Entité communale des Honnelles
Le territoire
Superficie: 99 ha
Altitude: de 37 m (niveau de l’Aunelle) à 64 m.
Situation géographique : Le territoire de Marchipont est situé sur le versant sud de la vallée de la Haine. Le village s’est constitué de part et d’autre de l’Aunelle, dans un petit vallon creusé par celle-ci. Depuis 1779, cette rivière a divisé l’ancien village en deux en marquant la frontière entre la Belgique et la France.
Cours d’eau : l’Aunelle, affluent de l’Hogneau
Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : boisé sur les versants, marécageux en bordure de la rivière qui débordait fréquemment de son cours.
Nature du sol : argileux, limoneux
Nature du sous-sol : grès, schiste
Préhistoire
Néolithique (Homo Sapiens) : Il n’est documenté que par des silex taillés et polis, ramassés autrefois et dont on ne connait le contexte.
Age du bronze : A Rombies-Marchipont, on a plus récemment découvert un habitat de l’âge du bronze.
Antiquité gallo-romaine
Un agriculteur a découvert en 1846 des vases gallo-romains près du lieu-dit « les Quatre Chemins ». Ceux-ci furent détruits. Certains auraient contenu des ossements. Il pouvait s’agir d’une petite nécropole.
Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)
Non documenté.
Deuxième Moyen-Age – le village
Première mention: 1142
Toponymie (anciennes orthographes) :
- Marcipont (1142, bulle du pape Innocent II
- Morcipont (1171, dans un acte du comte Baudouin IV)
- Morcin Pont (1214)
- Morchipont, Morchimpont, Morcipont
Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :
- Morcin Pont, pont d’un certain Morcin ou Marcus.
- Selon Chotin, Marchipont signifiait « pont de la frontière ». « Marche » (mark) en roman signifie « frontière ». Chotin en faisait le « pont de la marche », limite entre comté de Hainaut et d’Ostrevent, mais ce dernier comté était situé à l’ouest de l’Escaut et non à cet endroit où il n’y avait jadis pas de frontière.
- En latin Marcensis pons signifiait le pont de la limite, entre les pagi de Hainaut et de Famars au XIème siècle (Carnoy). Il n’est pas sûr qu’il y ait eu deux pagi distincts, même si l’on n’en trouve parfois mention.
Le pont serait de toute façon à l’origine du nom. Jusqu’au XIXème siècle, l’Aunelle n’était enjambée que par deux ponts en maçonnerie, celui de Quiévrain et celui-ci, d’où l’importance de ce passage (pour les chariots par exemple). A Angre, on passait à gué.
Ici passait le Vieux chemin de Valenciennes à Binche, souvent bien encombré (notamment par les armées en campagne). L’endroit était donc stratégique et le pont fut souvent démoli pour des raisons politiques.
L’utilisation du « o » (Morchipont) en place du « a » proviendrait de la prononciation picarde. Et les deux écritures sont simultanées dans le temps.
Epoque de son apparition: Dans les généalogies que nous avons trouvées, on trouve des seigneurs dès la fin du Xème siècle.
Facteurs ayant favorisé son émergence :
– voies de communication: la chaussée romaine antique ne passait pas loin. Le chemin médiéval de Famars (ou Valenciennes) à Estinnes (ou à Binche) passait par Marchipont, venant d’Estreux par Rombies et allant vers Baisieux, puis Elouges.
– sources d’eau ou cours d’eau: l’Aunelle
– source de bois: tout le versant était boisé
– proximité d’un lieu de pouvoir: un château local (?)
Paroisse dédiée à Saint-Nicolas
Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite (pour la partie belge).
Décanat/doyenné: de Bavay, puis de Dour à partir de 1803.
Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Crespin, ce qui fut confirmé en 1142 par une bulle du pape Innocent II (1130-1143).
Répartition des pouvoirs pendant la période féodale
Autorité supérieure: comté de Hainaut
Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons
Seigneuries et fiefs
Sur le territoire de Marchipont (France et Belgique), on compta, à des périodes variables, au moins quatre fiefs:
- une seigneurie principale
- un fief de l’abbaye de Crespin
- un fief de la seigneurie de Quiévrain
- un fief Séverin, mentionné au XVIème siècle
La seigneurie principale
Il semble que les droits seigneuriaux furent encore exercés par les comtes jusqu’à Baudouin IV (1108-1171) sous le statut de fief-lige. Celui-ci aurait été attribué à la seigneurie de Quiévrechain, qui la revendit ou la céda à celle de Roisin en 1214. Mais la présence de seigneurs portant le nom de “Mochipont” relativement tôt sème le trouble dans nos esprits.
Marchipont eut ses propres seigneurs, vassaux des précédents. Cette seigneurie fut dans les mains successivement de plusieurs familles, à commencer par celle qui porta le nom du village.
Il ne semble pas y avoir eu de château avant le XVIème siècle. Cependant, la généalogie ci-dessous rapport que des seigneurs sont nés ou morts ici. La construction d’un pont en pierre permettant le passage de charrois a pu se faire relativement tôt. Des droits de péage étaient empochés par les seigneurs du lieu.
Selon la généalogie consultée (A. Georgery), les premiers membres connus portaient déjà le titre de seigneurs de Morchipont et de Rombies. Peut-être y exerçaient-ils certains droits au nom des comtes. Ils portaient déjà le titre d’écuyer ou de chevalier, ce qui signifie qu’ils étaient au service des comtes.
- Crépin/Crépon de Morchipont (v960, Morchipont – ?), le premier cité (au temps de Régnier IV et des premiers seigneurs de Roisin)
- Germon/Germain de Marchipont (v990- ?), fils du précédent
- Thierry I de Morchipont (v1025, Morchipont- ?)
- Germain/Germon II de Morchipont (v1060, Morchipont-1099, Antioche). Il participa à la première croisade et décéda lors du siège d’Antioche.
- Jacques I de Morchipont (1088- ?), fils du précédent
- Robert I de Morchipont (1121, Namur- ?), fils du précédent
- Henri I de Morchipont (1153- ?), fils du précédent. Il épousa Marie de Roisin, fille de Baudry V, peut-être au moment où Marchipont devint fief-lige de Roisin.
- Jacques II de Morchipont (1176- ?), fils du précédent
- (deux générations manquantes)
- Robert II de Morchipont (1242- ?),
- Henri II de Morchipont (1272- ?)
- Germain/Germon III de Morchipont (v1304- ?)
- Jacques « Jacquemart » de Morchipont (1334, Morchipont-1381, Avesnes-le-Comte)
- Raould de Morchipont, cité en 1380
- Guy de Morchipont (v1365, Morchipont-1417)
- Bertrand de Morchipont (1392- ?)
- Thierry de Morchipont (1418, Choisies-apr1465)
- Henri de Morchipont (1459-1535), fils du précédent. C’est probablement lui qui revendit la seigneurie de Marchipont. Mais ses descendants portèrent encore le nom de Morchipont jusqu’au milieu du XVIème siècle.
Famille Ghoret
Mathieu Ghoret (v1455-1492), membre de la bourgeoisie montoise et du Conseil Ordinaire du Hainaut, acheta quelques terres dans la région (à Sebourg et à Rombies), mais aussi les seigneuries de Rampemont (domaine situé sur les territoires de Fayt-le-Franc, Montignies-sur-Roc et Onnezies) et de Marchipont en 1483.
Sa fille, Marie (Mathilde) Ghoret hérita de cette dernière seigneurie et la transmit à la famille de son mari, Gilles de Glarges.
Famille de Glarges
Gilles de Glarges ( ?-apr1495). Son père portait le même prénom et était bailli de Ghislenghien et seigneur de Hélesmes. Sa mère était Marguerite de Trazegnies. Celui-ci devient seigneur de Marchipont, en épousant Marie Ghoret, dame de Marchipont.
- Jacques I de Glarges (v1480- ?) était leur deuxième fils et hérita du lieu.
- Jean de Glarges (v1510- ?), fils du précédent
- Antoine de Glarges (v1535, Mons – 1606), fils du précédent. Son frère François, seigneur d’Hélesmes, ayant pris parti pour la Réforme, fut capturé à la bataille d’Hautrage en 1572 et exécuté par les Espagnols.
- Jacques II de Glarges (1567, Mons-1631, Mons), fils du précédent. Il aurait fait construire un château à Marchipont.
- Son fils aîné, Jean de Glarges abandonna la seigneurie en 1631, se faisant prêtre. Les autres fils semblent être décédés jeunes.
- C’est finalement sa fille Jeanne de Glarges ( ?-1667) qui hérita de Marchipont.
Famille de Hannoye/Hanoye
- Jean de Hannoye (v1605-1660) était conseiller à la cour de Mons et devint seigneur de Marchipont par mariage avec Jeanne de Glarges.
- Leur fils Jacques François Hannoye « de Marchipont » (1640- ?), magistrat à Mons, lui succéda. Il fut anobli par Charles II, roi d’Espagne, en 1678.
- Puis vint Antoine Philippe Hannoye “de Watinnes “(1688- ?), échevin à Mons et bailli de Chièvres. Il eut deux filles. Son frère Emmanuel de Hannoye ( ?-1372) lui succéda, mais resta célibataire et se fit prêtre.
- Marie Ursule de Hannoye (1749-1807), l’aînée d’Antoine Philippe, hérita de Marchipont et transmit la seigneurie à son mari.
Famille de Béhault d’Ornon
Nicolas Joseph de Béhault (1731, Mons-1802), écuyer, lieutenant prévôt à Mons, devint par son mariage avec l’héritière de Marchipont, seigneur du lieu. A sa mort, sa veuve Marie Ursule de Hannoye, épousa son frère en 1787.
Jean de Béhault ( ?-1800) resta seigneur de Marchipont jusqu’à la fin de l’Ancien Régime féodal (1793).
Période française (1794-1814)
Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794
- Département: Jemappes
- Canton: Dour
Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
- Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
- Province: Hainaut
- Arrondissement administratif: Mons
- Arrondissement judiciaire: Mons
- Canton: Dour
- Entité communale depuis 1977: Honnelles
Evènements et faits marquants sur le sol de la commune
Au début de la Guerre de Cent Ans entre France et Angleterre, le comte de Hainaut tenta de se montrer neutre, ce qui déplut au roi Philippe V de Valois qui saccagea en 1340 la région « entre Selle et Honniau », d’après un récit de Froissart. Marchipont en aurait souffert. A la fin de la même guerre, en 1453, ce furent au tour de pillards (« les Compagnons de la Verte Tente ») de semer la terreur dans les environs. Les mercenaires « sans travail » se livraient aussi à de tels actes (incendies, pillages, viols, assassinats).
Un peu plus tard, en 1477 et 1478, les armées du roi Louis XI, en guerre contre Marie de Bourgogne, se livrèrent aussi à de nombreux saccages sur les châteaux et les villages entre Valenciennes et Saint-Ghislain. Marchipont, lieu de passage, fut du lot.
En 1572, lors de la prise de Mons par les calvinistes des Pays-Bas, des renforts huguenots arrivèrent de France et se répandirent dans la région pour résister aux tentatives de reprise des villes par les Espagnols. Le frère du seigneur de Marchipont, François de Glarges, y laissa la vie.
Les villages de la région souffrirent des passages de troupes armées, de quelque bord qu’elles soient. Ce fut le cas en 1576, en 1581, en 1586, en 1597 et 1598.
Les guerres que Louis XIV entreprit contre les Pays-Bas Espagnols virent aussi le passage de ses troupes par les ponts de Marchipont et de Quiévrain.
Lors du Traité de Nimègue (1678), ce qui relevait des prévôtés de Maubeuge et de Valenciennes revint à la France de Louis XIV. C’était le cas pour quelques villages environnants (Sebourg, Quiévrechain, Crespin), mais pas pour Marchipont.
Ceci ne calma pas les appétits du Roi-Soleil qui reprit ses invasions dès 1690, avec leurs lots de désolations dans les villages et les campagnes traversées : réquisitions de chevaux, de fourrage, de nourritures, de main d’œuvre pour aider à effectuer les sièges des villes (Saint-Ghislain, Mons).
En mai 1706, après la bataille de Ramillies, 15.000 soldats français campèrent entre Valenciennes, Crespin et Jenlain. Ce qui occasionna de nouveaux de gros dégâts. Puis ils furent remplacés par les Autrichiens qui cherchaient à les chasser. Et cela continua encore ainsi en 1707, en 1708. Les champs ne pouvaient plus donner de récoltes. L’hiver fut malheureusement rude. La famine s’installa dans les populations.
Lors de la bataille de Malplaquet, les 10 et 11 septembre 1709, l’église du village fut détruite et les habitants pillés. Le pont fut détruit par les troupes qui refluaient vers la France.
En 1740, la « nouvelle » frontière fut encore franchie. Les troupes françaises occupèrent encore les villages frontières.
Sous Louis XV et Louis XVI, on remodifia les frontières par deux traités des Limites. Lors du second en 1779, l’Aunelle servit définitivement de frontière et divisa le village en deux.
Au début du XIXème siècle, en 1806, Marchipont-France fut réuni à Rombies (village qui a toujours dépendu de la seigneurie de Marchipont). Le château des seigneurs et l’église se retrouvèrent en territoire français.
Le 7 novembre 1918, des troupes canadiennes de libération de la région passèrent par ce pont.
En mai 1940, après l’invasion de l’armée allemande en Belgique, l’armée française qui se porta au secours des troupes belges passa également par Marchipont pour se répandre vers Angre, Audregnies et de là vers Mons.
Il est possible (mais je n’en ai pas l’information) que les troupes américaines et britanniques y passèrent aussi le 4 septembre 1944, encore que le plus gros des troupes libératrices passa par Quiévrain.
Economie
Village essentiellement agricole.
La partie belge est connue aujourd’hui pour son institut « Le Roseau Vert » pour adultes handicapés.
Bibliographie
Marchipont. Aux passages de l’Histoire, 2006