Audregnies

Entité communale de Quiévrain

Le territoire

Superficie: 583ha

Altitude: de 40 m (rivière à la sortie du village) à 110 m (plateau à l’est du village)

Situation géographique : Audregnies est situé dans la vallée de la Haine, sur sa rive gauche, là où commence la pente vers le plateau du Haut-Pays. Le noyau originel du village s’est constitué sur le versant est du vallon créé par la Petite Honelle qui le traverse du sud au nord.

Cours d’eau : la Petite Honnelle et quelques ruisseaux affluents (dans le bois au sud-est du village):

  • Le ruisseau des Carrières (ou de la Basse-Boulogne) à la limite de Montignies-sur-Roc
  • Le ruisseau du Bois (ou de la Bonne Fontaine) à travers le bois,
  • Le ruisseau (Rieu) Marion (Grand Flatry)
  • Un ruisseau descendant du champ de la Cambuse (derrière le Foyer Notre-Dame)

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : boisé, avec quelques clairières humides de part et d’autre de la Honnelle.

Nature du sol : limoneux

Nature du sous-sol : grès, pierre calcaire, houille

Préhistoire

Néolithique (Homo Sapiens) :

On a trouvé, au XIXème siècle, sur le territoire d’Audregnies, des outils en silex poli datant du néolithique. Sans précision.

Antiquité gallo-romaine

La chaussée romaine Bavay-Blicquy-Flandre traverse le territoire de la commune du sud au nord. Charles Debove, au XIXème, y aurait découvert des vestiges d’aqueduc (tuyaux en terre cuite) qui amenait l’eau de source de Wihéries (Champ de la Noire Guélène). Il daterait de l’époque des Antonins (96-192). Il se situait dans le talus de la route d’Audregnies à Elouges, du côté opposé à l’angle qui termine l’ancien monastère des Trinitaires, à un mètre de profondeur.

Albert Glineur (1885-1972) découvrit des objets d’époque romaine (épingles, poteries, vestiges d’aqueduc). Pas de précision sur l’endroit.

En 1964, des fermiers découvrirent au « champ du Moulin-à-Vent » (Maison Mathias, à proximité de la voie romaine) d’autres objets gallo-romains (poteries, lampes à huile, tuiles rouges disposées en coffrage, pièces de monnaie).

Des éléments souterrains, près du Pont, et en direction de l’église, pourraient dater aussi de cette époque. Probables dépôts de grains et de vivres, ou endroits de retraite en cas de danger.

Ces auteurs en ont conclu qu’un établissement était situé près de cette zone où se croisaient la chaussée romaine et la rivière. Il n’est pas impossible que ce fut une villa au vu des éléments découverts (notamment l’aqueduc).

Des prospections plus systématiques ont été réalisées plus récemment en 2007 (http://spw.wallonie.be/dgo4/site_caw/index.php/recherche#resultat).Les archéologues évoquaient plutôt deux zones d’occupation gallo-romaine entre la fin du Ier et le IIIème siècle.

Zone 1 – objets trouvés :

  • fragments de tegulae et tessons (= construction)
  • sesterces de Trajan
  • fibule en cuivre de type tutulus (en usage entre 70/80 et 150)
  • fragments de récipients en terre sigillée venant de la gaule centrale v.70-120
  • fragments d’une amphore, d’une cruche (II-IIIème) pareille à celles fabriquées à Famars au IIème siècle
  • fragments de plat en céramique provenant de l’atelier des Rues-des-Vignes, type Blicquy 5 (II-IIIème)
  • fragments de mortier, d’assiette, de jatte (type celles de la partie méridionale de la cité des Nerviens, seconde moitié II et III – Cambraisis, Bavay-Famars)

Zone 2 (à 200m de zone 1): tessons de céramique de Gaule centrale (IIème), d’un atelier des Rues-des-Vignes près de cambrai (IIème-IIIème), d’un autre de Bavay ou de Famars (II-III)

Aussi : des rognons de silex naturel, grattoir sur éclat mince (d’origine préhistorique).

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

A ma connaissance, aucun indice n’a été décrit pour cette période, mais le nom du village à connotation germanique permettrait d’évoquer qu’un habitat, peut-être isolé, y fut constitué. D’autant plus qu’à Wihéries et Elouges, il existait alors une communauté franque d’une certaine importance.

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 965

Toponymie (anciennes orthographes) :

  • Aldriniae (965, d’après original du XIème s), première mention
  • Aldreneias (1091)
  • Aldernia (1119)
  • Aldrineiis (1119)
  • Aldrinee (1181)
  • Daudergnies (1186)
  • Aldrineus (1190)
  • Aldreneis (1126)
  • Daudernies (1181, charte du Pape Lucius, confirmant à l’église de Cambrai la possession de ses biens)
  • Audernies (1181)
  • Audrenies (1194)
  • Aldregnies (1210)
  • Audregnies (1212)
  • Audreignies (1221)
  • Andrignie (1245)
  • Audregniez (1254, bulle du Pape Innocent IV)
  • Audrignies (1262, Bulle du Pape Urbain III)
  • Daudrenies (1557)

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :

Ce nom pourrait correspondre à :

  • Alda-har-iniaie-as = « Terre de Halda-hari », soit un domaine franc nommé Alda-hari (alda : vieux) (harja = heer)
  • Audergnatus proviendrait du nom d’un ancien roi de Bavay (légendaire).
  • Ander – Andrinus, seigneur qui aurait donné son nom au village
  • Ouder = ancien (germanique, Hocq)

Epoque de son apparition: entre le Xème et le XIIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine antique. Sur le territoire de Baisieux, en direction d’Elouges, passa au Moyen-Age le “Vieux chemin de Valenciennes à Binche”. Il est probable aussi qu’un autre chemin (ou sentir) reliait Roisin à ce chemin en passant par Angre, Audregnies et Elouges.

sources d’eau ou cours d’eau: la Honelle et ses ruisseaux

source de bois: une grande partie du territoire était boisé à l’origine. Il en reste un vestige au sud du village (bois d’Audregnies).

proximité d’un lieu de pouvoir: le château seigneurial, dont on ne sait s’il est apparu avant ou après la constitution du village

Paroisse dédiée à Saint-André. Elle fut à l’origine une dépendance de celle de Montignies-sur-Roc. Elle n’obtint son indépendance qu’en 1801. Un presbytère fut alors construit (Place, n°55). Il fut transféré en 1865 à la rue de l’Eglise.

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Bavay, puis Dour

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné au chapitre épiscopal de Cambrai.  Ce qui a été confirmé en 1181 par un acte du pape Lucius. La paroisse fut mise sous le contrôle des Trinitaires (infra) qui y prélevèrent la dîme de 1220 à 1783. Par la suite le curé releva directement du chapitre épiscopal de Cambrai, jusqu’à ce que les paroisses belges passent en 1801 (Concordat de Napoléon) à celui de Tournai et au décanat de Dour.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs

Le territoire, pendant la période féodale, était partagé entre plusieurs propriétaires. Pour un territoire villageois relativement peu étendu, cela faisait des petits domaines. On distingua :

  • la seigneurie principale – description infra
  • Un franc-alleu existait à l’est en direction d’Elouges. Il s’agissait de terres sans château. On en connait quelques familles propriétaires :
    • Famille de Quiévrain, vers 1400
    • Sivry de Bruath, Maubeuge (1500)
    • Monaldy, espagnols (Cambrai)
    • Butron y Mexico
  • Les possessions d’abbayes:
    • Deux terres appartenaient en 1473 à l’abbaye Saint-André du Cateau
      • Une comportait une ferme-villa qui appartenait à l’évêque Liébert de Cambrai (1051-1076) et dont on fit don à l’abbaye lors de la création de celle-ci en 1091. En 1256, un échevin d’Audregnies, faisait fonction de maïeur pour ces terres. On situe la couture de St-André sur le Camp d’Onnezies. Elle fut démolie au XVIIIème siècle.
      • Une autre ferme, mentionnée au XVème siècle. L’abbé Maur et les religieux de St-André s’y réfugièrent en décembre 1791, fuyant les révolutionnaires qui les avaient dépouillés de leurs biens. Ils se dispersèrent ensuite. Certains allèrent à St-Denis-en-Broqueroie, puis plus tard à Villers-la-Ville. La ferme fut vendue à titre de bien national en 1796. Différentes familles s’y succédèrent ensuite. Elle est encore située à la rue de Montignies. La chapelle St-André fut déplacée vers le Nord lors de la construction du chemin-de-fer Dour-Roisin. Des annexes au sud furent démolies à cette époque.
  • Une terre (d’au moins 15 manses) avec cour et courtils (ferme) appartenant à l’abbaye de Saint-Ghislain depuis au moins le Xème siècle (selon une charte de l’empereur Othon I en 965 énumérant les biens de l’abbaye, refondée vers 925). Une autre charte du Pape Gélase en 1118 mentionnait que l’abbé de St-Ghislain possédait une ferme seigneuriale avec ferme et courtils. Cette terre de St-Ghislain s’appelait « Champ de St-Germain ou couture de St-Germain » (1410) et était située sur le Champ de l’Enfer (croisement de la rue du Calvaire et du chemin de Wihéries). Elle possédait aussi des biens à la rue de la Ville, autrefois appelée rue de St-Ghislain. A la fin de l’ancien régime, St-Ghislain était encore propriétaire à Audregnies. Il y avait là le Moulin de Planches au XIXème siècle, qui fut démoli en 1870. Pour rappel, tout le village de Wihéries et un partie du village d’Elouges appartenaient à l’abbaye de Saint-Ghislain.
  • Une terre appartenait à l’abbaye de Crespin. On trouve confirmation de la propriété de ces terres sous l’abbé Algot (1132-1159). L’abbé Gobert (1182-1183) arbitra un conflit entre l’abbé de St-Ghislain et le chapitre Notre-Dame de Cambrai au sujet des dîmes d’Audregnies et d’Elouges. Les biens de l’abbaye de Crespin sur le territoire d’Audregnies furent administrés par l’abbé de Crespin jusqu’en 1464. Des moines fermiers en assuraient l’exploitation. Par la suite, des civils continuèrent cette œuvre, devant la dîme et les rentes à l’abbé. Dès 1787, les moines commencèrent à fractionner leurs terres et à les vendre à des particuliers. Tous ces biens d’abbayes furent vendus comme biens publics en 1796.
  • Des petits fiefs ayant appartenu, selon les époques, à des familles ou personnages, et qui sont soit une terre isolée, soit une ferme avec terres :
    • deux fiefs mouvants relevant de la terre de Quiévrain, dont un à Simon de Quiévrain, écuyer de Baisieux et un à son frère Jean de Quiévrain, près du moulin
    • un fief à Jacques d’Audregnies
    • le fief « le Fayaux » (1435)
    • le fief de Guillaume Bauduin (1435)
    • la tenance de Jacques Lefebvre (1499)
    • la tenance de Ciply (1524)
    • la Fontaine du Maréchal
    • fief de Forest

La seigneurie principale

Elle occupait le centre du village, autour de la Place qui servait de pâturages (wareschaix) pour les fermiers. Elle avait un château-fort, que l’on situe sur l’emplacement de la Claire Fontaine et que l’on pense avoir été construit vers 1190. Ce domaine était un franc alleu. Il appartenait à une famille locale, riche propriétaire, qui obtint d’y exercer les droits féodaux (cens, taxes, imposition de corvées) sur tous les habitants du domaine, qu’ils fussent libres (manants) ou non (serfs). Il comprenait le village à clocher (avec son église), le château, les services banaux (moulin, brasserie, …), des terres labourables, des pâturages, des bois, un verger. A travers les siècles, les seigneurs d’Audregnies y exercèrent la justice (haute, moyenne, basse). De nombreuses familles se sont succédé à la tête de ce domaine.

Famille d’Audregnies

On sait peu de choses de celle-ci. Propriétaire du domaine, on ne sait quand elle fut investie des droits féodaux. Elle ne semble pas connue comme ayant fréquenté les comtes, comme barons par exemple. Ce que l’on sait, c’est qu’au milieu du XIIème siècle, la dernière descendante, héritière du domaine, Hildetrude d’Audregnies (v1115- ?) épousa, Allard de Strépy, seigneur de Harchies, Ville et Pommeroeul, un baron important au service des comtes de Hainaut.

Famille de Strépy (à qui on donne parfois les noms de « Harchies » ou de « Ville » – cette dernière appellation persiste dans le nom d’une rue)

Allard III de Strépy (v1110/1120-apr1150) devint seigneur d’Audregnies par mariage avec Hildetrude d’Audregnies aux environs de 1135, à l’époque du comte Baudouin IV de Hainaut. Lui succédèrent :

  • Baudouin III de Strépy (1140-v1200), leur fils, qui fit peut-être fortifier la résidence précédente. Il fut également au service des comtes Baudouin V et VI.
  • Allard IV de Strépy (v1170-apr1224/1234), fils du précédent. L’exemple type du preux chevalier qui participa à la quatrième croisade (avec le comte Baudouin VI « de Constantinople »), à des guerres contre l’Angleterre (au service du roi de France Philippe-Auguste), ainsi qu’à la croisade contre les cathares albigeois (au service de Simon de Montfort). Il ajoutait à ce tempérament la noblesse de cœur, puisque c’est lui qui favorisa l’implantation à Audregnies en 1220 du monastère des Trinitaires (voir paragraphe « patrimoine »).
  • Gérard 1er de Strépy (ou Allard dit « Gérard ») (v1220/1230- apr.1265), fils du précédent
  • Arnould I de Strépy (v1240- ?), fils du précédent. Son fils aîné Arnould II hérita du domaine de Harchies, tandis que le cadet Gérard fut investi des domaines d’Audregnies, Ville, Pommeroeul et Hautrage.
  • Gérard II de Strépy (v1275- 1366), fils du précédent. Il procéda lui aussi à un démembrement de ses possessions entre ses deux fils, puisqu’il fit donation d’Audregnies à Guillaume et des autres seigneuries à Gérard.
  • Guillaume de Strépy « de Ville » (v1310-1389), fils du précédent. Toujours au service des comtes, celui-ci devint même bailli de Hainaut.
  • Jean de Strépy “de Ville”( v1335/1339- ?), fils aîné du précédent, mort sans postérité.
  • Gérard III de Strépy « de Ville » (v1340-1417), frère cadet du précédent
  • Quentin de Strépy « de Ville »  (v1370-v1428, Valenciennes), fils du précédent. Il n’eut qu’une fille, Jeanne, qui hérita du domaine.

Famille de Lannoy

Lannoy est un village de la Flandre gallicane, situé entre Lille et Roubaix.

Antoine de Lannoy (v1397/1412, Valenciennes – apr1476, Valenciennes) était seigneur de Lannoy, de Senzeille et d’autres lieux. Il devint par mariage avec Jeanne de Strépy « Ville » seigneur d’Audregnies. Lui et ses successeurs étaient au service des ducs de Bourgogne, pour qui ils exercèrent des fonctions politiques (prévôt du Château-le-Comte à Valenciennes, chambellan et premier maître d’hôtel) et militaires. Lui succédèrent :

  • Jean III de Lannoy « le bâtisseur » (1428, Cambrai – 1498), leur fils
  • Jean IV de Lannoy (1460/65-1525), fils du précédent. Il se maria deux fois, eut plusieurs enfants, dont Louise qui hérita du domaine d’Audregnies.

Famille de Revel

Nous ne savons pas l’origine de cette famille. Il existe une ville de Revel en Haute-Garonne. Y-a-t-il un lien ?

Louis de Revel ( ?-1549) était déjà seigneur de Saint-Hilaire et de Buvignies ( ?). Il devint seigneur d’Audregnies après avoir épousé Louise de Lannoy ( ?-1554). Il fut au service de Charles Quint, de sa sœur Marie de Hongrie et ensuite de Philippe II. Il fut également gouverneur de la citadelle de Bouchain. Le couple fut inhumé dans l’église d’Audregnies.

Charles de Revel (1549-v1580), leur fils. Dans les conflits religieux de son époque, il prit le parti de Guillaume d’Orange contre le roi d’Espagne. Il signa en 1566 le « Compromis des Nobles », ce qui lui valut de voir tous ses biens confisquée par le duc d’Albe. Criblé de dettes, il mourut à l’étranger, sans descendance. Sa sœur Guillemette hérita d’Audregnies.

Famille de Roisin

Cette puissante famille approche de son extinction au moment où elle acquiert Audregnies. Il s’agit en l’occurence de Baudry XV de Roisin ( ?-1545), déjà seigneur de Roisin, de Meaurain, de la Flamengrie et d’Angre. Il le devint également pour Audregnies en épousant Guillemette de Revel.

Baudry XVI de Roisin ( ?-1607), leur fils, épousa Eléonore, fille de Jean de Hénin-Liétard, comte de Boussu. Leurs trois enfants les précédèrent dans la tombe. Exit le nom de Roisin. La majorité de leurs domaines revinrent à une branche cadette issue de Jacqueline de Roisin, sœur de Baudry XV, décédée entre-temps, mais dont les descendants firent passer l’héritage dans la famille de la Tramerie. Audregnies n’y resta pas.

D’Adrien de Montigny (fin XVIème)

Familles diverses

Vincent de Mainsent leur acheta en 1607 la seigneurie d’Audregnies. Il était le frère d’Etienne Mainsent, seigneur de Montignies-sur-Roc et d’Onnezies, conseiller à la ville de Mons. Il épousa Françoise Pottier, dont il eut une fille, Yolenthe de Mainsent. La seigneurie fut tenue par un bailli, Jean-Laurent de Prémontaulx ( ?-1627), également échevin et bailli à Chièvres.

Pierre-Antoine de Béthencourt  (1627-1657). C’est par son mariage avec Yolenthe de Mainsent qu’il devint seigneur d’Audregnies. Il était commandant du château-fort de Courtrai. Ils ont également été inhumés en l’église d’Audregnies.

Séverin de Bethencourt (1657-1693, Louvain), leur fils, fut député des Etats du Hainaut, maréchal de camp de cavalerie des armées du roi d’Espagne pendant les guerres d’invasion de Louis XIV. Séverin de Bethencourt  légua tous ses biens à son ami Antoine Chrétien de Chasteler, seigneur de Moulbaix, qui ne put éviter des procès avec les héritiers légaux. Il conserva le château d’Audregnies, mais n’y porta pas grand intérêt. En 1699, il vendit la seigneurie d’Audregnies à Eustache Fontaine (1652, Montignies-lez-Lens – 1721/1724, Audregnies), son bailli et ami personnel, qui l’avait d’ailleurs été aussi pour Séverin. Eustache y vivait d’ailleurs en locataire depuis 1689 avant de l’acheter. Il est aussi inhumé dans l’église. Ses héritiers revendirent la seigneurie aux Baillencourt.

Maison de Baillencourt

Charles François de Bailliencourt dit « Courcol » » (1670, Mons-1736, Mons) était chevalier, comte de Bailliencourt, vicomte de Witres et Norhout. Il acheta Audregnies vers 1724. Il fut aussi officier supérieur dans les armées impériales autrichiennes, député du Hainaut en 1725 et prévôt de Mons de 1728 à 1732.

Son fils Charles Joseph Alexandre Hyacinthe Janvier de Baillencourt (1707-1779, Audregnies) lui succéda pour les mêmes domaines et les mêmes titres. Il fut aussi membre des Etats du Hainaut, prévôt de Mons et conseiller. Il mourut sans postérité. A sa mort, la seigneurie resta en vacance de pouvoir. Un litige opposa les habitants d’Audregnies à son exécuteur testamentaire, notamment parce que ceux-ci ne payaient plus le droit de chapon-pouillage.

Famille de la Barre

Emmanuel Joseph de la Barre (1736-1793) était comte d’Erquelinnes, seigneur de Maurage et de Quevaucamps. Il ajouta Audregnies à ses possessions en achetant la seigneurie. A la fin de sa vie, il vit déferler les Révolutionnaires Français qui abolirent ses droits seigneuriaux.

Carte de Ferraris (XVIIIème)
La commune

Un corps échevinal d’Audregnies est attesté dès 1265. Il s’agissait d’un mayeur héréditaire dont la fonction était relevée en fief de l’abbaye de St-André du Cateau, c’est-à-dire qu’il occupait et gérait les biens de celle-ci sur le territoire d’Audregnies. La commune possédait la place publique (Grand Trieu). C’était un wareschaix (ou waressaix) qui servait de pâturages pour les animaux des habitants, ainsi que des terres diverses. Une maison communale fut construite au nord-ouest de la Place.

Il y eut souvent des conflits entre les seigneurs et les habitants d’Audregnies à propos du Grand Trieu (la place), le premier la revendiquant comme place publique pour la haute justice et les seconds pour y faire paître leurs troupeaux. Ainsi le dernier comte de Baillencourt y fit établir un pilori que les habitants détruisirent une nuit. Ce fut peu de temps avant la Révolution Française. Ce pilori était situé le long du sentier qui conduisait du Calvaire à la ruelle Baron (actuel chemin de Wihéries). Il était constitué d’un socle en pierre, surmonté d’une colonne de pierre sur laquelle on attachait le carcan. Le socle a seulement disparu en 1948 pour y aménager le quai des vicinaux.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

Département: Jemappes

Canton: Dour

Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Mons
  • Arrondissement judiciaire: Mons
  • Canton: Dour
  • Entité communale depuis 1977: Quiévrain

Après la bataille de Waterloo, Audregnies, qui appartenait au canton de Dour, fut rattaché avec celui-ci à la France, selon le traité de Paris du 30 mai 1814. Mais le second Traité de Paris de 1815 redonna aux Pays-Bas les territoires situés au sud de la ligne Mons-Charleroi-Dinant, soit les régions de Quiévrain, Philippeville, Mariembourg, Chimay, Bouillon.

En 1816, Audregnies dépendait de la brigade de la maréchaussée du canton de Boussu. Le village possédait une garde communale active, une garde civique et une police qui était assurée par le bourgmestre assisté d’un garde-champêtre. En cas de trouble, il pouvait requérir la garde civique.

Evènements et faits marquants sur le sol de la commune

En 1554, le château fut assiégé et endommagé par les troupes françaises du roi Henri II (controversé). De nouvelles occupations françaises eurent lieu entre 1634 et 1654, en 1709, et encore en 1745. Les révolutionnaires incendièrent le château en 1792.

La guerre 1914-1918

Le 24 août 1914 vit se dérouler la « bataille d’Audregnies » qui s’inscrivait en fait dans celle de Mons, quand un corps expéditionnaire anglais tentait de résister à l’avancée allemande. Cet épisode dura trois heures dans la campagne entre Quiévrain, Thulin, Elouges et Audregnies.

La bataille d’Audregnies (auteur?)

Les Anglais, plus faibles, durent battre en retraite vers Paris par Bavai, Le Cateau, St-Quentin et Meaux. Les blessés furent amenés au couvent des Sœurs Bernardines. Cette bataille fit 42 morts et 180 blessés. Les Allemands pénètrent dans les villages où ils firent de nombreux prisonniers qui furent déportés (500 à Quiévrain). Entre-temps, une partie de la population s’était enfuie vers le Nord de la France. La plupart regagnèrent leur domicile après deux semaines, hormis quelques-uns qui gagnèrent le sud de la France et y attendirent la fin de la guerre.

Puis ce fut l’occupation, avec son lot de vexations, de réquisitions et de déportations. Une Kommandantur s’installa au n°55 de la Place (actuelle maison Ghaye).  Le 26 octobre 1916, tous les hommes valides de 16 à 60 ans durent se rendre au Contrôle à Quiévrain, devant une commission allemande. La plupart furent déportés vers Locquignol (France) et Münster (Westphalie). Le village hébergeait des hommes qui venaient du front pour s’y reposer. Des exercices de tirs avaient lieu dans la campagne entre Audregnies et Baisieux. Le couvre-feu était installé entre 18 et 8hoo.

Dès la fin septembre 1918, les bruits de guerre se rapprochèrent avec le recul allemand. Des deux dépôts de munitions installés sur le territoire, celui du château Duquesne sur la chaussée explosa début novembre. Le 5 novembre, Audregnies fut bombardée intensément durant 36 heures. Ce qui sera suivi de l’arrivée du corps expéditionnaire canadien le 7 novembre, entré la veille en Belgique par Marchipont.

Le 11 novembre, la guerre était finie. Des troupes anglaises furent encore cantonnées dans le village jusqu’au début de 1919. Des déportés, certains rentrèrent, d’autres pas… Il en fut de même de soldats actifs sur le front de l’Yser.

Un monument en pierre, surmonté d’un soldat blessé, est érigé dans l’enceinte du vieux cimetière près de l’église, à la mémoire des Audregniens qui ont perdu la vie durant cette guerre. Leurs noms y figurent. On y ajoutera les victimes de la seconde guerre.

La seconde guerre mondiale

Entre l’invasion le 10 mai et la reddition le 18 mai, quelques convois français traversèrent la région, et notamment Audregnies, en venant d’Angre vers Elouges, ou le long de la chaussée Brunehaut. Dans l’autre sens, passaient des réfugiés du Centre et du Namurois qui évacuaient vers la France. La population locale les suivit à partir du 18 mai. La plupart des évacués n’iront pas plus loin que Cambrai, Arras et Douai. Ils seront de retour dès la fin du mois. Des combattants de la première heure, certains furent libérés et purent regagner le village. D’autres furent dirigés vers l’Allemagne pour y être mis au travail forcé.

Et commença une nouvelle occupation avec son cortège de réquisitions, brimades et frustrations. On rationna la nourriture. Il fallut se résoudre au marché noir.  Lorsqu’en juillet 1941 des agents à la solde des Allemands recrutèrent pour une brigade wallonne, un Audregnien s’y engagea. De nouvelles déportations eurent lieu en mars 1943 pour les plus jeunes.

Lors des bombardements alliés de mai 1944, notamment sur la gare de St-Ghislain, de nombreux réfugiés arrivèrent. Il fallut cependant attendre le début septembre pour voir passer les troupes allemandes en retraite, poursuivies par les bombardements alliés. Elles descendaient de Bavai via la chaussée Brunehaut le 2 septembre. Une colonne fut attaquée à hauteur du cimetière d’Angre par les milices de Résistants, qui continuèrent leurs tiraillements dans les jours suivants. Le 3 septembre, les chars américains étaient au St-Homme à Thulin. Audregnies fut libérée le 5 septembre.

L’économie

L’environnement, fait de terres fertiles et de pâturages, a favorisé avant tout les activités agricoles.On l’a vu plus haut, de grosses fermes, appartenant à diverses abbayes virent le jour. Ce fut aussi le cas de la ferme-château des premiers seigneurs du village et peut-être d’autres confiées à des tenanciers. Après la Révolution Française, ces terres ecclésiastiques furent revendues à des particuliers qui les morcelèrent au fur-et-à-mesure des héritages. Le nombre de fermes se multiplia encore durant le XIXème et le XXème siècle. Les cultures principales étaient :

  • les céréales : le blé surtout, mais aussi le seigle, l’escourgeon et l’orge (pour les brasseries), l’avoine et le maïs
  • les légumineuses (nourriture pour les chevaux, et plus tard pour l’industrie : les petits pois)
  • les betteraves sucrières (dès 1845) et fourragères
  • le lin et le colza
  • le tabac (jusqu’en 1900 surtout)
  • la chicorée

L’élevage avait aussi son importance :

  • bovin principalement
  • ovin jusqu’en 1890
  • chevalin (jusqu’au XIXème)
  • canards

Des activités liées à l’agriculture apparurent :

  • les moulins
    • le moulin banal à eau du château-fort, datant du XIIème siècle. Il fut acheté par François Demarez en 1816.. D’autres meuniers lui succèderont jusqu’aux environs de 1900 où il fut abandonné.
    • le moulin à vent tordoir. Il pressait les graines de lin et de colza pour en faire de l’huile grasse (pour l’éclairage et l’usage domestique). Il fut édifié sur le « Champ du moulin à vent » en 1502, le long du chemin qui va d’Audregnies à Thulin (Voie Moneresse). Il semble ne pas avoir fonctionné au-delà du XVIIème.
    • le moulin à vent « de briques » (Moulin Moustache) sur le champ d’Elouges, au chemin de l’Avaleresse. Il en reste une partie aujourd’hui. Plus tardif, il fut probablement construit vers 1830 et fonctionna jusqu’en 1891.
    • Le moulin «  de planches » (moulin Dupont), situé sur le champ de l’Enfer et démoli vers 1870.
  • des brasseries
    • la brasserie seigneuriale (dans les souterrains du château)
    • la brasserie Jean-Joseph Dubuisson (mentionnée en 1787)
    • la brasserie Hottois-Glineur (XIXème), qui revint par alliance aux Michez en 1868. Très connue dans la région pour la qualité de sa bière « Saison ». Les activités cessèrent en 1962.
  • Une fabrique de chicorée, située près du Pont (actuelle maison n°22). Créée en 1859 par Pierre-Joseph Martin, elle disparut avec le décès de celui-ci en 1891.
  • Une sucrerie, sur la section « Les Quarante » du domaine de la ferme Duquesne, près du Pont de la Ville. Elle date du XIXème, sans doute vers 1849. On y installa l’éclairage alimenté par du gaz de houille. On y installa en 1866 une machine à vapeur à haute pression. Elle s’arrêta de fonctionner en 1911 et fut détruite à la fin de la guerre.
  • Des ateliers de raffinage du sel (« les salines »)
    • Willemart et Potvin (1845)
    • Joseph Glineur (1846)
    • Potvin-Hottois (1859)
  • Des entreprises travaillant les grains récoltés
    • Battage du grain, par une batteuse (Jean-Baptiste Bronchart)
    • stockage et séchage des grains. Philippe Tondreau (1950) près du moulin à eau : grains, engrais, … Il fusionna avec la Société Semaille en 1984, spécialisée en engrais chimiques.

Sur le plan artisanal et industriel, on cite

  • des ateliers de tisserands à la fin XVIIème
  • une tannerie, citée en 1845
  • l’entreprise Gaye-Dupont (55, Grand-Place) qui fabriqua des machines et des équipements agricoles dès 1947
  • des fabriques de fers à cheval, de flèches en bois pour le tir à l’arc

Dès le Moyen-Age, on vit s’installer des auberges et des petits hôtels, démontrant l’importance de la petite agglomération à l’époque, en rapport avec sa situation dans le réseau routier :

  • l’Hôtel du Heaume en 1410
  • l’Hôtel à la Tour en 1418
  • celui de l’Angle du Cavenier en 1468

On n’a pas de notion de marché ni de foire, mais on sait que le chemin qui va du Pont en contrebas vers Elouges (voie du Quesnoy) fut le siège d’une braderie dès 1635, d’où son nom qui se maintiendra jusqu’à la fin du XIXème pour être remplacé par celui de « rue du Calvaire ».

La nature du sous-sol a aussi favorisé des activités extractives :

  1. le charbon. L’extraction de la houille sur le territoire d’Audregnies daterait au moins du XVème siècle. On peut l’imaginer à partie de la dénomination « Gérardfosse » mentionnée en 1400. Plus tard, il fut question de la Fosse de Mayau (1515) et de la fosse Mehault (1531), ainsi que de celle de l’Espinette (1706), de la Désirée et de l’Avancée (1720), du puits de la Garde de Dieu (1741). L’extraction était placée sous la juridiction du seigneur d’Audregnies. Il s’agissait alors de puits de forme ronde ou rectangulaire, grossièrement étançonnés avec du bois non équarris. Ils pouvaient atteindre la quarantaine de mètres. On remontait le charbon dans des cuffats, soit à la force des bras, soit par celle de chevaux. Les hommes descendaient ou remontaient par le même système ou par des échelles. On ne mentionne plus de puits en 1812.

En 1844, la « Société Charbonnière de Bellevue à Elouges » demanda la maintenue de la concession des mines de houille sous les villages d’Elouges, de Dour, Thulin, Montroeul, Audregnies et Wihéries.

2. la chaux. Il est fait mention d’un chaufour en 1460 sur le Champ du Blanc Terry, près de la chaussée Brunehaut, à la limite de Baisieux.

3. les carrières de pierres. On extrayait la pierre pour la construction des routes et des habitations en divers endroits de la commune (Basse-Boulogne, Bosquet des Fayaux).

Les voies de communication importantes

Voies routières

La première connue est la chaussée romaine, appelée plus tard Chaussée Brunehault, qui allait de Bavay à Blicquy et plus loin vers la mer. Entre Montignies et Audregnies, cette chaussée passait par un profond cavain (« Les Cavanes »). Elle fut repavée à plusieurs reprises, notamment en 1856, en 1868 et de nouveau en 1894 à la suite de la construction de la voie ferrée, pour finalement être recouverte au XXIème siècle par une route bitumée avec des chicanes réduisant la vitesse des véhicules. Le cavain, dont les berges s’affalaient sans cesse sur la route, fut remblayé.

Il est probable que d’autres chemins à cette époque reliaient les villas entre elles et celles-ci à la chaussée. Pour rappel, le centre politique et commercial le plus proche fut d’abord Bavay, puis plus tard Famars (près de Valenciennes). En descendant la chaussée, on pouvait rejoindre la Haine au niveau d’un embarcadère situé à Pommeroeul, ce qui permettait d’écouler aussi des produits vers l’Escaut.

Plus tard au début du moyen-âge, quelques localités importantes apparurent (Valenciennes, Saint-Ghislain, Mons, Le Quesnoy, Maubeuge, …), ce qui favorisa un réseau de routes plus denses, alors qu’une grande partie du paysage, jusque-là couvert de bois, était défrichée au profit des cultures. Audregnies se trouva alors traversé de nouvelles voies :

  • le chemin du Quesnoy, qui partait de cette cité vers Saint-Ghislain, en passant par Sebourg et Angre (aujourd’hui rue de Ville, par référence aux seigneurs de Ville qui dirigèrent le village à une certaine époque), pour aller vers Elouges
  • La voie Moneresse, venant de Thulin (par l’actuelle Avaleresse) pour se joindre à la rue du Quesnoy au lieu-dit « l’Alouette » – à Thulin passait un chemin qui partait de Saint-Ghislain vers Crespin et Condé
  • Le chemin Bonoval (ou Coron du Bois) vers Montignies-sur-Roc
  • Le chemin de Wihéries, village appartenant à l’abbaye de Saint-Ghislain qui y gérait une grosse exploitation agricole (la Court). Contrairement à aujourd’hui, cette voie partait du chemin du Quesnoy où il séparait le « Champ de l’Enfer » du « Champ du Rieu Marion » Un nouveau chemin entre Audregnies et Wihéries fut construit en 1950 à partir de la Place sur l’assiette de la ruelle Baron. L’antique chemin fut abandonné au profit de l’agriculture.
  • Pour aller à Quiévrain à partir du centre du village, on descendait la Voie Verroize (ou Vannoise ou Verraude) qui rejoignait la chaussée Brunehault par le tronçon du « Chemin Noir » (actuelle rue d’Elouges de Baisieux).
  • On pouvait aussi aller à Athis en remontant près du lieu de la première implantation du couvent des Trinitaires
  • le chemin Maninval partait de la Place, passait au Nord-Est du Bois, coupait l’ancien chemin de Montignies à Wihéries, pour rejoindre le Préfeuillet (villa entre Wihéries, Elouges et Dour). Un chemin de Montignies à Wihéries traversait le territoire d’Audregnies pour rejoindre le Coin du Bois, entre Elouges et Wihéries. Il se divisait plus loin en une branche de gauche vers les Monts d’Elouges (chemin de Montignies) et une de droite vers le Préfeuillet.
  • la Voy de Croix (chemin de la Croix ou des Croix) partant du château d’Onnezies, traversait le domaine St-Landelin (de l’abbaye de Crespin), pour rejoindre la chaussée Brunehaut, faisant la limite entre les territoires de Montignies et d’Audregnies.
  • le « chemin des nonettes » fut créé en 1905 (dit aussi chemin des Dames) pour relier le couvent des Bernardines à la gare.

Le bétonnage et l’asphaltage des routes eurent surtout lieu après 1950. La rivière fut également mise sous aqueduc entre sa sortie du moulin et le pont afin d’élargir la chaussée et le croisement à ce niveau.

Le chemin de fer

Audregnies fut traversée par une ligne de chemin de fer qui reliait Dour à Roisin (ligne 98b). Elle fut construite et inaugurée le 12 mai 1882. Une gare fut aménagée au niveau du croisement de la ligne avec la chaussée Brunehaut. Six trains de voyageurs et un train de marchandises y passaient journellement. Le fret était constitué de marbres (venant de Roisin et de Bellignies), charbon, chaux, betteraves sucrières, céréales, … Cette ligne fut abandonnée en 1960.

Le chemin de fer vicinal (tram)

Une ligne Dour-Wihéries-Quiévrain traversa Audregnies et fut inaugurée le 26 novembre 1949.  Elle fut remplacée par des autobus en 1970.

Le courrier postal

En 1818, la messagerie Willot de Quiévrain assurait le courrier. Une poste, à Quiévrain, fut installée en 1830. Une perception à Audregnies vit le jour le 17 octobre 1882.

Le téléphone

Le premier récepteur fut installé à l’administration communale en 1906. Mais c’est surtout entre les deux guerres que l’usage va se développer, pour se généraliser après 1945. Des cabines téléphoniques furent placées dès 1972.

Le patrimoine ancien

Le château seigneurial  fut bâti à la fin du XIIème siècle (1190 ?) sur l’actuel site de la « Claire Fontaine ». Il a subi diverses attaques au cours des siècles et notamment un siège de la part des armées du roi de France Henri II en 1554 (controversé). Il fut alors saccagé. Il fut confisqué par Charles Quint du temps de Charles de Revel, seigneur d’Audregnies, considéré comme un relaps. Il apparaît sur une des gouaches dessinées en 1599 par Adrien de Montigny pour le duc Charles de Croy (supra). Il fut occupé à plusieurs reprises par les Français entre 1634 et 1654, puis en 1709 (lors de la bataille de Malplaquet) et en 1745 (avant la bataille de Fontenoy). Le donjon fut détruit en 1650. Il fut finalement incendié en 1793 par les Révolutionnaires Français.  Une affiche de vente de 1722 le décrit bien :

  • Le bâtiment était carré et entouré d’eau. On y accédait par un pont-levis.
  • L’intérieur était constitué d’un donjon, d’une chapelle, d’un pigeonnier, d’une basse-cour avec une grange et des écuries, d’un jardin potager.
  • Des bois et des champs se trouvaient à proximité, ainsi qu’un verger.
  • Les souterrains servaient de cave, de brasserie, de boulangerie et de prison.

Au XVIIIème, on distingue donc le château, l’église, la place qui lui était reliée par la ruelle Faveresse. Des noyaux d’habitat existaient dans la zone du Pont, le long de la Rue de la Braderie, le long de la rue de la Fontaine. Les Trinitaires étaient alors présents sur la Place. Quelques hameaux étaient éparpillés à distance de ce noyau central.

Le couvent des Trinitaires d’Audregnies (1220-1783). Cet Ordre avait été fondé en 1198 en France par Jean de Matha et Félix de Valois, avec l’approbation du pape Innocent III. Son but était de racheter des esclaves, devenus prisonniers des Sarrasins et des Maures. Nombreux furent ainsi rapatriés et faisaient un séjour dans les monastères de l’Ordre.

Le couvent d’Audregnies fut fondé en 1220 par un de ses premiers seigneurs connus, Allard de Strépy,  aussi sire d’Harchies et de Ville (-Pommeroeul), et par son épouse Ide, avec l’approbation de l’évêque Geoffroy de Fontaine et de la comtesse Marguerite de Hainaut. La première implantation se fit au lieu-dit « Le Mont » entouré de bois (Champ du Bois), à l’emplacement d’un ancien ermitage, près de la fontaine du Maréchal (ou du « Tauchal »). Cet endroit était peu éloigné des deux grands axes de circulation, la chaussée romaine et le chemin qui allait de Saint-Ghislain au Quesnoy (et à Cambrai). Cet emplacement leur avait été donné par Allard de Strépy.

La propriété était constituée d’une chapelle, d’un cloître, d’un bâtiment principal pour les communs (réfectoire, dortoir, infirmerie, …), une basse-cour, une grange, des écuries et un verger, le tout entouré d’un mur de clôture. Au sous-sol, il existait des caves-prisons (dont se servait la seigneurie de Roisin).

Les moines Trinitaires d’Audregnies devinrent propriétaires de terres et de paroisses à Angreau, Baisieux, Onnezies, Montignies-sur-Roc, ainsi qu’en France. Ils touchaient de la sorte des revenus variés. Les seigneurs d’Audregnies leur firent des dotations à de nombreuses reprises.

En 1507, le monastère fut transféré au centre du village, au nord-est de la Place (n°6-7-8 de la place actuelle). Il fut reconstruit au début du XVIIIème siècle. Un édit de l’empereur Joseph II supprima ce couvent en 1783. Les ornements furent remis à diverses paroisses du diocèse. Les bâtiments conventuels furent démolis (communs et chapelle) en 1785. On conserva la grange, le porche d’entrée du verger et les écuries.  Il servit donc de ferme. Puis on y bâtit les actuelles maisons N°6,7 et 8, précédées de jardins. On peut encore voir le portail de 1705, frappé de la croix de l’ordre des Trinitaires, avec la devise “espoir nous contente”.

Le couvent des Dames Bernardines (1903-1945) abrita des religieuses expulsées de France en 1903. Ces  religieuses Bernardines d’Esquermes-lez-Lille vinrent se réfugier à Audregnies. A l’époque, la politique française en matière d’enseignement était très anticléricale sous Emile Combes. De nombreux établissements catholiques français vinrent s’établir chez nous. Elles s’installèrent dans l’ancienne ferme Leroy (ou château Duquesnes), qu’il fallut agrandir pour y abriter leurs nombreux élèves. La première pierre de cette maison d’éducation fut bénie par le chanoine de Cambrai en mars 1904. Ces religieuses enseignaient à des jeunes filles de la bourgeoisie et de l’aristocratie française. On y comptait entre 60 et 80 élèves. Pendant la guerre 1914-18, le couvent fut aménagé en hôpital militaire à l’occasion de la bataille d’Audregnies. Elles quittèrent Audregnies en 1940.

En 1942, elles furent remplacées par les Sœurs Salésiennes de Don-Bosco. Celles-ci accueillirent des jeunes gens du village, mais aussi d’autres envoyés par le Secours d’Hiver. En 1944, des élèves de l’école Ste-Marie de Quiévrain y vinrent aussi s’abriter, au moment où l’on bombardait la gare de Quiévrain. En 1945, une communauté laïque flamande s’y installa.

En 1953, l’évêque de Tournai, Mgr Himmer, cherchant à fonder des homes pour personnes âgées, s’intéressa à Audregnies. L’évêché racheta le château Duquesnes. Et en 1956, les Servantes de l’Enfant-Jésus, un ordre religieux croate y fondèrent une maison de repos. Ces vieux bâtiments furent démolis en 1987 et remplacés par les actuels du Foyer Notre-Dame de la Paix. De nouvelles constructions eurent lieu en 2010-2012.

Le couvent des Sœurs de la Sainte-Famille (1904-1940). Lors de la même expulsion des religieuses françaises en 1904, un autre Ordre, celui des Sœurs de la Sainte-Famille d’Amiens (une dizaine de sœurs) vint s’installer dans une résidence rurale du début du XIXème sise sur l’emplacement de l’ancien château incendié en 1793. Soit à l’emplacement du château de la Claire Fontaine. Elles y ouvrirent une école dans le grand bâtiment latéral longeant la rue de l’église, bâtiment privé qui fut ensuite cédé à l’association des œuvres paroissiales du doyenné de Dour. Il s’agissait d’une école gardienne et primaire s’adressant à des enfants de 12-14 ans. Un patronage y fut organisé en 1911. En 1928, des institutrices laïques renforcèrent le corps enseignant religieux. Les sœurs quittèrent Audregnies après la guerre 40-45 et cette école ferma.

Le patrimoine actuel

Eglise Saint-André

On sait peu de choses de la première église (X ou XIème siècle). La seconde église fut petite et médiocre et ne valait que par sa chapelle seigneuriale. Elle fut bâtie au XVème siècle en style ogival. En 1722, on reconstruisit sa sacristie. Le reste était pourtant vétuste, ce dont se plaignirent mayeur et échevin en 1736 auprès du seigneur, plainte d’ailleurs répétée par leurs successeurs en 1765 et en 1790. Ce n’est pourtant qu’un siècle plus tard que l’on reconstruisit l’église. Elle fut inaugurée le 20 aout 1871 et consacrée à St-André.

De style néogothique, dessinée par l’architecte Dosveld de Mons.

Elle abrite quelques oeuvres d’art :

  • Vierge espagnole en bois peint (XVIIIème)
  • Cuve baptismale en pierre (XVIIIème)
  • Autel en marbre, avec la statue de St-André en bois polychrome (XVIIème)
  • Buste reliquaire de St-Roch en bois polychrome (XVIIème)
  • Calvaire en bois sculpté polychrome (époque gothique ?)
  • Ex-voto de Louis de Revel (gentilhomme au service de Charles Quint) et de son fils,
  • Confessionnaux (Style Louis XV)
  • Orgue (1885)
  • Art liturgique du XVII-XVIIIème (ostensoirs, chandeliers, croix, …)
  • Cloches (XXème)
  • Différents épitaphes et tombes : Louis de Revel et son épouse, etc…, familles Dupont, Duquesne

Au Moyen-Age, le cimetière entourait l’église, alors que les plus nobles et les plus riches pouvaient se faire enterrer à l’intérieur. Un nouvel emplacement fut choisi en 1891 hors du village, pour des raisons d’hygiène publique, sur le Champ des Bruyères, le long du chemin d’Audregnies à Angre.

La chapelle sépulcrale des seigneurs d’Audregnies est attenante au chœur de l’église précédente, démolie en 1871. Elle servit de sacristie après la Révolution. Elle aurait été construite entre 1525 et 1549. Le premier seigneur inhumé fut Louis de Revel en 1549.

Les chapelles St-André

L’ancienne était située dans la ferme de St-André-du-Cateau, rue de Montignies et datait du XVème. Elle fut démolie au XVIIIème. Une petite chapelle St-André est actuellement située le long du chemin de Montignies. Elle fut déplacée lors de la construction de la voie ferrée.

La chapelle du Coin du Bois. Datant du XIXème et dédiée à Notre-Dame de Pitié, elle est sise au lieu-dit Coin du Bois.

La Chapelle Ste-Thérèse de l’Enfant-Jésus, construite en 1929 au sud de la voie ferrée, le long de la rue de Montignies, à l’entrée du bois.

La chapelle St-Roch, bâtie à l’emplacement de la seconde église, après 1871.

Le calvaire fut construit au sommet de la rue du Calvaire (ancienne rue de la Braderie). Il comporte un Christ en bois sculpté, du début du XVIIIème sous une voûte. L’autel porte la date de 1731. Il semble que ce calvaire fut érigé après l’épidémie de peste de 1720. On trouve à côté un tilleul multiséculaire.

Il existe encore des bâtisses du XVIIIème siècle, dont des fermes :

  • Ferme Dusquesnes (actuel manège à la chaussée Brunehaut, première moitié XIXème)
  • Ruelle Faveresse, 5, 1786
  • Ancienne ferme de l’abbaye St André, 3, chemin de Montignies, XVIII-XIXème

La Place du village est arborée et entourée d’habitations rurales et bourgeoises. C’est une des plus étendues de Belgique. L’ancienne maison communale est de la fin du XIXème siècle, ainsi que l’école qui la jouxte.

Bibliographie

Le couvent des trinitaires d’Audregnies – D. Dereck, Ann. Cercle d’histoire et d’archéologie de Saint-Ghislain, VII, 1995

Audregnies au cours des siècles, Marc Coquelet

 

Baisieux

Entité communale de Baisieux

 

Le territoire

Superficie: 747 h

Altitude: 33 m( place) à 42 m (haut du village à l’est)

Situation géographique : Baisieux s’est installé dans la vallée de la Haine (rive gauche) et dans celle des deux Honnelles, au pied du Plat-Pays. 

Cours d’eau : les deux Honnelles (Grande et Petite) qui se rejoignent en aval à l’entrée de Quiévrain.

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : le bas du village était marécageux et reste inondable, entouré de prairies humides, alors que les versants étaient boisés

Nature du sol : alluvionnaire et limoneux

Nature du sous-sol : grès, houille, pierre à chaux

Préhistoire

Néolithique (Homo Sapiens) : 

Selon les auteurs du XIXème siècle, des silex taillés du néolithique ont été retrouvés sur le territoire.

Antiquité gallo-romaine

Non documentée

Premier Moyen-Age (période franque mérovinienne et carolingienne)

Non documenté

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 965

Toponymie (anciennes orthographes) : 

  • Basiacum (charte de 965)
  • Baisiacum (1018)
  • Basiacum (1034)
  • Baseium (1056)
  • Basium (1111)
  • Basiu (1186)

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) : 

bas peut signifier “marais, basses-eaux” et – basi (latin) = fosse, marécages. Baisieux était un village souvent envahi par les eaux des deux Honnelles

Epoque de son apparition: entre le Xème et le XIIème siècle

Facteurs ayant favorisé son émergence :

voies de communication: la chaussée romaine antique Bavay-Blicquy-Gand passait tout à l’est du village. Vers le VIIIème siècle, un chemin, partant de Famars (près de Valenciennes) et se dirigeant vers Estinnes, passait par Marchipont, puis Baisieux (par un tracé disparu), puis par Carochettes allait vers Elouges, Boussu, Hornu, Quargenon, Ciply, Harmignies, …

sources d’eau ou cours d’eau: les deux rivières

source de bois: sur les versants

proximité d’un lieu de pouvoir: le château de Quiévrain, puis celui de Baisieux.

Paroisse dédiée à Sainte-Aldegonde (soeur de Waudru – elle a fondé l’abbaye de Maubeuge). Un pèlerinage y fut organisé.

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Bavay, puis Dour

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné à l’abbaye de Crespin qui la partageait avec le couvent des Trinitaires d’Audregnies.

Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons

Seigneuries et fiefs. Le territoire fut partagé (peut-être à des périodes  différentes, entre

  • une seigneurie principale (infra)
  • un fief avec une ferme appartenant à l’abbaye de Crespin
  • un fief de la Motte, relevant des seigneurs de Quiévrain
  • une Cense des Prés, ayant appartenu depuis le XIVème siècle à la famille “des Prés” (ou “des Pretz” ou “Despretz”, liée à celle de Quiévrain

Liste des seigneurs de la seigneurie principale

Très tôt ce village s’est trouvé dans les propriétés des seigneurs de Quiévrain qui y exercèrent leurs droits féodaux (cens, taxes, corvées). Ces seigneurs étaient des barons au service des comtes de Hainaut. Ceci est documenté depuis au moins le XIIIème siècle.

Le seigneur de Quiévrain avait fait bâtir un château, ou tout au moins une demeure ou une ferme fortifiée, à Baisieux. Elle fut occupée par des seigneurs-châtelains, vassaux de Quiévrain.

Th. Bernier signale un Jacques (et/ou Jean) Maugret (ou Maugré), titulaire de la seigneurie de Baisieux, vers 1300. Le château porta le nom de Château Maugré/Maugret.

Par la suite, on trouve dans la généalogie de la famille de Quiévrain des personnages, seigneurs d’autres lieux, qui naissent ou décèdent à Baisieux, sans que l’on sache s’ils étaient considérés comme seigneurs de Baisieux. Parmi eux:

  • Jean Gillon de Quiévrain (v1310-1378), également seigneur de Bois-de-Lessines
  • Gilles de Quiévrain (1342-1378), son fils
  • Guillaume des Prêts de Quiévrain (1371-1423), fils du précédent
  • Simon des Prêts (?-?), renseigné comme écuyer de Baisieux, fils du précédent
  • Catherine Despret de Quiévrain qui épousa Jacques I Mouton, seigneur d’Harchies

On ne peut tirer aucune conclusion de ceci, car ces personnages peuvent

D’Adrien de Montigny (XVIème)

être considérés soit comme seigneurs de Baisieux, vassaux de ceux de Quiévrain (Aspremont, Lalaing, de Croÿ), soit comme propriétaires de la cense des Prés, soit les deux.

En 1635, la seigneurie appartenait à Louis de Senaughière, écuyer.

De gros éclaircissements doivent être faits sur cette question, d’autant plus que d’autres personnages de la famille étaient seigneurs de Quiévrechain (dont il est difficile de trouver une liste complète de seigneurs) et que leur château (actuel Château Braque) se trouvait … au Petit-Baisieux, hameau qui appartenait alors à Quiévrechain, avant d’être rattaché à Baisieux (infra).

Evènements et faits marquants sur le sol de la commune

C’est au château de Baisieux qu’en 1364, Siger II, seigneur d’Enghien vint se réfugier. L’époque était trouble. On était en pleine guerre de Cent Ans entre Français et Anglais. Les comtes et barons de nos régions se devaient de prendre position entre les deux partis. Le roi Edouard III d’Angleterre, époux de Philippa de Hainaut, fille du comte, revendiqua le Hainaut. Aubert de Bavière était alors régent du comté, remplaçant son frère Guillaume, devenu dément. Les vassaux du comte oscillaient également entre les divers partis. A Quiévrain, le seigneur Simon II de Lalaing était un fidèle du comte, dont il fut grand bailli. Parmi les opposants au comte, il y avait ce Siger (ou Sohier) d’Enghien. Il vint assiéger le château de Quiévrain. L’église adjacente fut en partie incendiée. Poursuivi, Sohier vint ensuite se réfugier dans le château de Baisieux, où il fut finalement arrêté. Il fut emmené et emprisonné au Quesnoy, résidence-forteresse des comtes, où il fut décapité. D’autres seigneurs de la région intervinrent aussi dans ce conflit, du côté du comte, comme Baudri de Roisin, Gérard de Ville et Jean de Werchin.

Le château fut encore occupé en 1396 par le comte Aubert lui-même, puis en 1426 par sa fille, la comtesse Jacqueline de Bavière, en conflit à l’époque avec le duc Philippe le Bon de Bourgogne.

Dans les siècles suivants, Baisieux et son château vécurent bien des vicissitudes. Ainsi, lors des guerres religieuses du XVIème siècle, le château fut  rasé en 1578 par le duc d’Alençon et d’Anjou, frère du roi de France. Les Orangistes l’avaient appelé à la rescousse pour régner en place du roi Philippe II d’Espagne. Maurice de Nassau s’était emparé de Mons et les Espagnols commençaient à y mettre le siège. Après avoir été repoussé, d’Alençon commit divers pillages et dévastations dans la région, toujours occupée par ses troupes. Les châteaux de Baisieux et d’Elouges furent sérieusement endommagés. 

En aout 1655, le village fut entièrement détruit par les troupes françaises du roi Louis XIV, église et château compris, ceci après le siège de Condé. 

Carte de Ferraris (XVIIIème)

Le 29 octobre 1792, une bataille s’y déroula où les Belgo-Autrichiens du comte Sztaraj battirent l’avant-garde française de Dumouriez. Ce qui n’arrêta cependant pas celui-ci qui emporta une victoire décisive quelques jours après à Jemappes. 

Lorsque les Autrichiens repoussèrent les Français hors du pays, ils poussèrent plus avant en France. Lors du siège de Valenciennes, en 1793, la ferme Poisson, derrière l’église de Baisieux, servit d’hôpital. Lors de deuxième invasion française révolutionnaire, un incendie brûla une grande partie du village en juillet 1794.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

Département: Jemappes

Canton: Quiévrain

Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Mons
  • Arrondissement judiciaire: Mons
  • Canton: Dour
  • Entité communale depuis 1977: Quiévrain

Le 21 août 1914, les Allemands, venant de Thulin et Saint-Ghislain se heurtèrent à des Anglais venant de Rombies. Ils se retirèrent par le même chemin, via Marchipont, en faisant sauter le pont.

Durant la guerre 1914-1918, beaucoup de Basigomiens furent déportés (72, y compris le bourgmestre Ansiau qui mourut en captivité).

Lors du recul allemand à la fin de la guerre, le 8 novembre 1918, des bombardements d’obus au gaz firent 25 victimes. Plus de 50 maisons furent endommagées.

Economie

La richesse d’un village comme Baisieux, ce sont ses prairies et ses surfaces cultivables. Toujours, jusqu’au XIXème siècle, ses habitants vécurent de l’agriculture et de l’élevage. Les anciennes grosses fermes ayant résisté au temps sont :

  • Celle du Maïeur Madeleine, près de l’église, ayant appartenu jadis à l’abbaye de Crespin, et dont les bâtiments actuels, datés de 1795, conservent encore une tour-colombier
  • La ferme Hoyau, 36, rue de Bavay, de la fin du XVIIIème aussi
  • Ainsi que la ferme Scouvemont, dans la rue du même nom, datant du XIXème.

Des entreprises artisanales, liées à l’activité agricoles, s’y développèrent.

  • Une sucrerie au XIXème siècle à Carochette.
  • Deux brasseries au XIXème
  • Un Moulin à eau, XVIIème
  • Deux fabriques de chicorée (XIXème)

On relève aussi

  • la présence de fours à chaux au XVIème siècle.
  • Une poudrière

En 1836, on tenta aussi d’y exploiter la houille, mais le projet fut vite abandonné, car les couches n’étaient pas régulières et les puits se remplissaient vite d’eau.

Cependant le charbonnage de Belle-Vue à Elouges poussa ses galeries sous le sol du village. Dans le petit coron de l’Avaleresse, à la limite d’Audregnies, se trouvait le puits n°12. Il reste quelques murs en ruines.

Baisieux est aujourd’hui avant tout un village résidentiel et son bâti s’est étendu jusqu’à l’entrée de Quiévrain.

Patrimoine

Eglise Ste Aldegonde. C’est aujourd’hui un bâtiment construit en 1830 en style semi-classique. Il a conservé le clocher et le porche de 1759. Comme mobilier, on trouve :

  • Un Christ en Croix
  • Une statue de Ste Aldegonde en bois polychrome, du XVIIème
  • Trois tableaux venant de l’abbaye des Trinitaires d’Audregnies: Baptême du Christ, Martyre de St Adrien, Martyre de St Etienne

Chapelle Notre Dame des bons remèdes, 1876 (don de la famille d’Arenberg)

L’ancienne maison communale date de 1880.

La place a été réaménagée en 1911 lors du recouvrement partiel de la Petite Honnelle.

Le Petit-Baisieux

Ce hameau n’a pas toujours fait partie du village de Baisieux. Il était le siège de la seigneurie de Quiévrechain qui y avait son château.

Ce « Château Bracq » actuel date de 1769 et fut construit par le seigneur Jean de Colins. On y entre par une drève de peupliers. Le bâtiment de style classique Louis XVI est entouré d’un parc avec un étang alimenté par un courant d’eau. Bracq était le nom de la famille qui le racheta en 1903.

Lorsque le Traité de Nimègue en 1678 détermina de nouvelles frontières entre la France (de Louis XIV) et les Pays-Bas Espagnols, Quiévrechain, devenue française, garda son domaine seigneurial en-deçà de l’Aunelle.

Ce n’est qu’en 1779, par le second Traité des Limites, que l’on simplifia le tracé des frontières, faisant de l’Aunelle/Anneau la limite entre France et Pays-Bas. Du même coup, le Petit-Baisieux devenait un domaine « belge » sous seigneurie française (de Quiévrechain). La seigneurie disparaissant avec la Révolution, Petit-Baisieux fut rattaché au village de Baisieux.

Au XIXème et au XXème, ce hameau était essentiellement habité par quelques agriculteurs, mais surtout par des mineurs travaillant à Quiévrechain. Une cité ouvrière y fut même construite à l’entrée du hameau, à droite, en venant du village de Baisieux.

Quiévrain

Entité communale de Quiévrain

Le territoire

Superficie: 860 ha

Altitude: de 30 m (frontière) à 48 m (lieu-dit “Carochettes”

Situation géographique : le village s’est implanté sur la rive gauche de la vallée de la Haine, au pied du Haut-Pays. Du nord vers le sud, la pente est relativement douce. Par contre, d’ouest en est, à partir de la Honnelle, une pente un peu plus marquée conduit vers un plateau.

Cours d’eau : la Grande Honnelle traverse Quiévrain au bas du village, à l’ouest. Entre Baisieux et Quiévrain, elle reçoit la Petite Honnelle. Dès qu’elle traverse la frontière, avant Hensies, elle reprend son nom français de “Hogneau”. Juste avant, elle reçoit encore les eaux de l’Aunelle, petite rivière qui marque la frontière depuis Sebourg. Le bas du village est inondable.

Paysage préhistorique (après la dernière période glaciaire) : le nord du village était marécageux (d’où l’appellation “Joncquois”). Avec les draînages, il s’est couvert de prairies humides, bordées de saules et de bosquets de peupliers (comme  dans les “Manages” ou au “Congo”). Plus on remonte vers le sud et plus la région était boisée. Il en reste de rares vestiges (bois de Baisieux).

Nature du sol : alluvionnaire et limoneux

Nature du sous-sol : pierre calcaire, grès et houille en profondeur.

Préhistoire

Néolithique (Homo Sapiens) :

Des vestiges de cette époque ont été trouvés au XIXème siècle et sont cités par les auteurs de la fin de ce siècle (Th. Bernier, Ch. Debove). On a retrouvé au Tombois et à Carochette, le long de la chaussée Brunehaut, des silex taillés et des haches polies (collection Toilliez, XIXème, d’après Bernier; collection Debove, Elouges; collection Bernier). Nous n’avons aucune indication sur un éventuel habitat néolithique.

Ages du fer : 

On sait que notre région fut habitée par des Celtes du peuple des Nerviens à la fin du premier millénaire avant J.C.

Selon Th. Bernier, l’historien de référence pour Quiévrain, il y existait un habitat du second âge du fer, soit des trois ou quatre derniers siècles avant J.C., à l’époque des Gaulois Nerviens. La rue du Tombois, qui fut autrefois un sentier, rappelle le mot tombelle et fait allusion à des tumulus gaulois. Nous n’avons pas de précision sur ces données. Il est vrai que les Celtes ont laissé peu de traces dans nos régions (hormis du côté d’Onnaing), alors qu’ils étaient bien présents.

Antiquité gallo-romaine

Les témoignages de cette époque sont plus nombreux. Une bonne partie fut retrouvée de nouveau dans la seconde moitié du XIXème siècle par les mêmes historiens de la région. On fit également quelques découvertes au XXème.

Quiévrain, comme écrit plus haut, est proche d’une ancienne chaussée romaine. Le village n’existait pas en tant que tel. Il n’y avait pas d’agglomération proprement dite. Des fermes, d’importance variable, étaient disséminées çà et là, tenues le plus souvent par des anciens Gaulois romanisés et peut-être aussi par quelques romains, soldats vétérans à qui les autorités romaines attribuèrent des terres après la conquête.

Ces exploitations agricoles constituaient des domaines avec à leur tête un maître (dominus) plus ou moins riche ou puissant (sur le plan politique). Les petites fermes ont rarement laissé des traces. Les plus riches sont repérables car elles furent construites en matières plus durables (avec des pierres et des toits en tuiles) et elles contenaient des objets de valeur (par exemple de la céramique sigillée importée, des statuettes en bronze, …). Les pièces de monnaie retrouvées permettent d’avoir une idée de la période concernée.

Au XIXème siècle, on a retrouvé au “Tombois” et près de l’ancienne chaussée romaine des monnaies et des fragments de tuiles de cette époque. Dans la collection Debove d’Elouges, on trouve une quarantaine de pièces de monnaies affichant des effigies d’empereurs romains (Auguste, Néron, Hadrien, Trajan, Vespasien, Antonin, Marc-Aurèle, Galien et Constantin), soit d’une période particulièrement étendue entre le début de notre ère et la première partie du IVème siècle. Des tuiles de maisons romaines, des débris de poteries et d’hypocaustes, un morceau de fresques, des fragments de mosaïques du IIème siècle, et des morceaux de marbre de provenance italienne évoquent une villa assez opulente. Un aqueduc aurait existé sur l’emplacement du nouveau cimetière.

Lors de travaux de restauration de l’église en 1955, on découvrit dans les fondations des éléments provenant d’un bâtiment romain (notes manuscrites de G. Fally – description de ces fouilles à l’annexe en fin de ce chapitre).

En 1993 (J. Dufrasnes du service archéologique wallon, SPW), d’autres vestiges gallo-romains ont été retrouvés aux abords de la chaussée romaine

  • au Calvaire des Six Chemins, à 150m de la chaussée : des fragments de tuiles et tessons de céramique (voir aussi Montroeul-sur-Haine et Hensies)
  • au Gant d’Or, à l’intersection de la grand-route actuelle et de la chaussée : fragment de tuiles, tessons de céramique, notamment sigillée (donc importée du centre ou du sud de la Gaule). L’auteur pose l’hypothèse d’une nécropole le long de la chaussée.

En 2001, on trouva à proximité de la chaussée Brunehaut une fosse quadrangulaire contenant des fragments de tuiles, de carreaux, de céramique sigillée du Haut-Empire (SPW).

On voit donc que des vestiges de construction de nature diverse sont retrouvés en plusieurs endroits, au minimum quatre :

  • près de l’actuelle église: possible villa
  • au Tombois: trésor de monnaies
  • au Saulçoir: possible villa ou ferme
  • au Calvaire des Six-Chemins, à la limite des communes de Hensies et Montroeul-sur-Haine: établissement de nature difficile à préciser (poste militaire?)
  • au  “Gant d’Or”: nécropole

Ces arguments ne sont que de spéculations, car les vestiges ne sont pas suffisamment nombreux et probants pour corroborer de telles affirmations. On peut imaginer une ou deux villas (certainement près de l’église et peut-être une entre l’actuel cimetière et le Saulçoir), les autres vestiges pouvant correspondre à des petites constructions agricoles ou même un camp militaire le long de la chaussée romaine, comme on l’a évoqué pour le Calvaire.

On sait que beaucoup de villas romaines furent abandonnées vers 250-275 à la suite d’une grande crise économique et des premières invasions franques qui furent très meurtrières. Le fait de découvrir des pièces de monnaie de Constantin pourrait faire émettre l’hypothèse qu’un habitat était encore présent au début du IVème siècle.

Premier Moyen-Age (période franque mérovingienne et carolingienne)

Lors des fouilles à l’église en 1955, on a retrouvé des fragments de sarcophages de tradition franque mérovingienne (source : notes manuscrites de Mr Fally).

On peut se poser la question de savoir s’il y eut une réelle continuité entre la période gallo-romaine et la naissance du village. Cette continuité est rare dans la région. Les preuves manquent. Mais il est assez curieux de découvrir qu’au centre du village, près de l’église, on a trouvé des restes d’une villa opulente, des sarcophages francs (seuls les riches pouvaient s’en payer). Le château et l’église ont également été construits à cet endroit. La question reste posée.

Deuxième Moyen-Age – le village

Première mention: 902

Toponymie (anciennes orthographes) :

  • Caprinium  (sur un diplôme du roi de France Charles le Simple en 902 – première mention écrite de la commune)
  • Cavrem (diplôme du roi Lothaire en 982)
  • Servain
  • Chiuvrain
  • Chievrain
  • Kiévraing (XIIème)
  • Kevraing, Kieuvain (XIIIème)
  • Kiévraing, Kiévrain, Keuvraing (XIVème)
  • Quieuvrain, Quieuvain (XVème)
  • Quiévrain (XVIIIème)

Etymologie (hypothèses d’origine du nom) :

Selon Jacques de Guyze (chroniqueur du Hainaut, 1334-1399), le village aurait été fondé par les Huns, sur la rivière Hunel ou Honnelle (eau de Hon). Un général romain, Servius, y aurait construit un fort auquel il donna son nom et qui devint Servrain, puis Quiévrain. On sait que les Huns n’ont pas fondé de villages en Gaule. Quant au fort romain, nulle trace n’en a jamais été découverte.

On retient plutôt l’hypothèse admise par Th. Bernier (XIXème) : Caprinium (comme ce fut écrit en 902), mot qui viendrait de :

  • capra (en latin) qui signifie chèvre, d’où est dérivé le mot quièvre (en vieux français roman)
  • le suffice –rain vient du latin ramus, qui signifie bois

Quiévrain signifierait ainsi “bois aux chèvres”. Mannier donne la même étymologie au village voisin de Quiévrechain. Ce qui peut correspondre au paysage antique et médiéval. L’appellation d’origine latine pourrait donc faire référence à un lieu ancien, nom qui s’est transmis à travers le temps pour qualifier le village naissant.

Epoque de son apparition: Peut-être au Xème siècle.

Facteurs ayant favorisé son émergence :

  • voies de communication: deux chemins à cette époque passaient à proximité:
    • la chaussée romaine antique Bavay-Blicquy qui passait à l’est du territoire
    • un diverticulum entre Valenciennes et Quiévrain (ou Elouges) qui s’embranchait dans le “vieux chemin de Binche”, chemin d’époque mérovingienne qui reliait dans un premier temps le centre politique de Famars à la résidence royale d’Estinnes
  • sources d’eau ou cours d’eau: les rivières évoquées plus haut
  • source de bois: ils étaient nombreux sur les pentes (le Haut-Pays était couvert par la Grande Forêt Charbonnière)
  • proximité d’un lieu de pouvoir: le château des seigneurs de Quiévrain (on ne sait pas s’il est antérieur ou postérieur à la fondation du village, ou contemporain).

Paroisse dédiée à Saint-Martin

Si l’on en croit Grégoire de Tours (Vème siècle), Saint-Martin de Tours, ancien officier romain, entreprit en 385 un voyage vers Trêves. En chemin, il détruisit de nombreux temples païens tout en convertissant les populations rencontrées. De Bavay à Condé, le saint serait passé à Quiévrain. C’est ainsi qu’il aurait pu, lui ou un disciple, abattre un temple païen dédié à une divinité gallo-romaine, temple annexé à la villa romaine, qu’il aurait remplacé par un petit oratoire. 84 des 464 paroisses du diocèse de Tournai lui sont dédiées. Toutes recèlent de vestiges de l’époque romaine. Mais il semble que tout ceci relève de la légende, car on sait que le saint n’a pas voyagé dans nos régions, encore totalement païennes à l’époque.

Evêché: de Cambrai (jusqu’en 1804), puis de Tournai ensuite

Décanat/doyenné: Hornu, puis Bavay, puis Dour

Autel (dîmes, entretien de l’église, nomination des officiants) donné dans un premier temps au chapitre épiscopal de Noyon (qui était commun avec celui de Tournai). Puis il fut transféré à celui de Cambrai.

Des confréries paroissiales furent fondées au fil du temps :

  • Notre-Dame de Hal, 1399, sous Simon de Lalaing
  • Ste Barbe, XVème
  • St Eloi, XVème – disparition de la statue en bois du saint en 1940
  • St Sébastien, 1415 (supra)
  • les Trépassés, 1760
  • St Sacrement, 1900
Répartition des pouvoirs pendant la période féodale

Autorité supérieure: comté de Hainaut

Autorité sous-jacente (administrative et judiciaire): prévôté de Mons. Il est possible qu’à une certaine époque Quiévrain ait dépendu de la prévôté de Valenciennes, au XIIIème siècle selon un cartulaire de 1265 à 1286, uniquement pour le service militaire.

Il existait à Quiévrain :

  • une seigneurie principale qui était constituée du village, de son église, d’un château, de terres de culture et d’élevage, et de bois
  • le fief du Saulçoir (ou Saulchoit). Cette dernière seigneurie était donc distincte. Elle était peut-être la continuation d’une hypothétique villa romaine, abandonnée ou fortifiée à la fin de l’époque gallo-romaine, puis peut-être reprise par les Francs à leur arrivée et qui continuera son existence, en tant que ferme, jusqu’au XXIème siècle. Les seigneurs de Quiévrain en sont devenus les maîtres au XVème siècle. On ne connait pas la date de fondation de cette seigneurie, ni ses premiers titulaires.
  • Des terres que possédait l’évêque de Noyon, qui les céda en 902 à l’abbaye de Noyon
  • Il semble que l’abbaye de Saint-Ghislain posséda aussi une ferme à Quiévrain

La seigneurie principale

Les premiers seigneurs de Quiévrain appartenaient à une vieille famille possédant non seulement le domaine de Quiévrain, mais beaucoup d’autres dans les environs (arrière-fiefs) : des parties de village à Baisieux et Hensies, des fiefs disséminés à Audregnies, Elouges, Autreppe, Nouvelles, Noirchain, … Ils devaient être riches et puissants, car ils servirent comme seigneurs bannerets (barons) les comtes de Hainaut lorsque celui-ci faisait la guerre.

Le seigneur de Quiévrain avait droit de haute, moyenne et basse justice sur toute sa seigneurie et ses dépendances. Un pilori, emblème de l’exercice de ce droit, était élevé dans chacun de ces villages. Pour l’aider, le seigneur, qui ne résidait pas toujours en son château de Quiévrain, désignait des officiers pour le remplacer. Le premier avait titre de châtelain d’abord, puis, dès 1500, de prévôt. Il habitait le château, y rendait la justice et veillait à la défense des droits réservés au seigneur. Le dernier prévôt fut Lambert-Henri-Joseph Mottiau, un lettré. Ses livres ont été transmis à Théodore Bernier par son petit-fils, Eugène Patte, membre du cercle archéologique de Mons. Il contenait la liste des seigneurs.

Il y avait un receveur, pour récolter les impôts de Quiévrain, Baisieux, Hensies, Neufville-lez-Hensies, et à certaines époques ceux de Montroeul, Marchipont et Thulin. Quiévrain fut le siège d’une recette des vingtièmes, établie en 1604 par l’archiduc Albert.

Plusieurs familles se succédèrent à la tête de la seigneurie. Certains barons résidèrent à Quiévrain (vraisemblablement les premières familles), mais à partir du XVIème siècle, la seigneurie appartint à des familles aristocratiques puissantes, au service des ducs de Bourgogne, des rois d’Espagne et des empereurs de Germanie. Elles possédaient de nombreuses résidences plus opulentes et résidèrent rarement à Quiévrain, y laissant un intendant-châtelain (ou prévôt).

Famille de Kiévraing (± 1067 à 1300)

Anselme de Quiévrain  (v1010, Quiévrain-v.1044). Il est le premier cité (sources généalogiques diverses). Nous n’avons aucune indication sur la provenance de cette famille. Peut-être était-elle déjà présente depuis longtemps dans la ferme-villa qui se trouvait près de l’église actuelle et ses maîtres se mirent-ils déjà au service des comtes, ce qui leur valut le titre de baron. Quiévrain était-il un alleu (domaine héréditaire non attribué par un comte)? Nous n’en avons pas trouvé mention, mais cela parait vraisemblable. Cet Anselme vivait du temps du comte Herman et de la comtesse Richilde, soit à une époque où le territoire du comté avait pris de la consistance et où ses souverains commencèrent à y organiser un pouvoir politique, administratif et judiciaire cohérent. Lui succédèrent :

  • Wauthier (ou Gauthier) I de Kiévraing (v.1036-v.1090), fils du précédent
  • Wauthier II (1067-v1109), fils du précédent
  • Wauthier III de Quiévrain (v1087- apr1109), fils du précédent
  • Hawel (ou Helin) (<1108-v.1183), fils du précédent
  • Arnould de Quiévrain (v.1147/1150, Quiévrain-1183 ou 1199 ou apr.1211), fils du précédent
  • Wauthier  IV de Quiévrain (1176-1243), fils du précédent. Il était au service du comte Baudouin VI, avec qui il signa la charte de 1200. Puis au service du comte Ferrand, avec qui il fut fait prisonnier à la bataille de Bouvines en 1214.
  • Richard de Quiévrain (1230-v1249), fils aîné du précédent, décédé sans postérité
  • Nicolas de Quiévrain, son frère  (v1230-v.1270/1280). Il épousa Julienne de Looz, héritière de la terre d’Amblise (fief situé à Crespin). C’était un militaire, adoubé chevalier, qui participait à des tournois, faisait la guerre et y mourut, puisqu’il rendit son dernier soupir en 1302 à la bataille des Eperons d’Or. Par héritage, par mariage et par achat, les seigneurs de Quiévrain étaient alors maîtres de plusieurs domaines. Il en fit profiter ses trois enfants. Isabeau hérita de Quiévrain et Amblise.

Famille d’Aspremont

Aspremont se situe en Lorraine et s’appelle aujourd’hui Aspremont-la-Forêt.

Geoffroid III d’Aspremont (v.1255-1302). Seigneur d’Aspremont et d’autres lieux, il le devint aussi pour Quiévrain et Amblise en épousant Isabeau de Quiévrain (1260/1268-1335). Ils eurent plusieurs enfants, dont Mahaut qui hérita du domaine de Quiévrain.

Famille de Lalaing

Lalaing (actuellement orthographié Lallaing) se situe dans l’actuel département du Nord, entre Douai et Valenciennes, au bord de la Scarpe, soit dans le royaume de France au XIIIème siècle.

Simon IV de Lalaing (1275-1333) était le fils de Nicolas de Lalaing, chevalier au service du roi (Saint) Louis IX de France, avec qui il alla à la 8ème croisade à Tunis. Simon, qui hérita de Lalaing, devint aussi seigneur et baron de Quiévrain en épousant vers 1310 Mahaut d’Aspremont. A ce titre, il se retrouva au service des comtes de Hainaut, législateur judiciaire (« loi Lalaing » de 1300 pour l’organisation judiciaire et administrative du comté), puis bailli du comté (soit le deuxième personnage du Hainaut). Ses deux fils se partagèrent son héritage. Suivirent pour Quiévrain:

  • Simon de Lalaing/II de Quiévrain (1333-1386), obtint Quiévrain et Hordain. Il devint également seigneur d’Ecaussines par mariage.
  • Simon de Lalaing, III de Quiévrain ( ?-1388), fils du précédent
  • Simon de Lalaing IV de Quiévrain (1370-1415), fils du précédent. Lui aussi fut bailli de Hainaut. Il eut deux filles, qui se partagèrent ses seigneuries.
    • Jeanne de Lalaing ( ?-1467) hérita de Quiévrain. Elle épousa Olivier de Blois-Châtillon ( ?-1433). Celui-ci cumulait les titres et les possessions : comte de Penthièvre, vicomte de Limoges, seigneur d’Avesnes, de Landrecies et de Nouvion. Il y ajouta la seigneurie de Quiévrain. Ils n’eurent pas d’enfant et à la mort de Jeanne, cette seigneurie revint à sa sœur:
    • Marie de Lalaing ( ?- ?), qui, elle, avait hérité d’Ecaussines-Lalaing.

Famille de Croÿ

Elle était originaire du petit village de Crouy-Saint-Pierre dans la Somme, près d’Amiens, donc vassale du roi de France. Elle apparut au XIIIème siècle. Elle commença à prendre de l’importance près d’un siècle plus tard en se mettant au service des rois de France Valois, alors en Guerre de Cent Ans contre les Anglais. Le premier personnage important fut Jean I de Croÿ qui se mit au service du roi Jean II “le Bon” et de ses fils, le roi Charles VI et son frère Philippe « le Hardi », fait duc de Bourgogne. Il exerça différents postes militaires importants avant de se faire tuer à la bataille d’Azincourt en 1415.  Auparavant, il avait acheté la seigneurie de Chimay. Il eut plusieurs enfants, dont Antoine « le Grand » qui fut un des plus proches collaborateurs du duc Philippe le Bon de Bourgogne, devenu également comte de Hainaut en 1433.

Jean II de Croÿ « à la Housette » (1380/1395 – 1473, Valenciennes) était un frère cadet d’Antoine. Il hérita de son père la seigneurie de Chimay que le duc Charles le Téméraire érigea en comté en 1468. Tout comme son frère, il exerça de hautes fonctions militaires et politiques au service des ducs de Bourgogne. C’est en épousant Marie de Lalaing qu’il devint aussi seigneur de Quiévrain et d’Ecaussines-Lalaing. Lui succédèrent :

  • Philippe Ier de Croÿ-Chimay (1436-1482, Bruges), leur fils. Au service des ducs Philippe le Bon et Charles le Téméraire, de l’archiduc Maximilien d’Autriche.
  • Charles Ier de Croÿ-Chimay (1455-1527, Beaumont), fils du précédent. Au service de Maximilien d’Autriche, de Philippe le Beau et de Charles-Quint. A sa mort, tous ses fils étaient décédés. Sa fille Anne hérita de ses domaines. Elle épousa son cousin Philippe II de Croÿ (1496-1549) de la branche aînée. Prince de Chimay, comte de Beaumont et de Porcien, il était à la tête d’un grand nombre de seigneuries dont celle de Quiévrain, d’Avesnes, de Landrecies, de Quevaucamps et d’Havré qu’il acheta. Il servit Charles Quint pour lequel il exerça les fonctions de grand bailli et de gouverneur de Hainaut.
  • Charles de Croÿ  (1522, Quiévrain-1551, Quiévrain), fils du précédent. Il hérita des titres de son père. Il mourut jeune, assassiné à Quiévrain par un traître. N’ayant pas d’enfant, son frère cadet, Philippe III de Croÿ (1526, Valenciennes – 1595, Venise), lui succéda. Celui-ci, en pleines guerres de religion, resta fidèle au roi Philippe II d’Espagne et de ses divers gouverneurs des Pays-Bas.
  • D’Adrien de Montigny (fin XVIème)

    Charles III de Croÿ (1560, Beaumont – 1612, Beaumont), fils du précédent Il servit les rois d’Espagne, Philippe II et Philippe III, ainsi que les gouverneurs Albert et Isabelle. Il fut considéré comme un des aristocrates les plus riches et les plus puissants des Pays-Bas Espagnols. Il est aujourd’hui aussi connu par les “Albums de Croÿ”, dispersés à travers le monde, mais dont les gouaches, représentant les villes et propriétés ducales de l’époque, offrent une source unique d’information sur les paysages et l’architecture de la Renaissance. Charles III n’eut pas d’enfant. Il répartit son grand domaine entre divers membres de la famille. Chimay, Avesnes, Beaumont et Quiévrain furent destinés à Alexandre d’Arenberg, fils cadet de sa sœur Anne de Croÿ et du prince et comte Charles d’Arenberg, à condition qu’il portât le nom et les armes de Croÿ.

Maison d’Arenberg (1612-1793)

Cette famille était originaire de l’Eifel en Allemagne et documentée depuis le XIIIème siècle. Plusieurs branches en sont issues. Celle qui est liée aux La Marck va aboutir au XVIème à Marguerite de la Marck-Arenberg qui épousa Jean de Ligne, un cadet de cette famille. De ce mariage est issue la Maison de Ligne-Arenberg qui prendra le nom d’Arenberg.

Alexandre d’Arenberg « de Chimay » (1590-1629)  est le petit fils de Jean de Ligne et de Marguerite de la Marck-Arenberg. Il hérita  donc de Quiévrain, Chimay, Beaumont et Avesnes de son oncle Charles III de Croÿ. La plupart de ses possessions passèrent à deux de ses fils successivement, mais la seigneurie de Quiévrain semble avoir été attribuée à son frère aîné Philippe Charles d’Arenberg (1587-1640) qui avait titre de prince d’Arenberg et du Saint-Empire. Il fit une carrière diplomatique et militaire au service des rois d’Espagne et de leurs gouverneurs Albert et Isabelle. Lui succédèrent :

  • Philippe-François d’Arenberg (1625-1674),  fils du précédent. Il possède les mêmes titres et les mêmes domaines que son père, tout en étant au service des rois d’Espagne. A sa mort, ses enfants ont déjà disparu, et ses biens revinrent à son demi-frère
  • Charles-Eugène d’Arenberg (1633-1681, Mons).
  • Philippe-Charles-François d’Arenberg (1663-1691), fils du précédent. Militaire, il fut au service de l’empereur de Germanie, pour lequel il fut tué à la bataille de Salantdemen.
  • Léopold-Philippe Charles-Joseph d’Arenberg (1690, Bruxelles – 1754, Heverlee), fils du précédent. Ce fut aussi un grand militaire au service de l’empire. Il fut blessé en 1709 à la bataille de Malplaquet et fit également une campagne en Hongrie.
  • Charles-Marie-Raymond d’Arenberg (1721, Enghien – 1778, Enghien), fils du précédent. A l’instar de ses ancêtres, il servit militairement l’impératrice Marie-Thérèse.
  • Louis-Pierre-Engelbert d’Arenberg (1750, Bruxelles – 1820, Bruxelles). Il commença sa carrière au service de l’empire. Vint la Révolution. Il perdit tous ses droits féodaux, mais conserva une grande partie de ses domaines. Ayant perdu la vue dans un accident de chasse, il se retira dans ses châteaux d’Enghien et d’Heverlee. Napoléon fit appel à lui au Sénat de Paris, en 1806, pour ses connaissances politiques. Il rentra en Belgique après la Restauration.
La commune

Le village fut érigé en commune “libre” au XIIème siècle. Il était administré par un mayeur et un conseil échevinal. Le mayeur était un officier seigneurial dont le rôle était de maintenir le contact entre la commune et le seigneur. Avec le temps, il reçut des attributions d’ordre législatif, judiciaire, militaire et financier. On l’a appelé maire, de 1786 à 1794. Puis il fut désigné bourgmestre.

Lorsqu’elle fut érigée en commune, Quiévrain reçut un sceau: “écusson d’or au chef bandé d’argent et de gueules de six pièces”. En 1534, on adopta celui des Croÿ, écartelé de Renty, et en 1587, celui des Arenberg, écartelé Croÿ.

Quiévrain ne devint jamais une ville. Pas d’enceinte, pas de beffroi, pas d’artisanat renommé. Mais il obtint le droit d’organiser un marché et des foires, où les paysans et les artisans des villages alentours venaient écouler leurs produits. Ainsi que le droit de construire des halles. On y trouvait aussi un hôpital.

Simon IV de Lalaing permit la constitution à Quiévrain en 1415 d’une Compagnie (“Serment”) des Archers de St Sébastien. La plupart des gildes d’archers ont été créées à cette époque dans le but de défendre seigneur et château. Elle fut reconnue par le Comte Guillaume IV de Bavière la même année et dotée de privilèges, qui furent confirmés en 1517 par Charles Quint. Cette corporation se composait de 48 compagnons, âgés de 18 à 40 ans, recrutés dans les cinq villages dont Simon de Lalaing était le seigneur justicier (24 de Quiévrain, 12 d’Hensies, d’autres de Baisieux, de Marchipont et de Bry). Elle possédait un jardin privé, reçu de son fondateur, situé derrière l’ancien hôpital, près de la Grande Honnelle. Chaque année, le lundi de la Pentecôte, ils se rendaient à leur jardin privé, accompagnés de leurs valets, revêtus d’une casaque rouge. Celui qui abattait l’oiselet devenait le “roi de l’année” et était promené en triomphe partout dans le village, collier d’argent au cou, symbole de sa dignité. La troupe avait aussi sa bannière. A la mort d’un compagnon, son arc était vendu au profit de la corporation. Chaque membre assistait à ses funérailles. Chaque année, un service était rendu à la mémoire des disparus. Lors de la fête de St Sébastien, on désignait celui qui portait l’enseigne. Cela dura jusqu’à la Révolution lorsque la société fut abolie et la propriété saisie. Après celle-ci, les membres continuèrent leur activité en tant que loisir et achetèrent une prairie pour y élever une perche (au bout de l’actuelle ruelle des Archers).

Pendant la seigneurie de Jeanne de Lalaing et de son époux Olivier de Châtillon (première moitié du XVème siècle), ces derniers firent construire l’hôpital Saint Nicolas près du pont de la rivière (là où se trouve aujourd’hui l’étude de Maître Fortez). C’était un établissement de bienfaisance pour y nourrir les pauvres, les veuves et les orphelins. Par la suite, il reçut aussi des donations de la part des seigneurs de Croÿ.

Le 9 février 1450, Jeanne de Lalaing, accompagnée de Pierre Gervaise, son châtelain de Quiévrain, comparut à Mons devant Jean de Croÿ et quelques nobles féodaux hennuyers. Elle donna, en leur présence, à l’église de Quiévrain, plusieurs francs alleux qu’elle possédait à Elouges (au Préfeuillet), à condition de faire exonérer différents services religieux.

En 1464, Philippe le Bon octroya à la commune de Quiévrain un marché franc le mardi de chaque semaine et deux franches foires le jour de la St Laurent et celui de la St Luc. Pendant la durée de la “franche foire”, un aigle était dressé sur la place du marché. Une fois dressé, personne ne pouvait être arrêté pour dettes. Symbole des franchises foraines, l’aigle est en bois doré (il est conservé à la maison communale). La halle du marché fut construite à cette époque.

Les gouaches d’Adrien de Montigny, commandées par le duc de Croÿ, ont été réalisées à la fin du XVIème siècle. Sur celle de Quiévrain (plus haut), on y voit à l’avant-plan une arche juste avant le pont de la rivière en remontant vers le village sur le chemin qui vient de Valenciennes. On y distingue des bâtiments plus grands :

  • Hospice St Nicolas (à droite en remontant la rue) avec sa chapelle
  • Eglise St Martin (église halle à l’époque)
  • Le château, entouré de douves, avec un donjon. Détruit en partie par Henri II (controversé), il aurait donc été réparé en grande partie.

En 1604, l’archiduc Albert, gouverneur des Pays-Bas Espagnols, établit à Quiévrain une recette des “vingtièmes”. Le receveur percevait les impôts de Quiévrain et de quelques communes avoisinantes. Ces impôts servaient à alimenter les guerres contre les Hollandais sécessionnistes et pour réparer les dégâts commis lors des guerres religieuses de la fin du siècle précédent.

En 1616, le château fut bien restauré. Il était alors habité par Jean de Malengreau, prévôt du bourg, au service des Arenberg.

Evènements importants sous l’Ancien Régime

Depuis le Moyen-Age, ce village fut situé sur un axe important entre d’abord les deux villes principales du comté de Hainaut (Mons et Valenciennes), puis plus tard entre le royaume de France et les provinces au nord de celui-ci. Quiévrain fut donc un lieu de passage « privilégié » pour toutes les armées qui allaient de l’un à l’autre.

En 1365, d’après les annales de Quiévrain (rapportées par Th. Bernier), le comte Aubert de Bavière visita Quiévrain, alors qu’il s’emparait du meilleur cattel de Michel Grosse-Puche, un bourgeois de Valenciennes, tombé malade. C’est également à cette époque que Sohier, seigneur d’Enghien, en révolte contre le comte, vint faire le siège du château de Quiévrain et endommagea l’église voisine, avant de tenter de se réfugier au château de Baisieux, où il fut finalement arrêté, conduit au Quesnoy où il fut décapité. L’histoire est narrée dans le texte consacré à Baisieux.

En avril 1435, Philippe le Bon (1419-1467) et son épouse Isabelle de Portugal séjournèrent à Quiévrain

Si Charles Quint put faire plier son ennemi, le roi de France, François Ier, il n’en fut pas de même avec le fils de ce dernier, Henri II, qui vint dévaster en 1554 quelques-uns de nos châteaux, dont ceux de Quiévrain, Baisieux et Boussu. On trouve ce fait dans plusieurs livres, mais quelques auteurs le contestent, car les armées françaises prirent plutôt la route de Binche et de Mariemont, où les saccages furent nettement plus importants sur leur passage.

Quelques années plus tard, en 1577, Marguerite de Valois fut de passage à Quiévrain. Fille d’Henri II et de Catherine de Médicis, celle que l’on dénomma la « Reine Margot », alors reine de Navarre par mariage avec le futur Henri IV, était accompagnée de Philippe de Lalaing, grand bailli de Hainaut, et d’une grande escorte de notables et de dames de compagnie.

En 1636, une épidémie de « peste » fit de nombreuses victimes à Quiévrain et dans la région.

Puis vinrent les guerres de Louis XIV. En août 1649, ses troupes s’aventurèrent en Hainaut. Elles auraient campé près du domaine du Saulçoir. Les châteaux d’Audregnies et de Baisieux souffrirent de ce passage.

Quelques années plus tard, l’armée de Turenne s’empara de Condé, du Quesnoy, de Boussu et de Saint-Ghislain. Le roi de France lui-même, 17 ans, avec le cardinal Mazarin, son conseiller, logea une nuit à Quiévrain le 27 août 1655, avant d’aller s’installer à Boussu. En septembre, de nombreux villages furent incendiés entre Condé et Quiévrain. L’église de Quiévrain fut très endommagée, notamment son clocher et quelques murs, avant que les Français ne s’attaquent à Mons.

En 1666, c’est au tour du château de Quiévrain de subir les exactions françaises. En 1667 et 1668, les troupes françaises de Louis XIV campèrent à plusieurs reprises dans la localité. Les populations devaient subvenir en chevaux et en vivres, par soumission complète à l’occupant. Il fallut conduire les cloches à Valenciennes. Cette ville dut payer une redevance à l’hôpital de Quiévrain. Les Français investirent le Hainaut. Le roi s’installa à Ath, puis à Tournai. L’église fut encore la proie des flammes en 1676.

Finalement, en 1678, après avoir obtenu le traité de Nimègue avec les Espagnols, Louis XIV retira ses troupes, mais une nouvelle frontière avait été tracée qui enlevait aux Pays-Bas Espagnols une bonne partie du Hainaut et de la Flandre. La nouvelle frontière fut établie entre Quiévrain et Quiévrechain sur l’Aunelle. Quiévrain restait de justesse dans le comté du Hainaut, sous domination espagnole. Mais Hensies, Harchies, Pommeroeul se sont retrouvés en France jusqu’en 1690.

La guerre reprit de nouveau en 1691 lorsque Louis XIV voulut attaquer les Espagnols …chez nous comme d’habitude. Le roi d’Espagne Charles II venait de mourir sans héritier. Louis XIV avait su imposer son petit-fils Philippe sur le trône d’Espagne et obtenu de lui le …. pouvoir de s’occuper des Pays-Bas Espagnols.   Immédiatement, le roi de France en profita pour s’y introduire. Les Français vinrent assiéger Mons et la prendre en avril. Le roi passa encore à Quiévrain le 11 mai 1695. Il se rendait à son camp de Givry. Le 7 août 1695, passait à Quiévrain la dépouille du neveu du grand Turenne, que l’on reconduisait à l’abbaye de Vicogne. Il était mort à la bataille de Steenekerke. Cette nouvelle guerre s’éternisa encore jusqu’à la défaite des Français à Malplaquet en 1709.

C’était au tour des Autrichiens, emmenés par le prince Eugène de Savoie, de laisser une troupe à Quiévrain, prête à secourir celles qui assiégeaient Le Quesnoy. De quelques camps qu’elles furent, ces troupes coûtaient toujours énormément à la population qui devait leur assurer les vivres.

Le roi Louis XV déclara la guerre aux Autrichiens lors de la succession au trône impérial qui voyait pour la première fois arriver une femme, Marie-Thérèse, pour l’occuper, ce que les Français contestaient. Le 8 octobre 1746, les Français établirent une garnison à Quiévrain, surveillant le passage des pièces d’artillerie. Il fallut donner l’hospitalité aux régiments de Seidorf (Suisse), du Royal-Vaisseau et de la Milice de Picardie. En novembre d’autres régiments passèrent, ainsi que de nombreux prisonniers hollandais. En 1747, l’armée campa à Quiévrain sous les ordres de Mr Lucé, intendant du Hainaut. Les réquisitions de vivres et de chevaux étaient abondantes. Le 28 octobre, c’était au tour du Comte de Saxe d’y loger son armée. En 1748, il fallut donner l’hospitalité aux régiments de Noaille et de Durumain. Puis la guerre prit fin.

L’empereur Joseph II, fils de Marie-Thérèse, passa à Quiévrain, alors qu’il inspectait ses possessions belges pour y apporter des réformes modernes.

Période française (1794-1814)

Fin de l’Ancien Régime féodal en 1794

  • Département: Jemappes
  • Canton: Quiévrain

Depuis 1789, la France s’enfonçait dans les grands remous de la Révolution. Dès 1790, quelques volontaires de Quiévrain s’engagèrent dans l’armée des patriotes au service des révolutionnaires français.

L’affaire de Quiévrain (la première)

Le 23 avril 1792, la Nation Française déclara la guerre au “roi de Hongrie”, ce qui fut notifié au commandement de la place de Mons. En fait l’Autriche (également souveraine sur la Hongrie) représentait pour les Révolutionnaires le passé, l’ancien ordre haï, mais aussi le refuge des aristocrates français qui y préparaient un retour armé. Pour rappel, la reine de France, Marie-Antoinette, était la sœur de Joseph II, empereur récemment décédé.

Les jours suivants, des colonnes armées françaises partant de Dunkerque, Lille et Valenciennes, passèrent la frontière à plusieurs endroits. Le 28 avril 1792, l’armée de Valenciennes, forte de 10.000 hommes, commandée par le général Biron, vint camper à Quiévrain et y déloger une petite garnison autrichienne. Ils y plantèrent un « Arbre de la Liberté », exhortèrent les Quiévrenois à l'”indépendance”, abattirent le pilori, pillèrent le bureau du prévôt du château et  obligèrent le curé à prêter le serment physique. Puis ils continuèrent leur chemin pour aller prendre Mons. Le surlendemain, une armée “austro-wallonne” d’à peine 500 hommes, commandée par le général Beaulieu, partie de Mons, vint attaquer les Français près de Quiévrain, à l’étonnement de ces derniers qui se croyaient bienvenus en apportant la révolution sur nos terres. Les Français se débandèrent alors et rentrèrent à Valenciennes. Mais les halles de Quiévrain furent détruites et elles ne seront plus jamais reconstruites. Le bataillon de Lille n’eut pas beaucoup plus de chance près de Tournai. Le 15 mai 1792, les troupes austro-belges allèrent même attaquer Bavai et d’autres postes frontières.

Après la bataille de Valmy, le 20 septembre 1792, entre Français et Prussiens, la contre-offensive de Dumouriez se concentra sur le Hainaut. Le 28 octobre, les Français passèrent à Quiévrain et livrèrent bataille à Thulin qui fut enlevée par une Légion Belge au service de la France. Ils progressèrent de village en village (Boussu, Saint- Ghislain, Sars-la-Bruyère, Frameries, Quaregnon) jusqu’à la bataille décisive de Jemappes (en fait à Flénu) le 6 novembre.

Quiévrain vit nombre de prêtres rebelles français s’y réfugier.

Sous le Directoire (1794-1798), Quiévrain fut chef-lieu de canton (24 fructidor de l’an III/7 septembre 1795 – 18 brumaire de l’an VIII/9 novembre 1799): Quiévrain, Baisieux, Hensies, Montroeul, Marchipont, Neufville-lez-Hensies, Erquennes, Fayt-le-Franc, Athis, Wihéries, Audregnies, Montiginies-sur-Roc, Onnezies, Rampemont, Angre, Angreau, Roisin, Meaurain, Autreppe.

Puis vint la période napoléonienne. Quiévrain était toujours un lieu de passage privilégié. En août 1801, divers détachements de prisonniers russes et autrichiens traversèrent Quiévrain pour rentrer dans leurs foyers. On vit le 30 août 1804 le passage de Napoléon Bonaparte et du prince de Beauharnais, avec un escadron de cavalerie.

Le 29 avril  1805, c’était au tour de Joseph Bonaparte, frère de l’empereur, « roi d’Espagne, de Naples et de Sicile ». Puis le 15 juin 1806, ce fut celui de Louis Bonaparte, un autre frère, qui allait prendre possession de son royaume de Hollande

Le 29 avril 1810, Quiévrain eut l’honneur de la visite de l’empereur lui-même et de l’impératrice Marie-Louise. On organisa une grande réception où était présent le préfet du département de Jemmapes.

Le  5 février 1814, passèrent des troupes françaises, commandées par le général Pienne, commandant de la ville de Mons, se rendant à Valenciennes. Après La bataille de Waterloo du 18 juin 1815, on vit encore passer en direction de la France le 23 septembre 1815 le prince Frédéric de Prusse  et le 1 octobre 1815 le tsar de Russie.

Répartition des pouvoirs pendant la période contemporaine (à partir de 1814)
  • Etat: Royaume des Pays-Bas (1814-1830), puis Royaume de Belgique
  • Province: Hainaut
  • Arrondissement administratif: Mons
  • Arrondissement judiciaire: Mons
  • Canton: Dour
  • Entité communale depuis 1977: Quiévrain

En septembre 1830, on vit des Quiévrenois participer aux Journées révolutionnaires de Bruxelles. Ils furent envoyés les 25 et 26 septembre, (24 septembre selon d’autres sources) retardés, comme d’autres Borains, par une désinformation due à une propagande hollandaise. Cinquante-sept volontaires, commandés par Fr.E. Debast, capitaine de gendarmerie, et par Auguste Patte, partirent, accompagnés jusqu’aux confins de la commune par ses habitants et la Société Philharmonique. Ils participèrent cependant à l’assaut du Parc de Bruxelles. Trois volontaires tombèrent au combat de Louvain (noms sur les tables mortuaires de la Place des Martyrs à Bruxelles: Benoit Dejardin, Vital Frappart, Jean-Baptiste Perseau). Tous furent de retour à Quiévrain en octobre 1830, avec le nouveau drapeau belge.

Le 5 février 1831, une députation du Congrès national, chargée d’aller demander au roi Louis-Philippe la nomination de son fils, le duc de Nemours, comme roi des Belges, passa par Quiévrain. On sait que le roi de France refusa et que ce fut un prince allemand qui devint roi.

En 1831, la Commission nationale des récompenses décerna un brevet de drapeaux d’honneur aux villes et villages ayant fourni des contingents de volontaires en 1830 et 1831. Quiévrain en obtint un, encore conservé aujourd’hui à la Maison Communale.

Le 5 août 1832, Léopold I traversa Quiévrain pour se rendre à Compiègne. Il devait y épouser Louise-Marie-Charlotte d’Orléans, fille du roi Louis-Philippe.

Les 13 et 14 novembre 1832, l’armée française, commandée par le maréchal Gérard, passa à Quiévrain pour se rendre au siège de la citadelle d’Anvers par les Hollandais. Ils furent salués chaleureusement par la population.

Révolution française de 1848 – la seconde affaire de Quiévrain. Le 25 mars 1848, des troupes de soldats et gendarmes belges arrivèrent à Quiévrain, pour arrêter une bande de 700 ouvriers français et belges qui voulaient soulever un mouvement républicain chez nous. Les Français furent refoulés et les Belges arrêtés. A cette époque, il existait une mouvance française désireuse de s’approprier la Belgique et d’y installer une république. D’autres tentatives de passage de la frontière eurent lieu (Risquons-Tout près de Mouscron). Le royaume belge reconnut la nouvelle république française, ce qui mit fin à ces mouvements d’exportation de la révolution.

Le 22 août 1868, Victor Hugo et quelques membres de sa famille reçurent l’hospitalité à Quiévrain. Ils étaient de passage pour raccompagner la dépouille mortelle de son épouse.

Pendant la guerre franco-prussienne de 1870, des troupes séjournèrent à Quiévrain. Mais notre pays resta neutre dans ce conflit.

Le 23 mars 1901, eut lieu la fondation de la Société nationale des anciens militaires de Quiévrain.

Le 10 septembre 1905, on organisa une grande fête patriotique pour le 75ème anniversaire de l’indépendance de la Belgique. Un hommage fut rendu au Drapeau d’Honneur de 1830 ainsi qu’aux Quiévrenois ayant participé avec Debast aux journées de septembre. C’est à cette occasion qu’on inaugura la Rue Debast, la place du Jeu de Balle et son quartier.

Ce début du XXème siècle fut une période de prospérité commerçante et industrielle qui s’accompagna à Quiévrain d’une expansion urbaine. La cité était effectivement un noeud de communication d’importance. Mais cette prospérité sera mise à mal par les deux guerres.

Première Guerre Mondiale

La Belgique fut envahie par l’armée allemande le 4 août 1914. Celle-ci atteignit Bruxelles le 20 août puis se dirigea en grande partie vers la France. Le 22 août, elle entrait en Hainaut. Ce sont essentiellement les Anglais qui assuraient la défense dans nos régions. Dès le 24 août 1914, des troupes anglaises, retranchées en avant de la localité, près de la sucrerie de Carochette, tentèrent d’arrêter la marche en avant des Allemands. En vain. Ce fut le jour de la bataille d’Audregnies. Cette année-là, Quiévrain eut à déplorer plus de 500 déportés (les premiers en Belgique).

L’occupation allemande fut accompagnée des vexations habituelles. L’Ecole Moyenne fut occupée par la Croix Rouge allemande. Elle réouvrit ses portes aux élèves le 3 novembre 1914. Elle fut de nouveau fermée de février à avril 1917 à cause d’une pénurie de charbon. Lors de la Libération, elle fut à nouveau réoccupée, avant d’être délivrée définitivement le 1 novembre 1918.

Du 2 au 4 novembre 1918, toute la région frontalière fut bombardée par l’ennemi en retraite, puis par les anglais. On déplora à Quiévrain 102 victimes. L’église, qui recevait des réfugiés français fuyant le front, fut endommagée.

Deuxième Guerre Mondiale

Avant sa destruction

Les Allemands pénétrèrent en Belgique le 10 mai 1940. Ce fut une guerre éclair. Quiévrain eut à subir des bombardements le 14 et le 17 mai. Des maisons furent détruites, ainsi que le corps principal du château Bataille. La gare fut endommagée. Ce fut à l’occasion du recul des troupes alliées par Quiévrain devant l’avance allemande. Il y eut de nombreuses victimes. Puis ce fut l’occupation.

Après la guerre, la vie reprit normalement.  Quiévrain était devenue une petite cité frontalière commerçante et enseignante.

Economie

Née sur des terres limoneuses fertiles, Quiévrain se consacra pendant de nombreux siècles, depuis les Romains et vraisemblablement avant du temps des Gaulois Nerviens, aux activités agricoles: céréales, betteraves, chicorées, tabac. On a vu que le bas du village était surtout constitué de prairies humides, utilisées pour l’élevage, et que les champs cultivables se trouvaient dans la partie haute constituée de limon sec très fertile. Les prairies étaient nombreuses, autant dans la cité qu’à l’extérieur de celle-ci. Les plus grosses fermes étaient

  • celles du Saulçoir (qui appartint aux seigneurs de Quiévrain – l’actuel bâtiment comprend encore des parties de 1747), rachetée en 1926 par la SA Olivier de Quiévrain, puis par la famille Lievens
  • celle des Willot,
  • celle des Olivier (actuelle ferme date de la deuxième moitié du XVIIIème),
  • celle de Carochette, …

A côté de l’agriculture et de l’élevage, des entreprises liées à ces activités naquirent. On connait particulièrement celles du XIXème siècle. Les premières industries alimentaires furent donc :

  • Des moulins à grains de céréales
    Le Moulin Valois “brûlé”
    • « Le Moulin Valois » (dans l’actuel quartier du Moulin, à proximité de la rivière). Celui-ci existait déjà en 1365, lorsque l’abbé Gille de Crespin acheta le moulin. Ce moulin, banal, appartenait par moitié aux seigneurs de Quiévrain et par moitié à l’abbaye St Eloi de Noyon. Les cultivateurs furent obligés de venir y moudre leur grain jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, ce qui leur en coûtait une redevance aux propriétaires. Le meunier prélevait un 16ème comme droit de mouture. Ce moulin était mû par l’eau (sur un bras détourné de la Honnelle) et comportait cinq paires de meules. En 1760, il était occupé par la veuve Collard. Il fut acheté par Mr Valois en 1858, qui l’équipa d’une machine à vapeur. Celui-ci fit installer une ligne ferrée jusqu’à la gare, qui traversait sa propriété et la rue du Joncquois. Le moulin passa ensuite dans les mains de la famille Broquet. Un incendie grave le détruisit en 1894, d’où l’appellation du « Moulin brûlé ». On ne l’a pas reconstruit. Quelques greniers persistèrent à proximité (coin de la rue de Crespin et de la rue du Moulin) qui furent aménagés en habitations privées.
    • « Le Moulin Dubois », à vapeur, rue du Pont Saint, 1872. Une fabrique de briquettes de houilles y fut ajoutée en 1874. L’établissement fut racheté par Désiré Saint-Ghislain en 1886
    •  « Le Moulin du Corbeau ». Plus récent, car la concurrence était permise au XIXème, il fut installé par M. Dubois en 1886 sur l’Aunelle (donc mû par l’eau). Lui aussi termina son existence sous les flammes en 1907.
  • Trois brasseries, connues au XIXème. Les brasseurs étaient le plus souvent des  agriculteurs et parfois aussi des meuniers. Ils possédaient également un réseau de cabarets pour écouler leur marchandise, au XVIIIème et XIXème siècle. Ces entrepreneurs faisaient partie des familles les plus riches alors.
    • « La brasserie Corbeau » (moulin, brasserie, agriculture). Elle appartenait au meunier Dubois, qui était également agriculteur. Mais cette brasserie existait déjà en 1596, désignée dans un état de biens délaissés par Jean de Maisnil, abbé de Crespin, décédé cette année-là. Elle devait donc appartenir à l’abbaye.
    • « La brasserie Bataille », fondée en 1864 ou 1880 (r. de valenciennes),
    • « La brasserie Vasseur », rue Grande, 1878
  • Deux sucreries
    • « Celle d’Herman Olivier ». Installée en 1836 le long de la route de Mons, elle utilisait une machine à vapeur. Une ferme y avait été bâtie depuis 1740 par l’entreprise Fally, déjà existante. Herman Olivier était un des volontaires de de 1830 et beau-frère de Debast. Elle était reliée à la gare des vicinaux. Les tramways amenaient les betteraves sucrières des Hauts-Pays et de France. La sucrerie fut occupée ensuite par un atelier de ferronnerie. Elle disparut par la suite, mais la ferme existe encore, transmise par Mr Dujardin, descendant des Olivier, à Mr Defrenne, puis à Mr. Lievens.
    • « La sucrerie Willot ». En 1858, elle fut aménagée à Carochette, le long de la chaussée Brunehaut. Elle fut exploitée ensuite par Mr Bernier.

A Quiévrain, on constatait une activité intense pour la culture des betteraves. Ces sucreries disparurent avec la concentration des différentes sucreries en Belgique.

  • Fabriques de chicorée. Celles qui furent aménagées au XIXème  fonctionnaient à la machine à vapeur.
    • Bataille, 1869
    • Vandendaele, 1874, rue de Valenciennes
    • Wéry, 1882, rue de Montroeul
  • Des fabriques de moutarde
    •  Wéry (ceux-là qui fabriquaient aussi de la chicorée), rue de Montroeul
    •   Moreau, rue grande, 1874
  • Deux petites savonneries
    • Mention, rue des Wagnons, 1835
    • Vandendaele, rue des Wagnons

On trouva aussi :

  • Une fabrique de graisse (1845, Serbat à la Station)
  • Une fabrique de couleur de mastic (1847, idem)
  • Une tannerie (1851/53, Gagniat, au Pont-Saint)
  • Une fabrique de tissus (1850, Boulanger)
  • Une usine à effilocher la soie (1873, Roland, rue de Montroeul)
  • Un atelier de chamoiserie Fally, 1875, ruelle des Archers
  • Une taillanderie Corvé (1879, rue des Wagnons)
  • Une taillanderie Martin (1879, rue de Mons)
  • Un marché aux bestiaux, instauré en 1861 place du Parc
  • Un abattoir communal, au bout de la rue du même nom, en bord de Honnelle, 1894

L’industrie houillère

Entourée de communes où existaient des charbonnages (Hensies, Quiévrechain, Elouges/Audregnies, Elouges), Quiévrain n’a jamais eu de puits sur son sol. Mais ce n’est pas faute d’avoir cherché, car au XVII ou XVIIIème siècle, des sondages dans le sous-sol ont été effectués, à l’initiative des ducs d’Arenberg, pour y trouver du charbon, à la limite entre Baisieux (Avaleresse) et Elouges (St Odile), dont il reste deux monticules (Monts des Burcq).

On chercha aussi dans la partie nord du village. Les gisements se sont avérés trop irréguliers et le sous-sol était gorgé d’eau. Une concession fut cependant demandée et octroyée en 1881. Mais la « Société Hensies-Pommeroeul » l’ayant obtenue plus tôt en 1875, on constitua une « Société Anonyme des Concessions Houillères Hensies-Pommeroeul-Nord de Quiévrain ». Après une nouvelle campagne de sondages, on installa le premier siège aux Sartis à Hensies (deux puits) où le charbon ne fut réellement exploité qu’en 1918. Finalement, le charbon sera transporté par voie ferrée industrielle jusqu’à Bernissart et Blaton (ligne St-Ghislain-Blaton) et par les canaux Mons-Condé et Pommeroeul-Antoing. Néanmoins profondément dans le sous-sol de Quiévrain passent des galeries venant de Hensies.

Fours à coke

On en installa à proximité de la ligne de chemin de fer Dour-Quiévrain, par laquelle on amenait le charbon. Date d’installation ? (sans doute après la mise en place de la ligne en 1873). Cinq fours furent aménagés et occupèrent 150 ouvriers. Ils fournissaient le gaz d’éclairage pour la commune, grâce à une usine à gaz (gazomètre distribuant le combustible sous une pression constante) située rue de Montroeul. Ces fours à coke fermèrent en 1935-38. Le gaz de ville proviendra ensuite du charbonnage n°2 de Quiévrechain ( Mines d’Anzin) et enfin de Carbo-Chimique de Tertre.

L’industrie argileuse

Il y eut à Quiévrain des briqueteries et des fabriques de tuiles. Mais la rareté de la matière première limita la production à une consommation locale. Elle disparut à la fin du XIXème.

Il y eut également des fours à chaux:

  • Bataille-Lenglet (1857, chaussée Brunehault)
  • Denis et Roland

On trouva encore :

  • Une fonderie de fer, tenue par M. Wallet dès 1874 (fabrication de pièces en fonte, moulées à partir de fonte brute), près de la station, le long de ligne de tram vers Montroeul. Fonderie Dath, 1861, rue de la Station.
  • Des fabriques de bouchons et d’allumettes
  • Une imprimerie, sise dans la rue Debast. Elle fut fondée par Alphée Seulin de Valenciennes en 1865. Elle édita l’année suivante Le Journal de Quiévrain, feuille hebdomadaire qui ne dura que huit mois. Elle publia aussi quelques livres concernant l’histoire et le patrimoine de la région de Quiévrain. En 1872, Mr Seulin céda l’imprimerie à J.B. Lecocq. Elle passa ensuite dans plusieurs mains, Mr Richard, Mr Havez, …  Les bâtiments sont actuellement occupés par la bibliothèque communale.
  • L’entreprise de construction Fally. Dans ses notes personnelles, Mr Georges Fally écrit que ses ancêtres étaient déjà dans la construction au XVIIème siècle. Ils participèrent à l’érection de nombreux bâtiments privés et publics de Quiévrain et de sa région.
  • L’ancienne Industrielle Boraine. Cette usine, implantée à proximité de la frontière, fut créée en 1928. Avant la guerre, elle fabriquait des phares marins et des bouées lumineuses équipant la côte belge et le Congo Belge. Après la guerre, l’I.B.  réalisa du matériel d’équipement minier, avant de se remettre dès 1953 à la fabrication de luminaires pour l’éclairage public. En 1964, la société réalisa des candélabres en acier et en aluminium destinés à l’éclairage des routes et autoroutes. Cette chaîne restée unique en Belgique fournit la totalité du marché Belge, surtout à l’époque de construction des autoroutes. En 1979, I.B. se reconvertit dans le secteur de l’épuration des eaux. Mais les marchés diminuaient et la société disparut en 1993.

En janvier 1994, elle fut rachetée par Gérard Garland et rebaptisée « Entreprise Boraine de mécanique (EBM) ». Elle s’orienta vers la construction métallique et la chaudronnerie, tout en conservant son secteur poteaux d’éclairage.

Quiévrain, ville frontière, voie de passage importante pour le transport de marchandises avant la construction de l’autoroute à la fin des années ‘1960, était une cité très commerçante. Outre les nombreux cafés et petits restaurants à proximité de l’ancienne douane, on trouvait des commerces de tabac (moins cher en Belgique qu’en France), mais également l’ensemble des petits commerces nécessaires à la consommation locale et régionale : épiceries, boucheries, boulangeries, graineries, hôtels, friteries, confection et vente de tissus et de vêtements, quincailleries, armureries, maroquineries, bijouteries, magasins de chaussures, de jouets, de vélos, … Des petites entreprises se consacraient à l’électricité, à la vente de charbon, à la taille de la pierre, à la photographie, garages automobiles. Beaucoup de ces établissements ont aujourd’hui disparus… et avec elle l’ancienne prospérité des lieux.

Les voies de communication
  1. Routières

Quiévrain est née à proximité de la chaussée romaine Bavay-Blicquy-Mer du Nord. On l’a vu plus haut, quelques villas et autres fermes gauloises s’installèrent dans les environs. On connait peu de choses de la période franque.

Mais la fondation des abbayes de Crespin, de Condé, de Saint-Ghislain et de Mons, à un moment où quelques résidences royales ou aristocratiques se développaient aussi (Valenciennes, Wihéries, Blaton, Estinnes, peut-être Mons), déterminèrent quelques grands chemins les reliant. Le noyau du village s’établit au croisement du chemin de Valenciennes à Binche (rue de Dour vers le Saulçoir et le Mont d’Elouges).

Par la suite, des chemins relièrent Quiévrain aux villages voisins (ses dépendances Baisieux et Hensies), ainsi qu’à l’abbaye de Crespin.

L’intensité du trafic routier (transport des gens par diligences et marchandises par chariots) obligea à élargir et paver les routes. Le 10 juin 1750, par une lettre patente de l’impératrice Marie-Thérèse, on fit construire une nouvelle route pavée entre Mons et Valenciennes, un peu plus au nord que l’ancienne (Valenciennes-Binche), correspondant à la route actuelle. Ce fut fait aux frais des Etats du Hainaut. En fait, un premier tronçon avait été construit de Jemappes à Boussu, en exécution de l’octroi de 1738 de l’empereur Charles VI. Du côté français, la route allant jusqu’à Valenciennes, fut décrétée en 1731 et avait été terminée en 1733.

Le transport par diligences en fut grandement facilité et cela favorisa la cité de Quiévrain. On fit construire, en 1751, à l’entrée de la cité, une “ferme de l’octroi” (au croisement de la Grand-Route et du chemin du Saulçoir, bâtiment existant toujours). On peut y voir sur la façade, au-dessus de la porte, un écusson aux armes du Hainaut. On y percevait un droit de chausséage (4 sols par chariot, 2 sols par charrette). Un relai de poste (“ferme de la poste” où se tenait le « Maître des Postes ») fut construit, là où se trouve aujourd’hui l’Athénée. Des hôtels furent construits (Hôtel-restaurant du Dauphin, …). On fit reconstruire les halles en 1752, car le commerce apportait de la prospérité à  la commune.

En 1847, une autre voie pavée relia les Hauts-Pays à Hensies et à Montroeul-sur-Haine.

2. Les chemins de fer

Ligne 97. Sous Léopold Ier, un plan belge ferroviaire, en 1834, prévoyait différentes lignes de liaison à partir de Bruxelles (Ostende, Liège-Prusse, Anvers et Paris). La Ligne de chemin de fer Bruxelles-Paris (“Ligne du Midi”) fut inaugurée le 7 août 1842 sur son tronçon belge par le roi lui-même qui descendit à Quiévrain. La liaison avec Valenciennes prit cours en octobre 1845 et celle avec Paris fut terminée en 1846 (ligne du Midi). La gare fut construite à la même époque. Elle fut aménagée pour les voyageurs et les marchandises (plusieurs voies, aiguillages, hangars, bureau télégraphique).

Devant la gare, une grande place pavée pouvait accueillir la kermesse d’octobre et les feux d’artifice. On l’appela après la guerre 1940-1945 « Place des Déportés », car c’est de là que partirent vers l’Allemagne, dans les camps de travail, les prisonniers de guerre de Quiévrain et de sa région. Cette place fut aussi le point de lâchage de pigeons pendant longtemps (ligne du Centre).

Cette ligne fut concurrencée dès 1857 par la ligne Bruxelles-Quévy-Paris, plus courte. A partir de 1914-18, les liaisons s’arrêtèrent à Valenciennes.

Quiévrain, à la fin du XIXème et au début du XXème, était un noeud ferroviaire important, très fréquenté par le commerce entre Belgique et France, à une époque où la région était très industrialisée, fréquentée aussi par les nombreux ouvriers frontaliers – près de 6000 – qui se rendaient chaque jour au travail de l’autre côté de la frontière. Des trains arrivaient de Mons, d’Ath et de Dour.

La liaison avec la France fut abandonnée dans les années 1970. Elle fut électrifiée en 1994 sur une voie entre Quiévrain et Saint-Ghislain.

Ligne 98a. Une deuxième ligne arriva à Quiévrain, venant de Dour, en 1874. Dour était déjà relié à Mons depuis 1840, via Warquignies, Wasmes, Pâturages, Flénu et Cuesmes. Cette ligne desservait surtout les charbonnages du Borinage, permettant le transport de la houille et des mineurs. Une barrière et une maison de garde-barrière furent aménagées à la traversée de la Grand-Route. La maison existe encore. La ligne fut supprimée à la fin des années 1960.

3. Les trams à Quiévrain

Trois lignes des « Chemins de fer économiques du Nord » (CEN) (lignes rurales) furent aménagées.

  •  Roisin-Quiévrain (tram à vapeur). Elle fut octroyée en 1889 et inaugurée le 10 novembre 1890. Cette exploitation fut concédée en 1890 par la SNCV aux CEN, puis en 1911 à la « Société anonyme des transports  urbains et vicinaux » (lignes du Tournaisis). Les rails furent démontés par l’occupant en 1914, puis remontés en 1919. La ligne fut prolongée jusqu’au canal de Pommeroeul en 1922. Elle devait continuer jusque Mainvault, mais ne fut jamais achevée au-delà de Pommeroeul. On l’électrifia en 1939. Elle disparut dans les années ‘1950.
  • Valenciennes-Quiévrain (tram à vapeur). Elle fut aussi réalisée par la CEN jusqu’à Blanc-Misseron, puis par la  SNCV jusqu’à la gare de Quiévrain (1820m). La section belge fut inaugurée le 15 mars 1890 et exploitée par la CEN. Elle fut électrifiée en 1914.
  •  Mons-Dour-Quiévrain (électrique, n°7). Octroyée en 1912, elle ne fut pas réalisée sur toute sa longueur. Elle reliait Quiévrain à Dour en 1949, via Audregnies et Wihéries.
Le service d’incendie

Avant 1885, les habitants assuraient eux-mêmes, par des réseaux de solidarité, souvent improvisés, la protection contre les incendies.

En 1885, la commune fit l’acquisition d’une pompe à bras pour l’arsenal de la station ferroviaire. Elle était manoeuvrée par les ouvriers du chemin de fer. C’est eux qui devaient assurer la protection de tout le village.

Suite aux incendies des meuneries (Braquet et Corbeau), l’administration communale décida de fonder un corps de sapeurs-pompiers, en décembre 1908. La compagnie comportait au départ 30 volontaires (souvent des hommes de métier de la localité).

Le premier incendie qui nécessita l’intervention des pompiers eut lieu le 21 février 1910. Ce corps connut une grosse activité lors des bombardements des deux guerres (1918, 1944). Il acquit un premier camion spécialisé à la fin de la guerre.

Une nouvelle caserne fut aménagée en 1976. Par la suite, le matériel fut constamment modernisé.

Le service était équipé de plusieurs ambulances. Un service d’Aide Médicale Urgente fut mis sur pied en 1987, pour lequel ont collaboré dans un premier temps des médecins généralistes formés à l’urgence. A partir de 1998, ce service fut assuré par les hôpitaux de la région.

Le patrimoine ancien

Le château de Quiévrain

Les seigneurs de Quiévrain se firent bâtir un château fort au centre de ce qui deviendrait leur village, sur une éminence artificielle, entourée d’eau, entre l’église et l’actuel quartier du Vert Bocage. La date d’édification du château est inconnue, sans doute au début de la seigneurie, au XIème siècle, peut-être sous la forme d’une motte castrale au début.

Il comportait (vers 1500) une forteresse, une basse-cour, un colombier, des fossés et des jardins. On a retrouvé par fouilles des vestiges de fossés et des souterrains inaccessibles. Il est probable qu’il fut à plusieurs reprises réaménagé pour se défendre contre les armes de plus en plus sophistiquées et finalement au XVIème transformé en résidence plus confortable.

Le château fut endommagé par Sohier d’Enghien (voir plus haut et histoire de Baisieux). Il fut assiégé et en partie détruit en 1554 par les troupes d’Henri II (incertain). Il fut restauré en 1616. Les prévôts continuèrent à l’habiter. On sait cependant qu’en 1666, il était complètement en ruines et abandonné. Une prison était annexée au château, qui continua à  être fonctionnelle après la destruction des bâtiments principaux. La date de sa disparition définitive n’est pas connue. Les prévôts avaient sans doute fait bâtir un hôtel plus confortable, puisqu’ils se succédèrent à Quiévrain jusqu’à la Révolution et peut-être encore par la suite.

L’hôpital Saint Nicolas

Au début du XVème, Jeanne de Lalaing et son mari Olivier de Châtillon firent construire un hôpital près du pont de la rivière (actuelle demeure du notaire Fortez, ancienne demeure de Mr Jean Bataille). C’était, comme tous les hôpitaux du Moyen Age, un établissement de bienfaisance pour y nourrir les pauvres, les veuves et les orphelins. Il reçut encore des donations par la suite des seigneurs de Croÿ. Il fut même restauré en 1616, notamment avec des peintures d’Antoine Cocqeau. Il appartint à un certain moment à l’abbaye de Crespin, avant 1781. On le désaffecta en 1823. Il fut habité ensuite par le vicaire et acheté toujours au XIXème siècle par Mr Olivier.

La Halle du marché

Elle fut construite lorsque Philippe le Bon accorda à Quiévrain le privilège d’organiser un marché hebdomadaire, vers 1430. Détruite, elle fut reconstruite en 1752 et de nouveau démolie au début de la Révolution française en 1792. Le seigneur avait un « droit de hallage » sur le bénéfice des ventes.

Patrimoine actuel

L’église Saint Martin

Sans doute, plusieurs églises se succédèrent à Quiévrain. Des sépultures chrétiennes préromanes orientées (selon les coutumes du temps) et un couvercle de sarcophage datant d’avant l’an mille ont été retrouvés en 1955, confirmant ces hypothèses.

Par contre, lorsque la paroisse fut érigée en 1148 (d’après les archives de l’évêché de Cambrai), on y éleva une église de style roman, dans le domaine castral, en moellons de grès et pierres, cimentés grossièrement. Il est possible que la chapelle du château correspondit au choeur actuel. Le chœur roman avait un chevet circulaire. A l’opposé, une tour rectangulaire fermait le côté ouest, par où l’on entrait. L’église comportait une nef centrale et deux collatéraux, séparés par des arcades en plein cintre et des piliers rectangulaires. Elle fut voûtée. Elle aurait été en partie détruite lors du siège du château par le seigneur d’Enghien.

Elle fut reconstruite vers 1550 en style gothique hennuyer. Il reste quelques vestiges du bâtiment précédent : la façade occidentale romane (milieu du XIIème, petits moellons irréguliers). Dans le nouveau bâtiment, correspondant à l’actuel, on trouve trois nefs de trois travées,  une voûte en berceau, entrecoupée de doubleaux. Le choeur est à 5 pans avec des fenêtres ogivales, remplaçant le choeur roman. En 1575, on inaugura la première cloche, appelée « Jehanne » en l’honneur de Jeanne d’Halluyn, épouse de Philippe de Croÿ, alors baron de Quiévrain. Une autre vint la rejoindre en 1769, appelée « Marie-Louise », en l’honneur de Marie-Louise de la Marck, épouse du duc Charles d’Arenberg, seigneur entre autres de Quiévrain. Ces deux cloches furent refondues en 1862.

La foudre s’y est abattue en 1643, en emportant la flèche de 16 mètres. L’église fut encore incendiée en 1676 (1655 selon d’autres sources) par les troupes de Louis XIV, commandées par le maréchal de Turenne, entre le siège de Condé et celui de Mons. L’église fut restaurée entre 1680 et 1686: la nef nord fut remise en état, puis les deux autres. On érigea une  tour renaissance et  un nouveau clocher, d’après les plans de Paul de Longpont (de Valenciennes). Un pignon en briques fut érigé en 1683. Un ancêtre des entrepreneurs Fally y participa (note de Mr. Fally).

Au XIXème siècle, on installa un nouvel autel néo-gothique, ainsi que des orgues. Quelques dégâts furent à constater après les bombardements de novembre 1918, alors que l’église servait d’abri pour des réfugiés français du front. On en fit la restauration en 1920-21. De nouveaux bombardements s’abattirent en 1940, mais c’est surtout un incendie, dû à l’orage le 25 mai 1943, qui détruisit de nouveau la flèche et la croix, provoquant de gros dommages à la toiture des nefs. Les Allemands en 1944 enlevèrent les cloches. On procéda à la restauration en 1955. Oeuvres artistiques à l’intérieur:

  • Statue de « St Martin dans sa Gloire, St Hilaire et St Ambroise », en bois polychrome du début du XVIIIème (ancien retable du maître-autel).
  • Assomption de la Vierge, toile fin XVIIème
  • Martyre de Ste Barbe, toile 1723
  • Nativité, peinture sur bois, XVIème
  • Statues en bois, baroques, XVIIIème
  • Stalles et lambris, néogothiques, XIXème
  • Chaire de vérité Louis XIV (XVIIIème), viendrait de l’abbaye de Crespin
  • Confessionnaux  Louis XV (XVIIIème)
  • Fonts baptismaux, XVIIIème (ayant remplacé ceux du XIIème, qui furent détruits par iconoclastes; il en reste la base en pierre bleue)
  • Orgues (XVIIIème)
  • Vitraux du choeur, XVIème, portant des inscriptions au nom des seigneurs de Croÿ
  • De nombreux objets sacrés furent recensés et exposés en 1955: chandeliers, encensoir, burettes, calices et ciboires, livres, médaillons, vêtement dont la robe de la statue de ND de Hal, meubles de la sacristie, reliquaires (plupart XVII-XVIIIème), la châsse de St Martin  et celle de Ste Barbe (fin XVème), retable en bois de Ste Barbe (fin XVIIème), collier du roi (de confrérie St Sébastien, XVème) et charte de 1415, pierres tombales du XIV, XV et XVIème, pavement du XIIIème.
  • Plusieurs pièces viendraient de l’abbaye de Crespin.

L’église était autrefois entourée de son ancien cimetière. Quelques épitaphes de l’église romane :

  • Tombe de la chapelle Ste Barbe: Isabeau de Croÿ (1503-1524), fille des princes de Chimay
  • Tombe de Jeanne de Lesclatière, qui avait épousé Charles de Somaing, maître d’hôtel du prince de Chimay et son prévôt de Kieuvraing (décédée en 1529).

Le Monastère des pauvres Claires (Clarisses), 14, rue des Wagnons. Il fut fondé en 1903 et abandonné dans les années soixante. Il fut racheté et restauré par l’église dissidente de Mgr Lefebvre en 1978. Il y plaça des soeurs de l’Ordre des Carmes Déchaussées, sous la direction de sa soeur, Mère Marie-Christiane: le Carmel du Sacré-Coeur. Cet ordre, encore présent aujourd’hui, est purement contemplatif. Les religieuses y sont isolées et se consacrent à la prière en groupes ou en solitaires. On y organise les cultes selon la liturgie latine telle qu’elle était pratiquée avant le Concile de Rome de 1962.

Ancien octroi

Il se trouve à l’entrée de Quiévrain, au coin de la grand-route et de la rue du Saulçoir. C’est un des plus vieux bâtiments de Quiévrain encore debout, mais en ruines. Il date de 1751 lorsque la route fut pavée.

Maison de l’Octroi (fin XVIIIème)

L’ancienne maison communale. Elle fut construite en 1873. Elle abritait tous les services communaux, y compris la police. Elle fut démolie au début des années 2000, après que les services communaux furent transférés à la fin du XXème dans les dépendances de l’ancien château Bataille, rue des Wagnons. Les services sociaux furent établis dans les bâtiments de la Congrégation des Sœurs. La police, fusionnée avec la gendarmerie, rejoignit les locaux de celle-ci.

La gare. Elle date de 1867 et est complètement abandonnée.

La douane. Construction d’un poste frontière mixte en 1958. Suppression de la douane en janvier 1993 (accords de Schengen). Les bâtiments centraux furent rasés en 1999. Les bureaux et entrepôts furent vendus à un particulier.

Le Château Gouvion. A proximité de la frontière, il fut construit, entouré d’un parc et d’un étang. Il abrite aujourd’hui l’Ecole de Promotion Sociale.

Le Château Bataille. Il fut construit au XIXème siècle à l’initiative de cette famille entrepreneuriale. Les Allemands s’y installèrent durant la deuxième guerre, raison pour laquelle il eut à subir des bombardements en 1944. Le corps du logis n’a pas résisté et fut abandonné. L’aile gauche fut vendue à un particulier. L’aile droite fut encore habitée par la famille jusque dans les années ‘1990. Elle fut rachetée par l’administration communale qui y établit ses bureaux.

Le château d’eau fut construit en 1900 permettant l’apport d’eau à la population à partir de rivières souterraines. 

Ferme et champ du Saulçoir (Saulchoit). Saulchoit (Saulçoir): lieu planté de saules. C’est une ancienne propriété des seigneurs de Quiévrain. La ferme était fortifiée. Elle fut tenue par Mahieu Duquesnes (1575) et par Louis Fontaine (1752) qui la louaient. Puis ce furent les Willot (XVIII-XIXème). Le bâtiment actuel date de 1717. De nombreuses modifications ensuite ont été réalisées. 

Annexe – Découvertes archéologiques de 1955 à l’église St Martin de Quiévrain

Sources :

  • Notes de A. Wambecq du 20/05/1955
  • Notes de G. Fally
  • Article de journal (La Voix du Nord, 24/11/1955)

Des fouilles furent réalisées en 1955, lors de la restauration de l’église suite à l’incendie de 1943, à l’initiative de Mrs Robert Thomato, Alfred Wambecq, Auguste Bourgogne, le curé Lebas, auxquels se joignit l’entrepreneur Georges Fally. Découvertes dans le sous-sol sous l’autel les 20 et 21 mai 1955:

  • Des éléments de l’église gothique de 1550, enfouis lors de travaux de restauration du XVIIème
    • Débris de pierres sculptées du XV et XVIème
    • Poteries gothiques XV et XVIème, avec des décorations par fleurs de lys et des devises
    • Des fragments de pierres tombales d’époque gothique (XIV, XV, XVIème)
  • Au bout du bas-côté sud (sous le retable de Ste Barbe), découverte de matériel roman (église du XIIème):
    • base d’un autel sur pavement de petits carreaux vernissés
    • sacrarium roman (cuvette percée d’un trou)
    • fenêtre de la nef
    • arc en plein cintre qui correspondait à une travée
    • débris de la cuve baptismale, ornée de colombes et de feuillages sculptés, en pierre bleue de Tournai, XIIème
  • couvercle de sarcophage du Xème, sur lequel est gravée une ancre (symbole paléochrétien de l’espérance). Prouvant qu’un sanctuaire existait ici avant l’église romane.
  • des sépultures mérovingiennes ou carolingiennes orientées vers l’est (avec des ossements épars = ancien cimetière)
  • Matériel romain (ancienne villa?)
    • des morceaux de marbre rare de variétés diverses : Carrare, Brèche et de Turquin (origine étrangère). Ils devaient provenir d’un pavement d’une demeure opulente.
    • des morceaux de mosaïques noires et blanches, aux dessins géométriques (IIème siècle)
    • des tuiles romaines, débris de poteries, tuyaux en poterie de l’hypocauste (chauffage de la villa)

Hypothèse:

  • d’abord villa romaine avec peut-être un petit temple païen
  • renversé, selon la légende par St Martin ou plus probablement par le maître des lieux, converti
  • oratoire chrétien, puis églises mérovingienne et carolingiennes – pas de traces, hormis les sépultures et le sarcophage – au temps de la fondation de l’abbaye de Crespin
  • église romane du XIIème
  • puis gothique XVIème
Bibliographie

Quiévrain, étude de géographie et d’histoire locales, Théodore Bernier, Ed. Manceau, Mons, 1886

Histoire des seigneuries de Quiévrain, Angreau et Marchipont, Th. Bernier, Ed. Thiemann, Mons, 1865

Brochure éditée à l’occasion de la restauration de notre église, par la confrérie de la Paroisse St Martin de Quiévrain, 1955,  impr. Richard

Quiévrain, monographie de L. Biefnot, mars 1978

La croissance économique de la communauté de Quiévrain au milieu du XIXème, M. Tromont ; Ed. M. Tromont, Quiévrain, 1971

Notes manuscrites de Georges Fally, aimablement prêtées (Sujets: Institut Ste Marie, Debast, Entreprise Fally, Personnages célèbres du XIXème, liste des bourgmestres et curés)

Notes de Mr Leduc (les « Affaires de Quiévrain »)

Bulletin communal de Quiévrain – La Gare – D. et JC Dorsimont