Montroeul-sur-Haine

Entité communale d’Hensies

Le territoire

Superficie: ?

Altitude: entre 20 (Haine) et 27 m (calvaire des six chemins)

Situation géographique : le village s’est installé dans la plaine marécageuse de la Haine, sur sa rive gauche.

Cours d’eau : la Haine et des courants ou ruisseaux de draînage: le grand Courant de Templeuve, Courant Franoé, ruisseaux du Roeulx (Foss du Reu), des Digues, des Préelles, du Grand Vivier. Les champs qui les bordent ont souvent les mêmes noms : Préelles, Grands Viviers, Couture des Grands Prés. La carte ci-contre démontre bien la densité de ces courants de draînages.

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : marécageux. Des débordements de la rivière inondaient fréquemment la partie basse du village, créant une zone de marais inhabitables.  Dans la partie basse (Le Grand Vivier, Couture des Cocarts), on trouve des prairies humides, des ruisseaux bordés de saules et de peupliers, des marécages et des amas d’eau croupissante.

Nature du sol : limoneux

Nature du sous-sol : sable noir alluvionnaire, tourbe. Au-dessus une marne imperméable et compacte rend les terrains humides, peu compatibles avec des arbres à racines profondes.

Préhistoire

Néolithique (Homo Sapiens) : 

On y aurait trouvé, selon Ch. Debove, des haches polies ressemblant à celles retrouvées à Thulin et sur le Mont d’Elouges. L’abbé Moulart évoque la possibilité d’un habitat primitif au sud à la lisière du bois à une époque préhistorique non précisée, sur base de découverte de traces de huttes dans les marécages.

Plus récemment, des découvertes ont été réalisées soit par des habitants soit par des archéologues de la Société Wallonne d’archéologie. Au lieu-dit « La Citadelle », on a trouvé des silex de type Spiennes : fragment de lame biface, pointe de flèche foliacée, burin dièdre (G. Saint-Ghislain, J. Dufrasnes).

Au « Champ Franoé » (nord du village), on évoque la possibilité de gisements préhistoriques (Van Assche M., Dufrasnes J. & Delcourt-Vlaeminck M., 2004. Deux gisements préhistoriques à Montrœul-sur-Haine, Bulletin de la Société tournaisienne de Géologie, Préhistoire et Archéologie, IX, 5, p. 113-130.)

Ages du fer :

On n’y a pas trouvé d’indice, mais il existait un « Vieux chemin des Celtes » à Montroeul, dont l’origine du nom n’est pas précisée.

Antiquité gallo-romaine

Cette période est nettement plus riche en découverte. Des structures compatibles avec une villa romaine et un cimetière gallo-romain ont été trouvées.

Le noyau du village actuel n’est pas éloigné de la chaussée romaine Bavay-Blicquy-Gand (appelée chaussée Brunehaut) qui passe à l’endroit actuel du « Calvaire » à la limite de Quiévrain, Montroeul et Hensies.

La villa de Villers ou le camp de Murwaut

Au lieu-dit « Villers » (croisement de cette chaussée avec le chemin qui allait de Quiévrain à Montroeul), on a retrouvé des vestiges gallo-romains faisant penser qu’une villa romaine s’y trouvait ou du moins un habitat. Certains évoquent plutôt la possibilité d’un camp romain (d’après les mots Ramecamp – Romanorum Campus et Murvaut – Murorum vallis, enceinte du camp – cités dans des actes anciens). Selon l’abbé Moulart, les Gallo-Romains ont défriché les bois qui recouvraient ce territoire pour étendre leurs surfaces cultivables jusqu’au-delà de « Murwaut ». Un habitat serait né aux abords d’un vieux chemin celto-romain et du carrefour des Six Chemins où se trouvait vraisemblablement un relais ou une villa. Ils auraient tracé une route sur le point le plus élevé du territoire au bord de laquelle se serait constitué un petit habitat.

Une des pièces de monnaie du “trésor” de Montroeul-sur-Haine

Le trésor du Boquet (Marchelle)

En 1846, un agriculteur découvrit dans son champ du « Boquet » près de la « Marchelle » (la Place actuelle) un coffre contenant des monnaies romaines, soit 3000 médailles en argent. Elles sont datées  d’une époque située entre le règne de l’empereur Septime-Sévère (193-211) et celui de l’usurpateur gaulois Postumus (260-269), soit une période déjà assez tardive et relativement brève. A quelques distances ( ?), on retrouva des débris de constructions gallo-romaines (tuiles, fragments de meules de moulin à bras). Ce trésor est particulièrement important. Cela évoque la possibilité qu’un personnage de haut rang (magistrat à Bavay ?) ait voulu cacher sa fortune à l’arrivée des premiers envahisseurs francs vers 270 et qu’il n’y ait pas survécu, lui et les siens.

Cimetière – champ Franoé

En 1847, on découvrit un cimetière gallo-romain  à incinération des IIème et IIIème siècle (donc correspondant aux monnaies ci-dessus): 200 sépultures, des amphores à vin et à huile, des urnes cinéraires remplies d’ossements calcinés et de mobilier funéraire typique de la période gallo-romaine (de la vaisselle, des bracelets et des bijoux, ….). Les cimetières romains étaient situés à quelques distances des habitats.

Pas loin, trois tumulus appelés « es-trois-monchiaulx ou trémonchiaux ».

En 1990, lors de travaux agricoles, de nouvelles découvertes entraînèrent des fouilles plus méthodiques de plusieurs sépultures avec du matériel : une monnaie en bronze de Commode (180-187), fragments de coupes en terre sigillée d’Argonne (fin IIème siècle), fragment d’une urne funéraire, quelques tuiles, un fragment de fibule (I-IIème), divers objets métalliques. 

En 1991, lors de prospections dans des champs au nord-ouest du « Coron des Marais » (vers Thulin), on retrouva des tessons de céramique (vase en céramique à engobe noir, bords de vase), mais pas de traces de construction. A proximité, fut déterrée une applique en bronze d’époque gallo-romaine

Toujours en 1991, le long du ruisseau « Courant de Templeuve » (à l’est du village, derrière le cimetière actuel), on découvrit des tessons  peu nombreux, un fragment de cruche en pâte savonneuse, des  bords de mortier, des fragments d’écuelle et de marmite en céramique commune, un tesson de poterie sigillée et de rares tuiles. 

Une deuxième habitation au centre du village

En 1997, Gérard Saint-Ghislain trouva sur son terrain de la « Citadelle » des  éléments analysés par Jean Dufrasnes : des fragments de tegulae, des tessons de céramique commune et sigillée, des pierres de limonite (minerai de fer), un élément en bronze figurant un dauphin (poignée de coffre ?), un chaton de bague en bronze, un sesterce de Marc-Aurèle (176-180). Un as de Domitien (86-96) situé à 250m au nord sur l’emplacement de l’ancien château médiéval (Matériel exposé à Ath). 

En 1998, au lieu-dit « France » : des tessons de céramique.

Emplacement d’une petite construction

En 2005, lors de prospections, Jean Dufrasnes découvrit (Cadastre : M/H Sect.A., zone sud de la parcelle n°265) des vestiges d’une petite construction gallo-romaine : des fragments de tegulae, des tessons de céramique sigillée (fabriquée au  Ier et IIème en Gaule centrale (Argonne), ainsi que de la céramique de la région de Bavay. Ce site pourrait avoir été occupé dès le milieu ou le troisième quart du Ier siècle.

Un habitat au Franoé

Entre 1997 et 2013, sur le site au nord-est du « Champ Franoé » (nord du village), Mrs Dufrasnes et  Leblois mirent à jour les vestiges d’un probable habitat le long d’un ancien cours de la Haine, datant du IIème et du début IIIème (plusieurs petites constructions), à proximité de la nécropole fouillée au XIXème, des éléments d’une forge, des monnaies (Sesterces, Dupondius du IIème siècle), un manche de clef en alliage cuivreux, des tessons de céramique (dolia, mortiers, cruches, amphores à huile) de la  seconde moitié du IIème en pâte de Bavay/Famars, ainsi que des tessons de céramique sigillée du sud et du centre de la Gaule de la fin du Ier et du début du IIème siècle.

Au lieu-dit « La Préelle » (sud du village) des vestiges d’habitat (tegulae, imbrices répartis sur une vaste surface, monnaie d’Hadrien et de Faustine la Jeune, de Constantin II fragments de fibules, fragments de céramique sigillée importée et commune régionale, mortiers, dolia) ont été trouvés, pouvant dater du milieu du Ier siècle au IVème siècle. Ce qui est assez rare dans la région.

De tous ces éléments, on pourrait tirer comme hypothèse que plusieurs sites de l’actuel territoire de Montroeul-sur-Haine, situés entre la chaussée romaine et la Haine navigable, ont comporté trois zones d’habitat datant des quatre premiers siècles de notre ère:

  • une aux environs de l’actuel Calvaire (peut-être un petit relais ou un camp militaire sur la chaussée romaine),
  • une aux environs de la place actuelle (peut-être une villa qui se fortifia au Bas-Empire ou au Haut Moyen Age, et dans laquelle le château médiéval trouva ses fondations – une nécropole la jouxtait)
  • une autre structure habitable au nord à proximité de la Haine (Franoé). Selon Dufrasnes et Leblois, cet emplacement pourrait ne pas être dissocié du vicus voisin de Pommeroeul. Il pourrait correspondre à une zone artisanale. Des scories de fer y ont été découvertes, ce qui laisserait penser qu’une forge y était installée. Un chemin reliait ces différents sites.
  • A cet endroit, se situait aussi une nécropole relativement importante. Les cimetières se trouvaient toujours hors des habitats à l’époque romaine. Elle pouvait servir pour les différents sites cités jusqu’ici, mais aussi pour ceux proches d’Hensies et de Pommeroeul.
  • Le chemin se prolongeait vers Quiévrain (où une villa ou plusieurs villas existèrent). C’est le long de ce chemin que se serait constitué le village au moyen-âge.

Aucune découverte n’a été faite concernant les siècles suivants, pouvant faire craindre, comme dans toute la région, que ces exploitations ne survécurent pas de manière significative aux invasions barbares du début du IVème siècle et que certaines disparurent même dès la deuxième moitié du IIIème siècle lors des premiers raids francs.

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

Monasteriolum fait référence à un petit couvent de femmes. Au nord du village, au lieu-dit « Coron Franoë », dans une zone de bois et de marais, à proximité de la Haine (près du Moulin Degardin), s’est constitué vers 650, un petit monastère.

Il aurait peut-être été fondé par Domitien, un des compagnons-disciples de Saint Landelin, le fondateur du monastère de Crespin, qui se trouve à deux lieues. On sait que l’abbaye de Crespin possédait des terres à Montroeul, dont vraisemblablement celle du monastère local, qui en dépendait. On y suivait la Règle Bénédictine.

A proximité, un petit fief (de prés et d’une ruelle) s’appelait « Templeuve » (vivier du temple), alimenté par le courant de Templeuve qui longe le village à l’est.

Le monastère fut saccagé par les Vikings au IXème siècle. Il fut reconstruit ensuite. Le monastère reçut en 1229 une rente de l’évêque de Cambrai, Guillaume de Hainaut. On ne connait pas la date de sa disparition.

Jusqu’ici, à notre connaissance, il n’a jamais été fait mention d’un habitat structuré d’époque mérovingienne, ni d’une nécropole de cette époque. Il est probable que des habitations (en matière périssable) perdurèrent durant cette période, en rapport avec le monastère. Les villas gallo-romaines n’étaient plus habitées (comme ce fut le cas à Elouges).

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 1119

Toponymie (anciennes orthographes) : 

  • Monteruls (1119), (de mortuorum rivulus = ruisseau des morts)
  • Mosterol (1181),
  • Montroeul (1199),
  • Monasteriolum

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) : 

Il fait référence à un petit monastère qu’on y trouva, peut-être à l’origine du village.

Epoque de son apparition: entre le Xème et le XIIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine Bavay-Blicquy, le chemin de Saint-Ghislain à Condé (dont il reste un tronçon), il s’en détachait un chemin qui allait à Crespin. 

sources d’eau ou cours d’eau: les ruisseaux évoqués plus haut

source de bois: des petits bosquets émaillaient le paysage marécageux

proximité d’un lieu de pouvoir: le château local. Il est difficile de dire s’il précéda ou suivit la constitution du village. Le contexte plaide pour la seconde solution.

Le village s’est sans doute constitué au départ près de l’actuelle église. Des fermes isolées furent probablement à l’origine des nombreux lieux-dits actuels (Franoé, Noyelle, Marchelle, Thirissart, …). Ce n’est qu’au XIXème et surtout au XXème siècle que l’habitat s’est densifié le long de ce village-rue.

Paroisse dédiée à Saint-Lambert, évêque de Maastricht

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Hornu, puis Bavay, puis Boussu

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné au chapitre épiscopal de Cambrai. Ce qui fut confirmé par une bulle du pape Lucius en 1181. La dîme a cependant été partagée avec les abbayes de Saint-Ghislain et de Crespin.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons.

Seigneuries et fiefs

On sait qu’à Montroeul-sur-Haine, l’abbaye de Crespin détenait des terres aux environs du monastère au nord du village.

La plus grande partie du territoire dépendit d’une seigneurie principale. Son maître était vassal du comte de Hainaut. Jusqu’au XVème siècle, il exerçait la basse justice (et peut-être la moyenne). Les crimes graves de haute justice dépendaient d’une juridiction comtale (la Prévôté de Mons). A partir du XVème siècle, les seigneurs de Ligne, devenus plus puissants aux côtés des souverains des Pays-Bas, purent également exercer la haute justice.

Comme tout seigneur féodal, le maître des lieux pouvait exiger de la part de tous ceux qui habitaient sur ses terres (serfs, paysans libres) des corvées, un impôt (la taille, le droit de mortemain) et des redevances diverses sur les productions agricoles ou artisanales (gambage, terrage), sur leur transport (droits de tonlieu et de pontonnage sur la Haine), sur leur commerce et sur diverses activités (tenderie, chasse, pâturages, pêche).

Au Moyen Age, les habitants avaient droit de pâture pour leur bétail sur les terres marécageuses qui s’étendaient entre Elouges, Montroeul et Thulin. Ce territoire était indivis. Il fallait juste payer une redevance à un percepteur au service des seigneurs.

Une troisième seigneurie exista, celle de Thirissart. On ne sait pas à partir de quand. Une charte lui fut accordée en 1461. Elle comportait un château (peut-être une simple ferme fortifiée), que l’on situe à 200 mètres de la place communale au sud. La seigneurie devint feudataire de la maison de Ligne (c’est-à-dire vassale de la seigneurie principale de Montroeul-sur-Haine) et son château servit de résidence au bailli du lieu. Elle appartenait juste avant la Révolution française au Comte de Clerfayt « de Croix ». Il est donc possible que le lieu-dit « La Croix » fut le domaine de cette famille. Ce Clerfayt fut un général renommé dans les armées autrichiennes qui s’opposèrent sur notre territoire aux visées expansionnistes de la France Révolutionnaire entre 1792 et 1794. Il possédait également les seigneuries de Hainin, d’Onnezies et d’Autreppe.

Liste des seigneurs de la seigneurie principale

Ils  appartinrent essentiellement à deux familles. Une première famille, dite de Monstruel, qui, d’après les documents connus, n’a occupé la seigneurie que deux ou trois générations, tout au plus. Ils sont même cités comme “maires” plutôt que comme “seigneurs”. Une héritière épousa le seigneur de Ligne, alors « petite » famille qui ne possédait que les villages de Ligne et de Maulde.

Cette famille, par des mariages fructueux, devint une des plus importantes du Hainaut. A partir du XVème siècle, les Ligne occupèrent des postes importants auprès des ducs de Bourgogne, des souverains des Pays-Bas, d’Espagne et d’Autriche. Plusieurs de ses membres furent faits chevaliers de la Toison d’Or.

Maison de Montroeul (« Monstruel »)

Les premiers seigneurs, comme c’était souvent le cas à l’époque, prirent le nom du lieu. Nous n’avons que peu de détails à leur propos. On connait :

Jehan de Monstruel, cité comme témoin dans une charte de 1082 de l’évêque Gérard de Cambrai à propos d’un oratoire à Pommeroeul. 

Arnulf et son frère Herman figurent sur une charte du même évêque en 1090.

Nous n’avons pas retrouvé ces personnages dans les généalogies existantes. A cette époque, le comté était dirigé par Baudouin II de Hainaut, qui, avec sa mère Richilde, s’employait à organiser l’administration qui reposait sur les pairies et les baronnies.

Maison de Ligne

Par la suite, c’est la famille de Ligne qui prit les rênes de la seigneurie principale de Montroeul-sur-Haine. Parfois, celle-ci passa dans les mains d’une famille parente, mais elle revint toujours dans cette célèbre famille qui, plus tard, dominera une bonne partie de la région, surtout au nord de la Haine, mais aussi au sud (Thulin et Frameries).

Vers 1090, une dame de Montroeul, Adeline « de Monstreuil » épousa Herbrand de Ligne (v1070-1129). C’est peut-être la fille d’un des trois personnages cités plus haut. Il est le premier baron reconnu de Ligne. Les textes anciens le citent comme échevin-maire de Montroeul.

Suivirent :

  • Thierry 1er de Ligne  (avant 1105- 1176), fils du précédent, lui aussi cité comme « échevin-maire ».
  • Thierry II de Ligne  (v.1134-1190), fils du précédent
  • Wauthier/Gauthier  1er dit “le Gâté” (avt 1150-1229), fils du précédent
  • Fastré de Ligne ( ?-1227), fils cadet du précédent, qui hérita de Montroeul. Pas de mariage ni d’enfant connu, le domaine pourrait alors être transmis à son frère aîné décédé après lui.
  • Wauthier II/Gauthier de Ligne  (1183-1245), frère aîné du précédent
  • Wauthier III de Ligne  (1225-1290), fils du précédent
  • Jean 1er de Ligne (1250-1300/1306), fils du précédent
  • Fastré III de Ligne (1280-1337), fils du précédent. Personnage important, car il épousa Jeanne de Condé (1290-1325), héritière de Condé, Beloeil, Morialmé et de leurs dépendances. Ils eurent de nombreux enfants, ce qui donna lieu, lors des héritages, à quelques répartitions. En ce qui concerne Montroeul, c’est l’aînée, Alix de Ligne ( ?- ?) qui en hérita. Elle avait épousé Gille « Rigaut » du Roeulx, chevalier au service du comte Jean d’Avesnes. Ils eurent un fils, Fastré du Roeulx, qui hérita du domaine, mais comme il n’eut pas d’enfant, à sa mort, Montroeul revint à la branche aînée de Ligne. Nous n’avons pas de date à ce sujet, mais il semble que ce soit Guillaume de Ligne (1320-1387) qui l’obtint. Il était le frère d’Alix.
  • Son fils Jean II de Ligne (1361-1442) lui succéda. Ce dernier avait aussi hérité de Ligne, de Beloeil et de leurs dépendances. C’est l’époque où la famille de Ligne s’installa définitivement à  Beloeil. C’est à partir de lui que les seigneurs de Ligne vont obtenir des fonctions prestigieuses auprès des souverains du duché de Bourgogne, et par la suite de l’archiduché des Pays-Bas, du royaume d’Espagne et de l’empereur de Germanie.
  • Michel III de Ligne (1390-1468), fils de Jean II. 
  • Il est possible qu’ici se situe un Jean III.
  • Jean IV de Ligne (1457-1491), fils du précédent
  • Antoine « le Grand Diable » de Ligne (1474-1532), fils du précédent. Il acheta Thulin et la terre d’Amblise (près de Crespin) à Gobert XII d’Aspremont en 1513.
  • Jacques de Ligne (1503-1552), fils du précédent. Baron de Ligne, puis comte de Ligne
  • Georges de Ligne ( ?-1579), fils du précédent et dont la descendance prendra le nom de (Ligne)-Arenberg.
  • Philippe de Ligne (1533-1583), fils de Jacques, frère de Georges

    D’Adrien de Montigny (XVIème)
  • Lamoral Ier de Ligne (1563, Beloeil-1624, Bruxelles), fils du précédent. Ligne et Amblise furent érigées en principauté en 1602 (1er prince) par l’empereur Rodolphe II. Par mariage, il devint baron de Werchin, seigneurie près de Valenciennes, dont le propriétaire a la charge héréditaire de sénéchal du Hainaut.
  • Florent de Ligne (1588-1622), fils du précédent
  • Albert-Henri de Ligne (1615-1641), fils aîné de Florent de Ligne – sans postérité
  • Claude-Lamoral I de Ligne (1618, Beloeil-1679, Madrid), frère du précédent
  • Henri-Louis-Ernest de Ligne (1644-1702), fils du précédent
  • Antoine Jospeh Ghislain (1682-1750), fils du précédent – sans postérité
  • Claude Lamoral II (1685-1766), frère du précédent. La plus grande œuvre du prince Claude-Lamoral II est le domaine et le château de Beloeil.
  • Charles-Joseph Lamoral de Ligne (1735, Bruxelles – 1814, Vienne), fils de Claude-Lamoral II. Il fut le dernier seigneur féodal de la Maison de Ligne.

La commune de Montroeul-sur-Haine

C’est tardivement que le village obtint sa charte-loi, en 1418.

Un document de 1669 précise qu’à Montroeul-sur-Haine, vivaient 400 habitants, distribués en 12 ou 13 familles.

Carte de Ferraris (XVIIIème)
Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

  • Département: Jemappes
  • Canton: Thulin, puis Boussu
Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Mons
  • Arrondissement judiciaire: Mons
  • Canton: Boussu
  • Entité communale depuis 1977: Hensies
Evènements et faits marquants sur le sol de la commune

Montroeul-sur-Haine était à l’écart des grands axes routiers au moyen-âge et pendant la période moderne. Les villageois n’eurent pas trop à souffrir des passages saccageurs des troupes armées. Sauf lorsqu’elles s’installaient dans la région en vue de la prise d’une ville. Ce fut le cas lorsque Louis XIV trouva des prétextes pour envahir nos régions. En 1690, lors d’une invasion des Pays-Bas Espagnols, une troupe de 6000 hommes campa en décembre à Montroeul, dévastant les vergers et les arbres. Des troupes établies à Quiévrechain vinrent enlever du bétail et se ravitailler en fourrage. Des rentes très lourdes étaient exigées soit par Mons, soit par Bruxelles, soit par Maubeuge  notamment pour des travaux de barrage sur l’Hogneau. Le non-paiement exposait à des prises d’otages ou des emprisonnements (ce qui fut le cas du mayeur Charles Ledure).

En 1692, un pillage fut effectué par une cavalerie située à Crespin, composée de mercenaires allemands et anglais qui assiégeaient Mons. Les habitants n’ayant plus rien durent vivre quelques mois dans les villages voisins. 

Le 28 octobre 1792, les villageois virent passer les troupes françaises du général Dumouriez. Elles ne s’attardèrent pas dans ces zones marécageuses, préférant prendre plus au sud sur le versant de la vallée. Il y eut quand même quelques échauffourées dans les champs bordant le hameau de Sairue de Thulin. Repoussées au-delà de la frontière, elles revinrent quelques jours plus tard, le 4 novembre, ne faisant que passer sans résistance, celle-ci étant concentrée du côté de Hainin et de Boussu-Bois.

Lors de la Révolution, le curé Anseau refusa de prêter serment de fidélité à la République et dut s’enfuir. Il se réfugia à St Saulve. Le vicaire Lecouvez continua son œuvre dans la clandestinité.

Pour ce qui est de la première guerre mondiale, on ne décrit pas de combat à Montroeul, mais il est probable que les Allemands, ayant traversé la Haine à Pommeroeul et qui déferlèrent le 24 août 1914 en trouvant de la résistance de la part des soldats Anglais à Thulin, passèrent sans doute aussi par le village pour rejoindre Quiévrain. Montroeul, comme les villages adjacents, fut délivrée par les Canadiens entre le 6 et le 8 novembre 1918.

En 1940, rien de particulier n’est décrit sur l’arrivée des Allemands le 20 mai. Ni sur la libération par les Américains le 4 septembre 1944.

Voies de communication et évolution du village

La première voie importante connue est la chaussée romaine Bavay-Blicquy qui passait au calvaire. Les quelques établissements gallo-romains établis sur le territoire du village lui étaient reliés par des petits chemins. Il est possible qu’à partir de la fin du IIIème siècle, il n’y ait plus eu âme qui vive à Montroeul et que tout soit retourné à la nature.

Le monastère du Franoé, établi au VIIème siècle, était relié sans doute par un sentier à la chaussée et au-delà à Crespin. La fondation des trois abbayes (Condé, Crespin et Saint-Ghislain) a favorisé l’aménagement d’un chemin qui les reliait. Venant de Saint-Ghislain, par Boussu, Hainin et Thulin, il se divisait à Montroeul-sur-Haine, une branche vers Condé (actuelle rue de Condé) et une branche vers Crespin (par le Moulin).

Dans les siècles suivants, le village s’est créé sur le modèle du « village-rue » du nord vers le sud, récupérant peut-être en partie l’ancien chemin qui reliait les établissements gallo-romains.

Depuis le début des années ‘1970 une route, l’Avenue des Droits de l’Homme, la traverse presque en son milieu, reliant Thulin à Hensies.

Economie

On se consacra essentiellement à l’agriculture (sur les terres non marécageuses et humides, au sud-est du village) et à l’élevage (sur les prairies humides du nord-ouest : les marécages et les zones fréquemment inondées par les débordements de la Haine et des ruisseaux affluents).

Quelques petites industries annexes traitaient les produits agricoles :

Ferme-brasserie du Fayt
  • des brasseries
  • un moulin à eau – s’agissait-il du moulin banal ? situation ? moulin Degardin sur la Haine ?
  • le moulin Patte, au sud-ouest du village
  • un pressoir d’extraction d’huile de lin
  • une touraille fabricant de la chicorée

Les habitants se sont consacrés durant des siècles à ces travaux agricoles. A partir du XIXème, certains sont allés travailler dans les houillères des villages voisins ainsi que dans les usines métalliques de l’autre côté de la frontière.

Aujourd’hui, le village est essentiellement résidentiel.

Patrimoine

L’ancien château

La résidence du châtelain se trouvait à une cinquantaine de mètres de l’actuelle église, sur deux éminences. On ne sait quand il fût bâti. Probablement au XIème siècle sous une forme de motte castrale (château en bois sur une éminence entourée d’une palissade et de fossés). A moins que ce ne fusse une ferme fortifiée.

Plus tard, ce château, rebâti en pierre, aurait été de taille considérable, de forme quadrangulaire, flanqué de quatre tours aux angles. Autour, une double enceinte environnée d’eau. Le petit étang existant encore de nos jours pourrait en être un vestige. Le prince de Ligne habitait Beloeil, mais passait un mois chaque année à Montroeul pour y rendre la haute justice.

Le château seigneurial fut détruit par Louis XI en 1464 lors de ses guerres contre les Bourgogne. On y laissa des ruines jusqu’au XVIIIème. Une maison en briques avec pignon en redents devant l’église aurait été reconstruite à cet endroit.

L’église Saint-Lambert

Il est possible que la première église paroissiale fût la chapelle du monastère pour un très petit noyau d’habitants près de celui-ci. Quelques serfs. Lorsqu’un seigneur se fit construire le château, la chapelle castrale servit d’église paroissiale. Elle se trouvait sans doute près de l’emplacement de l’église actuelle. 

Avec les siècles, l’église paroissiale fut plusieurs fois reconstruite. Lors de la Révolution, on enleva les deux cloches qui dataient de 1687. On y inhumait les curés dans le chœur. Quant aux seigneurs de Ligne, ils étaient enterrés dans leur village d’origine (près de Leuze).

L’église actuelle fut construite par Louis-Stanislas Poisson (brasseur à Montroeul) et Alexandre Fally (maître maçon à Quiévrain) entre 1840 et 1846, année de sa consécration. Elle est de style néoclassique, constituée majoritairement de briques et de pierres pour la partie décorative. Elle comporte :

  • un portique à pilastre et un fronton à l’antique.
  • Une tour au-dessus du porche
  • trois nefs de cinq travées
  • couverte d’une voûte en plein cintre, séparée par des arcs doubleaux et des colonnes d’ordre toscan.
  • Un chœur à abside
  • Des autels du XVIIIème de style Louis XVI
  • Un banc de communion de 1719, baroque
  • Une chaire de Vérité, XVIIIème
  • Un confessionnal XVIIIème
  • Une cuve en pierre calcaire des fonts baptismaux, 1601
  • Un jubé, 1867
  • diverses dalles funéraires fin XVIIème, XVIIIème
  • des peintures du XVIIème au XIXème
  • une statue St-Eloi, bois polychrome, fin XVème-début XVIème
  • une statue St-Lambert, bois polychrome, XVIIIème
  • des stalles XIXème

Saint-Lambert est invoqué pour la guérison ou la préservation des douleurs rhumatismales, des accès de fièvre et de goutte. Il est fêté le 17 septembre. Anciennement c’était un lieu de pèlerinage.

En face de l’église : un monument aux morts de 1914-1918 de style Art Déco.

Le presbytère est du XVIIIème.

Le Calvaire du quartier de « la Croix ». Au croisement de la rue venant de l’église et de celles qui vont vers Quiévrain, (anciennement vers Crespin) et vers Thulin (et anciennement vers Saint-Ghislain – il rejoignait sans doute le chemin qui allait de Condé à Saint-Ghislain). Déjà cité dans des actes du XIVème et du XVème. La tradition dit qu’une église ou plutôt une chapelle, dédiée à Notre-Dame de Liesse (Liessies ?), a existé à cet endroit. Des actes et des annales citent ce nom. Mais aucune date n’est citée. Un bâtiment à proximité porte la date « 1636 ».Actuellement on y voit un calvaire et une chapelle, datant de 1921.

L’appellation de la « Croix » peut provenir du fait qu’il s’agit de croisement de chemins, ou bien du calvaire lui-même, ou même encore du dernier seigneur du fief de Thirissart, le comte Clerfayt de la Croix.

La chapelle de Sainte Barbe. Au hameau de la Noyelle, première moitié du XIXème. L’actuelle date de 1825. Elle remplaça d’autre(s) construite(s) auparavant.

La chapelle de Saint Roch. Au hameau de la Marchelle (en face de la place communale), XVIIème. Erigée en 1820 à la place d’une autre qui datait de plusieurs centaines d’années.

Chapelle Notre-Dame-de-Lourdes, rue de Thulin, XIXème

L’habitat

Il persiste aujourd’hui quelques petites maisons basses et des fermes du XVIIIème et du XIXème.

Certaines fermes sont en quadrilatère :

  • Ferme-brasserie (33, rue du Fayt) avec sa tour-porche – 1814. C’est elle qui possédait autrefois un moulin à huile. Elle cessa ses activités brassicoles lors de la deuxième guerre mondiale.
  • Ferme Quintart (3, rue du Fayt), 1824
  • La place, arborée, est bordée de quelques habitations des XVIII-XIXème, ainsi que de l’ancienne maison communale, bâtie dans la première moitié du XIXème.
  • Dès la deuxième partie du XIXème, le village s’est étendu par des maisons mitoyennes à étages, puis dans la seconde partie du XXème sont venues s’ajouter des villas. Un quartier résidentiel, la cité des Prés (à proximité du champ des Préelles), a été construit.

 

Bibliographie

Esquisse historique et géographique, T1 & T2, Abbé Cl. Moulart, Impr. G. Warny, Leuze

Montroeul-sur-Haine : traces d’une nécropole gallo-romaine fouillée au XIXème siècle, Dufrasnes et Leblois, Annales du Cercle d’histoire et d’archéologie de Saint-Ghislain, t.XI, 2008

 

Thulin

Entité communale d’Hensies

Le territoire

Superficie: 861 ha

Altitude: 20 m (Haine) à 36m (limite d’Elouges)

Situation géographique : ce village s’est constitué dans la vallée de la Haine, sur sa rive gauche.

Cours d’eau : 

Quatre ruisseaux traversent son  territoire et se jettent au nord dans la Haine, en aval de l’ancien moulin:

  • A l’ouest, le Ruisseau (Rieu) d’Elouges qui descend de Wihéries par Elouges. Il passait autrefois presque au centre du village. Son cours fut détourné plus à l’ouest, et enfin il fut couvert en partie, puis canalisé dans sa partie terminale.
  • A l’est, le (Grand) Séquisse qui descend de Dour (où il s’appelle ruisseau Delval) et rejoint la Haine aux environs du hameau de Débihan
  • Le Rowet (ou Reu – dénomination en rapport avec l’appartenance à une certaine époque de terres au seigneur du Roeulx), sépare Thulin et Montroeul-sur-Haine. Il rejoint le Rieu d’Elouges. Il venait du Saulçoir.
  • Un ruisseau, venant du château de Boussu, se jette dans la Haine à Débihan.

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : toute la vallée de la Basse-Haine était marécageuse. Les hommes, pour la cultiver, ont dû, non seulement relever les berges de la rivière, mais aussi draîner les terres en creusant un réseau dense de courants (ruisseaux artificiels). Entre ceux-ci, se trouvent des prairies humides, bordées de petits bosquets de peupliers et de saules. Les terres sont moins humides dès qu’on s’avance vers le sud. Elles ont permis des cultures. Les versants au sud du village qui commencent à monter vers le Haut-Pays étaient boisés et ont été défrichés à diverses époques. On y voit aujourd’hui le terril Saint-Antoine qui s’est couvert d’une parure verte.

Nature du sol : alluvionnaire et limoneux

Nature du sous-sol : calcaire, houille (profond)

Au Moyen Age, le village de Thulin était plus étendu qu’aujourd’hui. Il y avait une enclave sur Elouges confinant à Dour (occupée par la seigneurie de Baem), un « pré de Wencques » sur Hensies, ainsi que le bois des Malagnes (bois d’Hainin), appartenant aujourd’hui à Hainin.

Préhistoire

Néolithique (Homo Sapiens) :

Quelques objets préhistoriques ont été trouvés sur le territoire de Thulin par Philippe Rinchon et Charles Debove. Au hameau de « Poningue », on a retrouvé des silex taillés (en porphyre rouge comme à Elouges), des haches polies, des racloirs et des grattoirs, ainsi que divers instrumente tranchants, évoquant un habitat néolithique. Il en serait de même le long de la Haine.

Selon Debove, le hameau de Poningue, petit plateau s’élevant près des marécages de la Haine, aurait révélé l’emplacement d’une hutte du néolithique. Ces endroits en bord de Haine étaient très boisés et favorisaient des activités de pêche et de chasse.

Au « Sardon » en 2003, il fut ramassé un petit grattoir sur éclat de hache polie en silex de Spiennes (néolithique moyen).

On a également évoqué un mégalithe, selon un acte scabinal de 1785, à l’endroit appelé  « Pierchyse » (dolmen?), près des courtiseaux de « Lescuire ».

Plus récemment, en 2003, les archéologues Mrs Dufrasnes et Leblois, ont fouillé au lieu-dit « Boulevet », au hameau du Sardon, soit au nord du village, sur des terrains marécageux, autrefois situés à quelques mètres du Rieu d’Elouges (aujourd’hui il a été détourné et canalisé). Ils y ont trouvé un grattoir sur éclat d’une hache polie en silex de type Spiennes (néolithique moyen).

Ages du fer :

Du second âge du fer, soit à l’époque gauloise ou un peu avant, on a trouvé des vestiges à la Taule (à la limite entre Thulin et Elouges): une hache en fer, des ustensiles en bronze.

Certains ont évoqué un sanctuaire druidique au hameau de Débihan, au bord de la Haine.

On aurait aussi retrouvé à Sairue un dépôt de froment brûlé sur une pierre (druidique?), avec des récipients en fer, en bronze et en pierre, ainsi que des fragments de céramiques.

Ces éléments sont issus de découvertes effectuées au XIXème siècle et rapportées par les historiens de l’époque.

En 1877, on y avait découvert de nombreux statères ambiens (Ier siècle avant J.C.) dans un méandre du Rieu d’Elouges.

Antiquité gallo-romaine

La route romaine Bavay-Gand (passant par Quiévrain-Hensies-Pommeroeul-Blicquy) passait à proximité de l’actuel village. S’en échappaient quelques chemins qui la reliaient aux villas et fermes gallo-romaines (celles-ci étaient connues à Elouges, à Audregnies, à Thulin, à Quiévrain, à Montroeul-sur-Haine et Hensies).

Il y a eu sur le territoire de Thulin un habitat romain. En témoignent quelques vestiges archéologiques.

Dans le petit hameau de « Sairue », un cultivateur découvrit en 1862 une urne cinéraire contenant plus de cinq cents pièces de monnaie d’argent, frappées à Rome, sous divers empereurs, depuis Septime Sévère (193-211) jusqu’à Gallien (267). Aucune pièce datant au-delà de cette époque n’a été retrouvée, pouvant faire penser que les premières invasions barbares ont peut-être arrêté le commerce ou fait disparaître la ou les  villas. On y trouva aussi une casserole et une passoire en bronze, ainsi qu’une pièce isolée (un sequin d’or).

Au « Sardon », ce sont des pièces en or qui ont été trouvées : de nombreux statères ambiens (en 1877) et des as de Trajan datés entre 98 et 117 (trouvés en 2014 par des archéologues du SPW)

Près de la place, on trouva un buste en bronze de Marc Aurèle et un plat rouge, ainsi que des traces d’un habitat gallo-romain et des vestiges d’aqueduc. Il est donc possible qu’une villa ou une ferme exista à cet endroit, peut-être celle qui aurait été bâtie par ce Tullinus évoqué plus haut et qui aurait laissé son nom à ce lieu, transmis oralement pendant plusieurs siècles jusqu’à ce qu’un petit groupe de paysans forme le noyau de l’actuel village. Il est vraisemblable que cette villa ne résista pas aux assauts barbares, peut-être déjà dès la fin du IIIème siècle. C’est peut-être son propriétaire qui alla cacher son argent dans une urne dans un champ de Sairue.

Premier Moyen-Age (période franque mérovin-gienne et carolingienne)

On ne sait rien de Thulin durant la période qui a suivi les invasions barbares, l’installation des mérovingiens et l’arrivée au pouvoir des carolingiens, au contraire d’Elouges où l’on a pu découvrir d’importants vestiges de l’époque franque. Thulin était-il habité ou non ? On n’en sait rien. Peut-être était-il redevenu une plaine marécageuse rendue à la nature.

Ou peut-être, pendant plusieurs siècles, quelques petites exploitations agricoles isolées ont existé, le plus souvent le temps de quelques générations avant de disparaître ou de laisser la place à d’autres. C’est ce qui a été constaté ailleurs pendant le Haut-Moyen-Age.

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 1030 (selon Rinchon)

Toponymie (anciennes orthographes) :

  • Tulin, v1139 – en latin : Tulino – vers 1555, c’était encore écrit comme cela.
  • Thullin, écrit jusque 1614 par les curés
  • Tullin
  • Thulin, à partir de 1643

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :

Selon L. Quicherat, cela viendrait d’un certain Tullinus, personnage cité par Tacite. Selon J. César, les « Tullingi » formaient un peuple de Gaule Belgique. Chotin pense que ce Tullinus fut le fondateur du village, peut-être un soldat romain vétéran qui aurait reçu des terres après la conquête et qui se serait établi comme colon. Ces colons devaient alors fournir du blé à l’armée romaine.

Ces hypothèses semblent peu crédibles dans la mesure où les villages se sont constitués près de 700 ans après la période gallo-romaine et qu’il ne semble pas y avoir eu de véritable continuité dans le temps.

Epoque de son apparition:

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: pas de chaussée antique, mais un chemin médiéval allant de Saint-Ghislain à Condé et à Crespin, traversant le milieu du village actuel

sources d’eau ou cours d’eau: le Rieu d’Elouges, dont le cours naturel traversait le village du sud au nord

source de bois: les bosquets, quelques bois du côté de Poningue et de Débihan, ainsi qu’au sud

proximité d’un lieu de pouvoir: pas de résidence fortifiée connue

Paroisse dédiée à Saint-Martin

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Hornu, puis Bavay (1159), puis Boussu (1804)

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Saint-Ghislain, ce qui fut confirmé par une charte d’asservissement de Gossuin de Thulin en 1170 et par une charte du pape Lucius en 1183. En d’autres termes, l’abbé de Saint-Ghislain nommait le curé de Thulin. Celui-ci percevait la dîme (un impôt en nature) de ses paroissiens et en restituait une partie à l’abbaye et une autre au chapitre Notre-Dame de Condé.

Les premiers habitants d’Hainin dépendaient de la paroisse de Thulin. Ils obtinrent la leur en 1295.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

Il semble qu’à l’origine de la constitution de la communauté rurale, le territoire de Thulin faisait partie des domaines appartenant aux comtes de Hainaut, probablement issus des domaines royaux de l’époque franque.

Ce territoire fut divisé en plusieurs fiefs à des époques différentes. On en distingue quatre importants :

  • – la seigneurie principale
  • – celle de Lescuire
  • – celle de Ramonerye ou de la Cure, à Poningue
  • – celle de Baem.

La seigneurie principale

Un comte, à la fin du XIème ou au début du XIIème, attribua une partie de ses domaines à un membre de la famille de Mons-Baudour. Quelques villages voisins faisaient partie “du lot”: Hautrage, Villerot, Baudour (à moins que cette seigneurie fut déjà en possession de cette famille), Boussu, Hainin, Dour (ou partie) et Ville-Pommeroeul (partie).

Les premiers noms de seigneurs, cités par les auteurs anciens, sont, comme pour les villages voisins cités:

  • Isaac de Mons, qui correspond probablement à Gossuin II « Isaac » de Mons (v1075-v1142). Il était le fils de Gossuin I de Mons (v1045-v1093), seigneur de Baudour et châtelain de Mons. On ne sait si ce dernier était déjà seigneur d’autres villages.
  • Gossuin de Valenciennes, qui correspond à Gossuin III de Mons (v1100-v1177), le fils du précédent. Il possédait les mêmes titres et les mêmes domaines que son père. L’historien Jacques de Guyse le présente comme un des seigneurs les plus riches du comté. Les noms de « Mons » et de « Valenciennes » viennent du fait que ces personnages étaient soit châtelains de ces deux châteaux (ce qui est contesté par l’historien Mathieu), soit pairs de ces châteaux.

Il est dit que Gossuin III n’eut qu’un fils, décédé jeune, et plusieurs filles qui se partagèrent l’héritage paternel et maternel.

La situation est ensuite plus compliquée.

On cite un certain Guillaume de Dour (v1100-1154), personnage assez mystérieux, dont on ne connait pas l’ascendance ni une éventuelle parenté avec les Gossuin, ni une proximité avec les comtes. On le dit seigneur de Dour, Thulin et Hainin. S’il semble certain qu’il eut une certaine autorité sur Dour (voir le chapitre consacré à ce village), il est assez difficile de penser la même chose pour Thulin et Hainin. Il était contemporain de Gossuin III de Mons. Or ce dernier était à coup sûr seigneur d’Hainin, dont sa fille Rose hérita à sa mort. Ce même Gossuin III céda en héritage ses divers domaines à ses filles (dont Boussu et Baudour).

Par contre, on ne sait rien de Thulin. Gossuin III  avait un fils, également appelé Gossuin, mais que de Guyse dit mort jeune.

Pour Thulin, il existe un autre personnage cité : Gossuin de Thulin ( ?-1188), donc un seigneur qui a pris le nom du lieu. Y résidait-il? Il fut chevalier, conseiller et diplomate du comte Baudouin V. En 1170, il signa une charte d’asservissement à l’abbaye de St Ghislain, par laquelle il lui donna la collation (droit de nommer les desservants de la paroisse), ainsi que la dîme de Thulin et d’Hainin. Ce même Gossuin fut envoyé en ambassade chez l’empereur Frédéric I Barberousse à trois reprises en 1187 et 1188. Il est cité dans plusieurs actes de cette époque.

Qui était-il ? La logique voudrait qu’il soit le fils, soi-disant mort jeune, de Gossuin III de Mons. Mais rien ne vient prouver cette hypothèse. Et nous sommes obligés de nous en tenir là jusqu’à plus amples informations.

D’autres personnages, nommés « de Thulin » sont mentionnés dans divers écrits, sans que l’on puisse savoir s’ils furent aussi seigneurs du village :

  • Nicolas de Thulin, abbé de l’abbaye de Crespin (1315-1321). L’évêque de Cambrai confirma en date du 23/10/1275, la donation par Nicolas de Thulin à l’abbaye de Vicoigne de tous ses biens, sous réserve d’usufruit, situés à Athis, à Audregnies, Blaugies, Dour, Elouges et Erquennes.
  • Jean de Thulin, religieux dans la même abbaye
  • Gauthier de Thulin? Cité dans un acte de 1299 comme fondateur d’une chapelle près du chœur de l’église.

Maison d’Aspremont

A un moment non déterminé avec précision en fin de XIIIème siècle, et sans en connaître la raison (achat, héritage ?), la seigneurie principale passa à la famille d’Aspremont, originaire de Lorraine. Ce fut aussi le cas aussi pour les seigneuries de Quiévrain et d’Amblise (territoire situé dans l’actuel village de Crespin). Si Quiévrain ne resta que deux générations dans la Maison d’Aspremont (Mahaut d’Aspremont apporta cette seigneurie en dot vers 1305-1310 à Simon III de Lalaing), il n’en est pas de même pour Thulin et Amblise qui continuèrent dans la famille Aspremont jusqu’en 1513. Ces seigneurs avaient droits de meilleur catel, de relief et de formenture sur Thulin, ainsi que des rentes diverses. Les seigneurs d’Aspremont, dont il est à peu près certain qu’ils furent seigneurs de Thulin, sont :

  • Gobert VIII d’Aspremont (1302-1325). Fils de Geoffroy III d’Aspremont (1294-1306) et d’Isabelle de Quiévrain. Il n’est pas impossible, mais pas non plus certain, que ce dernier posséda déjà Thulin.
  • Geoffroy IV d’Aspremont (1305-1375), fils du précédent
  • Gobert IX d’Aspremont (1325-1381/1391), fils du précédent
  • Geoffroy V d’Aspremont (1360-1391), fils du précédent
  • Gobert X (1394-1450), fils du précédent. Celui-ci vit sa terre d’Emblise élevée au rang de principauté par Louis de Bavière, vers 1410.
  • Edouard d’Aspremont (1410/1415-1473), fils du précédent
  • Gobert XI (v.1450-1495), fils du précédent
  • Gobert XII d’Aspremont (v1475-1513), fils du précédent. Il  n’avait pas d’héritier mâle et apparemment n’a pas doté une de ses trois filles du domaine de Thulin. Il vendit la seigneurie de Thulin en 1513.

Maison de Ligne

C’est Antoine « le Grand Diable » de Ligne (1474-1532) qui acheta le domaine de Thulin en 1513. Il était le fils de Jean IV de Ligne et possédait déjà de nombreux titres et domaines. Il était baron de Ligne et de Beloeil, comte de Fauquemberghe, prince de Mortagne, et seigneurs de nombreux villages, dont celui de Montroeul-sur-Haine. Ses successeurs jusqu’à la Révolution Française furent :

  • Jacques de Ligne (1503-1552), fils du précédent. Baron de Ligne (dès 1532), puis comte de Ligne
  • Georges de Ligne ( ?-1579), fils du précédent
  • Philippe de Ligne (1533-1583), fils de Jacques, frère de Georges
  • Lamoral Ier de Ligne (1563, Beloeil-1624, Bruxelles), fils du précédent. Ligne et Amblise furent érigées en principauté en 1602 (1er prince) par l’empereur Rodolphe II. Par mariage, il devint baron de Werchin, seigneurie près de Valenciennes, dont le propriétaire a la charge héréditaire de sénéchal du Hainaut.

    D’Adrien de Montigny (fin XVIème)
  • Florent de Ligne (1588-1622), fils du précédent
  • Albert-Henri de Ligne (1615-1641), fils aîné de Florent de Ligne – sans postérité
  • Claude-Lamoral I de Ligne (1618, Beloeil-1679, Madrid), frère du précédent
  • Henri-Louis-Ernest de Ligne (1644-1702), fils du précédent
  • Antoine Jospeh Ghislain (1682-1750), fils du précédent – sans postérité
  • Claude Lamoral II (1685-1766), frère du précédent. La plus grande œuvre du prince Claude-Lamoral II est le domaine et le château actuel de Beloeil.
  • Charles-Joseph Lamoral de Ligne (1735, Bruxelles – 1814, Vienne), fils de Claude-Lamoral II. Il fut le dernier seigneur féodal de la Maison de Ligne.

La seigneurie de l’Escuire (ou Lescuire ou Lecuire)

Ce terme est sans doute dérivé du mot écuyer. C’était également une possession des comtes de Hainaut. Ce fief sembla avoir été attribué par le comte Baudouin II en 1085 au chapitre des chanoines de Notre-Dame de Condé qui administra la seigneurie jusqu’à la fin de l’Ancien Régime.

Il s’agissait d’une seigneurie foncière, située au centre de l’actuel village. Le seigneur put y appliquer la haute et la basse justice (même s’il céda la première aux Ligne à la fin du XVIème). Il prélevait cens et terrages, nommait les mayeurs et les échevins qui devaient gérer les biens (champs, arbres, barrières, …). Il pouvait prélever la dîme sur tout le territoire de Thulin (sauf Ponengre). Il en donnait une partie (1/9) au curé et une autre (2/9) à l’abbaye de St Ghislain. Il gardait le reste. Il entretenait l’église et le presbytère de Thulin. Il est possible que ce même chapitre posséda les marais communs servant de pâturages aux manants de Thulin, Montroeul et Elouges.

Le domaine seigneurial se trouvait entre l’actuelle Grand’Rue et le quartier du Brouta et pouvait donc couvrir presqu’un quart du village. C’était l’exploitation agricole la plus importante à Thulin. Il y avait une cense dont la façade donnait sur l’actuelle grand-rue avec une entrée pourvue d’un porche-colombier. Le domaine se partageait en courtiseaux (enclos entourés de haies vives – sur lequel une cité du même nom a été construite dans les années 1960) et champs (dont certains se trouvaient à l’entrée de Pommeroeul : le champ de Lescuire). Ses entrées comportaient des barrières de péage. Le domaine était loué à bail par le chapitre de Condé à un censier. Celui-ci fut souvent le maïeur de la commune de Thulin. Quelques noms depuis le XVIème siècle: Wattier, Estoret, de Biève, Derbaix, Hallez, Petteau, Lefebvre, Philippe Lemaur.

Le domaine fut démembré progressivement, notamment au niveau des courtiseaux à l’arrière de la ferme. Une partie fut vendue à Jean Philippe Lacroix en 1762 qui en fit une ferme. Celle-ci devint plus tard, au XIXème, une brasserie qui s’étendait jusqu’à l’angle actuel de la Grand-Rue et de la rue Paul Pastur. La cense de Lescuire fut achetée par Marie Augustine Hallet, veuve Petteau, en 1780-81, ainsi que les terrains alentour. Le reste fut dépecé lors de la révolution française en 1795.

Au milieu du XIXème, la propriété principale fut rachetée par Philippe Lemaur, patron d’une sucrerie (en face du presbytère). La cense fut victime d’un ouragan en 1876 et s’écroula, en même temps ce jour-là que le clocher de l’église et de quelques granges et toits de chaume du village. Elle fut rebâtie  par les Druart-Lefebvre, occupée plus tard par les Rémy-d’Hénin (d’où l’appellation actuelle de « Château Rémy »). Elle fut de nouveau incendiée le 23 août 1914 par les Allemands, lorsqu’ils furent arrêtés par les Anglais dans leur progression à la hauteur de cette bâtisse. Elle fut reconstruite après la première guerre mondiale sous sa forme actuelle.

Terre de Ponengre (actuel hameau de Poningue), aussi appelée seigneurie de la Ramonerye en 1647.

La terre de Ponengre devint propriété seigneuriale appartenant au curé de Thulin suite à  un don gratuit qui leur fut fait sans doute aussi au XIème siècle par on ne sait qui, le comte ou un des premiers seigneurs féodaux. La cure en resta propriétaire jusqu’en 1795. C’était une propriété foncière. Le curé, seigneur des lieux, avait divers droits de  nomination d’un mayeur et des échevins, de la perception du cens et des dîmes (menue et grosse), ainsi que de la basse justice (la haute et moyenne justices étaient exercées par les seigneurs de Thulin, qui percevaient aussi les droits banaux et de mortemain).

La seigneurie de Baem. Elle appartenait à l’abbaye de Saint-Ghislain dès avant 1146. Elle se situait au sud du village, à proximité d’Elouges et était constituée de terres cultivables affermées.

Il existait encore d’autres petits fiefs à Thulin :

  • Le fief ample de Gaveaulmet. A l’emplacement de la ferme-brasserie Grumiaux-Fontaine. Il relevait aussi du chapitre de Condé. Il appartint plus tard aux seigneurs de Ligne.
  • Le fief d’Arcan. Il appartint au XVIIème à la famille Riotte, qui, sans être de souche noble, avait le droit de porter l’épée et d’avoir un colombier, apanage des seigneurs. Il relevait aussi du chapitre de Condé et était également constitué d’une exploitation agricole.
  • le fief de Wencque, sur l’actuel territoire d’Hensies. Il s’agit peut-être de cette terre cédée par le seigneur Gobert d’Aspremont à l’abbaye de Saint-Ghislain.
  • le fief Henry de Haynin
  • le fief de Hannebert

La commune

On n’a pas retrouvé la charte érigeant le village de Thulin en commune. On n’en connait donc pas la date. Les premiers magistrats connus à Thulin datent de 1477.

Les maretz communs (“tenue d’eau des marais »)

Au nord-ouest du village, existait une grande zone marécageuse, alimentée par de nombreuses sources et les débordements réguliers de la Haine. Elle était, depuis le XIème, copropriété (zone indivise) des trois villages de Thulin, Montroeul et Elouges. L’herbe y était dure et grasse, bonne donc pour y faire paître bovins et oies par les manants des trois villages. Ce dernier élevage était d’ailleurs prisé, qui rapportait viande, duvet et plumes pour écrire. Les marais communs exportaient une grande partie de leur production en Hainaut et au nord de la France. Un garde assurait la surveillance des troupeaux et des saules, nombreux en ce coin. Il était rémunéré par les trois pouvoirs communaux. Un massard percevait les droits de pacage.

En 1547, une ordonnance de Marie de Hongrie décida de la construction d’une écluse sur la Haine, la seconde sur le territoire thulinois, ceci afin d’améliorer la navigation sur la rivière. Dans cette zone de marécages, déjà facilement submergée par les inondations, il y avait risque d’encore voir ce phénomène aggravé. Les cultivateurs des marais (des trois communes)  s’adressèrent au comte de Ligne afin d’intercéder auprès de la gouvernante ou du moins son bailli de Mons. Ce qu’il fit … sans résultat. L’écluse fut construite et n’apporta pas plus de dommages à ses riverains, qui, pourtant, continuèrent à se chamailler comme auparavant.

L’élevage intensif des oies appauvrit le terrain, ce qui dégénéra en conflit entre leurs éleveurs et les autres. Au point que petit à petit, on en vint à ne plus se supporter entre les cultivateurs des trois villages.

Déjà, en 1651, une partie des marais, à Débihan avait été lotie en 21 fiefs et vendus. En 1731, le pacage des oies fut interdit. Le 15 mars 1742, on organisa la sortie d’indivision à la Cour Souveraine du Comté. Les trois villages se partagèrent le marais qu’ils séparèrent par des fossés et puis se hâtèrent, particulièrement à Thulin et à Elouges, de le vendre par parcelles. Ce qui eut pour conséquence de voir les parts de pacages diminuer.

Après 1830, plusieurs conflits entre éleveurs thulinois d’une part et leurs pouvoirs communal ou provincial surgiront: interdiction d’y fabriquer des briques, obligation de conversion en champs. Le gouvernement provincial fit lotir les terrains et les afferma aux plus offrants qui en tirèrent grand profit par la culture, vu la fertilité de ces lieux.

Avec le temps, la zone proprement marécageuse s’est fort rétrécie et n’occupe plus qu’une zone réduite entre Thulin et Montroeul. On y rechercha du charbon en 1920. On en trouva mais son extraction était peu rentable et on abandonna le projet.

Evènements et faits marquants sur le sol de la commune

Au XIème siècle, à l’époque de la comtesse Richilde, mariée au comte de Flandre Baudouin, on vit Robert le Frison, l’oncle de ce dernier, venir exiger le comté flamand et batailler en Hainaut. Il aurait passé la Haine à Thulin, selon Jacques de Guyse, et aurait ravagé la région et emporté la victoire du côté de Saint-Denis.

En 1553, Charles Quint fit le siège de Thérouanne. Les manants d’Elouges, Montroeul et Thulin durent fournir des charrois.

En juillet 1572, la bataille d’Hautrage, ainsi que les pillages par les huguenots et les hommes de Louis de Nassau s’accompagnèrent de séquelles sur ces villages. Cette même année, les pillards s’en prirent aussi à la cure de Thulin, où ils brisèrent le coffre-ferme, contenant les archives de la seigneurie de Poningue.

De 1645 à 1696, la région connut des guerres quasi continuelles, dues aux ambitions des rois de France, dont eurent à souffrir les fermiers. Des maisons furent incendiées. La cure de Thulin fut complètement détruite en 1645. Les habitants eurent à souffrir de disette, de famine, de misère, d’épidémies. Des troupes françaises séjournaient régulièrement, notamment celles du duc de Luxembourg en 1689, puis celle du duc d’Elboeuf en 1696. En 1694, parce que Thulin était en retard de paiement et de fournitures, le mayeur Jacques Hallet fut pris en otage par les armées de Louis XIV, emprisonné à Ath et libéré contre rançon.

Entre 1750 et 1755, Thulin vit encore séjourner sur ses terres des troupes, tantôt françaises (du roi Louis XV), tantôt autrichiennes.

Le 14 août 1763, la flèche de l’église fut incendiée par la foudre.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

  • Département: Jemappes
  • Canton: Thulin, puis Boussu
Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Mons
  • Arrondissement judiciaire: Mons
  • Canton: Boussu
  • Entité communale depuis 1977:

En septembre 1830, lorsque les troubles commencèrent à Bruxelles, les autorités communales thulinoises prirent des dispositions pour éviter des émeutes et des pillages. Ainsi, ils supprimèrent l’annuelle kermesse. Une “garde de la sûreté et de l’ordre public” fut instaurée. Le 8 septembre, le bourgmestre Philippe Bosquet fit monter un drapeau rouge-jaune-noir en haut du clocher de l’église. De jeunes hommes, vingt-six au total, devinrent volontaires pour aller participer à la révolution, emmenés par Théophile Degardin. Partis trop tard, ils ne participeront pas aux combats dans le parc de Bruxelles.

Le premier bourgmestre après l’indépendance fut Philippe Bosquet. La vie communale était calme dans cette période.

La guerre 1914-1918

Elle est racontée, en ce qui concerne notre région, dans un chapitre plus général. Tant par les combats qui ont émaillé l’invasion allemande, que pour l’occupation et la libération.

Lors de l’invasion, les Thulinois, défendus par les Anglais, eurent à subir l’assaut allemand le 24 août 1914. De nombreuses maisons furent saccagées, pillées et incendiées. Les habitants avaient fui les combats en se réfugiant à Elouges et à Wihéries. Quelques-uns de ceux qui restèrent furent tués ou humiliés. On eut à constater des dégâts à la Maison Communale, transformée en centre de soins Croix Rouge, à l’église et au Château Rémy.

Les occupants installèrent:

  • des postes de garde dans la cure (d’où le curé a été chassé), en haut du clocher, à la gare
  • dans l’ancienne maison Legeay (devenue plus tard la poste) : la Kommandantur locale et la Feldgendarmerie
  • dans les dépendances de la brasserie Grumiaux : la cuisine
  • des batteries d’artillerie en attente d’être utilisées au front

Durant toute la guerre, beaucoup de soldats allemands séjournèrent à Thulin. On y voyait aussi certaines troupes qui revenaient du front pour prendre quelques jours de repos.

Lors de leur retraite à partir du début novembre 1918, les Allemands firent sauter la voie ferrée, le carrefour du saint-Homme et quelques croisements dans le village.

La guerre 1940-1944

A l’annonce de l’avance rapide de l’armée allemande, les neuf dixièmes de la population évacuèrent vers la France.

Thulin fut occupée dès le 20 mai et fut témoin le 23 mai d’une bataille entre une arrière-garde de l’armée française et les Allemands installés dans le village depuis quelques jours. Le combat dura cinq heures et fit quatorze morts de chaque côté. Douze officiers et 300 soldats français furent faits prisonniers. On édifia un Monument aux soldats Français après la guerre sur l’ancienne place du Calvaire, rebaptisée « Place des Français ».

Le village fut libéré le 4 septembre 1944.

A Thulin, comme dans d’autres villages de la région, il existe une communauté de chrétiens protestants qui ont leur temple.

Economie

Agriculture et élevageLe village de Thulin était, vu son terrain, destiné à devenir agricole. De nombreuses fermes, grandes ou petites, s’y sont développées. En 1702, on comptait 35 courtils à Thulin. Les plus importantes comportaient un courtil central entouré des bâtiments d’habitation et d’exploitation. On y accédait souvent par un grand porche.

Au XIXème siècle, lorsque la population dépassa les 2000 habitants (ce qui était beaucoup à l’époque pour un village), on comptait plus d’une centaine de fermes, dont la majorité étaient petites et produisaient juste de quoi nourrir la famille.

Vers le nord et dans les marais à l’ouest, se trouvaient des prairies de pâturages et vers le sud et l’est les champs cultivables. On y récoltait des céréales (blé, avoine, seigle, orge), des betteraves sucrières et fourragères, des pommes de terre et des légumes, ainsi que du chanvre, du lin et du colza. Le colza donnait une huile qui éclairait. Il fut remplacé par le pétrole, puis l’électricité.

On cultiva aussi du tabac à partir du tournant du XIX-XXème siècle. Par contre on y dénombrait peu de vergers fruitiers.

Les grosses fermes :

  • Cense des mayeurs de Ronquier (grand-rue en face de la rue Radon, actuelle ferme Paillot). 1515 (la plus vieille de Thulin) – grange de 1673
  • Cense de Lescuire (voir description de la seigneurie)
  • Cense des mayeurs Hallet (coin de l’actuelle rue Ferrer, actuellement habitée par le Dr Defrise). Construite en 1684 par Pierre Hallet. Elle était constituée d’un corps habitable (toujours existant), d’une grange (abattue en 1950), entourant une cour dans laquelle on pénétrait par un porche surmonté d’un colombier.
  • Cense des mayeurs Lefevre de Haynin, 1738 (la grange est de 1743). Angle de la rue de Condé (Citadelle) et de la Grande Ruelle vers Poningue. Famille apparentée aux seigneurs de Hainin. Style tournaisien, avec porche-colombier et tour intérieure surmontée d’un bulbe. C’est sur une parcelle de cette propriété que fut construite en 1884 la nouvelle école libre des garçons.
  • Cense Riotte-Hallez, 1773. Sur le chemin de Bellevue, en face de la rue du Calvaire (actuellement rue Ferrer, 6-8). Il y avait un colombier, privilège habituellement accordé aux seigneurs, mais cette famille possédait plusieurs fiefs et avait le droit de porter l’épée.
  • Cense de Pierre-Philippe Bosquet, 1733. En face, jouxtant le cimetière près de l’église. Ancien homme de fief, mayeur et mambour.
  • Cense Le Comte Lorio, 1684. Appartint aux mayeurs Hallez
  • Cense Rinchon-Roucou (puis Rinchon-Lesage)
  • Cense Roucou Alexandre (puis Degardin) avec moulin sur la Haine
  • Cense Patte de Laussois. Angle de la rue Haute et du chemin de la Porquerie
  • Ferme-brasserie de Lescuire
  • Cense de la seigneurie de Ramonerye à Poningue (Ponengre)

Entreprises dérivées de l’agriculture

Les Moulins à grains

  • Le moulin banal à vent (moulin Bréel). Durant l’ancien régime, les fermiers et les habitants de Thulin étaient obligés de faire moudre leurs céréales au moulin du seigneur, lui laissant une redevance. Celui des seigneurs de Ligne se trouvait sur le champ de Sairue, à l’ouest du village. Il perdit sa fonction seigneuriale lors de la période française. Il fut racheté. Il fut déplacé vers la rue de la Citadelle au XIXème siècle (moulin Truchart-Carton). Il fut culbuté par une tempête le 28 décembre 1914 et il ne fut pas reconstruit.
  • Celui d’Augustin Honorez qui fonctionna à la vapeur en 1829.
  • Le moulin (à vent et à eau sur le Rieu d’Elouges) de Gilles Rinchon, un censier, installé en 1829 au Saint-Homme, converti en moulin à vapeur, incendié en 1874
  • Un moulin près du Pont-à-Foin sur la Haine au Sardon
  • Un moulin à Débihan à proximité de l’écluse, au XIXème, pour attirer et alimenter les entreprises locales
  • Moulin à eau Alexandre Roucou, puis Anciau-Degardin. A la limite Thulin-Montroeul, sur le Rieu d’Elouges, juste avant qu’il ne se jette dans la Haine. Il existait avant 1833. Il fut équipé d’une machine à vapeur en 1854. Une fermette avec un porche existe en annexe.
  • Moulin à vapeur Crucq-Bricourt, rue de la citadelle

Une sucrerie, dirigée par Mr Alexandre Lemaur et son frère François-Philippe entre 1836 et 1877. Ce fut la première industrie thulinoise. Ce directeur habitait la cense de Lescuire et fut également bourgmestre de la commune. L’entreprise se situait devant l’église. C’est dans cette entreprise que fut inaugurée en 1824 la première machine à vapeur thulinoise. Il n’eut pas d’héritier et son entreprise disparut à son décès.

Elle fut remplacée par une faïencerie  en 1887 par Victor Ducobu, banquier, propriétaire de la papeterie de Débihan et d’une sucrerie à Boussu. On y fabriquait de la céramique de qualité (statuettes, vaisselles, …) , artistiquement décorée, qui a eu du succès à l’exportation. De 1887 jusqu’aux années 1960, sous la houlette de V. Ducobu, puis de ses deux enfants Arthur et Victoria (1887-1922). De 1923 à 1971, l’entreprise s’appella « Société Anonyme des Faïenceries de Thulin » et fut dirigée par Mr. Léon Cyriaque. L’entreprise s’essouffla après la deuxième guerre mondiale. La société fut dissoute en 1973. Elle fut alors totalement démolie et remplacée par l’actuelle école communale.

A Débihan, près de la Haine (et de son écluse), se sont succédée sur le même site plusieurs entreprises :

  • une filature de laine, créée en 1829 par Mrs Carlier et Roland
  • une scierie de marbre, par les mêmes personnes (1836-1851)
  • Le tout fut remplacé en 1862 par une papeterie à l’initiative de Victor Ducobu, associé à François Roland. On y fabriquait du papier d’emballage et plus tard des cartons. On utilisait une machine à vapeur. Plus tard V. Ducobu, seul, installa un gazomètre à charbon pour produire de l’électricité pour son usine. A la fin du siècle, cette papeterie était la première du Hainaut. Quelques incendies (1893, 1911) et des changements de propriétaires affaibliront l’usine. Entre-temps des fêtes et des ducasses furent organisées par Ducobu à Débihan. Une cité ouvrière fut bâtie à proximité. Ducobu entra en politique et devint bourgmestre en 1892. Il décéda en 1897. En 1940-44, les Allemands y firent déshydrater les pommes de terre pour l’armée.

Après plusieurs changements de propriétaires, Henri Lammerant et son épouse fondèrent les « Cartonneries de Thulin » en rachetant le site. Ils modernisèrent l’outil pour produire des boîtes d’emballage de poudres à lessiver, fournissant Unilever, Procter & Gamble entre autres et exportant 90% de leurs produits vers les pays voisins. En 1972, rachetant une entreprise gantoise, Henri Lammerant fit concevoir des machines produisant des emballages plastiques, notamment pour disques CD depuis 1987. Ils fermèrent l’usine gantoise. Aujourd’hui ses enfants ont repris les activités de production. L’entrepris s’appelle « Carthuplas ». Le bâtiment d’habitation date de 1922.

La « Papeterie Semoulin », encore présente, a été créée en 1910 par Jules Semoulin. Elle s’est spécialisée après 1945 dans la production de sacs en papier et de bobines imprimées pour l’emballage. Elle a continué à se moderniser par la suite, s’appelle aujourd’hui « Semoulin Packaging » et est toujours dirigée par les descendants du fondateur.

Au XIXème siècle, ont encore fonctionné à Thulin

  • Une fabrique d’étoffes et de tissage de sacs de laine pour la sucrerie (Nimal, 1856 et 1859)

Mais on sait qu’il y eut à Thulin des tisserands dans les siècles antérieurs et notamment un certain Jehan Lefebvre en 1589. On y a tissé le lin jusqu’au XIXème.

  • Une manufacture de casquette (Boulanger-Populaire), v1862
  • Une savonnerie
  • Une bouchonnerie
  • Une saboterie
  • Une scierie de marbre (Carlier-Roland, 1836)
  • Une scierie de bois (Dupont, près de la gare)
  • Des menuiseries, charronnage
  • Deux forges de maréchal-ferrant, une ferronerie
  • Un atelier de galvanisation (la Seauterie)
  • Une tannerie (Elie Bélanger), au Sardon (actuellement Maison d’Oscar Dupont). Ce directeur était le père d’Elie Bélanger (1860-1912), médecin thulinois apprécié. Il fit de la politique, devint conseiller communal en 1887, puis échevin. Il fit beaucoup pour le développement de la fanfare communale. Il créa à Thulin une société de prévoyance, ancêtre d’assurance mutualiste.
  • Une malterie (Grumeaux-Fontaine)
  • Une fabrique de tabac (E. Quintard, v1855 à 1900
  • Des brasseries. On cultivait à Thulin de l’orge, du houblon, de  l’escourgeon et de l’avoine, indispensables à la production de la bière. On en importait aussi de Pommeroeul et d’Hensies. Une brasserie existait déjà au XVIème, peut-être tenue par Jehan Wattier, mayeur de 1537 à 1560, aussi censier. La famille Ponthus-Wattier en avait toujours le gambage pour le prince de Ligne en 1575. Une autre (ou la même?) appartenait à André Couteau et fut vendue en 1651. Les brasseries du XIXème siècle :
    • Destray (1844)
    • Bosquet (1856)
    • Brohée-Tromont (1869) à l’angle de la rue Paul Pastur et de la Grand’rue (n°58). Elle faisait partie anciennement du domaine de Lescuire. Les bâtiments actuels furent construits en 1762 par Jean-Philippe Lacroix, originaire de Bettignies (France), qui épousa en 1751 Hélène-Joseph Tromont de Thulin. La maison d’habitation, aujourd’hui occupée par le Notaire Pierre Culot et son épouse le Docteur Rouveroy, se trouve au fond d’une cour dans laquelle on entrait jadis par un porche-colombier, construit en 1820 et détruit en 1963. Jean-Philippe Lacroix, devenu lieutenant-mayeur en 1768, mourut l’année suivante. Sa veuve se remaria en 1774 avec François-Joseph Petteau et mourut elle-même en 1798, sans enfant. La propriété passa au couple Philippe Ballant-Anne-Marie Tromont, cultivateurs,  en 1804. Puis en 1806, Antoine Degardin en devint propriétaire. D’abord fils d’un maître-batelier, puis agriculteur, il devint brasseur en 1820. Il y adjoignit en 1832 le métier de meunier, par l’achat de l’écluse-moulin du Sardon, sur la Haine. Il décéda en 1831. Son fils Antoine hérita du moulin et son second fils Théophile reçut la ferme-brasserie. Ce dernier revendit l’entreprise en 1834 à Jean-Joseph Destray, de St Ghislain, dont la veuve, Agnès Delacroix, continua les activités après sa mort, jusqu’en 1868. L’immeuble fut exhausté en 1860. En 1868, elle vendit la propriété à Eugène Brohée (1825-1902), de Boussu. Ses deux enfants, Albert et Emile, en hérièrtent en 1884. A la mort du premier, sa veuve Julia Tromont continua l’activité de brasseur, achetant les parts de son beau-frère. Affaiblie par les Allemands qui réquisitionnèrent les cuves pendant la guerre, la brasserie dut fermer ses portes en 1920.
    • Grumiaux-Fontaine (1876)

Les brasseurs, pendant l’ancien régime, étaient soumis à un droit de gambage sur leur production.

Les commerces étaient variés et nombreux. Avant la Révolution française, il n’existait pas de boucherie. Chaque fermier tuait ses bêtes et les faisait découper par un artisan-boucher. Et chaque ménage élevait un cochon pour ses propres besoins. On ne mangeait pas de la viande tous les jours.

Il existait un commerce de chevaux (H. Carpentier).

La houille à Thulin

Thulin a bénéficié de l’absence de terrils et d’industrie d’extraction de la houille. Ce n’est pas faute d’en avoir cherché dans son sous-sol, au Saint-Homme, dans les marais, à Débihan, à la limite de Boussu-Bois … entre le XVI et le XVIIIème siècle en surface, au milieu du XIXème par des sondages en profondeur, créant des avaleresses (puits qui n’atteignent pas le niveau de la houille).

A proximité du Bois de Boussu, au sud du village, un petit hameau, appelé « Alger » se développa auprès d’une de ces exploitations. Il a disparu par la suite à la fin du siècle. Ces recherches s’arrêtèrent en 1844.

Dans les villages en bord de Haine, entre Saint-Ghislain et Montroeul, ainsi qu’à Quiévrain, il était non rentable d’extraire de la houille.  Il fallut creuser jusqu’à 318 mètres pour en trouver. Cependant, des galeries venant des fosses d’Elouges et de Boussu-Bois passent dans son sous-sol.

Au XIXème et dans la première moitié du XXème siècle, de nombreux Thulinois travaillèrent dans les charbonnages de Boussu-Bois, Dour et Elouges. Ils partaient le matin, le plus souvent à pied, pour rejoindre les fosses et en revenaient fourbus le soir. Un chemin, partant du Quéniau, traversant le chemin de fer  lorsqu’il fut construit, à pied ou sur une passerelle (construite en 1880 et démolie lors de l’électrification de la ligne en 1980), parallèle au Séquisse, traversant la Grand-Route, menait jusqu’au Bois de Boussu. Un autre allait vers Dour.

Plusieurs Thulinois périrent lors de coups de grisou dans les mines de Boussu (28, le 5 mai 1845), d’Elouges Longterne Ferrand (14,  le 6 mai 1852) et d’Elouges-Bellevue (6, le 2 juillet 1861).

En 1981, une société allemande vint dans les marais étudier la possibilité de gazéifier le charbon sous-jacent. Mais les recherches furent abandonnées après quelques années.

Lorsque la région offrait de l’emploi (entreprises de Crespin et Quiévrechain, celles de Boussu et Dour), de nombreux Thulinois y travaillèrent dans la première moitié du XXème siècle. Puis la crise économique amena son lot de chômage dès les années 1970.

Evolution de l’habitat et du réseau routier

Dans l’Antiquité, les grands axes de circulation, autour de Thulin, étaient la Haine (pour les marchandises sur des barques plates) et la chaussée romaine partant de Bavay vers Blicquy et la Mer du Nord, passant par Quiévrain et Hensies. Des chemins secondaires reliaient les petits noyaux d’habitation.

Au début du Moyen Age, deux chemins se croisaient à peu près au centre de ce qui fut sans doute le noyau originel du village :

  • le chemin de Saint-Gislain à Condé et Crespin, passant par Boussu, Hainin, Thulin, Montroeul-sur-Haine, Hensies, Bernissart et Condé (actuelle rue Léon Mahieu, anciennement rue de la Citadelle ; rue Victor Delporte et rue Michel Cavenaile, anciennement rue du Calvaire)
  • le chemin de Belle-Vue, descendant d’Elouges, venant de Bavay par Roisin, Angre et Audregnies, traversant le village pour aller vers la Haine, traverser celle-ci, le village de Pommeroeul et rejoindre le Rond de Ville, là où passait le chemin de Mons et Saint-Ghislain à Tournai

Au sud du village, à la limite d’Elouges, passait un chemin d’est en ouest qui porta plusieurs noms, selon les époques et les endroits (Vieux chemin de Binche, Chemin du Vieil Empire) qui joignait Valenciennes à Mons et Binche.

Toutes ces routes étaient en terre et leur entretien était à charge du pouvoir comtal en ce qui concerne les grands axes et du pouvoir communal pour les chemins du village.

La première route à être pavée fut celle de Mons à Valenciennes. Après que la partie entre Mons et Boussu fut pavée entre 1723 et 1738, les Autrichiens hésitèrent à continuer jusqu’à la frontière française, craignant les visées militaires de Louis XV. Mais les considérations commerciales l’emportèrent. En effet cette route permettait l’acheminement du charbon borain vers la France. L’impératrice Marie-Thérèse prit donc la décision de faire paver entre Boussu et Quiévrain, aux frais des communes traversées et grâce à la main d’œuvre qu’elles fournissaient sous forme de corvées, leur laissant cependant les revenus de l’octroi. Les pierres venaient de Wihéries et le sable du Mont d’Elouges. Le travail fut terminé en 1760. La route passait par des ponts au-dessus des ruisseaux, ponts qui devaient être entretenus par les manants du village.

La même importance commerciale se retrouvait sur le chemin de Bellevue, venant d’Elouges et de Dour vers Pommeroeul. Par ici, aussi, on transportait le charbon extrait dans ces localités, mais aussi la pierre de Wihéries, que l’on amenait à la Haine pour être ensuite exportés plus loin. Marie-Thérèse en accorda le pavage en 1763. Les frais en étaient imputés aux Thulinois, à qui elle laissa les droits de barrière. De là, on allait vers Beloeil, où se trouvait le château des Ligne, seigneurs de Thulin et Montroeul, et de bien d’autres lieux au nord de la Haine.

Au fur-et-à-mesure que l’habitat grandissait, des chemins et des ruelles, en terre, se créèrent, notamment pour rejoindre les hameaux qui s’étaient constitués autour de fermes plus éloignées (Sardon, Poningue, Débihan, Quéniau, Brouta, Saint-Homme, Alger). Ces chemins étaient bordés de profonds fossés et drainaient les eaux et les résidus ménagers, ainsi que les fosses à purin. Ils étaient traversés par des ruisselets qu’il fallait franchir à gué ou sur des planches de bois.

Les maisons à étage (de type urbain) n’apparurent qu’au XIXème siècle, remplissant le plus souvent les espaces restés vides au fur-et-à-mesure que la population s’étoffait.

Au tournant du XVIIIème-XIXème siècle, on comptait plus de 2000 Thulinois et presque une centaine de fermes d’importance inégale, ce qui faisait de Thulin un des plus gros villages de la région et lui valut d’être chef-lieu de canton à l’époque française.

Des notables s’installèrent au centre du village et firent construire quelques demeures plus cossues au XIXème siècle, principalement autour de la Place. L’actuelle Auberge du XIXème date de 1822.

A partir du XVIIIème siècle, les voies de communication se sont améliorées, comme ce fut expliqué plus haut pour les grands axes. Pour remplacer un sentier qui venait de Dour à Thulin, une route plus large vint rejoindre le chemin de Bellevue, conduisant vers Dour, Blaugies, Athis, Fayt-le-Franc et la France.

Les autres chemins ont seulement été pavés au XIXème, à partir de 1820, à l’instigation des autorités communales.

Pour l’éclairage public, les premiers réverbères au pétrole apparurent en 1871. De vingt-huit, ils passèrent à cinquante, neuf ans plus tard. Un particulier, l’allumeur public, devait chaque soir s’occuper de l’allumage, le matin de l’extinction et de l’entretien.

Les premiers trottoirs furent aménagés dès 1871 aussi. Des caniveaux et des canalisations souterraines les accompagnent.

Thulin était un peu à l’avant-garde dans la région pour ce confort.

Il faut attendre 1913 pour que l’éclairage public devienne électrique. C’est aussi le moment où l’électricité s’imposa à l’intérieur des demeures et des entreprises. Les occupants allemands en 1915 accélèrent le phénomène pour les bâtiments publics.

Petit à petit, les rues verront remplacer les gros pavés par de plus petits et de mieux taillés. Viendront ensuite les conduites d’eau courante et de gaz.

La Haine, au nord du territoire, fut navigable pour des barques plates halées par des hommes ou des chevaux, au moins depuis la période romaine jusqu’à la construction du canal Mons-Condé, achevé en 1818.

Le Rieu d’Elouges traversait à l’origine d’abord la seigneurie de Lescuire, puis descendait à l’ouest du centre du village. A plusieurs reprises on le détourna plus à l’ouest pour qu’il prenne son cours à l’extérieur de la partie habitée. Ce fut le cas au XVIIème siècle et en 1741. On le détourna vers la Porquerie et le Brouta.On le passait à gué ou sur des petits ponts de bois. C’est au début du XVIIIème que ces ponts furent construits en dur sur les différents ruisseaux et dans les marais. Le premier pont en briques, comportant deux voûtes, fut érigé en 1716 au carrefour du chemin d’Audregnies et de la Porquerie. En 1881, on le reconstruira avec une seule voûte et il reçut alors le nom de “Pont Franco”. Quelques années auparavant, en 1876, une partie de son cours avait été voûtée sur une longueur de 88m avant d’atteindre le chemin d’Audregnies. La même année, un second pont solide était construit sur le chemin de Crespin (actuelle rue Michel Cavenaile). A la fin du XIXème, le Rieu traversait et alimentait en eau la tannerie d’Elie Bélanger, qui se trouvait au Sardon (actuelle propriété d’Oscar Dupont). En 1995, le cours du Rieu a été élargi et consolidé par des rives en bêton.

Les voies de communication d’époque contemporaine

De 1806 à 1818, le canal de Mons à Condé fut construit pour pallier l’insuffisance de la Haine face à une exportation de houille de plus en plus importante. A partir de ce moment, la rivière perdra toute son importance. Le canal croisait la route de Bellevue au « pont de Thulin ». A proximité, naquirent un chantier de construction de bateaux et des fours à chaux.

De 1842 à 1844 fut construite la ligne de chemin de fer entre Mons et Quiévrain, avec une station à Thulin. Ce train servait au transport des voyageurs mais plus essentiellement à celui des produits industriels et des marchés. Les gens se déplaçaient peu à l’époque, hormis les riches et les notables. Pour l’aménager, il fallut constituer entre Thulin et Quiévrain un remblai à l’aide de terres prélevées à proximité, ce qui entraîna le long de la ligne des excavations, appelées « emprises du chemin de fer » et plus communément « les trous ». Ceux-ci se remplirent d’eau, furent bordés d’arbustes et seront peuplés de poissons pour les pêcheurs. Pour passer les ruisseaux, on bâtit des ponts en pierre, dont celui du Rieu d’Elouges qui fut apprécié des enfants. Il était bordé de culées qui offraient de belles glissade, d’où l’appellation de « pont glissant ». La ligne était bordée d’un chemin de terre entre Boussu et Quiévrain. Une passerelle l’enjambait sur le chemin qui part du Quéniau vers le Bois de Boussu par Pierre d’Or.

Un chemin de fer industriel relia dès 1858 la gare de Thulin aux charbonnages de Dour et d’Elouges Longterne Ferrand et de là par Warquignies vers Saint-Ghislain. Elle descendait le long du Pavé de Dour à proximité du Séquisse. Ce charbon partait vers les usines métallurgiques notamment du Grand-Duché de Luxembourg. Mais cette ligne fut vite désaffectée en 1873 au profit d’une ligne Dour-Elouges-Quiévrain.

Dans les années 1960, une route contournant le village par l’ouest joignait Dour à Baudour.

Au début des années 1970 fut terminée l’autoroute E19 reliant Bruxelles (mais aussi les Pays-Bas et l’Allemagne) à Paris à l’emplacement du canal Mons-Condé.

Admirablement servie par les voies de communication, par un paysage vierge de toute industrie polluante, par des commerces de base variés, Thulin est devenue une commune résidentielle appréciée.

Patrimoine

L’église Saint Martin. On ne sait quasi rien des premiers sanctuaires. Une tour romane aurait cependant était érigée au XIIème siècle. Et peut-être une autre au XVème, dont certains restes furent retrouvés dans les fondements de la tour. L’église fut mise à sac par les huguenots en 1572.

Le bâtiment actuel a été construit en 1732-34, sur les plans de l’architecte Louis Abraham, aux frais de la commune. On a utilisé de la pierre de Wihéries. Seuls les fonts baptismaux, datant de 1576, représentent les vestiges de l’église précédente. Le clocher a été restauré en 1762, suite à un incendie par orage. Puis la tour se délabra peu à peu.

Au milieu du XIXème, l’administration communale ordonna de rebâtir la tour. Les travaux commencés en 1858 se terminèrent en 1862. Ils furent réalisés selon les plans de l’architecte Carlier. On en profita pour allonger le bâtiment: trois nouvelles travées furent ajoutées aux trois nefs de l’ancienne église. Un transept y fut accolé, lui donnant un plan de croix latine. Et on changea l’orientation : l’ancien choeur se trouvait sous l’ancienne tour. La nouvelle tour surmontera désormais le porche et l’entrée, alors qu’un nouveau choeur fut construit à l’autre extrémité. La flèche s’élève désormais à 56mètres, très élancée. La façade est néoclassique, en briques et en pierres. 

Certaines parties du mobilier sont antérieures au XVIIIème:

  • les fonts baptismaux, 1576
  • le buffet Louis XIII, de 1640
  • une statue de St Sébastien en bois polychrome
  • un ostensoir de 1660
  • -des dalles funéraires de doyens, de curés et de censiers

Sont postérieures à cette date:

  • les trois autels de style Louis XV, avec leurs retables sculptés (Notre-Dame de Lorette, Saint-Martin, Saint-Sébastien)
  • les lambris sculptés du côté du choeur (avec médailles d’apôtres)
  • la chair de vérité
  • les confessionnaux, style Louis XVI
  • les lutrins

Lors des travaux du XIXème, on y a encore ajouté, à l’initiative du curé Gailly:

  • un banc de communion Louis XVI
  • la peinture du maître-autel: l’Incrédulité de St Thomas, de Wauquier (Bruxelles), 1854
  • un Chemin de Croix, en 14 tableaux, peint par Colin (1868)
  • les orgues (1881) sur le jubé qui fut agrandi
  • les vitraux du choeur (1900) représentant les quatre fêtes chrétiennes
  • une copie par Devos d’une Montée au Calvaire de Rubens
  • un tableau représentant Saint-Eloi, peint sur bois
  • quelques statues de saints : Roch, Barbe, Rita, Antoine, Martin, …

Certaines pièces de mobilier proviennent de l’abbaye démantelée de Saint-Ghislain. Il y eut 18 cloches dont la plupart furent enlevées par les français pour en faire des canons.

L’église connut un grave incendie le 22 aout 1984, communiqué par celui d’un magasin voisin. Ce fut surtout le toit qui  fut détruit. 

Le presbytère actuel date de 1925. Il remplace l’ancien de 1777.

L’ancien cimetière. Jusque-là, accolé à l’église, il fut déplacé vers un endroit appelé “les Courtisiaux du Quesne” (actuelle rue E. Vandervelde) en 1859. L’espace près de l’église devint un parc communal planté de saules. Un monument aux morts de la guerre 14-18 y fut élevé et inauguré le 28 août 1921 en forme d’obélisque. Mais dans le mur du fond de l’église persistent encore de nos jours des dalles funèbres de divers personnages: curés, mayeurs, etc…

Les chapelles (les actuelles datent du XIXème)

  • Marie Consolatrice des Affligés, au Saint-Homme, 1860, bâtie par Emmanuel Roucou, un censier
  • Notre-Dame de Lorette, Poningue, actuelle de 1865, qui remplace une plus ancienne de 1782
  • Notre-Dame, place de la Perche, 1872
  • Notre-Dame de Lourdes, rue Radon, 1877
  • Sacré-Cœur, Sardon, 1922, par la famille O. Dupont
  • Notre-Dame de Lourdes, 1868, transformée en grotte en 1959, rue P. Pastur

La Maison Communale. L’actuelle fut bâtie en 1849 et remaniée en 1880. L’architecte était Mr. Limbourg d’Ath. Elle comporte l’écusson du village, soit celui des Ligne du XVIème siècle. Elle est de style éclectique. Une partie servit un moment d’école primaire pour les filles.

Vestige de l’écluse

L’écluse de Débihan. Le bâtiment actuel date de 1682.

La Maison du Peuple (rue Auguste Lecomte). Vers 1900, les leaders socialistes de Thulin, Auguste Lecomte et Alexandre Carton, décidèrent de créer une société coopérative, comme cela se faisait un peu partout. Ils achetèrent un bâtiment en face de la prairie de la Perche. On l’aménagea en café, salle de réunion et logement pour le tenancier. On y établit une boulangerie avec four et pétrin. C’est le tenancier lui-même qui assurait les tournées pour vendre le pain dans une fourgonnette tractée par des chevaux. En 1906, la fanfare « La Fraternelle » y vit le jour. Au début des années 1920, on arrêta la fabrication du pain. On fit venir celui-ci de la Coopérative de Pâturages. En 1924, on crée un magasin coopératif qui proposait de l’épicerie, de la lingerie et des petits articles ménagers. En 1925, la coopérative de Thulin et d’autres se regroupèrent dans « L’Union des Coopérateurs Borains », sise à Pâturages. En 1926, on construisit une nouvelle salle de fêtes sur un terrain contigu et on restructura l’ancien bâtiment. On y organisa des fêtes, des soirées dansantes, des séances théâtrales, des concerts et des conférences. Le magasin ferma ses portes en 1970.

En 1977, l’ensemble fut mis en vente et partagé en lots. L’Eglise Protestante en acheta une part pour y établir son temple. Une ASBL locale acheta la grande salle qui reste « la Maison du Peuple », rebaptisée plus tard de « Chiffon rouge ».

Bibliographie

Thulin, sa géographie, son histoire – Philippe Rinchon, Impr. Delzenne-Viseur, Chièvres, 1925

Les Rinchon de Thulin et leurs alliances – Philippe Rinchon, François de Cacamp, Ed. genealogicum belgicum, 1964

Thulin à travers l’histoire, de 1792 à 1918 – Gérard Hénaut

Thulin, balades au temps jadis – G. Hallez, 1997

Monographies diverses (La Porquerie, Maison du Peuple, La terre de Lescuire, La brasserie Brohée, L’église Saint-Martin, La cense des maïeurs Hallet, l’école du Couvent) – Georges Hallez

 

Hensies

Entité communale d’Hensies

Le territoire

Superficie: 983 ha

Altitude: 20 à 25m

Situation géographique :  Hensies est situé en vallée de Haine, sur la rive gauche.

Cours d’eau :  de nombreux courants de drainages en quadrillage (Grand Vivier, Saint-Roch, des Digues, Préelles, …) ont été réalisés pour pouvoir dessiner des étendues de prairies pour l’élevage. Le ruisseau des Préelles est à la limite de Montroeul-sur-Haine. 

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : marécageux, bosquets de peupliers, saules

Nature du sol : alluvionnaire, argileux et limoneux, sablonneux

Nature du sous-sol : grès, houille

Préhistoire

Néolithique (Homo Sapiens) :

On y aurait découvert, au XIXème siècle, deux menhirs (près d’un sentier entre la rue de Villers et la rue de Chièvres). On sait qu’il existait de nombreuses pierres levées le long de la chaussée entre Bavay et Gand (via Blicquy), celle-ci ayant repris le tracé de chemins plus anciens, celtiques ou même néolithiques. Pour rappel les mégalithes datent du néolithique, il y a plus de 5000 ans, bien avant les périodes gauloises et romaines. Les menhirs d’Hensies ont été détruits. L’un d’entre eux, appelé au moyen-âge « Caillou Saint-Georges », aurait été « récupéré » par le clergé local pour fonder un lieu de pèlerinage. Il aurait été ensuite transporté au centre du village, avant d’être remplacé par le pilori communal.

Selon Charles Debove, un pont de la Mottelette sur la Haine, à la limite de Bernissart, doit son nom à une butte qui aurait été un tumulus gaulois. 

Ont été découverts au XIXème siècle des vestiges du néolithique (un fragment de hache polie) et de l’âge du bronze (un fragment de hache à douille). Sans aucune précision sur un éventuel habitat local datant de ces périodes lointaines.

Antiquité gallo-romaine

Par contre, les découvertes relevant de la période gallo-romaine sont importantes. Une chaussée romaine, allant de Bavay vers Blicquy (et Gand), passait à Hensies, venant de Quiévrain (par l’actuelle rue de Villers, puis se prolongeant par la rue de Chièvres, sans réaliser la courbe actuelle qui ramène la circulation vers la place communale). De là elle prenait la direction de Pommeroeul et de Harchies.

Au lieu-dit « Malmaison », au nord du village actuel, un embranchement rejoignait une autre chaussée romaine du côté de Quarouble, qui allait de Bavay vers Tournai et le Pas-de-Calais. Au-delà elle rejoignait le centre urbain et militaire de Famars (près de Valenciennes). Ce chemin fut ensuite appelé « Chemin des Postes ».

Le vicus de Malmaison

A cet embranchement, où on a retrouvé des vestiges de maçonnerie, s’était probablement constituée une petite agglomération : « un vicus », sans doute en lien avec le « portus » (embarcadère entouré d’ateliers artisanaux) sur la Haine qui est situé à proximité, à Pommeroeul. De nombreux vestiges y ont été retrouvés depuis 1975.

A proximité de la Haine, les Romains y auraient construit une digue pour contrer les nombreuses inondations de la rivière. Une vanne de sécurité y avait été installée. Le vicus de Malmaison servait de relais le long de la chaussée romaine. Les voyageurs pouvaient s’y arrêter, se reposer, éventuellement manger. Un atelier de forgerons et de charrons était aménagé pour d’éventuelles réparations. Il est possible que le nom de « malmaison » provienne du mot latin « mansio » qui correspondait à un relais au bord d’une voie romaine. On n’explique cependant pas le préfixe –mal.

Pas très loin, sur le territoire actuel de Montroeul-sur-Haine, un fossé des Poncheaux (ponts-chauds) servait de trop-plein aux eaux du Vivier de Montroeul, construit aussi par les Romains en direction de Bernissart-Condé. 

D’autres vestiges ont été trouvés sur d’autres sites, prouvant l’existence d’autres habitats (Jean Dufrasnes, SPW). Au nord du « Calvaire des Six Chemins », à droite de la route venant de Bavay (1993). Une forte concentration de tuiles (tegulae) a été retrouvée, évoquant une habitation ou pour d’autres un petit camp militaire.

Au lieu-dit « La Préelle », à 800m de la chaussée romaine (1991, 2000), entre le centre d’Hensies et Montroeul-sur-Haine. De nombreux fragments d’éléments de toitures (tegulae, imbrices), un fragment de céramique sigillée (genre souvent importé du Centre de la Gaule), une monnaie en bronze du IVème siècle (ce qui est assez tardif dans l’occupation gallo-romaine). 

Au lieu-dit « Prairies des Sartis » (extrémité nord du village en bordure de la réserve naturelle de Harchies, à une centaine de mètres au sud d’un ancien lit de la Haine – 1992). Des fragments de tuiles, un morceau de meule rotative en arkose, des tessons de céramique commune et sigillée, évoquent également un habitat. 

Au hameau de la « Marchelle » (est du village, 1999-2000), découverte de tessons de céramique commune.

« Neuville », 1986 (Dufrasnes et Leblois) – vestiges d’une construction, connus depuis le milieu du XIXème : petits objets métalliques, fragments de meules en arkose, un sesterce, tête et fragments de fibules, bague, clef, fragments de céramique. Indices des II et IIIème siècle.

Pour résumer, le long ou à proximité de la chaussée romaine, ont existé dès les premiers siècles de notre ère

  • Un habitat (relais, villa ou castrum) au croisement des Six-Chemins (Calvaire à la limite de Montroeul, Hensies et Quiévrain)
  • Un habitat aux Préelles (commun avec celui signalé à Montroeul-sur-Haine)
  • Une concentration de constructions près de Malmaison où il existait peut-être un vicus, pas très éloigné de l’embarcadère de Pommeroeul, ni des autres constructions signalées aux Sartis et à Neuville, ainsi que sur le site Franoé de Montroeul-sur-Haine.
  • une nécropole importante sur le site Franoé
Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

L’abbaye proche de Crespin fut fondée en 646. Elle était située un peu plus à l’ouest que l’actuel hameau du Séminaire. Ce lieu-dit tiendrait peut-être son nom d’une ancienne grange où les moines entreposaient leurs grains de semence (du latin « semen »). D’autres sources pensent qu’il y aurait eu à cet endroit une maladrerie (endroit où l’on donne des soins).

Les moines défrichèrent des terrains boisés (les “Sartis”) le long de la Haine et de la Honnelle/Hogneau, qu’ils détournèrent et endiguèrent pour protéger le village contre les inondations de l’hiver. 

Un de ces moines au XIème siècle, Aybert, s’installa sur les bords de la Haine, sur le lieu-dit “Scopignies” (actuel village de Saint-Aybert). Il fut renommé pour ses miracles et on vint habiter à proximité, y créant le hameau de la Neuville dans une zone de forêts essartées et à l’abri des inondations de la Haine. On y cultivait le houblon et on y pêchait. On y fonda un petit port avec un embarcadère. 

A notre connaissance, il n’a pas été retrouvé de témoignages d’un habitat franc mérovingien ou carolingien (objets, sépultures) qui aurait pu être la continuation, même interrompue, de celui qui exista pendant la période gallo-romaine. 

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 870

Toponymie (anciennes orthographes) :

  • Hensitiae, la plus ancienne mention, datant de 870, figurant dans l’acte du Traité de Meersen où fut partagée la Lotharingie entre les descendants de Charlemagne.
  • Aisientiae
  • Esentiae
  • Hennesies
  • Hansy (1110)
  • Hancioe (1080)
  • Haizy (1486)
  • Hensies (1534)

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) : 

Ces différents termes pourraient évoquer le mot « Haine », accompagnés du suffixe -sies (“eau courante” en celtique) ou, comme ce fut également expliqué pour d’autres villages, le nom « Hansius, qui serait celui d’un légionnaire romain, ayant reçu des terres et qui y aurait fait bâtir une « Villa Hansia » à proximité de l’antique chaussée romaine.

Epoque de son apparition: le petit ermitage d’Aybert à la Neuville date du IXème siècle. L’apparition d’une communauté villageoise à distance de celui-ci est sans doute un peu plus tardif (entre le Xème et le XIIème siècle).

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine antique, les chemins médiévaux reliant l’abbaye de Saint-Ghislain à celles de Crespin et de Condé

sources d’eau ou cours d’eau: les nombreux rus, la Honnelle

source de bois: les bosquets éparpillés. Ils étaient sans doute plus importants au sud du village, endroit plus sec.

proximité d’un lieu de pouvoir: peut-être le château de Quiévrain et l’abbaye de Crespin

Paroisse dédiée à Saint-Georges

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Hornu, puis Bavay, puis Boussu

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné aux abbayes de Crespin et de Saint-Ghislain.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

Les Hensitois n’eurent pas de seigneurie propre.

Quelques parties de leur territoire (champs, prairies, bois) appartenaient aux moines de l’abbaye de Crespin (hameau des Sartis, hameau du Séminaire, Neuville). L’abbaye possédait aussi une chapelle. Ces possessions furent confirmées en 1142 par le pape Innocent II. Une exploitation agricole se situait aux Sartis et un entrepôt de semences au Séminaire.

La plus grosse partie du village dépendait du seigneur de Quiévrain, quant aux corvées, cens et impositions diverses. La justice était rendue par ces mêmes seigneurs pour certains faits et pour d’autres par le Prévôt de Mons, représentant le Comte de Hainaut. 

Il semblerait qu’il n’ait existé sur le territoire d’Hensies, pourtant érigé en commune avec un mayeur et des échevins, ni moulin ni four, ni forge ni tordoir. Les villageois s’adonnaient surtout aux cultures, notamment du houblon. Un brasseur y exerçait son métier.

Longtemps, de nombreux différends opposèrent les Hensitois aux moines de Crespin, principalement en raison des inondations dues au mauvais entretien des cours d’eau qui s’écoulaient sur les terres de l’abbaye. Un autre gros conflit éclata encore au début du XVIIème siècle, sous les archiducs Albert et Isabelle qui durent même intervenir pour le régler.

Il est à noter que le hameau de la Neuville (Nova Villa) était autonome sur le plan communal, géré par des échevins et des maïeurs pour l’abbaye de Crespin.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

Département: Jemappes

Canton: Thulin, puis Boussu

Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Mons
  • Arrondissement judiciaire: Mons
  • Canton: Boussu
  • Entité communale depuis 1977: Hensies
Evénements et faits marquants sur le sol de la commune

Hensies était à l’écart des grands axes routiers d’alors et la vie y fut relativement paisible pour ses habitants. Ce qui n’était pas le cas de Quiévrain et Boussu.

Cependant, à partir du XVIIème siècle, des guerres nécessitant le déplacement de grands corps d’armées, les firent passer à travers ses plaines. Pendant ces années où Louis XIV affrontait le roi d’Espagne sur ses terres du nord (Pays-Bas Espagnols), les troupes françaises furent souvent présentes à Hensies et dans les villages voisins. Le but était de repousser le plus au nord possible les frontières du royaume de France. Louis XIV n’arriva finalement pas à les établir sur la frontière naturelle du Rhin comme il l’espérait, mais il récupéra un grand nombre de régions et de villes des comtés de Flandre et de Hainaut. C’est ainsi qu’au Traité de Nimègues en 1678, les communes d’Hensies, Harchies, Bernissart, Thivencelles et St-Aybert se retrouvèrent dans le royaume de France. Il fallut attendre 1690 pour que les trois premières reviennent dans les Pays-Bas Espagnols. Cette année-là, le maréchal de Luxembourg, commandant une armée française, installa son Q.G. à Hensies, avant d’aller assiéger Mons et emporter une victoire importante à Fleurus.

En octobre 1792, les armées françaises du général Dumouriez, porteuses des idées de la Révolution Française, passèrent la frontière à Quiévrain et à Hensies, pour aller attaquer les troupes belgo-autrichiennes à Thulin et Elouges, avant d’aller livrer la bataille décisive de Jemappes.

C’est durant la période française que Napoléon Bonaparte décida la construction du canal Mons-Condé pour faciliter le transport de la houille boraine vers l’Escaut, car le gabarit de la Haine ne suffisait  plus à assurer des exportations qui étaient en hausse. A cette occasion, Napoléon fut reçu en 1813 à Malmaison lors d’une première inauguration, là où une écluse avait été aménagée. Ce canal ne sera achevé pourtant qu’en 1818, sous les Hollandais. 

En septembre 1830, des volontaires Hensitois, mêlés à des Dourois, s’en allèrent combattre à Bruxelles contre les Hollandais. Ils étaient menés par le commandant Constantin Lenne, qui par la suite devint conseiller communal. 

En 1848, des républicains d’Hensies accueillirent Ledru-Rollin aux premiers temps de la Révolte contre le roi Louis-Philippe. Il y rédigea des articles pour son journal.

Le reste de l’histoire d’Hensies se confond avec sa vie économique et le développement de son habitat.

Dans le cadre de la bataille de Mons, en août 1914, une armée anglaise tente de maintenir l’envahisseur allemand au nord d’une ligne constituée par le canal Mons-Condé et celui du Centre. Le 23 août, à Hensies, ont pris position trois compagnies anglaises, dont l’une à proximité de Malmaison, point possible de passage (à Thulin, la situation est identique près du Pont du canal ; il en est ainsi à chaque point de passage le long de cette ligne de défense). Le pont de Malmaison est détruit par les défenseurs, alors que les deux autres compagnies restées jusque-là dans le village viennent la rejoindre. L’artillerie allemande se mit en branle vers 17h00. Une attaque eut lieu en pleine nuit qui fit reculer vers le village les défenseurs britanniques. La situation était identique à Thulin, où de vifs combats eurent lieu dans le village. A Hensies, les Anglais préférèrent se retirer plus vite vers Quiévrain, ce qui permit aux Allemands de pénétrer dans le village le 24 août au matin et de se livrer à des exactions contre la population. Trois maisons furent incendiées, cinq personnes furent tuées et une quinzaine fut blessée. A 11h00, les Allemands avaient atteint Quiévrain. Le lendemain eut lieu la bataille d’Audregnies qui clôtura la bataille de Mons au profit des envahisseurs.

Puis ce fut l’occupation avec ses privations, ses vexations et ses déportations (184 Hensitois en tout). A Hensies, les Allemands installèrent un « central à chevaux », section destinée à préparer les chevaux qui devaient monter au front.

Le 13 octobre 1918, l’autorité allemande décréta l’évacuation du village. 1623 Hensitois obtempérèrent. Les 6 et 7 novembre suivants, les Canadiens délivrèrent Baisieux, Quiévrain, Crespin et Hensies. Il faut attendre le 8 novembre pour que Saint-Aybert, La Neuville et les Sartis puissent connaître le même bonheur. Les évacués regagnèrent le village le 13 novembre, deux jours après l’armistice pour constater de nombreux dégâts (voies de tram, carrefours, maisons et fermes).

La guerre 1939-1945 a commencé par une invasion-éclair, ce qui a minimisé les combats réels dans notre région. Il est à noter que le 1 mai 1944, le jour même où Saint-Ghislain fut bombardée par l’aviation alliées, des bombes tombèrent sur le hameau de la Neuville, semble-t-il par erreur, car elles visaient avant tout les infrastructures ferroviaires.

Economie

Exploitations agricoles et industries dérivées

Comme cela a été écrit dans l’introduction géographique, Hensies, en bord de Haine, était constitué de prairies humides, drainées pour permettre le pâturage des animaux domestiques. Plus au sud, se trouvaient des champs consacrés à la culture des céréales et des betteraves. Hensies s’est distingué aussi par la culture de plantes médicinales (surtout mauve, guimauve, souci).

Quelques industries liées aux cultures se sont développées, essentiellement des brasseries, une fabrique de chicorée et une fabrique de tabac. Il existait à Hensies des moulins à vent et à eau. Nous n’avons pas d’indication quant à la qualification banale de l’un d’entre eux. Un moulin banal devait obligatoirement être utilisé par les cultivateurs de céréales. Son usage s’accompagnait d’une redevance au seigneur du domaine. Il en existait un à Quiévrain. Certaines sources affirment cependant qu’il n’y avait pas de moulin au moyen-âge.

Industrie houillère

Par rapport aux autres communes du Borinage, l’exploitation houillère s’est développée beaucoup plus tard, après la guerre 1914-1918. Le sol de Hensies était très aquifère et rendait difficile le creusement de puits.

Des premiers sondages furent effectués en 1838 à la demande du duc d’Arenberg, de la famille des anciens seigneurs de Quiévrain et d’Hensies. Ils furent repris en 1858-1862 et prouvèrent l’existence de veines de charbon sous la commune.  Il fut alors décidé de créer une société d’exploitation. Avec de nouvelles techniques de forage, on réalisa encore des sondages en 1875. Une concession fut octroyée à la « Société d’Hensies-Pommeroeul ». Une autre société, formée par Mrs Lambert, Berneaux et Cie, qui prit le nom de « Société Civile du Nord de Quiévrain » débuta aussi des sondages un peu plus au nord. En 1899, les deux concessionnaires fusionnèrent en « Société anonyme des Concessions Houillères d’Hensies-Pommeroeul et du Nord de Quiévrain ».

La technique s’améliorant (congélation lors du creusement), la traversée des terrains meubles fut facilitée. Les sondages continuaient, avec l’aide de la Société Foraky, mais pas encore d’exploitation. En 1912, les deux sociétés fusionnèrent en une  « S.A. des Charbonnages Hensies-Pommeroeul » dont le siège se trouvait aux Sartis, à proximité du canal de Mons-Condé. On commença l’exploitation en 1918 sur le site des “Sartis“. En 1923, on ouvrit un deuxième site d’extraction, le Charbonnage Louis Lambert, entre la rue de l’Eglise et la rue des Chiens. Il était relié au site précédent par une ligne de wagonnets tractés. On y traitait le charbon extrait. Ce charbon était maigre et adapté à l’usage domestique.

Des Sartis, le charbon partait par voie d’eau (canaux) et par une ligne de chemin de fer reliant le site à la gare de Bernissart. On n’a pas vu s’élever des terrils, les marais ayant absorbé tous les détritus.

Si le puits Louis Lambert ferma en 1966 en raison de veines trop profondes et de la menace constante du grisou, on continua à exploiter celui des Sartis jusqu’au 31 mars 1976, date de fermeture de ce qui était encore le dernier charbonnage du Borinage. Les mineurs encore en activité allèrent travailler dans les derniers puits de la région de Charleroi pour quelques années encore. En effet, beaucoup d’autres puits borains avaient fermé entre 1952 et 1961. 

De ces deux sites, il reste encore aujourd’hui quelques vestiges en friche, dont la grille monumentale Art Déco du site Lambert, ainsi que des bureaux et des vestiaires aux Sartis. L’actuel bureau de police, à côté de l’église, était l’ancienne cantine du charbonnage et date du XIXème siècle.

L’exploitation de la houille à Hensies attira une forte immigration avant et après la guerre de 1939-1945. 

  • Ce furent d’abord des Polonais (entre 1920 et 1946),
  • Puis les Italiens en deux vagues (une première, peu importante, avant la deuxième guerre mondiale qui fuyait le régime fasciste, puis une seconde nettement plus importante dans les dix années qui suivirent la fin de cette guerre,
  • puis des Maghrébins (années 1960)
  • et surtout des Turcs (dès 1963 – cfr infra)
  • on trouvait également des Espagnols, des Grecs et bien d’autres qui constituent, eux et leur descendance, plus de la moitié de la population actuelle du village.

Une partie importante de ces immigrés quitta cependant le village pour aller s’installer dans d’autres centres industriels (entre 1958 et 1970)

Evolution de l’habitat

Il est le reflet de l’activité des habitants du village. Pendant des siècles, depuis la période romaine (et peut-être auparavant) jusqu’à la fin du XIXème siècle, la seule activité était agricole. Sans doute, au XIXème, vit-on quelques habitants aller travailler dans les charbonnages voisins ou dans les usines du nord de la France, mais la majorité restait au village. 

Jusqu’à la fin du XIXème, on pouvait voir à Hensies des fermes, petites ou grandes, et des petites maisons basses le long de ses chemins. Le centre du village, avec sa place, se trouvait au croisement des chemins menant à Quiévrain, à Montroeul-sur-Haine (et plus loin Thulin, Boussu, Saint-Ghislain), à Harchies (et plus loin vers Chièvres) et vers Condé. Pas loin de la place, triangulaire et bordée d’érables, s’embranchait une rue vers l’église.

Aujourd’hui encore il reste quelques petites maisons basses datées de la fin du XVIIIème et du début du XIXème. Il en est de même pour les fermes, dont les plus anciennes sont :

  • La ferme du Maïeur, quadrilatère, datant de 1788, au tournant de la rue de Chièvres
  • Une ferme, datant de 1800, au 65, rue de Villers
  • Une ferme à la Neuville, de la même période
  • Une autre au Séminaire

Au XIXème et au début du XXème, des habitations de type urbain (mitoyennes et à étages), sont venues compléter le centre de l’agglomération, le densifiant et l’étendant. Au XXème, avec les activités d’exploitation houillère, le phénomène s’est amplifié. Sur les axes principaux d’abord, avec des maisons ouvrières et quelques bâtiments plus cossus pour les gérants du charbonnage (ex : le château Desailly, rue de Crespin, 76).

De nouveaux quartiers virent le jour :

  • Celui des Sartis, entre 1913 et 1921, avec des maisons (une quarantaine) pour mineurs, pour employés, un hôtel, un magasin, une école
  • Celui des Acacias (190 maisons), à proximité, rasé lors de l’élargissement du canal (vers 1920)
  • Celui de la Rue de Crespin (1925), de la Cité Wauters (1934) et de la Nouvelle Cité (1951), au sud-est du centre, avec une école
  • Celui de l’Europe, au nord du centre (1964)
  • Celui du Champ de Fayau, au sud-ouest du centre (1972)
  • Celui de la Herse, au sud (1981)

Depuis 1976, Hensies est en fait devenue une cité résidentielle.

La communauté turque d’Hensies

Les premiers travailleurs turcs sont arrivés à Hensies en 1956, à titre d’essai, mais l’expérience ne fut pas poursuivie immédiatement. On pense que les conditions de travail et que la catastrophe minière de Marcinelle (8 août 1956) en sont une raison.

C’est pendant la décennie ‘1960 que la majorité de ces immigrants s’intensifia vers la Belgique, suite à des accords belgo-turcs de 1962. A Hensies, les premiers arrivèrent en 1963. C’étaient des hommes seuls qui envoyaient leur épargne à leurs familles restées au pays. Ils furent logés dans l’hôtellerie des Sartis et dans l’ancien couvent de Pommeroeul.

Par la suite, ils furent rejoints par leurs familles. Eux et les suivants furent logés dans les cités ouvrières (Sartis, Acacias, rue des Chiens). Entre 1963 et 1965, plus de 700 travailleurs turcs sont arrivés à Hensies, mais tous n’y sont pas restés.

Lors de la fermeture du site des Sartis, 30% sont rentrés en Turquie. Certains furent réaffectés dans les charbonnages encore en activité en pays de Charleroi, qu’ils rejoignaient en car. Les autres connurent la retraite. On compte plus ou moins 1120 mineurs turcs ayant travaillé à Hensies.

Les Turcs hensitois se sont bien implantés dans la région. Beaucoup achetèrent un logement qu’ils restaurèrent ou qu’ils  firent bâtir. Certains ouvrirent des commerces.

(d’après Les mineurs turcs des charbonnages d’Hensies-Pommeroeul, 2015, ASBL « Entraide des Travailleurs Turcs d’Hensies »)

Voies de communication

Longtemps, Hensies a conservé ses axes routiers antiques et médiévaux: la chaussée romaine Bavay-Blicquy et la voie secondaire vers Famars (Valenciennes), les chemins allant de Saint-Ghislain vers Condé et vers Crespin, auxquels se sont ajoutés un chemin vers Quiévrain et un autre vers Elouges (voie Elouges-Condé passant au Calvaire des Six-Chemins).

La Haine était navigable pour le transport de marchandises. Quelques petits embarcadères avaient été aménagés ici et là (Neuville, Sartis, Pommeroeul).

Le canal de Mons à Condé fut construit entre 1808 et 1818. Il fut fermé à la navigation en 1967 et fut supprimé au début des années 1970 pour servir de desserte à l’autoroute E19 qui n’offre pas d’entrée ni de sortie à Hensies même. Le poste-frontière y est situé depuis 1972.

Le chemin de fer n’est jamais passé à Hensies, sauf une ligne industrielle reliant les Sartis à la gare de Bernissart (ordonnée dès 1910), d’où une ligne permettait d’atteindre la gare de Blaton. Elle fut prolongée dans l’autre sens jusqu’au site Louis Lambert. Cette ligne fut supprimée en 1976.

Un tramway fonctionna quelques décennies entre la gare de Quiévrain et Pommeroeul. Il atteignait Hensies par la rue de Villers, puis par l’actuel site de l’avenue de l’Europe, il partait vers Montroeul-sur-Haine. Cette ligne fut supprimée en 1954.

A proximité des Sartis, un canal, creusé entre Pommeroeul et Condé, sert d’embranchement entre le canal Nimy-Péronnes et l’Escaut. De plus grand gabarit que l’ancien, il devait sans doute servir au transport de la houille, mais n’a jamais été entretenu du côté français. Des pourparlers sont toujours en cours pour le mettre en fonction.

Une nouvelle route, depuis la fin des années 1960, relie Thulin à Hensies (avenue des Droits de l’Homme).

Patrimoine

Eglise St Georges. L’édifice actuel est du XVIIème, hormis son chœur de 1781, restauré par l’abbaye de Crespin, peu de temps avant son abolition. Il existe encore des éléments antérieurs : une façade à pignons du XIIème, des chapelles du transept du XVème. La voûte de la nef est en berceau.

Le mobilier intérieur est du XVI-XVIIIème. Mais les fonts baptismaux datent sans doute d’un premier édifice du XIIème, à l’époque de la constitution de la paroisse. Autour de l’église, on trouve :

  • L’ancien cimetière, désaffecté au début des années 1950 au profit d’un nouveau, hors du village, à la rue de Villers. On y voit encore quelques vieilles pierres tombales. 
  • Un monument aux morts de la première guerre mondiale
  • Un monument aux morts de la seconde guerre mondiale
  • Une chapelle, datant de 1834, avec un Crucifix en bois polychrome du XVIIIème

Chapelle St Roch, XIXème

Chapelle Notre-Dame-de-la-Pitié, deuxième moitié du XIXème, rue de Villers

Maison communale, bâtie à la fin du XIXème

Maison du Peuple, rue de Crespin, de 1911, de style éclectique avec un frontispice à sgraffites

Ecole Communale, implantée en 1923, près de l’ancienne ligne vicinale Quiévrain-Mainvault.

Bibliographie

Je remercie Madame Halina Wojtan pour la documentation qu’elle m’a aimablement prêtée et qui m’a aidé à compléter de nombreux paragraphes de ce chapitre. Ainsi que Michael Demoustier pour sa contribution sur la guerre 1914-1918.

Hensies, étude socio-économique – Lionel Gobert & Séverine Rousseau, 2002-2003 (TFE)

Hainin

Entité comunale de : Hensies

Le territoire


Superficie: 256ha

Altitude: de 23m (près de la Haine) jusqu’à 60m (limite avec Dour)

Situation géographique

Hainin est situé dans sa majeure partie dans la plaine de la vallée de la Haine. Dans sa partie méridionale le village monte légèrement en pente vers les limites de Dour et de Boussu-Bois.
Il est séparé d’Hautrage au nord par la Haine.

Cours d’eau

Un ruisseau, le Grand Courant, qui draine les fossés des zones basses et se jette dans la Haine.

Aspect du paysage antique

La partie basse du village était autrefois marécageuse et couverte de bois. Il en reste encore aujourd’hui une partie (bois d’Hainin, bois de Débihan) et les zones agricoles y sont fortement drainées par un grand réseau de fossés. Ce sont des prairies humides et fraîches.

Nature du sol: argileux

Nature du sous-sol: crayeux

Préhistoire

Ages du fer 

Un potin du type Rameau A (monnaie nervienne, datant de 50 à 30 avt.J.C.) a été ramassé par Mr. A. Delvallée.

Pas de données quant aux périodes antérieures.

Antiquité gallo-romaine

(Non documentée)

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

On aurait trouvé une fibule en bronze d’époque mérovingienne (sans précision).

Le village

Première mention: 1146

Toponymie (anciennes orthographes)

Hanin
Henin
Hennin
Haynin (de Haine, la rivière – lieu ou terres de la Haine), orthographe fréquente qui désigne notamment la famille seigneuriale locale

Etymologie (hypothèses d’origine du nom)

Henehem (vieille voie, vieux hameau en germanique)
Le nom pourrait provenir aussi du nom de la rivière

Epoque de son apparition: probablement au Xème ou au XIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence

voies de communication: le village naît au bord du chemin qui relie les abbayes de Saint-Ghislain et de Crespin (et Condé)

sources d’eau ou cours d’eau: Haine, le Grand Courant

source de bois: de Hainin et Débihan, versant boisé au sud

proximité d’un lieu de pouvoir: le château des seigneurs de Haynin (dont on ne sait s’il précède ou suit la fondation du village)

Structuration du village

L’habitat le plus ancien se situe entre le chemin de Condé et la rivière. C’est là que l’on trouve encore aujourd’hui les maisons les plus anciennes, datant de la fin du XVIIIème et du début du XIXème siècle. 

L’église se trouve au croisement de deux axes routiers.
Des fermes étaient probablement disséminées dans la campagne autour du noyau du village, à proximité des axes de communication. La plupart ont été reconstruites au XVIIIème ou au XIXème siècle.
L’habitat s’est ensuit étoffé depuis le XIXème par des maisons de type urbain (mitoyennes et à étages), puis par des villas et enfin par une cité.

Paroisse dédiée à: Notre-Dame-de-la-Visitation
Elle fut d’abord une dépendance de celle de Thulin.
En 1310, Thomas d’Haynin, écuyer, obtint son autonomie. Pour cela, il fit don à la cure de Hainin de terres qu’il possédait à Chièvres et de rentes , … à condition que la cure et donc la paroisse existe. Ce qui lui fut accordé.
L’acte de donation fut contresigné par son frère Etienne II, seigneur d’Hainin, et par Roger, abbé de St Ghislain, qui resta collateur de la dîme.

Evêché: Cambrai jusqu’en 1803, puis Tournai

Décanat/doyenné: Bavay (jusqu’en 1803), puis Boussu

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Saint-Ghislain en 1146 par l’évêque Nicolas de Chièvres. Ce qui fut confirmé par une charte du pape Lucius en 1183.
Particularité: Une partie de l’actuel territoire de Dour, le “Petit-Hainin”, dépendait de la paroisse d’Hainin. Les habitants pouvaient être baptisés et se marier à Dour, mais devaient se faire enterrer près de l’église de Hainin. Une « Voie des Morts » descendait de ce hameau dourois vers Hainin.
Cette enclave en terre de Dour revint à celle-ci lors de la Révolution.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

Il semble qu’il n’exista qu’une seule seigneurie sur le territoire d’Hainin qui faisait partie des immenses domaines impériaux à l’époque de Charlemagne, récupérés un siècle plus tard par la famille des comtes Régnier.
Cependant, le “couvent” a été construit au XVIIIème siècle à la place d’une ancienne bâtisse de l’abbaye de Crespin. Il est donc probable que celle-ci possédait des terres à Hainin depuis une date inconnue. Il semble aussi que cette abbaye touchait une part de la dîme.

Liste des seigneurs de la seigneurie principale

La tradition prétend que ce sont les descendants de Régnier I « au long col » qui ont fait construire le premier château d’Hainin. Les données archéologiques et les documents connus ne permettent pas de le prétendre, mais, comme pour les seigneuries voisines (Hautrage, Boussu, Thulin et Dour – villages atteints par les chemins décrits plus haut), on sait que les habitants d’Hainin eurent des membres de la famille de Mons-Baudour à la tête de la seigneurie.

Maison de Mons

Il s’agissait d’une famille proche des comtes, probablement une branche cadette de la famille des Régnier, descendante de Rodolphe, frère de Régnier III. Il semble qu’elle occupa une place importante pendant quelques siècles à la cour des comtes. Certains furent châtelains de Mons et  de Valenciennes (encore que ceci est contesté par l’historien Mathieu). Ils furent à la tête de plusieurs seigneuries (Baudour, Villerot, Boussu, Dour, Hainin, Thulin), « aux confins » des domaines de l’abbaye de Saint-Ghislain, ce qui explique qu’ils furent régulièrement en conflit avec celle-ci pour des problèmes de délimitation et d’autorisation de pâturages pour les manants. 

Trois seigneurs sont régulièrement cités :

⦁ Isaac de Mons, qui correspond probablement à Gossuin II « Isaac » de Mons (v1075-v1142). Il était le fils de Gossuin I de Mons (v1045-v1093), seigneur de Baudour et déjà châtelain de Mons. On ne sait si ce dernier était déjà seigneur des autres villages cités plus haut, mais cela serait logique à l’époque où la comtesse Richilde, son époux Baudouin I et leur fils Baudouin II mettaient en place les éléments du pouvoir comtal et des pouvoirs seigneuriaux, souvent en opposition avec l’abbaye de Saint-Ghislain, « la rebelle » qui avait échappé à l’autorité comtale et était passée sous l’autorité impériale et surtout épiscopale.

⦁ Gossuin de Valenciennes, qui correspond à Gossuin III de Mons (v1100-v1177), le fils du précédent.Il possédait les mêmes titres et les mêmes domaines que son père. L’historien Jacques de Guyse le présente comme un des seigneurs les plus riches du comté. Il est dit qu’il n’eut qu’un fils, décédé jeune, et plusieurs filles qui se partagèrent l’héritage paternel et maternel.

Guillaume de Dour (v1100-1154)

Ce personnage « mystérieux » est dit « seigneur de Dour, de Thulin et d’Hainin ». Si cela semble réel pour Dour, domaine pour lequel il prit des décisions importantes (voir le chapitre consacré à ce village), cela apparaît plus douteux pour Thulin et Hainin. Il n’apparaît pas dans les généalogies connues des Gossuin de Mons, même si on a l’impression d’une parenté ou du moins d’une proximité. De plus, il est contemporain de Gossuin III, cité plus haut, qui était à coup sûr seigneur d’Hainin, puisqu’une de ses filles hérita de ce domaine. C’est pourquoi nous avons un doute en ce qui concerne les pouvoirs seigneuriaux qu’il aurait pu exercer sur Hainin (à moins que cela ne concerne que le Petit-Hainin à Dour, proche du territoire des seigneurs laïcs de Dour).

Maison de Haynin

Elle s’est constituée par le mariage de

Rose de Mons ( ?-apr1205), dame héritière d’Hainin, fille de Gossuin III de Mons, cité plus haut, et de Béatrix de Rumigny

⦁ Avec Etienne I de Denain (v.1140-apr.1205). Ce dernier était le fils d’Hugues II d’Ostrevent. Il était aussi seigneur de Denain. L’Ostrevent était un ancien petit comté situé entre l’Artois, la Flandre et le Hainaut, au nord de Valenciennes, sur la rive gauche de l’Escaut.  Ses villes principales sont Bouchain et Denain.

Leurs descendants prendront le nom de « Haynin » et même souvent «Brognart de Haynin ». Ces successeurs furent:

Gossuin I « Brognart » de Haynin (1165/1170-1239), fils du précédent. Chevalier au service des comtes Baudouin VI/IX et Ferrand de Portugal. C’est lui qui fit bâtir dans l’église du village une chapelle dédiée à Saint-Jean-Baptiste.

Wauthier I « Brognard » de Haynin (v.1200-1260), fils du précédent. Au service de Guy de Dampierre, comte de Flandre.

Jean I de Haynin « Brogniart » (avt1235- ?), fils du précédent

Gossuin II « Brognard » de Denain et de Haynin (v.1230- ?), frère du précédent

Wauthier II « Brognard » de Haynin (v.1260-1319), fils du précédent. Grand bailli de Hainaut en 1305 et 1310.

Son deuxième fils, Thomas, obtint l’autonomie de la paroisse d’Hainin.

Etienne II Brognart de Haynin (v.1280-apr.1359), fils aîné du précédent

Jean/Jehan II  Brognart de Haynin (v.1310- ?), fils du précédent

Jean/Jehan III Brognart de Haynin (v.1340-1402), fils du précédent. Dont un fils cadet, Thierry, fut aussi grand bailli de Hainaut.

Pierre I « Brougnart » de Haynin (v.1360-1431), inhumé à Hainin. Conseiller du comte Guillaume IV et de la comtesse Jacqueline de Bavière. Grand bailli du Hainaut (1408-1418 ; 1425-1426)

Jean/Jehan IV de Haynin (v.1390-1425), fils du précédent. Echanson du dauphin Jean de France, fils du roi Charles VI.

Jean V Brognart de Haynin (1423-1495), fils du précédent. Militaire au service de Philippe le Bon et de Charles le Téméraire.Il devint chroniqueur entre 1465 et 1477. Il aurait été le premier à avoir utilisé le mot « wallon » lorsqu’il rapporta un combat entre les Bourguignons et la garnison liégeoise de Montenaeken.

François I de Haynin (1464-1537, Lille), fils du précédent. Capitaine du château de Lille.

Philippe I de Haynin ( ?-1528, mort avant son père, à Wambrechies). Maître d’hôtel de l’archiduc Philippe le Beau.

Jean VI de Haynin, fils du précédent

Philippe II de Haynin ( ?-1620), fils du précédent

D’Adrien de Montigny (XVIème)

François II de Haynin (avt1590-1629), fils du précédent. Gouverneur de Valenciennes.

Philippe III de Haynin (1612-1677), fils du précédent

(Henri) Joseph I de Haynin ( ?-1711, Maubeuge), fils du précédent

Louis-François I de Haynin (1700, Lille- 1781, Seclin), fils du précédent. Premier lieutenant des gardes wallonnes au service du roi d’Espagne. Il n’eut qu’une fille, Marie-Louise-Bonne de Haynin (1741-1786, Seclin).

Il est le dernier descendant mâle de la lignée aînée des Haynin. 

Maison Le Duc

Il s’agissait d’une famille de magistrats enrichis de Mons.

Adrien Dominique Le Duc (1663-1722) Il était pensionnaire des Etats de Hainaut. Seigneur d’Onnezies (que son père Charles Ignace avait acheté). Lui-même acheta Hainin à Louis-François de Haynin, logiquement avant le décès de ce dernier en 1722. Il eut deux enfants : un fils qui mourut jeune et une fille, Marie-Anne.

Maison de Croix-Clerfayt

Sébastien Nicolas Joseph de Croix, dit de Drumez (1693-1738). Comte de Clerfayt. Prévôt de Binche et lieutenant-colonel dans l’armée autrichienne. Il épousa Marie Anne Josèphe le Duc qui lui apporta les seigneuries d’Onnezies, d’Hainin, d’Autreppe et d’Angreau.

Son fils Charles Joseph de Croix (1733-1798) lui succéda à la tête de ces seigneuries. Il fut un officier supérieur de l’armée autrichienne qui se distingua sur plusieurs fronts : dans la Guerre de Sept Ans, celle contre les Turcs (1788-1789), et contre les Révolutionnaires Français enfin. S’il fut vaincu à la bataille de Jemappes en 1792, il remporta ensuite quelques beaux combats à Maestricht, Neerwinden, Le Quesnoy et Wattignies. Il fut finalement vaincu à Mouscron en avril 1794 au retour des Français, puis encore à Sprimont et à Aldenhoven. Il se retira ensuite à Vienne où il mourut en 1798, après avoir reçu les insignes de l’Ordre de la Toison d’Or. Il fut le dernier seigneur féodal d’Hainin.

Carte de Ferraris (XVIIIème)
Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

    • Département: Jemappes
  • Canton: Thulin, puis Boussu
Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)

    • Etat: Pays-Bas (de 1814 à 1830), puis Belgique
    • Province: Hainaut
    • Arrondissement administratif: Mons
    • Arrondissement judiciaire: Mons
    • Canton: Boussu
  • Entité communale depuis 1977: Hensies
Evénements et faits marquants sur le sol de la commune

Hainin était situé sur un axe routier important reliant la France à la Belgique. Sans que cela soit nécessairement documenté, ses villageois virent souvent passer des troupes armées à partir du XVème siècle, qui s’en prirent à leur château et à leurs chaumières.

Le village aurait subi de gros dommages en 1572 au moment de la bataille d’Hautrage qui opposa les troupes espagnoles en garnison chez nous et des Huguenots venus de France pour aider Louis de Nassau qui s’était emparé de Mons avec les calvinistes et qui y était assiégé.

A l’automne 1792, lors de l’invasion des troupes françaises révolutionnaires, Hainin fut au centre des combats.
Une première ligne de défense autrichienne barrait la grand-route sur les hauteurs d’Hainin et du Bois de Boussu. Une première tentative française échoua à Thulin le 28 octobre. Une deuxième tentative réussit à enfoncer les lignes autrichiennes le 4 novembre.
Il est à noter qu’un des généraux commandant aux troupes belgo-autrichiennes n’était autre que le seigneur de Hainin, le comte de Croix de Clerfayt.
Les habitants durent enterrer les morts dans un cimetière improvisé au sud du Mont d’Hainin.
Le 6 novembre, le seigneur d’Hainin était parmi les vaincus lors de la bataille décisive de Jemappes.
La chapelle Notre-Dame de la Fontaine fut détruite par les révolutionnaires.

En août 1914, il n’est pas fait mention de combat à Hainin, sans doute parce que les défenseurs Anglais n’occupaient pas le village comme c’était le cas à Thulin. Les Allemands pénétrèrent dans le village en passant la Haine depuis Hautrage le 24 août.
Le village fut libéré par des Canadiens le 8 novembre 1918.

Du 14 au 16 mai 1940, la grand-route fut copieusement bombardée par les avions allemands, alors qu’elle drainait des réfugiés qui fuyaient vers la France et que des soldats français passaient en sens inverse, espérant arrêter les Allemands.
Hainin fut occupé dès le 19 ou le 20 mai.
Le village fut libéré le 4 septembre 1944.

Economie

Agriculture et élevage furent les activités majeures des villageois jusqu’au XIXème siècle.

Entreprises annexes:

Un moulin à vent est attesté en 1833 au sud du village (pas de précision).

Exploitation du sous-sol

Extraction de chaux. On y trouva autrefois des fours à chaux. Un fonctionnait au milieu du XVIIIème siècle  dans “le champ des Belles Filles”. Une carrière et un four sont également renseignés au début du XXème entre la Voie des Morts (vers Dour) et le chemin du Moulin. Ils étaient exploités par la famille Clément qui modernisa l’installation après la première guerre mondiale. L’entreprise cessa ses activités au milieu des années 1930, mais les exploitants d’Elouges vinrent encore se fournir en chaux à la carrière d’Hainin.

Ici, comme ailleurs au Couchant de Mons, on tenta de trouver de la houille dans le sous-sol. On le fit à Hainin dès le XVIème siècle, mais les tentatives furent stoppées avant 1745, car, comme depuis Boussu jusqu’à Quiévrain, il fallait creuser plus profondément qu’ailleurs pour espérer trouver de la houille.
Par contre des galeries venant des charbonnages de Boussu et de Dour passèrent sous Hainin et de nombreux Haininois qui ne pouvaient trouver du travail dans les activités agricoles allèrent aux XIXème et XXème travailler dans les charbonnages proches.

Hainin est aujourd’hui une calme cité résidentielle.

Voies de communication

La plus ancienne semble être le chemin qui reliait l’abbaye de Saint-Ghislain à celles de Crespin et de Condé.
La localité fut reliée ensuite aux villages voisins de Dour et d’Hautrage.
Tout au sud du village, passait un chemin médiéval qui reliait Valenciennes à Estinnes (ensuite appelé Vieux Chemin de Binche). Cette voie ancienne fut remplacée vers 1760 par la chaussée pavée de Mons à Valenciennes.

En 1842, fut construite la ligne ferroviaire 97 Mons-Quiévrain. Il fallut creuser une tranchée profonde. Les terres extraites haussèrent le Mont d’Hainin.
Un pont de pierre l’enjambe.

Patrimoine


Eglise Notre-Dame de la Visitation

Eglise Notre-Dame-de-la-Visitation

Un premier édifice daterait du XIIème siècle. Gossuin II de Hainin, seigneur et écuyer, fonda en 1299 dans l’église une chapelle dédiée à St Jean-Baptiste. D’autres membres de la famille fonderont une chapelle St Nicolas en 1300. Les seigneurs se faisaient enterrer dans l’église sous le chœur.Actuellement, on trouve quelques pierres tombales encastrées dans la maçonnerie.

L’édifice actuel est le résultat de plusieurs travaux de modifications du bâtiment initial.

    • Soubassement en pierres et moellons du XII-XIIIème
    • Chœur, 1616, transformé en 1734
    • Tour-porche 1626 (à l’initiative de Jean Lebrun, censier-tenancier-châtelain du château d’Hainin – son nom et celui de son épouse figurent dans une niche à l’extérieur du chevet)
    • Nefs, 1711-1731, avec porte latérale
    • Portail néo-gothique
  • Mobilier :
      • Fonts Baptismaux du XVIIème
      • Maître-autel, XVIIème
      • Autels latéraux, XVIIIème et 1850
      • Stalles du chœur, fin XVIIIème
      • Sainte-Barbe, XVIème, statue en bois
    • Sainte-Anne, XVIème, statue en bois

Chapelle Notre-Dame de la Fontaine
Elle fut bâtie le long d’un sentier reliant Hainin à Boussu, à proximité d’une source alimentant une fontaine, aujourd’hui tarie, source d’un petit ruisseau qui alimentait le château avant d’aller se jeter dans la Haine du côté du canal de Caraman. Il en reste la margelle.
L’architecture est romane.
Le premier édifice fut bâti en 1471/1478 à l’initiative de Jean IV, seigneur d’Haynin et d’autres lieux, peut-être sur un oratoire antique.
Il fut rasé par les Révolutionnaires Français en 1792, en route pour Jemappes, à l’occasion des premières escarmouches près du Moulin. On enterra les morts de cette bataille dans le cimetière des Français (propriété de Mr Mulpas).
La chapelle fut reconstruite en 1819 et réaménagée en 1872-74.

Le couvent, place St-Joseph.
Il s’agit d’une grosse habitation de style classique, datant du dernier tiers du XVIIIème siècle. Elle remplaça une vieille bâtisse ayant appartenu à l’abbaye de Crespin.
Des demoiselles Flament y enseignèrent jusqu’en 1895.
Elles furent remplacées par des religieuses de la Congrégation des Filles de Marie de Pesche qui restèrent jusqu’en 1964.
Ce couvent contient une chapelle.
C’est aujourd’hui une maison particulière.

Château des seigneurs de Haynin
Selon la tradition, il fut édifié par les descendants de Régnier au Long Col (comme celui de Boussu).
En réalité, il le fut par les premiers seigneurs qui résidèrent à Hainin, sans doute les premiers d’Haynin, à la fin du XIIème siècle.
Il était situé sur un pré en bordure de la Haine, en direction de Boussu, à 800mètres à l’est de l’église. Il était relié au village par un chemin.
Il a sans doute subi des transformations au cours du temps.
On en devine aujourd’hui les dimensions et la forme: 23x25m, quatre tours d’angle de 5m de diamètre et des murs d’une épaisseur de deux mètres, en pierre d’Angre, entourés de fossés (dont les eaux étaient captées à la Bonne Fontaine).
D’après Debove, ce schéma daterait du XIV ou XVème siècle.
Comme raconté plus haut, il subit de lourds dommages en 1572 (bataille d’Hautrage).
Sa date de destruction n’est pas mentionnée. Il est probable que les seigneurs de Hainin n’y résidaient plus depuis au moins ce XVIème siècle.

Bibliographie

Tranches de vie paroissiale, Hainin – P. Honorez, 1998