle des Mouton de Harchies, par achat (jusque vers 1600)
  • celle des Mérode (jusqu’en 1793)

Maison de Strépy (-Harchies)

Le premier seigneur connu semble être Allard I « le Grand » de Strépy (v1040/1050- ?) mentionné, comme les autres membres de sa famille, parmi les conseillers et chevaliers barons des comtes, et notamment au milieu du XIème siècle, à l’époque de la comtesse Richilde, de son époux Baudouin I et de leur fils Baudouin II. Il n’est pas sûr qu’Harchies fut un alleu (propriété familiale) de cette famille. Il s’agit plus probablement d’un fief attribué pour services rendus, probablement détaché d’un grand domaine comtal (anciennement royal) qui comprenait à proximité la grande seigneurie de Blaton (donnée à la même époque aux de Caudry), la petite seigneurie de Bernissart (donnée plus tardivement aux Auberchicourt d’Ostrevent) et les domaines attribués à la famille de Mons (Hautrage, Villerot, Baudour, Boussu, Hainin, Dour).

Lui succédèrent :

  • Hugues de Strépy (v1090/1100-1121), fils du précédent. Vers 1106, il lui fut attribué aussi la seigneurie de Ville par Baudouin III.
  • Allard II de Strépy (v1120/1130-apr1136), fils du précédent
  • Allard III de Strépy (v1150-1175), fils du précédent. Par mariage, il devint également seigneur d’Audregnies.
  • Baudouin III de Strépy (1140-v1200), fils du précédent. Ce preux chevalier se mit au service du roi de France Philippe-Auguste contre l’Anglais Richard Cœur-de-Lion.
  • Allard IV de Harchies (v1170-apr1224/1234), fils aîné de Baudouin. L’exemple-type du chevalier médiéval, qui participa à la Quatrième Croisade (avec le comte Baudouin VI/IX), à la guerre contre Philippe-Auguste, qui se mit au service du comte Ferrand et du roi d’Angleterre Jean-sans-Peur, notamment en Normandie – fut-il présent à Bouvines en 1214 ?. Il partit aussi à la Croisade contre les Cathares, aux côtés de Simon de Montfort en 1213. Par mariage, il devint également seigneur de Quévy et à ce titre pair du Hainaut.
  • Gérard 1er de Strépy (ou Allard dit « Gérard ») (v1220/1230- apr.1265), fils du précédent
  • Arnould I de Strépy (1240, Harchies- ?), fils du précédent
  • De ses deux fils, Arnould II de Strépy-Harchies (1265, Harchies – apr1314) hérita d’Harchies, alors que son frère Gérard hérita de Ville, de Pommeroeul, d’Hautrage et d’Audregnies. 
  • Arnould III de Strépy-Harchies ( ?-1339), fils du précédent, devint grand bailli de Hainaut.
  • Jehan  I de Strépy-Harchies (v1310-1355), fils du précédent, également grand bailli de Hainaut et diplomate au service du comte Guillaume II d’Avesnes.
  • Jacques 1er de Strépy-Harchies ( ?- ?). Il n’eut pas d’héritier et vendit la seigneurie de Harchies vers 1440 à Jacques Mouton

Famille des Mouton de Harchies (même liste généalogique)

  • Jacques I Mouton « de Harchies » (V-1497).  Bourgeois de Tournai, déjà titulaire de la seigneurie de Tourcoing, qu’il revendit, il aurait fui le royaume de France et se serait réfugié en Hainaut où il obtint le titre de bailli des bois du Hainaut et s’acheta les seigneuries de Harchies, dont il releva le château de ses ruines, et de Bellignies.
  • Jean Mouton de Harchies, fils du précédent. Il n’eut pas de descendance.
  • Jacques II Mouton de Harchies ( ?- ?), neveu du précédent. Il servit le duc Philippe « le Bon » de Bourgogne, par ailleurs seigneur de Blaton. Il n’eut pas non plus de descendance.
  • Gérard I Mouton de Harchies (v1485- ?), petit-fils de Jacques I par une branche cadette. Seigneur de Harchies et de Bellignies par héritage, il devint encore seigneur de Sars (-la-Bruyère) par mariage.
  • Gérard II Mouton « de Sars »  de Harchies, fils du précédent
  • Charles I Mouton de Harchies ( ?-apr1563), fils du précédent
  • Charles II Mouton de Harchies ( ?-apr1600/1638), fils du précédent. A sa mort, il lui restait deux filles, dont l’une, Marguerite Mouton était dame héritière de Harchies.

    D’Adrien de Montigny (fin XVIème)

Famille de Mérode

Elle est originaire de Rhénanie-Wesphalie en Allemagne, connue dès le XIIème siècle. Avec le temps, elle s’est divisée en plusieurs branches. C’est dans celle des Mérode-Waroux que l’on trouve les propriétaires d’Harchies.

  • Jean I de Mérode ( ?-1630/1635). Comte de Mérode et de Waroux (près de Liège), il devint seigneur de Harchies en épousant Marguerite Mouton de Harchies. Lui succédèrent :
  • Jean II ( ?-1633), fils du précédent, mort sans postérité
  • Ernest de Mérode (v1595-1665/1677), frère du précédent
  • Albert Eugène Joseph de Mérode (v1620-1655), fils du précédent
  • Jérôme  de Mérode (1648-1695, Cadix), fils du précédent, mort sans descendance
  • Adrienne Ernestine de Mérode ( ?-1723), sœur du précédent. Héritière entre autres de Harchies, célibataire et sans enfant, elle légua ses domaines à un membre issu de la branche cadette des Mérode-Westerloo.
  • Jean Philippe Eugène de Mérode (1674-1732). Il était également seigneur de Grandglise.
  • Philippe Maximilien Werner Mathias de Mérode (1729-1773), fils du précédent
  • Guillaume Charles Ghislain de Mérode (1762-1830), fils du précédent. 

En 1794, il perdit tous ses droits seigneuriaux. Il resta propriétaire de certaines terres, où il fit effectuer des sondages à la recherche de houille entre 1804 et 1808. Sans succès.

La Seigneurie de Préau

Il s’agit d’un hameau de 85ha avec étangs, au sud-ouest du village et en grande partie sur Bernissart. Il y existait une chapelle annexée à un manoir seigneurial, alimentée par les dîmes de plusieurs villages voisins. C’était un fief ample tenu du comte du Hainaut qui entrait dans la grande seigneurie de Blaton (voir ce chapitre).

Il fut tenu par plusieurs familles consécutivement :

  • la Maison d’Enghien
  • La maison comtale de Hainaut
  • la maison de Werchin, dont les membres titulaires détenaient le titre de sénéchal de Hainaut
  • la maison de Barbençon
  • la maison de Melun-Epinoy
  • la maison de Ligne
  • celle peu connue d’Amberchies ( ?)

Famille d’Enghien

Arnould 1er d’Enghien (v1227-avt1295), fils de Sohier I d’Enghien, partisan des Avesnes dans la querelle opposant ceux-ci aux Dampierre pour l’attribution des comtés de Flandre et de Hainaut. Il semble que ce soit Jean I d’Avesnes (fils de Bouchard et de la comtesse Marguerite, père du futur comte Jean II d’Avesnes) qui aurait attribué les domaines liés à la grande seigneurie de Blaton à un fils cadet des Enghien. Lui succédèrent :

  • Arnould II d’Enghien ( ?-1315), son fils
  • Arnould III d’Enghien (v1285-avt10/1323), fils du précédent. Il eut une fin de vie malheureuse, car il fut emprisonné pour dettes, semble-t-il. Le comte Guillaume I « le Bon » en 1323 négocia sa libération, probablement en échange de ses seigneuries qui revinrent donc dans le domaine comtal.

Maison comtale de Hainaut

Il est assez difficile de suivre la lignée des seigneurs de Préaux. Il serait logique qu’elle suive celle de Blaton, dont ce hameau est une dépendance. Auraient ainsi été titulaires du Préaux (voir Blaton pour plus de détails):

  • Guillaume I « le Bon » d’Avesnes (1304-1337), comte de Hainaut.
  • Philippe V de Valois, roi de France, son beau-frère
  • Guillaume II d’Avesnes, fils de Guillaume I, futur comte, neveu du précédent
  • Louis I de Nevers (1304-1346), comte de Flandre, gendre de Philippe V. Histoires de famille et surtout d’alliances importantes en ces temps troublés où se prépare la Guerre de Cent Ans entre France et Angleterre.
  • Louis II de Male (1346-1384), fils du précédent et comte de Flandre
  • Philippe I « le Hardi » de Bourgogne (1342-1404), gendre du précédent, duc de Bourgogne et comte de Flandre.

Maison de Werchin

On ne sait pas quand la seigneurie de Préaux fut détachée du grand domaine de Blaton. En tout cas, c’était attesté en 1410. Pour rappel, les Werchin (village au sud de Valenciennes) détenaient par héritage le titre honorifique (mais rémunéré) de sénéchal de Hainaut. En fin de XIVème siècle, ils étaient liés par plusieurs mariages avec les Enghien. Ont pu être seigneurs de Préaux :

  • Jacques II de Werchin ( ?-1383)
  • Jean II de Werchin ( ?-1415), fils du précédent, tué à la bataille d’Azincourt, sans postérité. Ses biens passèrent successivement à sa sœur Jeanne de Werchin ( ?-1442), décédée sans enfant, puis à son autre sœur Philippotte de Werchin.

Maison de Barbençon-Werchin

Philippotte de Werchin épousa en 1399 Jean III de Barbençon-Jeumont (1354-1415), d’une lignée cadette de la famille de Barbençon (près de Beaumont), proche des comtes. Lui-même seigneur de plusieurs domaines, dont Roubaix, Jeumont et Erquelinnes, il hérita par mariage de la seigneurie de Werchin et du titre de sénéchal de Hainaut qu’il transmettra à ses descendants. Au service des ducs de Bourgogne, il fut Grand Bailli de Hainaut et chambellan du duc Jean « sans Peur » de Bourgogne. C’est probablement ce dernier qui l’en fieffa. Leur succédèrent :

  • Jean IV de Barbençon-Jeumont (1402, Verchain-1470), leur fils. Chambellan du duc Philippe « le Bon » de Bourgogne.
  • Jean V de Barbençon ( ?-1472), fils du précédent, resté célibataire
  • Jacques III de Barbençon ( ?-1478), frère du précédent
  • Nicolas de Barbençon-Werchin (v1470-1513), fils du précédent
  • Pierre de Barbençon-Werchin (v1497-1556/1557, Tournai), fils du précédent. Celui-ci n’a que trois filles qui se répartirent l’héritage.

Maison de Melun

Hugues de Melun-Antoing (1520-1553). Prince d’Epinoy, connétable de Flandre au service de Charles-Quint, chevalier de la Toison d’Or, il devint en 1545 par mariage avec Yolande de Barbençon-Werchin (1521-1593) seigneur de Werchin et de Préaux, ainsi que sénéchal de Hainaut.

D’Adrien de Montigny (fin XVIème)

Maison de Ligne

Lamoral I de Ligne (1563-1624) épousa Anne-Marie de Melun ( ?-1634), héritière de Werchin et de Préaux. Aux nombreux titres et domaines déjà tenus par la famille (prince de Ligne et du Saint-Empire, prince d’Amblise, baron de Beloeil, seigneur de Stambruges, Ville et Pommeroeul, Thulin, Montroeul-sur-Haine, Hautrage, …), ce mariage ajouta Werchin et Préaux, ainsi que le titre de sénéchal de Hainaut. Ses successeurs furent :

  • Florent de Ligne (1588-1622), fils du précédent
  • Albert-Henri de Ligne (1615-1641), fils aîné de Florent de Ligne – sans postérité
  • Claude-Lamoral I de Ligne (1618, Beloeil-1679, Madrid), frère du précédent
  • Henri-Louis-Ernest de Ligne (1644-1702), fils du précédent
  • Antoine Jospeh Ghislain (1682-1750), fils du précédent – sans postérité
  • Claude Lamoral II (1685-1766), frère du précédent
  • Charles-Joseph Lamoral de Ligne (1735, Bruxelles – 1814, Vienne), fils de Claude-Lamoral II.  Il fut le dernier seigneur féodal de la Maison de Ligne.

Préaux redevint un hameau, dont les terres appartinrent au XIXème siècle à la famille Flescher.

Evènements importants

Le château de Harchies fut détruit en 1478 par les troupes françaises de Louis XI.

La commune

Les habitants de Harchies auraient obtenu une charte d’échevinage dès 1386.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

Département: Jemapes

Canton: Quevaucamps

Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Ath
  • Arrondissement judiciaire: Tournai
  • Canton: Quevaucamps
  • Entité communale depuis 1977: Bernissart
Economie

Elle est essentiellement agricole, surtout sur les terres plus fertiles du nord du village. 

Exploitation de la houille

Entre 1804 et 1808, des sondages furent effectués à l’initiative du comte de Mérode, sans succès à cause des inondations incessantes du puits. 

Deux puits d’extraction fonctionnèrent plus tard, après avoir dominé ce gros inconvénient par un système de congélation du sol et des pompes à vapeur:

  • Puits n°1, démarré en 1899
  • Puits n°2, en 1900

Le Coron du Charbonnage fut bâti à proximité, avant 1904. Fermeture des deux puits en 1968. Vestige : le puits du coron. Ouverture d’un Musée de la Mine et de la Mémoire ouvrière dans un ancien atelier.

Patrimoine ancien

Château-fort. Ses origines sont peu connues. Il fut rebâti en 1444, puis pris et détruit par Louis XI en 1475. Il fut reconstruit au XVIème par Jacques de Harchies et plus tard par les Mérode. Il fut à nouveau détruit en 1675.

Patrimoine actuel

Eglise Notre-DameLe clocher actuel date de 1762, mais le reste fut reconstruit en 1836. Monument funéraire de Jacques de Harchies

Les marais de HarchiesRéserve naturelle classée.

Bibliographie

La seigneurie de Harchies, par Thierry Harchies (blog), 2005

Blaton

Entité communale de Bernissart

Le territoire

Superficie: 1042 ha. Autrefois, au Moyen Age, le territoire de la commune de Blaton était quatre fois plus étendu (Il était encore de 2319ha en 1833), parce qu’il comprenait des terres de quelques villages avoisinants (Bonsecours, Bernissart, Stambruges).

Altitude: La partie centrale du village (altitude 40m) occupe une vallée encaissée entre deux collines de bruyères, les Grandes Bruyères (55m) et le Mont des Groseilliers (65m).

Situation géographique :  Le territoire de Blaton se situe sur le versant nord de la vallée de la Haine.

Cours d’eau : Cette vallée correspond au cours du Ruisseau de la Fontaine Bouillante. Celui-ci prend sa source à Stambruges, traverse Grandglise, puis Blaton où il est en partie voûté et laisse aller une partie de ses eaux dans le canal Blaton-Ath, avant de poursuivre sa course à travers Bernissart et former le Courant Macou qui se termine dans la Haine à Condé à son confluent avec l’Escaut.

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : boisé sur le versant

Nature du sol : sablonneux

Nature du sous-sol : grès, pierre calcaire

Préhistoire

Lors de pérégrinations prospectives, Fr. André et S. Parent, ont dans les dernières décennies pu récolter du matériel préhistorique datant de différentes périodes, sur différents sites (« Petite Bruyère », « Grande Bruyère », « Mont du Crapaud », « Mont des Groseilliers ») :

  • Du paléolithique moyen (culture lithique moustérienne)
  • Du paléolithique supérieur
  • Du mésolithique
  • Du néolithique moyen
  • De l’âge du bronze

Essentiellement des outils de silex taillé : des burins, des fragments de haches polies, des grattoirs, des perçoirs, des pointes de flèches), ainsi que de la céramique grossière

Antiquité gallo-romaine

L’historien Jacques de Guyse (XIVème siècle) évoque la présence de deux temples romains sur le territoire de Blaton : le Fanum Mercurii, à proximité du Mont Brutus (Bonsecours ?) et Ablatonas, à proximité du « Haut-Bois ». Jules César, avant de mater la révolte des Eburons, aurait, selon lui, placé ses cohortes à Blaton et à Chièvres. Ces affirmations proviennent en fait d’interprétations des textes des Commentaires de Jules César et n’ont jamais reçu la moindre confirmation archéologique ni historique.

Une chaussée romaine, reliant Bavay à  Blicquy et la mer du Nord, passait à proximité sur l’actuel territoire de Grandglise. Certains évoquent des chaussées secondaires, dont une passerait au lieu-dit « Malot ». Il est possible que le vallon dans lequel apparut plus tard le village ait servi de point de passage entre la vallée de la Haine et d’autres vallées plus au nord et notamment vers Tournai, seule ville proche d’époque romaine, située au croisement d’une autre chaussée importante (Boulogne-Bavay-Cologne) et de l’Escaut. On aurait découvert à Antoing en 1867 des éléments ayant appartenu à cette chaussée secondaire.

On a découvert sur le territoire de Blaton des vestiges d’époque gallo-romaine.

  • Des substructions d’habitat sur le Mont des Groseilliers, parfois interprétées comme ayant appartenu à un castrum
  • Des substructions aussi là où la rue de Condé fut interrompue par le creusement du canal Pommeroeul-Antoing, au XIXème siècle). On y a évoqué une villa gallo-romaine nommée « Cerania ».
  • Au lieu-dit « Mury-Marais » (vers Basècles) : une nécropole gallo-romaine
  • En divers endroits du village et sur le « Haut-Bois » furent ramassées de nombreuses pièces de monnaie, s’étalant dans le temps entre la deuxième moitié du Ier siècle au début du IVème siècle (Néron, Faustine, Postumus, Gallien, Probus, Gallus et Constantin)
  • En 1857, dans la carrière « Duchâteau-Bougny » furent récoltés de nombreux objets : fioles en verre, bols, bouteilles, médailles, céramique dont de la sigillée importée
  • On a évoqué des fours à chaux de cette époque près du chemin de Condé
  • Une petite statuette en bronze d’une « Eve » (femme dénudée avec une pomme) fut ramassée par S. Parent en 1985.

Un habitat d’une certaine importance (probable villa) exista donc pendant une bonne partie de la période gallo-romaine.

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

Une communauté franque habita sur le sol de Blaton. En témoignent :

  • Une mention dans un acte daté de 652 (nous n’avons pas connaissance du contenu de celui-ci)
  • Une nécropole mérovingienne fouillée au Mont St-Antoine (1937, 1965-1966, 2008), où furent retrouvés des dépôts funéraires : 50 tombes avec armes, poteries et parures (VIIème)
  • Des objets divers de cette époque ramassés en divers endroits : des vases encens sous l’église de Blaton, une céramique médiévale au « Coron Courtil », des bracelets, urnes, fusaïole, scramasaxe

On ne peut pas affirmer une continuité entre l’habitat romain et l’habitat mérovingien. A cette époque, Blaton était situé à proximité d’axes reliant quelques grands centres reconnus à l’époque, outre ceux évoqués à l’époque romaine :

  • Condé-Chièvres
  • Mons et Saint-Ghislain – Tournai

Dans un paragraphe plus bas, nous rapportons quelques évènements qui se seraient passés à Blaton, selon l’historien Jacques de Guyse (XIVème siècle) qui rapportait des textes plus anciens aujourd’hui disparus. Ces événements, s’ils s’avèrent exacts, signifieraient qu’il exista à Blaton une résidence appartenant aux rois mérovingiens (fisc royal) ou à une famille aristocratique proche de ceux-ci (on y évoque Sainte Aye, deuxième abbesse de Mons et parente de Sainte Waudru).

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 652

Toponymie (anciennes orthographes) :

  • Ablaton, 652 (ACSS  Belgii)
  • Ablatonae, 880 (d’après de Guyse)
  • Via Platonis, 1040, première mention officielle dans un diplôme de l’empereur Henri III (« P » en place de « B »).
  • Blaton, chartes de 1139, 1143, 1155, 1175, 1184, 1212
  • Balto
  • Blatum, 1140, 1177, 1180 (bulle du pape Lucius III)
  • Blathum, 1151, 1157, 1183, 1186 (bulle du pape Urbain III)
  • Blathon (1175)

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :

  • Ablatonas, nom gallo-romain à suffixe celtique, provenant de Ablatum signifiant « détruit, renversé », destructions pouvant être attribuées à Jules César ou aux Barbares…
  • Blato-duno, contracté en Blattuno – le radical signifierait « fleur »
  • Baldum, blé, fleur de farine
  • Ablatonis (latin) transformé ensuite en Ablatonas (= cabanes).
  • Ablato pouvant être un nom propre (selon Chotin), celui d’un ancien seigneur du lieu

Epoque de son apparition: Par rapport à ces habitats d’époque mérovingienne, il est difficile de placer la période où une communauté villageoise s’est concentrée sur le territoire.

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine à Grandglise, les chemins médiévaux évoqués lus haut

sources d’eau ou cours d’eau: le ruisseau de la Fontaine Bouillante

source de bois: le versant de la vallée était boisé (forêt de Bonsecours à Saint-Denis-en-Broqueroye)

proximité d’un lieu de pouvoir: château local

Paroisse dédiée à tous les Saints

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Chièvres jusqu’en 1803, Péruwelz jusqu’en 1968, puis Beloeil

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Saint-Ghislain en 1138 par Nicolas de Chièvres, évêque de Cambrai. Blaton est ensuite cité dans plusieurs actes papaux confirmant cette possession : Innocent II (1139), Lucius III (1183), Urbain III (1186), Célestin III (1191), Innocent IV (1252, après une contestation de Jacques de Condé).

En 1701, les abbés de St-Ghislain abandonnèrent la dîme et l’obligation d’entretenir le lieu.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): châtellenie d’Ath

Le village, implanté au nord de la Haine, a pu faire partie à l’origine du Pagus de Brabant (Burbant, comté de Chièvres). Il semble que lorsque l’empereur Othon créa la marche de Valenciennes, Blaton y était incorporée, avant d’être réunie vers 1050 au comté de Hainaut.

Seigneuries

Le village, comme dit plus haut, beaucoup plus étendu qu’aujourd’hui, fut le siège d’une seigneurie importante qui faisait partie des six pairies de Valenciennes. Cela signifie que ses titulaires faisaient partie de l’entourage des comtes. A de nombreuses époques, ce furent les comtes eux-mêmes.

Outre le territoire de Blaton, son seigneur exerçait ses droits féodaux sur d’autres villages :

  • Une partie de Bernissart (jusqu’en 1601)
  • Grandglise (jusqu’en 1545)
  • Quevaucamps (id)
  • Wadelincourt (de 1381 à 1545)
  • Feignies, près de Maubeuge (id)
  • Le hameau de Préaux
  • Stambruges (qui serait passé aux Condé, puis aux Ligne)
  • Dosies
  • Le Maisnil (France)

Le chroniqueur Jacques de Guyse, d’après les traditions fabuleuses, fit de cette commune une ville qui disputait le premier rang à Cambrai.

Les seigneurs de Blaton

Les premiers seigneurs mentionnés sont tardifs, ce qui laisserait penser que les territoires évoqués plus haut faisaient partie d’un grand domaine que les comtes de Hainaut possédaient en propre et où ils exerçaient directement leurs droits féodaux. Une résidence, peut-être fortifiée, y accueillit à l’époque de la comtesse Richilde au XIème siècle, des hôtes importants.

Il semble que ce soit à partir du milieu du XIIème siècle qu’ils les donnèrent en fief à des familles qui s’y succédèrent, tout en se réservant le droit de se les réapproprier, si l’on s’en tient à la liste des seigneurs qui se succédèrent. 

Maison de Caudry

Ce sont les premiers seigneurs de Blaton. Caudry était une seigneurie du Cambrésis. On est assez mal documenté sur cette famille qui devait être proche du pouvoir comtal. Sans doute pour services rendus à celui-ci, obtinrent-ils le grand fief de Blaton. Le moine Pierre d’Oultreman, dans son Histoire de Valenciennes, en 1688, cite quelques seigneurs de Caudry sans préciser lequel pourrait avoir été le premier à posséder Blaton et ses dépendances.

Il semble que ce soit Arnould de Caudry « de Blaton ». Cité en 1143, soit à l’époque où le comte Baudouin IV « le Bâtisseur » organisait militairement et économiquement son comté en y faisant construire des fortifications et en créant des villes nouvelles. Il était pair de Valenciennes. Le premier château lui semble dû, construit à proximité de l’église actuelle. Cette installation pourrait donc s’inscrire dans la politique comtale de défense du comté, d’autant plus que nous sommes ici assez près de l’Escaut, au-delà duquel se trouvait le comté de Flandre, vassal du roi de France, considéré alors comme ennemi. Sont également cités dans les décennies qui suivirent :

  • Nicolas de Caudry, cité en 1137, 1154, 1160 et 1184 dans des actes d’asservissement.
  • Adam de Caudry (1207)

En l’absence des seigneurs, un bailli les remplaçait.

Maison de Hainaut

Lorsque le comte Baudouin VI/IX de Hainaut et de Flandre partit pour la quatrième croisade, où il fut élu empereur de Constantinople et où il laissa la vie en 1205, il nomma son frère, Philippe le Noble (1175, Valenciennes-1212), comte-marquis de Namur (1195-1212), comme régent du comté et tuteur des deux jeunes filles du comte, les futures Jeanne et Marguerite « de Constantinople ».

C’est un personnage assez troublant. Selon d’Oultreman, historien de Valenciennes, il se serait emparé du château et de la seigneurie de Blaton en 1203 et en aurait chassé les Caudry. Il résida souvent au château de Blaton. Il épousa en 1210 à Valenciennes la fille du roi de France Philippe-Auguste (suzerain de la Flandre). Il laissa à celui-ci la tutelle des deux filles. Il semble qu’il ait eu beaucoup de péchés à se faire pardonner, puisque, tombé malade en 1212, il fit de grandes pénitences et donna beaucoup de ses biens, avant de se retirer dans le château comtal de Valenciennes où il mourut peu de temps après. 

Il n’avait pas, à son décès, d’héritier. Sa sœur, Yolande de Hainaut, qui avait épousé Philippe de Courtenay, hérita du marquisat de Namur. Quant à la seigneurie de Blaton, elle retourna probablement dans les possessions des comtes de Hainaut.

Maison d’Enghien

On ne sait pas très bien quand, une des comtesses, Jeanne ou Marguerite, à moins que ce ne fût le premier fils de cette dernière, Jean I d’Avesnes, usurpant alors ses droits en ces temps troublés de luttes entre les Avesnes et les Dampierre, donna en fief Blaton et ses dépendances à la famille d’Enghien.

En 1254, lorsque Marguerite, en guerre contre les Avesnes, chercha à donner son comté de Hainaut à Charles d’Anjou (frère du roi de France Louis IX), Sohier I d’Enghien (v1205-1261) lui refusa l’hommage. Sohier était lié familialement à Jean I d’Avesnes. C’est une explication, pas une certitude. A son décès, Sohier partagea ses domaines. C’est ainsi qu’un des fils cadets, Arnould I d’Enghien (v1227-avt1295), devint seigneur de Blaton et de ses dépendances. Lui et ses descendants servirent les Avesnes. Lui succédèrent :

  • Arnould II ( ?-1315),  fils du précédent
  • Arnould III (v1285-1323), fils du précédent. Pour des problèmes de dette, il s’est vu enfermer par Amauri de Melun. Le comte de Hainaut négocia sa libération.  Il décéda sans postérité masculine en 1323 ou 1324. Ses possessions revinrent à la famille comtale, selon un acte signé par Gérard de Liedekerke et Marguerite de Cantaing, mère du décédé. 

Maison de Hainaut (1324-1333)

  • Guillaume I « le Bon » d’Avesnes (1304-1337) était alors comte de Hainaut. Il céda la seigneurie de Blaton à son beau-frère, Philippe V de Valois, roi de France. Celui-ci le rétrocéda en 1328 à son neveu, Guillaume II d’Avesnes, le fils de Guillaume I et futur comte.
  • En 1333, ce même Guillaume II rendit le fief à son père, Guillaume I. Et dans le même acte, celui-ci le repassa au comte de Flandre, Louis I de Nevers (1304-1346) gendre de Philippe V.

Histoires de famille et surtout d’alliances importantes en ces temps troublés où se prépare la Guerre de Cent Ans entre France et Angleterre.

Maison de Flandre (1333-1545), puis de Bourgogne et d’Autriche

Les comtes de Flandre furent un temps vassaux des comtes de Hainaut pour ce fief de Blaton. Ce qui donna lieu à des contestations. Après la mort de Louis de Nevers en 1346, la comtesse Marguerite, qui avait hérité de son frère Guillaume II le comté de Hainaut et épousé Louis de Bavière, saisit la seigneurie de Blaton. Mais elle fit des propositions à Louis II de Male (1346-1384) nouveau comte de Flandre, qui récupéra le bien de son père.

Les mariages qui vont suivre vont faire passer le comté de Flandre dans un premier temps et le comté de Hainaut dans un second temps dans le giron des ducs de Bourgogne d’abord, puis des archiducs d’Autriche ensuite. Furent donc considérés comme comtes de Flandre et seigneurs de Blaton :

  • Philippe I « le Hardi » de Bourgogne (1342-1404), dès 1369, par mariage avec Marguerite de Male, héritière de Flandre.
  • Jean I « sans Peur » de Bourgogne (1371-1419), dès 1405
  • Philippe II « le Bon » de Bourgogne (1396-1467), dès 1419. Ce dernier devint aussi comte de Hainaut en 1433.
  • Charles I « le Téméraire » de Bourgogne (1433-1477), dès 1467
  • Marie de Bourgogne (1457-1482) qui a épousé Maximilien de Habsbourg, archiduc d’Autriche (1459-), dès 1477.

Divers personnages

En récompense pour services rendus aux archiducs Maximilien, Philippe « le Beau » et Charles-Quint, la seigneurie de Blaton fut confiée à de fidèles serviteurs.

  • En 1480 à Jean de Salazar, conseiller des ducs de Bourgogne, avant son retour en Espagne, en récompense de services rendus à Maximilien et Marie. 
  • En 1497 à Philippe de Bourgogne (v1450-1498, Bruges), fils d’Antoine, bâtard de Bourgogne, et donc petit-fils de Philippe le Bon. Amiral de Flandre, gouverneur d’Artois Seigneur également de La Roche, de Beveren et de la Veere. Chevalier de la Toison d’Or. Et enfin évêque d’Utrecht en 1510, raison pour laquelle il remit Blaton à son suzerain.
  • En 1510 à Jean de la Croix, receveur-fermier des terres et seigneuries de Blaton. Ce qui fut approuvé en 1516 par Maximilien d’Autriche.
  • En 1515 à Charles de Lannoy (1482-1527), seigneur de Senzeilles, officier de Charles Quint. On lui attribue la capture du roi François I de France à la bataille de Pavie en 1524. A sa mort en 1527, la seigneurie de Blaton revint dans les propriétés du souverain régnant.

Maison d’Espagne

En 1527, Charles Quint (1500-1558) était souverain des Pays-Bas, archiduc d’Autriche, roi d’Espagne, empereur de Germanie et… seigneur de Blaton (et de bien d’autres lieux !). Ce souverain décida alors de partager le grand domaine de Blaton.

En 1545, il donna à Philippe de Croÿ, duc d’Aerschot, et à son fils aîné Charles, prince de Chimay : Quevaucamps, Granglise, Feignies et Wadelincourt, pour être tenues en un seul fief, sous le nom de « seigneurie de Quevaucamps », à relever du comte de Hainaut, en échange de Landrecies, où l’empereur comptait améliorer les fortifications aux frontières du royaume de France, avec qui il était en guerre. 

Le reste du territoire, soit Blaton, le hameau de Préaux et une partie de Bernissart, constitua un fief nettement plus petit et probablement de moindres revenus. Continuèrent à le gérer :

  • Philippe II d’Espagne (1527-1598), à partie de l’abdication de son père Charles-Quint en 1555
  • Les archiducs Isabelle d’Espagne (1566-1633) et son époux  Albert d’Autriche (1559-1621) en tant que gouverneurs des Pays-Bas espagnols à partir de 1598.

Personnages divers

  • En 1627, Isabelle d’Espagne, devenue veuve, vendit la seigneurie de Blaton à Don Carlos Colonna, diplomate au service de son frère, le roi Philippe III d’Espagne. Puis par ventes successives, le domaine passa à :
  • Albert de Mérode (v1620-1655), dès 1644. Comte de Mérode, Waroux et baron d’Harchies.
  • Jérôme Albert de Mérode (1648-1695), fils du précédent. Militaire au service du roi d’Espagne, il vendit à son tour Blaton en 1682 à des membres de la famille La Cattoire, soit :
  • Ghislain François de la Catoire ( ?- ?), cité comme seigneur de Blaton
  • Jean-Henry-François de la Catoire (1688-1750), frère ou neveu du précédent. Ecuyer, seigneur de Blaton et d’autres lieux (Rameignies). Il épousa en 1722 à Blaton Anne Hoyois (1699-1752), dont il eut plusieurs enfants. Il est probable qu’à la mort de leur mère, ils aient revendu le domaine.
  • On mentionne aussi un Joseph de la Cattoire, cité en 1728 comme écuyer et seigneur de Blaton.

Maison de Croÿ

En 1718, Alexandre de Croÿ acheta déjà le Haut-Bois.

Blaton (partie belge du domaine qui s’étendait aussi en France dans le bois de Bonsecours) fut acheté en 1752 par Anne Emmanuel de Croÿ (1718-1784), duc de Croÿ, prince de Solre, également seigneur de Condé et de Bernissart et officier au service des rois de France. 

Il transmit son héritage à son fils Anne Emmanuel Ferdinand François de Croÿ (1743-1803). C’était un grand chasseur qui aimait séjourner à Blaton et chasser le sanglier dans la forêt de Bonsecours. C’est lui qui fit tracer « l’Allée Royale » dans cette forêt, depuis le Mont des Groseillers jusqu’au château de l’Hermitage à Condé.

Il fut le dernier seigneur féodal de Blaton.

Carte de Ferraris (XVIIIème)
Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

  • Département: Jemappes
  • Canton: Péruwelz
Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Tournai
  • Arrondissement judiciaire: Tournai
  • Canton: Péruwelz
  • Entité communale depuis 1977: Bernissart
Evènements et faits marquants sur le sol de la commune

Selon de Guyse (historien du XIVème siècle, qui ne pratiquait pas la critique historique sur les écrits antérieurs à son époque,  y compris les récits légendaires) :

628         Assassinat de Brumulphe, neveu de sainte Aye, deuxième abbesse de Mons, par des généraux de Dagobert.

673         Assassinat du maire du palais Ebroïn par un rival.

885         Sac et pillage d’un castrum en 885 par les Vikings.

Ces évènements signifieraient que Blaton était le siège d’un palais mérovingien d’une certaine importance en Neustrie, peut-être sur un domaine fiscal (royal).

1048      Séjour de la suite du pape Léon IX et de la comtesse Richilde à Condé et Blaton. C’est sans doute vraisemblable et cela tendrait à prouver qu’il existait dès cette époque une résidence comtale sur un domaine appartenant aux comtes.

1072      Attaque du village de Blaton (et sans doute de la résidence comtale) par Robert le Frison, en guerre contre la comtesse Richilde. 

1096      Les prédicateurs de la première croisade furent de passage à Blaton. 

1184      Le comte Baudouin V, en guerre contre le duc de Brabant, plaça une garnison au château de Blaton. 

1186      Une grosse tempête endommagea fortement l’église et des habitations.

V1300   Mariage de Marie d’Enghien, fille du seigneur Arnould II d’Enghien, dame de l’Escaille, avec Robert le Borgne, seigneur de Robersart, tué en 1328 à Cassel.

1348      La grande peste passa et laissa à Blaton comme dans toute l’Europe un nombre impressionnant de victimes.

1402      Un incendie ravageur brûla presque toutes les maisons du village.

1422      Passage des garnisons de Guise, venant de Bavay et pillant Blaton, tout en laissant 80 morts dans la population (épisode dans la Guerre de Cent Ans).

1478      Occupation de Blaton par les troupes de Louis XI, en guerre contre Marie de Bourgogne. Elles  dévastèrent toute la région en pillant les châteaux de Ville, Harchies, Stambruges, Bernissart et Blaton.

1576      Une épidémie mystérieuse fit 140 morts dans le village.

De 1579 à 1584, toute la région fut livrée aux belligérants des guerres de religion : huguenots des républiques calvinistes de Tournai et d’Audenarde, troupes espagnoles et wallonnes, mercenaires allemands. En 1580, les Tournaisiens pillèrent les villages de Péruwelz, Blaton et environs. Période difficile pour les paysans incapables de cultiver leurs champs. Des incendies ravagèrent le château, l’église et de nombreuses maisons. 

1625      De grosses inondations, suite à des pluies torrentielles, eurent lieu. 

1792      Le 23 octobre, une garnison autrichienne, établie à Blaton, repoussa une avant-garde des troupes françaises du général Demouriez. Ces dernières venaient de l’Hermitage et s’avançaient dans l’Allée Royale vers Blaton. Des renforts autrichiens stoppèrent encore ces avancées pendant trois jours, avant de décrocher et de laisser les soldats français s’installer à Blaton et obliger la population à les loger et les nourrir. Ils prirent ensuite la direction de Jemappes, malgré quelques escarmouches locales avec des régiments wallons.

Par la suite, plusieurs habitants de Blaton s’illustrèrent dans les armées wallonnes, puis napoléoniennes.

1798      Le curé Debay refusa de prêter serment à la République Française et se fit confisquer sa cure. Il dut se cacher dans le village. Les biens ecclésiastiques furent vendus comme biens publics ou confisqués.

1914      Fin août, on vit des uhlans allemands à cheval investir le village et se livrer au pillage. L’occupation qui suivit vit son lot de réquisitions et de déportations. Un camp de prisonniers fut aménagé. Un autre camp d’exercices le fut aussi pour les soldats allemands à la Grande Bruyère.

1918      Lorsque les Allemands se retirèrent, ils se livrèrent à des destructions (moulin de la Petite Bruyère, minage de ponts). Blaton fut libérée le 9 novembre par des Anglais.

1940      Le 13 mai, les environs de la gare furent bombardés. La population évacua vers la France. Des soldats français qui reculaient se livrèrent aussi à quelques pillages, avant l’arrivée des Allemands. L’occupation connut comme ailleurs ses déportations, réquisitions, ravitaillements, des faits de résistance et des sabotages.

1944      Le maïeur collaborateur fut assassiné en juillet. Le 4 septembre, les troupes américaines délivraient le territoire. 

En 1984, Bernissart et Feignies jumelèrent.

Economie

Longtemps, l’agriculture fut l’activité principale des villageois (cultures des céréales, du  houblon au XVIIème siècle, des plantes médicinales).

Du sous-sol, on a extrait le grès (« pierre de sable »), depuis au moins le XVIIIème siècle, pour la construction de routes, de maisons et de murs de clôture en pierre sèche.

Au XIXème siècle, on trouvait à Blaton :

  • Des fours à chaux (déjà cités en 1777)
  • Des fours à coke, reliés au charbonnage de Bernissart
  • Une fabrique de tuyaux et de pannes
  • Des usines textiles et bonneteries
  • Un moulin à scier le marbre en 1833.

Le sous-sol de Blaton fut aussi exploité par les charbonnages de Bernissart.

Voies de communication

Longtemps Blaton dépendit des vieilles routes citées plus haut. 

Des canaux furent creusés :

  • Antoing-Pommeroeul, 1826, pour contourner les taxes douanières imposées par les Français après 1815 sur le canal de Mons-Condé, indispensable à l’exportation du charbon borain.
  • Blaton-Ath (vers la Dendre canalisée), 1868
  • Nimy-Blaton-Péronnes, 1951-1955

Le chemin de fer reliait Mons à Tournai et à Ath. Des gares furent construites en 1865 et 1883, et réaménagées en 1960.

La route de Quevaucamps fut pavée en 1886.

Blaton fut desservie par une autoroute en 1971-1973.

Patrimoine

Restes d’un ancien châteauIl fut érigé probablement au XI ou XIIème siècle, peut-être sur une ancienne résidence fortifiée plus ancienne. Il se trouvait sur un terrain proche de l’ancienne maison communale. Il fut restauré entre 1394 et 1402, puis encore en 1433. Il fut pillé en 1579 par les huguenots et incendié avec le village en 1582. Il disparut avant la Révolution. Il fut remplacé par la maison communale en 1740 et par des habitations.

Eglise de tous les Saints. Une des plus anciennes du Hainaut, construite à la fin du XIème-début XIIème siècle, époque des premiers seigneurs et de la naissance du bourg, pour remplacer un ancien oratoire devenu trop petit. Elle est en style roman scaldien et gothique précoce. On y a utilisé les moellons de grès local et de Grandglise. Son plan est en croix latine à trois nefs de six travées. Il persiste des éléments romans primitifs: voûte sous le clocher, le transept avec voûte en berceau. Le reste est couvert d’une charpente en bois. La nef comporte des arcs brisés annonçant la transition roman-gothique. On y trouve des chapiteaux “tournaisiens” à feuilles stylisées (palmes, coeur). Le choeur, autrefois gothique, fut restauré en néo-roman et agrandi en 1872-1876. La tour carrée de la croisée, assez élancée pour un édifice roman, date du XIIIème siècle et fut surélevée aux XV-XVIème. On y ajouta une flèche et un bulbe au XVIIème. D’autres restaurations eurent lieu au XXème siècle. La dernière, effectuée en 1953-63, lui a rendu ses lignes originales à la nef centrale et au transept. Décoration intérieure:

  •  des niches gothiques (1490) avec statues St Pierre et St Paul
  •  Crucifix en bois XVIème
  •  diverses statues, dont St Christophe et St Roch, en bois polychrome, XVIIème
  •  reliquaire de St Fortunat, 1732

Chapelle de la Grande Bruyère

Maison communale (ancienne). Elle fut construite en 1740 ou 1773. Elle fut restaurée en 1873 et 1930.

Un hôpital a existé à Blaton, cité en 1593.

Ainsi qu’une léproserie.

 Bibliographie

Blaton, son histoire, …, Louis Sarot, Syndicat d’initiative

Bernissart

Entité communale de Bernissart

Le territoire

Superficie: 546 ha

Altitude: de 20 m à 70 m

Situation géographique : le territoire de Bernissart est situé dans la plaine de la vallée de la Haine, à proximité de l’embouchure de celle-ci dans l’Escaut. Il monte légèrement en pente vers le nord.

Cours d’eau : la Haine, les ruisseaux de la Fontaine Madame, de la Fontaine Bouillante, du Fraity, de la Marnière, et les courants de drainage

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : marécageux, prairies humides, bosquets de peupliers, saules. Le versant était boisé.

Nature du sol : alluvionnaire, sablonneux

Nature du sous-sol : grès, houille

Préhistoire

Le village est avant tout réputé pour la découverte de squelettes fossiles d’iguanodons (iguanodon Bernissartensis) en 1878 par les mineurs de la fosse Sainte-Barbe à 322m de profondeur. 

Trente squelettes complets vieux de 125 millions d’années. (http://bernissart.fpms.ac.be/histoire.htm.Ils mesuraient 5m de haut et 10 mètres de long. Ils datent du Crétacé (ère secondaire), période où la région ressemblait à un vaste marécage tropical avant de s’effondrer et d’emprisonner sous forme de fossiles et de charbon tous les éléments vivants qui se trouvaient en surface. On y a également retrouvé les fossiles de 2000 autres spécimens d’animaux variés.

Des archéologues au XXème siècle ont ramassé des indices de présence humaine lors de la préhistoire :

  • Lieux-dits « Le Catignier », « Au-dessus du Rieu » et « Vieille voie » (vers Harchies). Nombreux artefacts en silex (1982-1999, S. Parent). 
    • Certains éclats et nucleus pourraient dater du paléolithique
    • Une pièce en silex du mésolithique (maglemosien) ou néolithique ancien et une hache-marteau en bois de cerf
    • Néolithique : hache polie en silex de type Spiennes, herminette de silex polie, éclats, armature de flèche, grattoirs
  • Autres endroits non précisés
    • Fragment de hachette polie en grès (1994, J. Dufrasnes) du néolithique final
    • Pointes de flèches, couteau (2000, id)

Age du bronze 

Des vases et des objets en bronze (dont un rasoir) furent découverts (site?)

Ages du fer

De la période Hallstatt (premier âge du fer): des débris de céramique et un rasoir de bronze.

De la fin de la période de La Tène: une monnaie nervienne (rameau type C)

Antiquité gallo-romaine

Le territoire de Bernissart est situé à peu de distance de la chaussée Bavay-Blicquy-Flandre, pas très loin non plus du vicus portuaire d’Hensies-Pommeroeul.

Un site gallo-romain (1995/1998, J. Dufrasnes) a été découvert au sein d’une plaine marécageuse « Marais ». Des vestiges d’une petite construction (tuiles, imbrices) ont été trouvés à proximité du ruisseau Le Grand Courant. On a aussi ramassé en divers endroits:

  • Des tessons de céramique commune, un vase gallo-romain découvert dans un champ au nord-est de la chapelle Saint-Roch (2015)
  • Un sesterce de l’époque des Antonins (IIème siècle)
  • Un trésor monétaire du IIIème siècle (époque de l’empereur Gordien).
  • Des fragments de meules.

Il est assez difficile sur ces quelques éléments d’apprécier la nature de l’habitat, sans doute une exploitation agricole gallo-romaine.

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

On a découvert un fragment de fibule mérovingienne (2004, J. Dufrasnes) à 400m de la voie romaine Bavay-Blicquy (VII-VIIIème siècle) et une autre d’époque carolingienne. Pas d’autre trace d’occupation humaine.

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 1247  (sans doute plus tardive que la fondation de la communauté villageoise).

Toponymie (anciennes orthographes) : 

  • Bernesart
  • Bernifsart

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) : 

Nous n’avons pas d’indication sur la signification du nom :

  • Berni-  = ?
  • -sart = endroit défriché

Epoque de son apparition: entre le XIème et le XIIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine qui passe à Harchies, des chemins médiévaux vers Condé et Valenciennes.

sources d’eau ou cours d’eau: la rivière et les rus

source de bois: le versant boisé

proximité d’un lieu de pouvoir: le château seigneurial

Paroisse dédiée à Notre-Dame, attestée entre 1191 et 1254

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné:  Chièvres

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Saint-Ghislain. Entre 1701 et 1735, cette abbaye fut condamnée pour avoir refusé de réparer l’église et tenté de renoncer à la dîme.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

Les seigneuries

Le territoire de l’actuel village était partagé en trois seigneuries.

  • Une partie était incluse dans le grand domaine de Blaton et fut régie par les seigneurs successifs de celui-ci (voir chapitre Blaton).
  • Une autre, située au centre et au sud du village, était la seigneurie de Bernisssart (infra). Elle eut un château, construit au XIIIème siècle.
  • Quant à la seigneurie du Préau, décrite dans le chapitre d’Harchies, elle était située à la frontière des deux territoires.

La seigneurie de Bernissart

S’y sont succédé les familles suivantes :

  • Auberchicourt (XIII-1406)
  • Silly-Risoir (1406-1464)
  • De Failly (1464-1634)
  • Millendonck (1634-1716)
  • De Croÿ (1716-1791)

Famille d’Auberchicourt

Il s’agit d’un village situé entre Valenciennes et Douai, autrefois faisant partie du petit comté d’Ostrevent, qui fut rattaché au comté de Hainaut en 1163. Leur généalogie est assez difficile à reconstituer, surtout quand il s’agit d’attribuer à leurs titulaires la petite seigneurie de Bernissart.

Le premier seigneur cité est Jean d’Ostrevent (v1039, Auberchicourt- ?). Il était le fils cadet d’Anselme II de Ribemont, comte d’Ostrevent, qui possédait un domaine à Auberchicourt et qui était un fidèle compagnon de la comtesse Richilde de Hainaut et de son fils Baudouin II, avec qui il partit pour la première croisade où il mourut. Il est plausible que Richilde ou Baudouin II ait détaché une partie du village de Bernissart de leur grand domaine de Blaton pour être donnée en fief à un fidèle. Jean d’Ostrevent prit le nom d’Auberchicourt qu’il transmit à sa descendance. Il est cité comme seigneur d’Auberchicourt, de Bernissart et d’Hordaing. Il était l’oncle d’Etienne de Denain qui épousa Rose de Mons, dame de Hainin, et fut à l’origine de la famille de Haynin.

Sont cités alors quelques personnages de la famille, sans que l’on soit certain qu’ils furent seigneurs de Bernissart :

  • Jean de Bernissart (v1056- ?), fils de Jean ci-avant
  • Régnier d’Auberchicourt
  • Gauthier I de Douai (1080/1090-1158/1165), fils de Régnier. Châtelain de Douai. Attesté seigneur d’Auberchicourt, mais pas de Bernissart. 
  • Gauthier II d’Auberchicourt (1129/1139, Auberchicourt – 1209), fils du précédent. Lui et les suivants sont attestés seigneur d’Auberchicourt et de Bernissart.
  • Gauthier III d’Auberchicourt (1164, Auberchicourt – 1228), fils du précédent
  • Baudouin I « le borgne » d’Auberchicourt (1188, Douai – 1239), fils du précédent
  • Baudouin II d’Auberchicourt «de Douai » (1195/1215, Auberchicourt-1289), fils du précédent
  • Baudouin III d’Auberchicourt (1240/1245-1302), fils du précédent, tué à la bataille des Eperons d’or, au service du roi de France
  • Baudouin IV d’Auberchicourt « de Douai » « le Jeune » «  le Borgne » (1270/1280, Auberchicourt – 1326)
  • Baudouin V d’Auberchicourt « de Douai » (v1315-1381). 
  • Ce dernier seigneur eut trois filles, dont Marie d’Auberchicourt (1340-1401), héritière de Bernissart et du Risoir (château près d’Enghien). Elle eut une relation libre avec Philippe de Bourgogne « le Hardi » (1341-1404), fils du roi de France Jean II le Bon, duc de Bourgogne par apanage et devenu en 1369 comte de Flandre et… seigneur de Blaton.
  • Ce serait leur fils illégitime, Henri de Bougogne « du Risoir » (1360-1409) qui aurait hérité de la seigneurie de Bernissart, qu’il vendit en 1401.

Famille de Failly

C’était une famille montoise au service des comtes.

Jean « Husson » ou « de Mons » de Failly (v1360- ?, Bernissart). Chevalier, capitaine au château de Mons, compagnon d’armes du comte Guillaume IV de Bavière, il fut fieffé par ce dernier des terres de Failly (Fayt-lez-Manage) et de Bernissart. Certains prétendent qu’il serait un frère naturel du comte.

Lui succédèrent :

  • Jean I de Failly (v1385, Bernissart-), son fils
  • Michel de Failly (v1415, Bernissart- ?), fils du précédent
  • Guillaume de Failly (v1440- ?), fils du précédent
  • Jean II de Failly (1467, Bernissart- ?), fils du précédent
  • Jean III de Failly ( ?- ?), fils du précédent
  • Charles de Failly ( ?- ?), fils du précédent. Il acheta le village de Quevaucamps
  • Jean IV de Failly (1584, Bernissart-1633), fils du précédent
  • Jacques de Failly ( ?- ?), fils du précédent. Il lègua Bernissart à sa fille Marie de Failly.

Famille de Millendonck

Claude-Herman de Millendonck (1613-1658). Comte de Millendonck, seigneur de plusieurs villages, il le devint aussi pour celui de Bernissart en épousant en 1635 Marie de Failly

Louis-Herman de Millendonck (1642, Bernissart-1693), fils des précédents. Il n’eut qu’une fille, Marie Marguerite.

Maison de Croÿ-Solre

Philippe-Alexandre-Emmanuel de Croÿ (1676-1723). Il était prince de Croÿ et de Solre-le-Château, marquis du Quesnoy et seigneur de plusieurs domaines, dont Condé. Il le devint pour Bernissart en épousant Marie Marguerite Louise de Millendonck (1681-1768)

Leur succédèrent :

  • Anne-Emmanuel de Croÿ (1718-1784), leur fils. Celui-ci, à ses titres et domaines, ajouta Blaton qu’il acheta en 1752. Il était donc seigneur de Condé, Blaton et Bernissart.
  • Anne-Emmanuel-Ferdinand-François de Croÿ « Prince de Croÿ » (1743-1803), fils du précédent. Il fut le dernier seigneur féodal de Bernissart.

    Carte de Ferraris (XVIIIème)
La commune

Les habitants de Bernissart, s’ils dépendaient selon l’endroit où ils résidaient d’une des deux seigneuries, avaient cependant un échevinage commun avec un mayeur, situé à Blaton. Ceux de la seigneurie de Bernissart reçurent en 1466 une charte-loi du seigneur Guillaume du Failly.

En 1601, le village de Bernissart reçut un échevinage distinct de celui de Blaton.

En 1965, Bernissart et Harchies fusionnèrent.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

Département: Jemappes

Canton: Péruwelz (?)

Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Tournai
  • Arrondissement judiciaire: Tournai
  • Canton: Péruwelz
  • Entité communale depuis 1977: Bernissart
Evènements et faits marquants sur le sol de la commune

Le château et le village furent occupés par les troupes de Louis XI lorsqu’il assiégea Condé en 1478.

Economie

Les habitants de Bernissart vécurent longtemps uniquement de l’agriculture (céréales, plantes fourragères, colza, lin, pommes de terre,…). On y faisait de l’élevage sur les 80ha de pâturages communaux (wareschais). 

Des petites entreprises artisanales se développèrent en rapport avec cette activité agricole :

  • Un moulin à vent
  • Une sucrerie au XIXème (arrêtée en 1903).
  • Des fabriques de lingerie (XIXème)
  • Une fabrique d’instruments aratoires (XIXème).

Industrie houillère

En 1735, on exploitait déjà une quinzaine de fosses.

La Compagnie d’Anzin commença à exploiter le charbon de houille à partir de 1754 près de la frontière, à l’orée de la forêt de Bonsecours. Elle creusa un puits qui fut immédiatement inondé. Une machine à feu de Newcomen (1782-83) fut installée, pour combattre l’inondation constante des galeries minières. On atteignit la profondeur de 42m où on rencontra la première veine de charbon. Mais le coût de l’opération força à abandonner le site. Le bâtiment fut transformé en habitation par le seigneur des lieux, le duc de Croÿ, pour son garde-chasse.

L’exploitation reprit plus tard à quelques centaines de mètres de là. La gestion fut le fait de la « S.A. des Charbonnages de Bernissart ». On exploitait à proximité des canaux (Mons-Condé, Pommeroeul-Antoing, Blaton-Ath), des chemins de fer Blaton-Ath et Hainaut-Flandres. La concession s’étendait sous les communes de Blaton, Bernissart, Pommeroeul, Ville-Pommeroeul, Harchies, Grandglise, Stambruges et Péruwelz (2933ha). L’Ecole Moyenne de l’Etat occupe l’ancien bâtiment administratif, datant de 1920. D’autres bâtiments furent réaménagés en logements.

On compta cinq puits à Bernissart au nord du centre du village :

  • Puits Négresse n°1, 1841-1858 – profondeur 190m – il servit ensuite d’aérage du puits Sainte-Barbe
  • Puits du Moulin n°2 (1842 – 1863)
  • Sainte-Barbe n°3, 1845-1926 – profondeur 415/450m – le plus important, mais sujet à de nombreuses inondations – fermeture pour cette raison. C’est ici que furent faites les découvertes concernant les fossiles du crétacé.
  • Sainte-Catherine n°4, 1864-1914/18 – profondeur de 280m
  • Puits n°5, près du coron Lagache pour un ventilateur à force centrifuge.

Une ligne de chemin de fer industrielle relia tous les puits de Bernissart, d’Hensies et d’Harchies à la gare de Blaton. Il existait une gare, transformée elle aussi en habitation. La voie ferrée a été aménagée en piste cyclable jusqu’à Blaton.

Plusieurs corons (104 habitations), files de maisons presque semblables, furent construits pour loger les mineurs à proximité des sites miniers : coron Lagache, coron Perdu, cité Waters, coron Jaune, coron à l’Eau, coron d’en Haut, cité Carlier, cité Royer.

Les industries annexes :

  • Une cokerie
  • Une fabrique d’agglomérés, de briquettes et de boulets.

Les puits de Bernissart fermèrent entre 1913 et 1926.

Bernissart fut desservi par de bonnes voies de communication depuis le XIXème siècle :

  • Le canal Pommeroeul-Antoing, construit en 1826 pour dériver la houille du Borinage vers l’Escaut sans passer par la France qui imposait des frais de douane importants pour protéger ses mines
  • Le canal Blaton-Ath-Dendre
  • L’autoroute Liège-Tournai-Lille
Patrimoine

Eglise Notre-Dame

Il existait une église du XIIIème, construite sur les bords du fossé du château. Elle fut agrandie et restaurée en 1735, puis fut remplacée en 1876 par un édifice gothique. On y trouve la pierre tumulaire de Charles de Failly, seigneur de Bernissart, mort en 1620.

Château

Il fut construit au XIIIème, mentionné pour la première fois en 1267. En 1478, il fut assiégé et endommagé par les troupes de Louis XI. L’archiduc Maximilien le reprit après quelques mois. Il fut démoli en 1876. Il en reste quelques vestiges sur la place à côté de l’église.

Musée de l’Iguanodon

Collection de minéraux et de fossiles. La plupart des iguanodons ont été envoyés au Musée d’Histoire Naturelle de Bruxelles. Un d’eux a été prêté au musée local.

Jardin géologique – Dynolabyrinthe

Marais de Harchies, de Hensies et Pommeroeul

Ils couvrent 550ha. Dans une zone marécageuse au nord de la Haine, des étangs se sont constitués, provoqués par des effondrements miniers du sol dans la première moitié du XXème. Le domaine fut acheté dans les années ‘1970 par le Ministère de l’Education nationale et donné en gestion à l’Institut Royal des Sciences naturelles de Belgique. Celui-ci y implanta un centre de recherches biologiques. C’est devenu une zone protégée, car ce lieu est exceptionnel pour la flore et la faune avec des biotopes différents (« Zone humide d’intérêt biologique » en 1994). On y admire le passage d’oiseaux migrateurs. 

 

La pompe à feu de 1782, restaurée en 2013-2014. Un lourd balancier en fonte sortait du haut de la façade. Il était relié à l’intérieur à un piston actionné par une machine à vapeur. A l’extérieur, il actionnait un système de pompage pour évacuer l’eau du puits de la mine voisine. Elle fut démontée peu de temps après et le bâtiment fut transformé en habitation.

Le terril Sainte-Barbe, boisé, à proximité de la dalle du puits comblé en 1949.

Le terril Sainte-Catherine, avec sa dalle

 Bibliographie

Bernissart et son château, Cécile & Gilbert Delfanne, 2004